- JohnMédiateur
http://www.liberation.fr/monde/2014/10/24/a-qui-voulez-vous-que-je-parle-d-aragon-ou-voltaire-a-kobane_1128592Mustaka Baker, Kurde syrien de 64 ans, vient de fuir la ville en proie aux combats contre l'Etat islamique. Il retrace l'évolution de la cité depuis plus de cent ans et revient sur la présence française.
Mustafa Baker est un Kurde syrien aux grands yeux bleus. Il est né à Kobané il y a soixante-quatre ans. Il y a quatorze jours, il a quitté Kobané, où les combattants kurdes tentent de résister à l’Etat islamique, pour Sanliurfa, côté turc. Lui qui était en costume trois-pièces quand il enseignait le français à Alep à la fin des années 90 vit aujourd’hui avec ses trois enfants dans un appartement dans lequel s’entassent d’autres familles de Kobané, dans une promiscuité terrible. Rencontré mardi soir à Sanliurfa, près de la grotte d’Abraham, il raconte l’histoire de sa ville, Kobané. [...]
«J’ai appris le français, non pas parce que ma ville avait été comme un laboratoire de la modernité importé par les Français durant leur mandat, mais parce que c’était comme ça : tu feras du français, point. Hélas, comme je le ne pratique plus, j’ai totalement perdu mon français. J’ai été emprisonné trois ans en 1987. Sans avocat, sans procès, pour activités subversives. Je n’ai jamais supporté les méthodes des baasistes. Quand j’ai été arrêté, ils m’ont dit : on va contrôler même tes rêves. Quand je suis rentré à Kobané dans les années 90, mes voisins pensaient que j’étais devenu complètement taré : je parlais tout seul. Mais à qui voulez-vous que je parle de Louis Aragon, d’Albert Camus ou de Voltaire à Kobané ?
«Aujourd’hui j’ai perdu ma propre mémoire, mes livres, mes cahiers, mes notes, mes souvenirs. Tout a disparu : le vin que je buvais, les Arméniens que j’ai aimés et qui m’ont transmis l’amour de la culture française. Je suis chanceux, car je suis en vie et, surtout, j’ai mes trois garçons qui m’ont rejoint côte turc et qui m’ont trouvé un petit appartement.»
Il fait nuit. L’homme a les larmes qui lui montent et cite les deux premiers vers des Yeux d’Elsa d’Aragon, et dit : «Ne nous oubliez pas. Voyez ce que le pouvoir a fait de nous, les Syriens, en créant un monstre comme l’Etat islamique : des gens sans passé, sans culture, sans abri.»
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"Qui a construit Thèbes aux sept portes ? Dans les livres, on donne les noms des Rois. Les Rois ont-ils traîné les blocs de pierre ? [...] Quand la Muraille de Chine fut terminée, Où allèrent ce soir-là les maçons ?" (Brecht)
"La nostalgie, c'est plus ce que c'était" (Simone Signoret)
- Samuel DMNiveau 6
Article très intéressant.
- ChocolatGuide spirituel
Je l'avais lu sur libé, cet article.
Il est non seulement émouvant, mais très instructif, aussi.
Donc merci de l'avoir mis ici, John !
Il est non seulement émouvant, mais très instructif, aussi.
Donc merci de l'avoir mis ici, John !
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- wanaxFidèle du forum
De la propagande. On choisit quelqu'un qui nous ressemble le plus possible ( "Les yeux bleus"..."vin rouge"..."Camus"... ) pour créer la sympathie. Puis on déroule le bréviaire.
Toujours le même axe, essayer de faire porter au pouvoir syrien la responsabilité de la création de l'"état islamique", d'ailleurs à peine évoqué dans cet article. Le Qatar et nous-mêmes n'y sommes pour rien. Ou si peu.
Toujours le même axe, essayer de faire porter au pouvoir syrien la responsabilité de la création de l'"état islamique", d'ailleurs à peine évoqué dans cet article. Le Qatar et nous-mêmes n'y sommes pour rien. Ou si peu.
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