- KamolNiveau 9
J'étudie l'Etranger avec mes premières (merci encore à Lili pour son aide précieuse), et je n'arrive pas à me décider: fait-il leur parler d'existentialisme ou d'absurde?
Dans leur bouquin (Magnard), ils font un groupement Malraux (La Condition humaine), Sartre (La Peste), Camus (La Peste) sous le titre "le roman existentialiste" en donnant comme définition au détour d'une synthèse "qui soulèvent la grave question de l'existence humaine: la culpabilité, le sens de la vie" => je trouve ça très léger comme définition
Dans le Mittérand (à qui j'ai plutôt tendance à faire confiance, ai-je tort?), ils disent que Sarte et Camus ne sont pas à mettre dans la même panier, et que Camus se rapproche plus de l'absurde, car ce n'est pas une philosophe "professionnel".
Le truc, c'est que j'avais choisi au départ l'Etranger pour traiter un mouvement littéraire et culturel, et je pensais parler de l'existentialisme.
Vous feriez quoi: un GT sur Malraux, Sartre ou plutôt un GT théâtre (c'est pas gênant dans une séquence sur le roman?)avec Beckett et Ionesco?...
Dans leur bouquin (Magnard), ils font un groupement Malraux (La Condition humaine), Sartre (La Peste), Camus (La Peste) sous le titre "le roman existentialiste" en donnant comme définition au détour d'une synthèse "qui soulèvent la grave question de l'existence humaine: la culpabilité, le sens de la vie" => je trouve ça très léger comme définition
Dans le Mittérand (à qui j'ai plutôt tendance à faire confiance, ai-je tort?), ils disent que Sarte et Camus ne sont pas à mettre dans la même panier, et que Camus se rapproche plus de l'absurde, car ce n'est pas une philosophe "professionnel".
Le truc, c'est que j'avais choisi au départ l'Etranger pour traiter un mouvement littéraire et culturel, et je pensais parler de l'existentialisme.
Vous feriez quoi: un GT sur Malraux, Sartre ou plutôt un GT théâtre (c'est pas gênant dans une séquence sur le roman?)avec Beckett et Ionesco?...
- CarabasVénérable
Pour moi, Camus n'est pas à mettre dans l'existentialisme. L'existentialisme, c'est, schématiquement, l'idée que l'on n'existe que par ses actes.
L'absurde, c'est le sentiment, l'intime conviction que la vie n'a pas de sens.
L'existentialisme, lui, cherche bien un sens à la vie...
Expliquer le contexte de ces oeuvres, aborder ces notions qui sont contemporaines, oui, les confondre, non.
L'absurde, c'est le sentiment, l'intime conviction que la vie n'a pas de sens.
L'existentialisme, lui, cherche bien un sens à la vie...
Expliquer le contexte de ces oeuvres, aborder ces notions qui sont contemporaines, oui, les confondre, non.
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- AvaExpert spécialisé
Absurde... Lis le Mythe de Sisyphe, c'est éclairant.
- KamolNiveau 9
Et je viens de retrouver un fil sur néo qui traitait de la question, et où l'on disait que L'Etranger était tout sauf absurde, et qu'il s'agissait là d'un anachronisme... Me voilà un peu désemparée, je l'avoue, car tout ce que j'ai récupéré sur l'oeuvre (pour une fois que je m'autorise à emprunter des choses à des collègues) invoque abondamment cette fameuse absurdité de la condition humaine... En même temps, le mythe de Sisyphe est bien contemporain à l'Etranger; je ne l'ai pas lu (pfiou), mais ne suggère-t-il pas cette idée d'absurdité, peut-être sans la nommer?
- CarabasVénérable
Pour moi, si.Kamol a écrit:Et je viens de retrouver un fil sur néo qui traitait de la question, et où l'on disait que L'Etranger était tout sauf absurde, et qu'il s'agissait là d'un anachronisme... Me voilà un peu désemparée, je l'avoue, car tout ce que j'ai récupéré sur l'oeuvre (pour une fois que je m'autorise à emprunter des choses à des collègues) invoque abondamment cette fameuse absurdité de la condition humaine... En même temps, le mythe de Sisyphe est bien contemporain à l'Etranger; je ne l'ai pas lu (pfiou), mais ne suggère-t-il pas cette idée d'absurdité, peut-être sans la nommer?
Ca me rappelle ma formatrice qui m'avait reproché d'avoir dit à mes élèves que l'Odyssée était une épopée.
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- AvaExpert spécialisé
Pour moi, c'est clairement absurde... ET c'est ce que j'ai vu à la fac aussi.
- KamolNiveau 9
Bon, alors je fais fi de l'opinion du sage Abraxas... Et je viens grossir les rangs de ces "profs ennemis des profs" qui racontent n'importe quoi à leurs élèves?... (voir le poste "Toujours l'Etranger: l'absurde?")
- CarabasVénérable
Pour moi, le personnage de Meursault n'est pas absurde. En revanche, le roman l'est et Meursault, à la fin du roman, en prend conscience. Il voit que tous cherchent résolument un sens à la vie alors qu'il n'y en a pas, pas plus que la nature n'en a.
L'absurde est clairement lié à un sentiment tragique, mais un tragique sans Dieu, sans Destin, sans sens... un tragique absurde, quoi. Voir la scène du meurtre. Pourquoi a-t-elle lieu? Meursault est armé, il est retourné sur ses pas, il a chaud, il a le soleil dans les yeux, et l'Arabe est là... C'est à la fois tragique (l'acharnement du hasard, mais le héros ne lutte pas contre son destin) et absurde, puisque tout ceci est le fruits de hasards successifs. C'est comme ça que j'ai expliqué le roman à une élève, une année.
Maintenant, j'ai peut-être tout faux. Après tout, je n'ai pas été titularisée...
L'absurde est clairement lié à un sentiment tragique, mais un tragique sans Dieu, sans Destin, sans sens... un tragique absurde, quoi. Voir la scène du meurtre. Pourquoi a-t-elle lieu? Meursault est armé, il est retourné sur ses pas, il a chaud, il a le soleil dans les yeux, et l'Arabe est là... C'est à la fois tragique (l'acharnement du hasard, mais le héros ne lutte pas contre son destin) et absurde, puisque tout ceci est le fruits de hasards successifs. C'est comme ça que j'ai expliqué le roman à une élève, une année.
Maintenant, j'ai peut-être tout faux. Après tout, je n'ai pas été titularisée...
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- CarabasVénérable
http://neoprofs.forumactif.org/t6911-toujours-l-etranger-l-absurde?highlight=%E9tranger+absurde
Oui, l'absurde est bel et bien là : l'absurdité d'une société qui refuse de garder en son sein "un monstre", monstre qui n'est peut-être monstre que parce qu'il a mieux compris que tous cet immense vide de la vie... ou pas (en même temps, cette prise de conscience n'a lieu que la nuit précédant l'exécution). Une société qui condamne non des faits, mais une attitude décalée et susceptible d'être dangereuse.
Justement, si l'on regarde la scène du procès, il est à peine question du meurtre. Or, il est question de l'attitude de Meursault à l'enterrement de sa mère, assimilée à un meurtre moral et rapproché d'un parricide. On se fout clairement du meurtre réel. En revanche, tout tourne autour du meurtre moral.Abraxas a écrit:Au passage, ce qu'il y a de plus absurde, dans ce roman, c'st la condamnation à mort du héros. Un Européen condamné à mort, en algéie des années 30, pour aovir abattu un Arabe qui le menaçait d'un couteau ? Allons donc…
Oui, l'absurde est bel et bien là : l'absurdité d'une société qui refuse de garder en son sein "un monstre", monstre qui n'est peut-être monstre que parce qu'il a mieux compris que tous cet immense vide de la vie... ou pas (en même temps, cette prise de conscience n'a lieu que la nuit précédant l'exécution). Une société qui condamne non des faits, mais une attitude décalée et susceptible d'être dangereuse.
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- KamolNiveau 9
Non, ton analyse me paraît intéressante Carabas (et je ne comprends toujours pas pourquoi tu n'as pas été titularisée, mais je ne veux pas remuer de vieux couteaux...).
Puisque la problématique de la séquence est "Quel regard Camus pose-t-il sur le monde moderne à travers le personnage de Meursault", je peux bien dire que c'est un monde absurde car privé de Dieu, ou de valeurs unifiantes et consolatrices comme la religion en proposait...
Du coup Beckett et Ionesco en TC, ça ne vous choque pas (dans une séquence sur le roman)?
J'éditz: je viens de lire ton nouveau message: tout à fait convaincue par ta lecture, merci!
Puisque la problématique de la séquence est "Quel regard Camus pose-t-il sur le monde moderne à travers le personnage de Meursault", je peux bien dire que c'est un monde absurde car privé de Dieu, ou de valeurs unifiantes et consolatrices comme la religion en proposait...
Du coup Beckett et Ionesco en TC, ça ne vous choque pas (dans une séquence sur le roman)?
J'éditz: je viens de lire ton nouveau message: tout à fait convaincue par ta lecture, merci!
- KamolNiveau 9
Carabas a écrit:Pour moi, Camus n'est pas à mettre dans l'existentialisme. L'existentialisme, c'est, schématiquement, l'idée que l'on n'existe que par ses actes.
N'est-ce pas le cas de Meursault, qu'on ne nous donne à voir qu'à travers les actes successifs qu'il rapporte, sans jamais vraiment les analyser? :|
- JPhMMDemi-dieu
Est-ce si contradictoire ?
En trois mots :
Du fait que la vie n'a pas de sens en soi, 1. nos actes seuls ont la possibilité de lui en donner, 2. et de fait seuls nos actes lui en donnent.
Si la vie avait un sens en soi, nos actes n'y changeraient rien, et nous serions esclaves de ce sens-là jusque dans nos actes.
En trois mots :
Du fait que la vie n'a pas de sens en soi, 1. nos actes seuls ont la possibilité de lui en donner, 2. et de fait seuls nos actes lui en donnent.
Si la vie avait un sens en soi, nos actes n'y changeraient rien, et nous serions esclaves de ce sens-là jusque dans nos actes.
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Labyrinthe où l'admiration des ignorants et des idiots qui prennent pour savoir profond tout ce qu'ils n'entendent pas, les a retenus, bon gré malgré qu'ils en eussent. — John Locke
Je crois que je ne crois en rien. Mais j'ai des doutes. — Jacques Goimard
- nuagesGrand sage
complètement d'accord avec Carabas, Camus est un écrivain de l'absurde, d'ailleurs grand admirateur de Kafka. Son oeuvre peut-être la plus absurde est sa pièce Le malentendu , sujet auquel fait allusion l'Etranger
- CarabasVénérable
J'ai l'impression que Meursault se fiche d'exister ou non et se contre-fiche de l'impact de ses actes. Il agit parce qu'il a chaud/qu'il a mal à la tête/qu'il désire Marie... Il n'agit au nom de rien, tandis que le personnage existentialiste croit que ses actes donnent un sens à la/sa vie.
En ce sens, Meursault n'agit pas. Mais j'avoue ne pas être à l'aise sur ce terrain-là.
Je préfére dissocier les 2 notions, même s'il y a effectivement des points communs.
En ce sens, Meursault n'agit pas. Mais j'avoue ne pas être à l'aise sur ce terrain-là.
Je préfére dissocier les 2 notions, même s'il y a effectivement des points communs.
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Terry Pratchett
- AvaExpert spécialisé
Carabas a écrit:http://neoprofs.forumactif.org/t6911-toujours-l-etranger-l-absurde?highlight=%E9tranger+absurdeJustement, si l'on regarde la scène du procès, il est à peine question du meurtre. Or, il est question de l'attitude de Meursault à l'enterrement de sa mère, assimilée à un meurtre moral et rapproché d'un parricide. On se fout clairement du meurtre réel. En revanche, tout tourne autour du meurtre moral.Abraxas a écrit:Au passage, ce qu'il y a de plus absurde, dans ce roman, c'st la condamnation à mort du héros. Un Européen condamné à mort, en algéie des années 30, pour aovir abattu un Arabe qui le menaçait d'un couteau ? Allons donc…
Oui, l'absurde est bel et bien là : l'absurdité d'une société qui refuse de garder en son sein "un monstre", monstre qui n'est peut-être monstre que parce qu'il a mieux compris que tous cet immense vide de la vie... ou pas (en même temps, cette prise de conscience n'a lieu que la nuit précédant l'exécution). Une société qui condamne non des faits, mais une attitude décalée et susceptible d'être dangereuse.
+1! Carabas:
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