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- TournesolÉrudit
Merci pour vos messages, qui me confortent dans l'idée que l'attitude à adopter ne va pas de soi.
- zigmag17Guide spirituel
lene75 a écrit:zigmag17 a écrit:
Dans ce cas précis, parler avec lui et lui proposer de réécrire un texte moins engageant, plus neutre, lui permettrait de comprendre qu'il a été entendu, mais que par ailleurs il n'est pas exempté d'une évaluation. Certainement pas de lui mettre une bonne note si c'est mal écrit.
Je trouve que c'est la meilleure solution. L'évaluer sur autre chose.
Mettre une mauvaise note à son récit autobiographique serait à mon sens d'une grande violence, parce que même s'il est vrai qu'il a été indiqué aux élèves qu'ils pouvaient inventer (ce que souvent à cet âge ils considèrent comme mentir dans ce contexte) et même s'ils l'ont compris en théorie, il n'en reste pas moins que ce type d'exercice les invite, les incite, à se livrer, et que non, pour m’être battue sur ce sujet avec ma fille, ils n'arrivent pas toujours à comprendre réellement ce qu'on y note ni pourquoi leur expérience de vie reçoit une mauvaise note, même quand le prof a pris toutes les précautions pour l'expliquer et pour leur dire qu'ils n'étaient pas obligés de dire la vérité. Mais toutes les précautions ne sont en réalité pas prises par le sujet même, sans quoi, si on voulait s'éviter que l'enfant raconte sa vie et y mette ses tripes, ce qui peut l'amener à négliger la forme, on lui demanderait de se mettre dans la peau d'un personnage et de faire l'autobiographie de ce personnage, pas la sienne, même romancée.
Cet exercice me semble relever de l'injonction paradoxale : raconte ta vie mais ne la raconte pas, invente, mais pas n'importe quoi, parce qu'on cherchera à l'interpréter et à renvoyer l'invention au réel qu'elle cache, confie-toi sous couvert de protection de la littérature mais avec des conséquences dans le réel si tu le fais. Ça brouille inévitablement les pistes dans la tête de l'enfant et dans la réception de la note.
C'est exactement ça : une injonction paradoxale. Cela fait que je traite cet objet d'étude à la fois avec des textes d'auteurs, et dans l'écriture je demande aux élèves l'élaboration d'un livret autobiographique avec dix textes rédigés " à la manière de" ( Rousseau, Pérec, Leiris...). Ils ont le droit de ne pas écrire deux textes sur les dix si les sujets les gênent. Je m'efforce ainsi de respecter les contours de leur intimité. En procédant de cette façon j'ai moins l'impression d'être intrusive.
Mais je sais bien que c'est loin d'être parfait.
- zigmag17Guide spirituel
NanouV a écrit:J'ajoute que je trouverais extrêmement malsain de donner une bonne note par compassion.
Je note une copie, pas une personne. Je note en fonction de critères essentiellement linguistiques. Ma note n'a pas pour but de faire plaisir, de même qu'elle est pas là pour punir.
Je pense que sortir de ce cadre nous fait prendre le risque d'ouvrir la porte aux pensées les plus malsaines. Certains élèves (une minorité, heureusement) pourraient être tentés de mentir et de s'inventer un passé poignant uniquement pour attendrir les professeurs et augmenter leur moyenne.
Je me souviens, par exemple, avec un certain agacement, de ce petit chou de 4ème qui allait voir ses enseignants pour leur conter le terrible assassinat de son oncle sous ses yeux chaque fois qu'il souhaitait échapper à une évaluation ou négocier une note...
Les parents ont relativisé le mensonge en reconnaissant l'imagination débordante de leur petit cœur d'amour...
Tout à fait d'accord là-dessus.
- lene75Prophète
Zoé a écrit:Baldred a écrit:Voltaire a écrit:Il me semble risqué de demander un souvenir d'enfance, on peut évidemment obtenir ce qui s'est produit, un souvenir traumatique (et on n'est pas professionnels de la psychologie pour savoir comment réagir, sans compter que pour l'élève qui fournit ce souvenir, ce n'est certainement pas que de la littérature). Ne peut on se prémunir (et protéger aussi les élèves) en faisant ce que faisaient astucieusement mes professeurs en demandant un souvenir "réel ou imaginaire, d'un évènement positif ou amusant" ?
Poser des questions intimes (ou qui peuvent être perçues comme telles), il me semble que ce n'est pas la fonction de l'école, que fait-on des réponses ? Mais d'un autre côté, offrir une possibilité d'expression aux élèves est précieux aussi. Mais hors cadre de l'évaluation, alors. Un élève de 2nde à qui je demandais dans la fiche rentrée, comme PP, ce qu'il avait appris au collège, avait répondu franchement "que je veux mourir". Merci à l'infirmière scolaire qui a pris l'élève en charge en toute discrétion suite à ma demande, et a certainement évité une catastrophe.
Je partage ton avis. Je n'ai fait l'erreur du récit du souvenir d'enfance qu'une fois en début de carrière avec le même type de témoignage que celui rapporté par @Tournesol. Depuis, je balise beaucoup plus le récit autobiographique, d'abord en faisant réfléchir les élèves sur le vrai, le vraisemblable, l'intime, le privé, le public. Ensuite en proposant de sujets plus guidés, en général tirés de Rousseau du type "triomphe et infortune" qui privilégie une vision distanciée, voire humoristique de son passé.
Mais ce n'est pas si simple, et malgré cela j'ai reçu des "confessions" glaçantes dans des sujets a priori anodins et éloignés de l'autobiographie.
Il est difficile, voire contradictoire d'enseigner la puissance du récit, de l'écriture avec sincérité et de ne pas recevoir en retour des témoignages qui nous saisissent. Dans le cas cité, il s'agit de revivre par l'écriture ou de témoigner d'un drame, que pouvons-nous faire d'autre que l'accueillir ? @Zigmag17 parle avec raison de récit cathartique.
D'autres récits relèvent du secret dévoilé : viols, incestes, maltraitances, désirs de morts que nous ne sollicitons évidemment pas mais que des élèves de manière parfois explosives, parfois furtives transmettent par l'écriture et dont ne ne devons pas rester les destinataires mais les accompagnateurs vers les spécialistes.
Je suis souvent stupéfait de la force, des ressources dont certains élèves font preuve pour aller chercher l'aide dont ils ont besoin, et très inquiet quand je sais que la majorité n'enverront que des signes imperceptibles, et le plus souvent aucun signe du tout.
Le sujet n'est pas le problème. Sinon, autant supprimer : "raconter un souvenir de vacances" au primaire.
J'y serais tout à fait favorable. D'autant qu'en plus là ça génère de la jalousie entre enfants.
Que des enfants se livrent sur n'importe quel sujet parce qu'ils en ont envie ou besoin, c'est une chose, mais ces sujets qui les invitent à le faire, pour des enfants qui peuvent avoir du mal à comprendre qu'ils ont la droit d'inventer, sont de fait une intrusion dans la vie privée des familles et dans l'intimité des enfants. Ou alors on conçoit l'exercice comme un travail social nécessaire, mais il faut être au clair là-dessus. Là il me semble, notamment en l’évaluant, qu'il y a un mélange des genres.
- NanouVNiveau 6
C'est pour ça que je fais toujours une longue mise au point avec mes troisièmes.
Je leur dis et leur répète qu'ils n'ont pas besoin de me raconter leur vie, que de toute façon je ne m'amuserais jamais à enquêter pour vérifier la véracité de telle ou telle déclaration et qu'en tant que professeure de français, j'évalue leur niveau de français. Rien d'autre.
Ils le comprennent très bien.
Maintenant, ce sont (en théorie) des grands, et je ne sais pas comment font les collègues du primaire pour éviter les débordements ou les incompréhensions.
Je leur dis et leur répète qu'ils n'ont pas besoin de me raconter leur vie, que de toute façon je ne m'amuserais jamais à enquêter pour vérifier la véracité de telle ou telle déclaration et qu'en tant que professeure de français, j'évalue leur niveau de français. Rien d'autre.
Ils le comprennent très bien.
Maintenant, ce sont (en théorie) des grands, et je ne sais pas comment font les collègues du primaire pour éviter les débordements ou les incompréhensions.
- zigmag17Guide spirituel
NanouV a écrit:C'est pour ça que je fais toujours une longue mise au point avec mes troisièmes.
Je leur dis et leur répète qu'ils n'ont pas besoin de me raconter leur vie, que de toute façon je ne m'amuserais jamais à enquêter pour vérifier la véracité de telle ou telle déclaration et qu'en tant que professeure de français, j'évalue leur niveau de français. Rien d'autre.
Ils le comprennent très bien.
Maintenant, ce sont (en théorie) des grands, et je ne sais pas comment font les collègues du primaire pour éviter les débordements ou les incompréhensions.
Je fais exactement comme toi. Mêmes réactions des élèves.
- AsarteLilithEsprit sacré
Pareil. Et autant parfois j'ai des choses qui font que je vais voir l'infirmière, parfois c'est très classique.
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Chuis comme les plantes sans eau : sans grec ni latin, j'me dessèche.
ON DIT CHOCOLATINE, PHILISTINS !
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