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- ErgoDevin
Marie Laetitia (et les autres), voici l'état de ma réflexion sur mes découvertes de cette année. Ce n'est qu'un chantier, bien évidemment mais j'espère commencer à expliquer dans le texte qui suit pourquoi je veux rester dans mon établissement l'année prochaine, malgré les journées de doute, les pleurs, la violence, la dureté des conditions de travail. Il n'a peut-être pas sa place ici, mais je suis d'humeur à m'épancher, en ce moment.
Je n’ai jamais voulu devenir enseignante. J’ai passé le concours parce qu’on m’a dit de le faire, parce que je ne pouvais pas rester éternellement étudiante.
Comme presque tout jeune enseignant (T1, en l’occurrence, 1ère année après le stage), j’ai été affectée dans un établissement dont personne ne veut, ici un établissement ECLAIR (écoles, collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite), anciennement ZEP/APV/RRS (zone d’éducation prioritaire, prévention violence, réseau réussite scolaire).
Ces sigles sont le signe d’établissements labellisés, défavorisés, mal cotés. Plus il y a de lettres, plus c’est mauvais signe. C’est évidemment la première chose qu’on se dit quand on reçoit son arrêté d’affectation : et voilà, c’est parti pour le cirque, la foire d’empoigne, la peur au ventre tous les jours. C’était là, le cocktail molotov. C’était là, la tournante. C’est ce quartier, les voitures béliers. C’est ce quartier, les cambriolages, les vols, le deal.
Ce quartier, c’est un ghetto social. C’est le lieu où ont atterri des générations d’immigrés venues travailler dans les industries métallurgiques et les usines – des générations qui se retrouvent au chômage lors des fermetures successives. Certains repartent au bled, d’autres restent. Les familles éclatent.
Le collège est le reflet de ces éclatements, de ces ghettos. Zones pavillonnaires, tours. Huitième ville de plus de 20 000 habitants la plus pauvre de France en 2010. Près de 30% des actifs travaillent dans un autre département. En bref, c’est la zone. Ce sont des enfants livrés à eux-mêmes, boursiers, externes, dont les modèles sont fluctuants, qui connaissent la violence.
Une violence qui vient d’abord de la société et du regard que la société porte sur eux. Le désengagement de l’Etat n’est pas un mythe. Dans cet établissement, je ne suis pas prof. Je suis une représentante de la République (je dis République, et pas Etat, à dessein). Je défends cet idéal républicain d’une école pour tous – pas d’une égalité des chances, qui n’a aucun sens. L’égalité des chances, c’est dire à ces enfants : on vous a donné la même chance que les autres, vous n’avez pas su la saisir, c’est vous qui avez échoué, vous êtes responsable de votre sort. L’égalité n’est pas le point de départ, elle doit être le point d’arrivée. Peu importe l’égalité des chances tant qu’il n’y aura pas d’égalité des droits.
C’est cette illusion que le dispositif ECLAIR tente de créer : des équipes stables, qui s’engagent sur des missions auprès des élèves défavorisés. C’est cette illusion cynique qui montre que l’Etat se lave les mains des inégalités, se déchargeant sur des ordres de mission qui transforment les enseignants en prestataires de services.
Je n’ai jamais voulu devenir enseignante. Mais j’aime ces élèves. Chaque jour est un défi : un défi pour les faire apprendre, pour leur transmettre le goût de la matière, leur donner des clés pour construire leur autonomie ; un défi pour leur montrer qu’ils en valent la peine, tous autant qu’ils sont, avec leur violence, leur haine, leur rage, mais aussi leur politesse, leur intérêt, leurs connaissances culturelles si éloignées des miennes ; un défi pour leur montrer que je n’ai aucune idée du monde dans lequel ils vivent, tout comme ils n’ont aucune idée du monde dont je viens mais que si nous mettons ces deux mondes en commun, nous serons plus forts, ensemble. D’autant plus forts qu’en fait, moi, je vais leur parler de la guerre civile Irlandaise, de littérature jeunesse anglaise, de différences culturelles – en bref, je vais leur montrer que j’ai ma culture de naissance, ma langue maternelle et que j’ai ma culture et ma langue de passion. Et que c’est ce joyeux mélange qui fait de moi ce que je suis.
C’est un défi pour moi, au quotidien : apprendre à prendre du recul, ouvrir un volet vers un monde que j’ignore, me révolter, hurler en silence face aux situations que des enfants subissent tous les jours. Il a été très difficile pour moi, de me positionner. J’en ai longuement discuté avec les CPE de l’établissement : comment, en ayant connaissance de leurs situations, insister sur un dérisoire « s » de 3ème personne ?
C’est un autre défi : travailler en équipe. Je déteste ça. Je ne suis pas sociable, je n’aime pas parler. Mais qu’est-ce que je parle, cette année ! Je m’interroge sur mes pratiques, j’échange avec des gens plus expérimentés. Je découvre également une image de la hiérarchie que je ne connaissais pas. Je ne suis pas tellement pour, une hiérarchie. Jusqu’au jour, très tôt dans l’année, où je les entends parler des élèves, des familles. Jusqu’au jour, très tôt dans l’année, où cette hiérarchie m’écoute, me conseille, me soutient. Jusqu’au jour où cette impression se fait, illusoire, bien sûr, que nous sommes tous des membres de la famille. La gestion des enfants est collective. Que faire pour améliorer les résultats à la sortie du collège ? Que faire pour aider tel élève, dont les parents ne parlent pas français mais qui rêve d’apprendre ? Que faire pour aider celui qui a vécu des situations atroces dans son pays et qui voit encore la France comme une terre de libertés ? Que faire pour que nos gamins (nos gamins) s’en sortent ? C’est-à-dire que faire pour leur présenter les voies qui s’offrent à eux et leur donner les moyens de réaliser leurs rêves ?
Travailler en ECLAIR, quand on est jeune, naïf et qu’on pense encore que l’Ecole Républicaine doit supprimer la reproduction des classes, c’est vivre à 200 à l’heure – pour peu qu’on accepte de s’y investir.
Les élèves sont durs ? Oui, sans aucun doute, oui. Surtout dans les couloirs, dans la cour. Je suis T1, je n’ai pas d’expérience. Mais l’année de stage, je n’obtenais pas le silence que j’ai cette année. L’année de stage, je n’avais pas l’assurance, la sérénité que j’ai cette année. L’année de stage, je n’avais pas le plaisir à retrouver les élèves que j’ai cette année. L’année de stage, je n’avais pas les amis que je me suis faits dans cet établissement. Je n’avais pas cette découverte d’une hiérarchie compétente qui me donne envie de m’investir parce qu’elle ne compte pas ses heures, elle non plus.
Tous ne travaillent pas, c’est vrai. Mais quand à la fin de la journée, je fais le compte des sourires, des politesses, des mains d’élèves timides qui se lèvent pour essayer, des élèves décrocheurs qui ont pris le cours et m’ont écoutée, regardée, qui m’ont souri (ou qui ne m’ont pas insultée), c’est ça qui reste. C’est cet élève qui vient à 8h30 alors qu’il n’a pas cours parce qu’il n’a pas bien compris, madame, alors il aimerait que je ré-explique. Cet élève qui a mal tenu son cahier, alors il recommence. Cet élève qui voudrait encore du travail. Ces élèves qui veulent lire dans le texte, là, maintenant, tout de suite. Chaque jour s’est fait à 200 à l’heure : une tornade d’émotions, positives et négatives, qui m’assure un renouvellement quotidien de mon métier - et tellement plus encore sur le plan humain.
(Edit: il y aurait bien plus à en dire, naturellement. Mais j'ai essayé de synthétiser. On pourra en discuter.)
Je n’ai jamais voulu devenir enseignante. J’ai passé le concours parce qu’on m’a dit de le faire, parce que je ne pouvais pas rester éternellement étudiante.
Comme presque tout jeune enseignant (T1, en l’occurrence, 1ère année après le stage), j’ai été affectée dans un établissement dont personne ne veut, ici un établissement ECLAIR (écoles, collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite), anciennement ZEP/APV/RRS (zone d’éducation prioritaire, prévention violence, réseau réussite scolaire).
Ces sigles sont le signe d’établissements labellisés, défavorisés, mal cotés. Plus il y a de lettres, plus c’est mauvais signe. C’est évidemment la première chose qu’on se dit quand on reçoit son arrêté d’affectation : et voilà, c’est parti pour le cirque, la foire d’empoigne, la peur au ventre tous les jours. C’était là, le cocktail molotov. C’était là, la tournante. C’est ce quartier, les voitures béliers. C’est ce quartier, les cambriolages, les vols, le deal.
Ce quartier, c’est un ghetto social. C’est le lieu où ont atterri des générations d’immigrés venues travailler dans les industries métallurgiques et les usines – des générations qui se retrouvent au chômage lors des fermetures successives. Certains repartent au bled, d’autres restent. Les familles éclatent.
Le collège est le reflet de ces éclatements, de ces ghettos. Zones pavillonnaires, tours. Huitième ville de plus de 20 000 habitants la plus pauvre de France en 2010. Près de 30% des actifs travaillent dans un autre département. En bref, c’est la zone. Ce sont des enfants livrés à eux-mêmes, boursiers, externes, dont les modèles sont fluctuants, qui connaissent la violence.
Une violence qui vient d’abord de la société et du regard que la société porte sur eux. Le désengagement de l’Etat n’est pas un mythe. Dans cet établissement, je ne suis pas prof. Je suis une représentante de la République (je dis République, et pas Etat, à dessein). Je défends cet idéal républicain d’une école pour tous – pas d’une égalité des chances, qui n’a aucun sens. L’égalité des chances, c’est dire à ces enfants : on vous a donné la même chance que les autres, vous n’avez pas su la saisir, c’est vous qui avez échoué, vous êtes responsable de votre sort. L’égalité n’est pas le point de départ, elle doit être le point d’arrivée. Peu importe l’égalité des chances tant qu’il n’y aura pas d’égalité des droits.
C’est cette illusion que le dispositif ECLAIR tente de créer : des équipes stables, qui s’engagent sur des missions auprès des élèves défavorisés. C’est cette illusion cynique qui montre que l’Etat se lave les mains des inégalités, se déchargeant sur des ordres de mission qui transforment les enseignants en prestataires de services.
Je n’ai jamais voulu devenir enseignante. Mais j’aime ces élèves. Chaque jour est un défi : un défi pour les faire apprendre, pour leur transmettre le goût de la matière, leur donner des clés pour construire leur autonomie ; un défi pour leur montrer qu’ils en valent la peine, tous autant qu’ils sont, avec leur violence, leur haine, leur rage, mais aussi leur politesse, leur intérêt, leurs connaissances culturelles si éloignées des miennes ; un défi pour leur montrer que je n’ai aucune idée du monde dans lequel ils vivent, tout comme ils n’ont aucune idée du monde dont je viens mais que si nous mettons ces deux mondes en commun, nous serons plus forts, ensemble. D’autant plus forts qu’en fait, moi, je vais leur parler de la guerre civile Irlandaise, de littérature jeunesse anglaise, de différences culturelles – en bref, je vais leur montrer que j’ai ma culture de naissance, ma langue maternelle et que j’ai ma culture et ma langue de passion. Et que c’est ce joyeux mélange qui fait de moi ce que je suis.
C’est un défi pour moi, au quotidien : apprendre à prendre du recul, ouvrir un volet vers un monde que j’ignore, me révolter, hurler en silence face aux situations que des enfants subissent tous les jours. Il a été très difficile pour moi, de me positionner. J’en ai longuement discuté avec les CPE de l’établissement : comment, en ayant connaissance de leurs situations, insister sur un dérisoire « s » de 3ème personne ?
C’est un autre défi : travailler en équipe. Je déteste ça. Je ne suis pas sociable, je n’aime pas parler. Mais qu’est-ce que je parle, cette année ! Je m’interroge sur mes pratiques, j’échange avec des gens plus expérimentés. Je découvre également une image de la hiérarchie que je ne connaissais pas. Je ne suis pas tellement pour, une hiérarchie. Jusqu’au jour, très tôt dans l’année, où je les entends parler des élèves, des familles. Jusqu’au jour, très tôt dans l’année, où cette hiérarchie m’écoute, me conseille, me soutient. Jusqu’au jour où cette impression se fait, illusoire, bien sûr, que nous sommes tous des membres de la famille. La gestion des enfants est collective. Que faire pour améliorer les résultats à la sortie du collège ? Que faire pour aider tel élève, dont les parents ne parlent pas français mais qui rêve d’apprendre ? Que faire pour aider celui qui a vécu des situations atroces dans son pays et qui voit encore la France comme une terre de libertés ? Que faire pour que nos gamins (nos gamins) s’en sortent ? C’est-à-dire que faire pour leur présenter les voies qui s’offrent à eux et leur donner les moyens de réaliser leurs rêves ?
Travailler en ECLAIR, quand on est jeune, naïf et qu’on pense encore que l’Ecole Républicaine doit supprimer la reproduction des classes, c’est vivre à 200 à l’heure – pour peu qu’on accepte de s’y investir.
Les élèves sont durs ? Oui, sans aucun doute, oui. Surtout dans les couloirs, dans la cour. Je suis T1, je n’ai pas d’expérience. Mais l’année de stage, je n’obtenais pas le silence que j’ai cette année. L’année de stage, je n’avais pas l’assurance, la sérénité que j’ai cette année. L’année de stage, je n’avais pas le plaisir à retrouver les élèves que j’ai cette année. L’année de stage, je n’avais pas les amis que je me suis faits dans cet établissement. Je n’avais pas cette découverte d’une hiérarchie compétente qui me donne envie de m’investir parce qu’elle ne compte pas ses heures, elle non plus.
Tous ne travaillent pas, c’est vrai. Mais quand à la fin de la journée, je fais le compte des sourires, des politesses, des mains d’élèves timides qui se lèvent pour essayer, des élèves décrocheurs qui ont pris le cours et m’ont écoutée, regardée, qui m’ont souri (ou qui ne m’ont pas insultée), c’est ça qui reste. C’est cet élève qui vient à 8h30 alors qu’il n’a pas cours parce qu’il n’a pas bien compris, madame, alors il aimerait que je ré-explique. Cet élève qui a mal tenu son cahier, alors il recommence. Cet élève qui voudrait encore du travail. Ces élèves qui veulent lire dans le texte, là, maintenant, tout de suite. Chaque jour s’est fait à 200 à l’heure : une tornade d’émotions, positives et négatives, qui m’assure un renouvellement quotidien de mon métier - et tellement plus encore sur le plan humain.
(Edit: il y aurait bien plus à en dire, naturellement. Mais j'ai essayé de synthétiser. On pourra en discuter.)
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"You went to a long-dead octopus for advice, and you're going to blame *me* for your problems?" -- Once Upon a Time
"The gull was your ordinary gull." -- Wittgenstein's Mistress
« Cède, cède, cède, je le veux ! » écrivait Ronin, le samouraï. (Si vous cherchez un stulo-plyme, de l'encre, récap de juillet 2024)
- NellGuide spirituel
Merci Ergo de rappeler ce qui fait la beauté de notre métier, les victoires au quotidien, les reconnaissances les plus pures dans un sourire ou un élève qui reste après les cours
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Impose ta chance, sers ton bonheur et va vers ton risque. A te regarder, ils s'habitueront. (R. Char)
- WonderWomanBon génie
juste
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Vide dressing petite fille https://www.vinted.fr/membres/15210542-wiwiagathe
Vide dressing sur néo : https://www.neoprofs.org/t128716-vd-fille-wonderwoman-du-3-mois-au-4-ans-sergent-major-jacadi-zara-dpam-kiabi-verbaudet#4954294
- User5899Demi-dieu
Merci Ergo. C'est très intéressant. A vous lire, toutefois (et ça n'a rien à voir avec vous), je me demande pourquoi il faut créer un statut dérogatoire pour espérer tomber sur une hiérarchie intelligente ; pour que vos objectifs soient ceux-là, alors que ce sont ceux de l'école en général.
- ErgoDevin
Nullement. Je ne suis pas affectée sur un poste ECLAIR et je ne compte pas l'être. Mais c'est le label de l'établissement.
D'ailleurs ma hiérarchie ne l'est pas non plus, l'établissement étant passé ECLAIR alors qu'ils étaient déjà en poste. En revanche, les prochains seront recrutés sur profil.
Nul besoin de dire que tous les enseignants se sont battus contre le passage de l'établissement en ECLAIR l'année dernière.
A mon sens, d'ailleurs, l'ECLAIR va contre ces objectifs qui devraient être ceux de toutes les écoles, justement.
Edit: Je tiens aussi à préciser, pour être un peu plus "honnête" que tout le monde, même dans mon établissement, ne doit pas penser comme moi.
D'ailleurs ma hiérarchie ne l'est pas non plus, l'établissement étant passé ECLAIR alors qu'ils étaient déjà en poste. En revanche, les prochains seront recrutés sur profil.
Nul besoin de dire que tous les enseignants se sont battus contre le passage de l'établissement en ECLAIR l'année dernière.
A mon sens, d'ailleurs, l'ECLAIR va contre ces objectifs qui devraient être ceux de toutes les écoles, justement.
Edit: Je tiens aussi à préciser, pour être un peu plus "honnête" que tout le monde, même dans mon établissement, ne doit pas penser comme moi.
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- User5899Demi-dieu
Alors, c'est encore mieux
- carlottaHabitué du forum
Très beau témoignage !
- LédisséEsprit sacré
Ergo, je ne sais pas quoi te dire.
Parce que je ne suis pas du tout dans la même situation :
- ça fait longtemps que je veux enseigner (au contraire, la thèse me fait horreur )
- ma ZEP est gentillettissime à côté de la tienne, je ne suis donc pas confrontée aux mêmes situations ; j'aime cependant à penser que face à ce que tu vis, j'aurais la même réaction : n'est-ce pas justement terriblement motivant d'être face aux élèves qui ont le plus besoin d'enseignants qui les aident à obtenir le meilleur d'eux-mêmes ? n'est-ce pas là que notre métier est à la fois le plus terrible et le plus "beau", comme dans l'expression ?
Est-ce que tu envisages de montrer ce texte, si juste, à ta directrice de thèse ?
Parce que je ne suis pas du tout dans la même situation :
- ça fait longtemps que je veux enseigner (au contraire, la thèse me fait horreur )
- ma ZEP est gentillettissime à côté de la tienne, je ne suis donc pas confrontée aux mêmes situations ; j'aime cependant à penser que face à ce que tu vis, j'aurais la même réaction : n'est-ce pas justement terriblement motivant d'être face aux élèves qui ont le plus besoin d'enseignants qui les aident à obtenir le meilleur d'eux-mêmes ? n'est-ce pas là que notre métier est à la fois le plus terrible et le plus "beau", comme dans l'expression ?
Est-ce que tu envisages de montrer ce texte, si juste, à ta directrice de thèse ?
_________________
Life is what happens to you while you're making other plans. John Lennon
Life is not governed by will or intention. Life is a question of nerves, and fibres, and slowly built-up cells in which thought hides itself and passion has its dreams. Oscar Wilde
Bien que femme, je me suis permis_ / demandé_ / rendu_ compte / fait_ désirer... etc._
- ErgoDevin
Paradoxalement, je me demande des fois, si ce n'est pas justement parce que je n'ai pas eu de "vocation" à être enseignante que ça se passe bien. Je ne dis pas que ce n'est pas dur. C'est dur. Mais comme on est obligé de mélanger les genres (enseignant / assistante sociale - j'ai fait relais pour obtenir la gratuité de la cantine pour un élève, ce n'est pas mon rôle - etc.), heureusement que je ne voulais pas être enseignante. Je ne sais pas si ça fait sens. Mais je pense aussi que c'est là que l'école a sa place, plus que jamais. Et j'adore ça, finalement, enseigner.
Quant à savoir quoi me dire, LadyC, tu l'as fait toute la semaine. (D'autant que tu as eu des exemples concrets de ces violences que je ne détaille pas ici.)
J'admets avoir envisagé d'envoyer ce texte à ma directrice, ainsi qu'à mon autreidole prof de fac qui ne va pas comprendre pourquoi je souhaite rester. Or, elles sont toutes les deux politisées, je me dis que ce texte, elles devraient le comprendre. Mais elles sont quand même débordées, donc...
Merci, Nell, Kroko, Cripure, carlotta et cath5660.
Quant à savoir quoi me dire, LadyC, tu l'as fait toute la semaine. (D'autant que tu as eu des exemples concrets de ces violences que je ne détaille pas ici.)
J'admets avoir envisagé d'envoyer ce texte à ma directrice, ainsi qu'à mon autre
Merci, Nell, Kroko, Cripure, carlotta et cath5660.
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- TrinityEsprit éclairé
Ergo a écrit:Paradoxalement, je me demande des fois, si ce n'est pas justement parce que je n'ai pas eu de "vocation" à être enseignante que ça se passe bien. Je ne dis pas que ce n'est pas dur. C'est dur. Mais comme on est obligé de mélanger les genres (enseignant / assistante sociale - j'ai fait relais pour obtenir la gratuité de la cantine pour un élève, ce n'est pas mon rôle - etc.), heureusement que je ne voulais pas être enseignante. Je ne sais pas si ça fait sens. Mais je pense aussi que c'est là que l'école a sa place, plus que jamais. Et j'adore ça, finalement, enseigner.
Quant à savoir quoi me dire, LadyC, tu l'as fait toute la semaine. (D'autant que tu as eu des exemples concrets de ces violences que je ne détaille pas ici.)
J'admets avoir envisagé d'envoyer ce texte à ma directrice, ainsi qu'à mon autreidoleprof de fac qui ne va pas comprendre pourquoi je souhaite rester. Or, elles sont toutes les deux politisées, je me dis que ce texte, elles devraient le comprendre. Mais elles sont quand même débordées, donc...
Merci, Nell, Kroko, Cripure, carlotta et cath5660.
Je me retrouve pas mal dans ce que tu écris. Pas la vocation (non, je ne voulais pas être maikresse quand j'étais petite) ni de passion dévorante pour la matière que j'enseigne (la physique-chimie). Le public adolescent est épuisant mais passionnant, je trouve.
J'enseigne aussi en
_________________
"Deux choses sont infinies : l'Univers et la bêtise humaine. Mais en ce qui concerne l'Univers, je n'en ai pas encore acquis la certitude absolue." Albert Einstein
- LédisséEsprit sacré
Pour la question d'envoyer ce texte à tes idoles :
- elles sont débordées, certes, mais bon, ça prend 5 minutes (et c'est bien écrit en plus d'être juste )
- il faut bien que tu en passes par leur expliquer le pourquoi du comment "je veux rester en ECLAIR alors que vous vous y opposez"
- il me semble (mais Condorcet ou ML ou d'autres auront une opinion plus pertinente) que tu devrais y joindre un paragraphe "non non je ne suis pas démotivée pour ma thèse, l'un n'exclut pas l'autre et mon objectif professionnel à l'université est toujours aussi ferme", sinon elles risquent de se poser des questions
Voilà voilà...
- elles sont débordées, certes, mais bon, ça prend 5 minutes (et c'est bien écrit en plus d'être juste )
- il faut bien que tu en passes par leur expliquer le pourquoi du comment "je veux rester en ECLAIR alors que vous vous y opposez"
- il me semble (mais Condorcet ou ML ou d'autres auront une opinion plus pertinente) que tu devrais y joindre un paragraphe "non non je ne suis pas démotivée pour ma thèse, l'un n'exclut pas l'autre et mon objectif professionnel à l'université est toujours aussi ferme", sinon elles risquent de se poser des questions
Voilà voilà...
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Life is what happens to you while you're making other plans. John Lennon
Life is not governed by will or intention. Life is a question of nerves, and fibres, and slowly built-up cells in which thought hides itself and passion has its dreams. Oscar Wilde
Bien que femme, je me suis permis_ / demandé_ / rendu_ compte / fait_ désirer... etc._
- LédisséEsprit sacré
Ah oui, et ton "c'est peut-être parce que je ne voulais pas être enseignante que ça se passe bien" est très compréhensible, rassure-toi !
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Life is what happens to you while you're making other plans. John Lennon
Life is not governed by will or intention. Life is a question of nerves, and fibres, and slowly built-up cells in which thought hides itself and passion has its dreams. Oscar Wilde
Bien que femme, je me suis permis_ / demandé_ / rendu_ compte / fait_ désirer... etc._
- WonderWomanBon génie
je pense que ça t'a évité pas mal de désillusions ...
(moi je me souviens de balades avec mon Pépé (Ze PA du collègue du village), et la peur qu'il faisait aux adultes & enfants quand j'étais petite, puis du respect apporté à mon père (Ze directeur de l'école primaire), et puis maintenant je réalise que, ben c'est plus ça.)
(moi je me souviens de balades avec mon Pépé (Ze PA du collègue du village), et la peur qu'il faisait aux adultes & enfants quand j'étais petite, puis du respect apporté à mon père (Ze directeur de l'école primaire), et puis maintenant je réalise que, ben c'est plus ça.)
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Vide dressing petite fille https://www.vinted.fr/membres/15210542-wiwiagathe
Vide dressing sur néo : https://www.neoprofs.org/t128716-vd-fille-wonderwoman-du-3-mois-au-4-ans-sergent-major-jacadi-zara-dpam-kiabi-verbaudet#4954294
- User5899Demi-dieu
Bah, ce n'est pas vous qui avez créé ce label, j'imagine...Noetiote a écrit:J'enseigne aussi enZEPECLAIR, à la différence près que j'ai signé sur un poste à profil (allez-y, balancez-moi des tomates pourries )
- TrinityEsprit éclairé
Cripure a écrit:Bah, ce n'est pas vous qui avez créé ce label, j'imagine...Noetiote a écrit:J'enseigne aussi enZEPECLAIR, à la différence près que j'ai signé sur un poste à profil (allez-y, balancez-moi des tomates pourries )
Certes, non. J'ai beau avoir quelques idées perverses en réserve, là, je plaide non coupable.
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"Deux choses sont infinies : l'Univers et la bêtise humaine. Mais en ce qui concerne l'Univers, je n'en ai pas encore acquis la certitude absolue." Albert Einstein
- MamaVénérable
Ergo, c'est magnifique
Je n'ai pas encore eu l'occasion d'enseigner dans un établissement aussi difficile, bien que je sois TZR, mais si cela m'arrive un jour, je crois que j'aurai de la force, et que je repenserai à ton texte. Parce que j'ai voulu être enseignante, très fort, mais pour le contact avec des adolescents de toutes sortes, justement... Et je crois que je ne vais pas être déçue...
Longue vie à ton énergie (et à ta hiérarchie) !
Et maudits soient les créateurs de labels abscons et de postes à profils...
Je n'ai pas encore eu l'occasion d'enseigner dans un établissement aussi difficile, bien que je sois TZR, mais si cela m'arrive un jour, je crois que j'aurai de la force, et que je repenserai à ton texte. Parce que j'ai voulu être enseignante, très fort, mais pour le contact avec des adolescents de toutes sortes, justement... Et je crois que je ne vais pas être déçue...
Longue vie à ton énergie (et à ta hiérarchie) !
Et maudits soient les créateurs de labels abscons et de postes à profils...
- CathyFidèle du forum
Joli texte qui fait du bien! Je suis contente Ergo que tu t'épanouisses dans un établissement si difficile! Et je comprends très bien ce que tu veux dire autour de l'absence de vocation!
- Invité21Fidèle du forum
Ergo, je serais curieuse de connaître le nom de ton établissement. MP si tu acceptes!
Témoignage passionnant, sinon!
Témoignage passionnant, sinon!
- sandGuide spirituel
Pour quelqu'un qui n'avait pas la vocation, Ergo, quel défi, et quelle réussite !
- DerborenceModérateur
Très beau texte, Ergo.
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"La volonté permet de grimper sur les cimes ; sans volonté on reste au pied de la montagne." Proverbe chinois
"Derborence, le mot chante triste et doux dans la tête pendant qu’on se penche sur le vide, où il n’y a plus rien, et on voit qu’il n’y a plus rien."
Charles-Ferdinand Ramuz, Derborence
- ErgoDevin
Merci.
L'ENgénu: MP! (Même si j'ai déjà donné plein d'indices pour qui connaît la région. :lol:)
Par contre, le CDE a officieusement obtenu sa mutation (j'ai des indics dans son futur établissement). Et la PA a demandé la sienne (et je veux pas qu'elle paaaaarte!)
L'ENgénu: MP! (Même si j'ai déjà donné plein d'indices pour qui connaît la région. :lol:)
Par contre, le CDE a officieusement obtenu sa mutation (j'ai des indics dans son futur établissement). Et la PA a demandé la sienne (et je veux pas qu'elle paaaaarte!)
mamamanette a écrit:e n'ai pas encore eu l'occasion d'enseigner dans un établissement aussi difficile, bien que je sois TZR, mais si cela m'arrive un jour, je crois que j'aurai de la force, et que je repenserai à ton texte. Parce que j'ai voulu être enseignante, très fort, mais pour le contact avec des adolescents de toutes sortes, justement... Et je crois que je ne vais pas être déçue...
Longue vie à ton énergie (et à ta hiérarchie) !
Et maudits soient les créateurs de labels abscons et de postes à profils...
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"You went to a long-dead octopus for advice, and you're going to blame *me* for your problems?" -- Once Upon a Time
"The gull was your ordinary gull." -- Wittgenstein's Mistress
« Cède, cède, cède, je le veux ! » écrivait Ronin, le samouraï. (Si vous cherchez un stulo-plyme, de l'encre, récap de juillet 2024)
- FlofloNiveau 10
Très beau texte, dans lequel je me reconnais. Quartiers nord de Marseille, établissement ECLAIR, mais j'adore mon collège, mes élèves, mes collègues, mes élèves .... quoi, je l'ai déjà dit ???? J'y suis depuis 6 ans et je compte y rester !!!
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Les mots sont
La voix de l'émotion
Grand Corps Malade
- IsidoriaDoyen
C'est beau, et ça fait du bien de lire ça...
J'ai enseigné quatre ans en ECLAIR enfin à l'époque ça avait un autre nom, mais peu importe. Et c'était dur, les insultes, les larmes, le découragement. Mais l'équipe était soudée, le CDE génial (avant son remplacement), et les heures de réunions diverses ne me faisaient pas peur. J'ai pourtant été volée, gazée à la bombe lacrymo (oui, oui, en classe), menacée, insultée, j'ai même portée deux fois plainte et reçu protection juridique du fonctionnaire.
Et un jour j'ai enfin obtenu ce dont je rêvais: un poste en lycée français à l'étranger.
Et là, autant l'avouer, j'ai rarement eu autant envie de démissionner que maintenant. Mes élèves sont des consommateurs, jamais merci, ils critiquent tout, sont des fainéants comme jamais je n'en ai vus en région parisienne. Quant aux parents, c'est pire que tout, premièrement ils interviennent quand ils veulent sur tout, et critiquent sans arrêt!
Je viens de subir les remontrances de ma CPE PA parce qu'il semblerait que "tes troisièmes ont peur de toi"!!! Ah?? "Mais ne t'inquiète pas je ne pense pas que les parents iront jusqu'à écrire une lettre".
Mais quoi? Ils ont peur parce que je leur dis qu'ils n'ont pas le niveau? Parce que dans cette classe j'ai des élèves dont je ne comprends ni l'oral ni l'écrit? Ils ont peur parce que je les fais travailler? D'ailleurs ils ont dit à la CPE que c'était vrai qu'ils n'arrêtaient pas de bavarder et qu'ils ne travaillaient pas, mais qu'ils aimeraient le faire tranquillement.
Ca me donne envie de baisser les bras.
Ca et les collègues qui alors que je suis représentante du personnel me remettent tout sur le dos comme la fermeture de la 1ère L comme si j'y étais pour quelque chose.
Bref tout ça pour dire que je ne pense pas retourner un jour en ECLAIR mais que ce fut une belle époque, où enseigner avait du sens. J'ai même gardé des contacts avec des élèves qui sont fiers d'avoir leur bac, et qui savent remercier, qui sont simples!
Pfff désolée pour ce coup de gueule j'en ai marre, vivement les vacances...
J'ai enseigné quatre ans en ECLAIR enfin à l'époque ça avait un autre nom, mais peu importe. Et c'était dur, les insultes, les larmes, le découragement. Mais l'équipe était soudée, le CDE génial (avant son remplacement), et les heures de réunions diverses ne me faisaient pas peur. J'ai pourtant été volée, gazée à la bombe lacrymo (oui, oui, en classe), menacée, insultée, j'ai même portée deux fois plainte et reçu protection juridique du fonctionnaire.
Et un jour j'ai enfin obtenu ce dont je rêvais: un poste en lycée français à l'étranger.
Et là, autant l'avouer, j'ai rarement eu autant envie de démissionner que maintenant. Mes élèves sont des consommateurs, jamais merci, ils critiquent tout, sont des fainéants comme jamais je n'en ai vus en région parisienne. Quant aux parents, c'est pire que tout, premièrement ils interviennent quand ils veulent sur tout, et critiquent sans arrêt!
Je viens de subir les remontrances de ma CPE PA parce qu'il semblerait que "tes troisièmes ont peur de toi"!!! Ah?? "Mais ne t'inquiète pas je ne pense pas que les parents iront jusqu'à écrire une lettre".
Mais quoi? Ils ont peur parce que je leur dis qu'ils n'ont pas le niveau? Parce que dans cette classe j'ai des élèves dont je ne comprends ni l'oral ni l'écrit? Ils ont peur parce que je les fais travailler? D'ailleurs ils ont dit à la CPE que c'était vrai qu'ils n'arrêtaient pas de bavarder et qu'ils ne travaillaient pas, mais qu'ils aimeraient le faire tranquillement.
Ca me donne envie de baisser les bras.
Ca et les collègues qui alors que je suis représentante du personnel me remettent tout sur le dos comme la fermeture de la 1ère L comme si j'y étais pour quelque chose.
Bref tout ça pour dire que je ne pense pas retourner un jour en ECLAIR mais que ce fut une belle époque, où enseigner avait du sens. J'ai même gardé des contacts avec des élèves qui sont fiers d'avoir leur bac, et qui savent remercier, qui sont simples!
Pfff désolée pour ce coup de gueule j'en ai marre, vivement les vacances...
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