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- Solal des SolalNiveau 6
Le principe est le terme souhaitable d'une action. C'est la fin, supposée bonne, que je vise et que, pour cette raison, j'introduis, à titre de prémisse nécessaire, dans mon raisonnement pratique : soit P un principe ; tout P est souhaitable ; or, en la circonstance je crois avoir la possibilité de réaliser P ; donc je me donne les moyens d'agir pour réaliser P. La valeur est le résultat d'une fonction d'évaluation quelconque : dire que V est une valeur, c'est dire qu'il y a une fonction f(x) telle que f(x)=V. Un principe est un point de départ pratique, une valeur, un point d'aboutissement théorique. Le problème, c'est que le plupart des incultes qui nous rebattent les oreilles avec les soi-disant valeurs (ex. les "valeurs de la république") veulent, en réalité, parler de principes : la tolérance, la droiture, la compassion, la laïcité, la charité, etc. sont, évidemment, des fins telles que, si on les considère comme bonnes, alors on entend les viser par des actions appropriées.Dalathée2 a écrit:Je remarque qu'en une page de discussion, personne n'a encore défini principes et valeurs
- MictlantecuhtliNiveau 9
Arg, tu vas faire hurler nos amis matheux. Une fonction f, telle que f(x) = V
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Ō miserās hominum mentēs, ō pectora cæca !
Quālibus in tenebrīs uītæ quantīsque perīclīs
dēgitur hoc æuī quodcumquest ! Nōnne uidēre
nīl aliud sibi nātūram lātrāre, nisi ut quī
corpore sēiūnctus dolor absit — mente fruātur
iūcundō sēnsū, cūrā sēmōta metūque ?
- LevincentNiveau 9
Dalathée2 a écrit:Quid alors des "principes de la République" ?Levincent a écrit:Un principe est ce qui fonde une connaissance ou une pratique. On parle des principes de la géométrie ou du principe de précaution. [...] Une valeur peut être associée à un objet, comme une oeuvre d'art. Elle désigne alors une préférence pour cet objet par rapport à d'autres.
Si on définit la République en tant que "laïque, indivisible, etc.", je serais plutôt d'avis que ce sont des principes qu'on énonce. Ces caractéristiques servent de cadre, de fondement à la République, mais elles ne lui disent pas où elle doit aller.
Mais si on prend la devise "liberté, égalité, fraternité", c'est différent. A première vue, on peut tout à fait mettre la liberté et l'égalité au rang des principes (principes juridiques notamment). Mais l'adjonction de la fraternité change un peu la donne. La fraternité ne saurait être un principe juridique, législatif ou institutionnel, puisqu'elle prend naissance dans un sentiment, et ne saurait être évaluée objectivement à partir de critères prédéterminés. La fraternité, en effet, va plus loin que la solidarité, puisqu'on peut très bien agir solidairement sous la contrainte ou par intérêt, c'est-à-dire que dans la fraternité, on pratique la solidarité mais en plus le cœur y est. Par conséquent, la fraternité est davantage une valeur qu'un principe, et qu'en étant adjointe à la liberté et à la liberté dans une même formule, elle donne à ces principes une modalité particulière , un contenu qui les élève au rang de valeur. La liberté que veut la République, ce n'est pas simplement la liberté de conscience, de culte, d'entreprendre, mais c'est la liberté dans la fraternité, soit une liberté qui se réfléchit dans celle des autres citoyens ; l'égalité, ce n'est pas seulement l'égalité devant la loi ou l'égalité des chances, mais c'est l'égalité dans la fraternité, soit l'égalité qui existe entre les membres d'une fratrie, où la valeur de chaque individu, bien que singulière, est reconnue égale à celle de tous les autres.
Dalathée2 a écrit:Le 4e amendement de la Constitution américaine, c'est un principe ou une valeur ? Ne peut-on pas avoir des principes absolus valant pour tout le monde dans un microcosme donné (ici, les Etats-Unis) qui deviennent valeur dans un macrocosme (ici, l'échelle mondiale) ?Levincent a écrit:Autre différence : les principes sont absolus et valent pour tout le monde, tandis que les valeurs sont relatives.
Je pense que ce que j'ai écrit au paragraphe précédent permet largement de répondre.
- User19866Expert
C'est un résumé intéressant concernant cette question.arth75 a écrit:Donc ce serait finalement la laïcité-valeur qui amènerait à interdire et la laïcité-principe qui amènerait à accepter ?
Oups, pardon. Moins que des questions, c'était mon cheminement intellectuel personnel que je mettais par écrit.Cripure a écrit:Oh la la, mais comment voulez-vous qu'on vous réponde, vous posez 45 questions par message ?Dalathée2 a écrit:Je comprends la définition. C'est vraiment se placer sur le plan du droit, de la définition légale de la république.Cripure a écrit:J'appelle principes (ci-dessus) ce sans quoi il n'y a pas de république (par exemple, la présence d'une famille royale en Grande-Bretagne, d'un roi en Belgique ou d'un hibou au Luxembourg (hihihi ) fait que ces régimes ne sont pas républicains). [...] En revanche, proclamer la nécessité de l'accueil des réfugiés n'est pas un acte consensuel et la république, qu'elle les accueille ou pas, n'est pas menacée dans ses principes. Non ?
Je remarque deux conséquences de cette définition des "principes de la République" (qui, d'ailleurs, prend une majuscule dans cette expression, je crois ; est-ce que cela change foncièrement l'acception de l'expression ?). D'une part, je ne suis pas certaine que la séparation des pouvoirs est une condition d'existence sine qua non de la république (cf. les juges de la Cour Suprême américaine, nommés par l'exécutif, mais on peut aussi imaginer que cette disposition soit valable pour tous les juges : les Etats-Unis resteraient une république). D'autre part, du coup, il n'y a finalement que peu de choses qui répondent à cette définition du "principe de la République" : l'égalité, la démocratie, la liberté sont alors des valeurs et non des principes. Les seuls "principes de la République" sont alors ceux qui permettent d'organiser l'attribution d'un mandat par une partie du corps social.
Je remarquais, comme pour moi-même, que la séparation des pouvoirs n'était pas une condition sine qua non d'existence de la république. Or vous citiez la séparation des pouvoirs comme un exemple de principe de la république. Puis, vous définissiez les principes de la république comme "ce sans quoi il n'y a pas de république". En fait, je pointais simplement du doigt le fait que votre exemple ne répondait pas à votre définition. (Sauf si j'ai mal compris, ce qui est toujours possible !)
Mais je trouve pour autant l'un et l'autre intéressants. Même imparfaits, ils permettent de donner une première définition, qui sert de base à la réflexion et me permet de définir grossièrement les contours de ces notions.
Il y a des gens qui se donnent la peine d'envoyer des emails pour reprocher aux autres leur propre incompréhension ? C'est moderne comme idée ; faudra que j'essaie !Cripure a écrit:J'ai expliqué suite à trois courriels peu amènes qui m'engueulaient
Sinon, Solal, il me semble que ceci :
Solal des Solal a écrit:Le principe est le terme souhaitable d'une action. C'est la fin, supposée bonne, que je vise et que, pour cette raison, j'introduis, à titre de prémisse nécessaire, dans mon raisonnement pratique
contredit cela :
(Et sinon, tu touches 1€ à chaque fois que tu mets un mot en italique ? )Solal des Solal a écrit:Un principe est un point de départ pratique, une valeur, un point d'aboutissement théorique.
Autant j'ai trouvé le paragraphe précédent très intéressant, autant je n'ai pas compris en quoi il répondait à ma question.Levincent a écrit:Je pense que ce que j'ai écrit au paragraphe précédent permet largement de répondre.
Au passage, je m'interroge : l'expression "les principes de la République" a-t-elle la même signification que "les principes de la république" ?
- LevincentNiveau 9
Dalathée2 a écrit:Autant j'ai trouvé le paragraphe précédent très intéressant, autant je n'ai pas compris en quoi il répondait à ma question.Levincent a écrit:Je pense que ce que j'ai écrit au paragraphe précédent permet largement de répondre.
Bon, j'avoue, c'était une pirouette de ma part. J'avais la flemme de faire une réponse circonstanciée sur le deuxième point.
Tout d'abord, pourquoi avoir posé la question sur le 4ème amendement, et pas le 7ème ou le 10ème ? Est-ce que c'était donné à titre d'exemple, ou bien ce 4ème amendement a vraiment une particularité pour toi par rapport aux autres ?
Mais s'il faut répondre, je dirais que cet amendement protège et garantit la propriété, la tranquillité et la liberté du citoyen. C'est un article de loi qui donne une limite que l'Etat ne peut franchir. En ce sens, il s'agit donc de ce que j'ai appelé un cadre, et ressort donc davantage du principe que de la valeur. En revanche, rien n'empêche que son adoption ait été motivée par certaines valeurs (la justice, l'inviolabilité de la personne humaine).
Dalathée2 a écrit:
Au passage, je m'interroge : l'expression "les principes de la République" a-t-elle la même signification que "les principes de la république" ?
La première expression me semble plutôt signifier "les principes de notre république", les principes qui font la particularité de la République française, qu'on écrit avec une majuscule, la seconde désignerait davantage les principes qui font qu'une république est une république.
- Paul DedalusNeoprof expérimenté
Comme ça au passage, une bonne référence : Le traité des valeurs de Louis Lavelle.
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«Primus ego in patriam mecum, modo uita supersit. »
Virgile Georgiques.
« Ma science ne peut être qu’une science de pointillés. Je n’ai ni le temps ni les moyens de tracer une ligne continue. »
Marcel Jousse
- RogerMartinBon génie
J'aime ce forum: il y a des gens beaucoup plus malades que moi, au moins sur un point. C'est un réconfort incroyable. Pardon du HS.Cripure a écrit:J'ai expliqué suite à trois courriels peu amènes qui m'engueulaient
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Yo, salut ma bande ! disait toujours le Samouraï.
I User5899.
User 17706 s'est retiré à Helsingør.
Strange how paranoia can link up with reality now and then.
- Solal des SolalNiveau 6
Il n'y a aucune contradiction, seulement un paradoxe : le principe est à la fois la fin relativement à mon action et le commencement (l'arkhè des Grecs) relativement à mon intention d'agir. C'est la raison pour laquelle les principes sont destinés, tout à la fois, à être appliqués dans des actes, mais aussi défendus par et dans des déclarations d'intention. Par contraste, les valeurs se prouvent ou se démontrent mais ne se défendent pas : si on considère la laïcité comme une valeur et non comme un principe, il va sans doute y avoir des débats théoriques quant aux critères d'évaluation de ce qu'est un espace public laique, mais, de ce fait, on ne défendra pas la laïcité comme principe pratique (pas plus que l'on ne défend le totalitarisme en discutant des critères de reconnaissance du totalitarisme).Dalathée2 a écrit:il me semble que ceci :Solal des Solal a écrit:Le principe est le terme souhaitable d'une action. C'est la fin, supposée bonne, que je vise et que, pour cette raison, j'introduis, à titre de prémisse nécessaire, dans mon raisonnement pratique
contredit cela :Solal des Solal a écrit:Un principe est un point de départ pratique, une valeur, un point d'aboutissement théorique.
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