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NLM76
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par NLM76 Jeu 23 Déc 2021, 12:21
Évidemment, la qualité de ce qui est à apprendre est essentielle ; mais plus ça va, plus j'ai le sentiment que la quantité va de pair avec la qualité. Autrement dit, pour qu'il y ait qualité, il faut qu'il y ait qualité.
Je pense à cela du fait du jeu "engranger des vers" (dans la partie restreinte du forum), et donc aux capacités de mémorisation qui sont pratiquement exponentielles : plus on apprend, et plus on peut apprendre, du fait des liens et des connexions que peuvent s'établir... à condition évidemment de cogiter ce qu'on apprend.
J'y pense aussi à cause de la pédagogie du latin : je vois bien que quand je fais apprendre peu, c'est mal appris. Il faut faire apprendre suffisamment en quantité (des choses organisées logiquement), pour obliger à créer des liens.
J'y pense aussi à cause de Rabelais, qui montre bien que l'éducation sophistico-théologo-sorbonagriste fait apprendre non seulement des âneries, mais encore très peu de choses (Gargantua apprend son alphabet en plusieurs années), alors que l'éducation humaniste prétend à une masse immense de savoir - et ce n'est pas essentiellement une parodie ! contrairement à ce qu'affirment certains.
Autrement dit, j'ai le sentiment qu'en matière enseignement, sans l'ambition encyclopédiste, on n'arrive à rien.
egomet
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par egomet Mar 28 Déc 2021, 04:42
Oui, c'est évident qu'il y a une masse critique à apprendre dans un temps donné, tant d'un point de vue cognitif que d'un point de vue utilitaire.

Tu résumes bien le problème cognitif. Pour mémoriser quoi que ce soit, on a besoin de faire des liens avec des savoirs existants. Si l'on n'a pas assez de références, on n'a rien à quoi raccrocher les nouvelles leçons. Le problème est bien connu (quelle que soit la doctrine pédagogique à laquelle on se réfère). Et bien sûr il faut arriver à introduire les nouveaux concepts à un rythme qui ne soit ni trop rapide pour éviter la surcharge, ni trop lent pour éviter d'oublier plus vite qu'on n'apprend. Idéalement, il faut réactiver les concepts au bout d'un jour ou deux. Si on attend une semaine, c'est déjà trop. Quant au nombre de mots nouveaux, pour une matière donnée, c'est un peu plus délicat à évaluer. Mais, à la louche, si l'on considère la nécessité de rappeler les mots précédemment acquis, 5 à 10 mots nouveaux par séance sont bien suffisants (mais 20, 30, 50 mots réactivés). Après, tout dépend de la cohérence des séries à apprendre. Et je suppose des séances quotidiennes.

J'ajouterai qu'il faut avoir les idées claires quant au niveau de maîtrise à atteindre et que dans bien des cas, le seul niveau acceptable, c'est bel et bien l'automatisme. Et l'automatisme dans une situation aussi proche que possible de la réalité. Si l'on doit réciter ses conjugaisons dans sa tête, on n'est pas près de faire une phrase complète. Ce qui n'est pas su par cœur n'est pas utilisable.

Pour le latin, malheureusement, je dois dire que le nombre d'heures qui y sont consacrées est insuffisant pour espérer atteindre la masse critique. La matière a rejoint les matières inutiles, dessin, musique etc. Inutiles parce qu'insuffisamment enseignées, j'entends. Il n'y a pas de matière inutile en soi. C'est une pitié de voir qu'après 4 ans de musique au collège, les adolescents disent qu'ils ne savent pas chanter, ni jouer d'un instrument, ni déchiffrer une partition. Quel est le sens de cet enseignement? Je pense que choisir une matière (dessin OU musique) et l'enseigner vraiment (4 heures par semaine) serait beaucoup plus satisfaisant pour tout le monde que de faire un peu de tout, mais mal. On peut toujours discuter sur les objectifs, mais une fois qu'on a des objectifs, il faut se donner les moyens. Pour les langues, 1 heure par jour, ce serait le minimum, quitte à devoir choisir ou quitte à devoir apprendre les langues les unes après les autres.

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par Tangleding Mar 28 Déc 2021, 06:44
Je ne suis pas sûr d'être en adéquation avec ces principes, non seulement en théorie, mais dans ma pratique même - ma théorie procédant presque intégralement de ma pratique, il est vrai.

Je trouve que le rythme d'apprentissage est trop élevé en français, pour les élèves qui n'ont souvent pas les bases, et ils sont très nombreux au collège, trop nombreux.

En une heure de cours, je leur apprends peu de notions nouvelles, il me faut plusieurs heures pour déplier (déployer) le sens d'un texte avec une classe de façon assez riche pour que ce travail ait un sens, un intérêt, de mon point de vue.

Qu'ont-ils appris de nouveau en 1h de mon cours ? Pas grand chose, surtout ramené à l'échelle de chaque individu. Pourtant ils ont découvert des choses qu'ils ne soupçonnaient que confusément à la première lecture, sans pouvoir les "mettre en mots" au départ.

Et au terme d'un trimestre, j'observe des progrès fulgurants de mes 6e pour qui la démarche d'analyse est totalement nouvelle. C'est particulièrement vrai pour les élèves qui ont déjà de bonnes bases (vocabulaire, maîtrise de la syntaxe élémentaire ou approfondie). Mais avec un trimestre de plus, une tranche d'élèves consciencieux et moins "doués", ou avec pas mal de lacunes (mais pas trop), progresse également et finalement davantage car ils ont appris à faire ce qu'ils ne savaient faire, quand les premiers ont découvert la formalisation explicite d'opérations mentales qu'ils réalisaient déjà intuitivement en lisant (mais des textes infiniment moins riches, l'occasion est donc plus rare, et les liens plus grossiers).

Du coup j'ai l'impression que l'essentiel de mon apport est de mettre mes élèves au contact de textes littéraires, et d'entraîner mes élèves à leur (les textes) faire dire le maximum de ce qu'ils disent, les entraîner à analyser le tissu des textes, pour découvrir le maximum de relations de sens, et notamment les faire accéder à la dimension symbolique et métalitteraire des textes qui en sont pourvus (contrairement à ceux qu'ils lisent par eux-mêmes)

Si je n'avais qu'une heure de cours par semaine je n'arriverais à rien. Heureusement j'en ai 4h ou un peu plus. Mais je ne cracherais pas sur plus d'heures de cours car il m'en faudrait facilement moitié plus de mon point de vue pour pouvoir traiter le programme de littérature tel qu'il est défini. Je n'ai pas le sentiment de pouvoir aller plus vite en embarquant autant que possible toute la classe - élèves à la ramasse totale y compris.

Certes en améliorant ma technique de conduite de la classe, en hiérarchisant mieux en amont les opérations, je pourrais avancer plus vite que je ne fais pour les élèves qui comprennent ce qu'ils lisent et ce qu'on fait. Mais je n'ai pas l'impression que je pourrais aller plus vite pour les autres, si ce n'est qu'ils comprendraient mieux au bout d'une heure la nature du travail qui leur est demandé (ce qui serait déjà beaucoup, indépendamment de leur capacité à le faire dans un premier temps, même si ça contribuerait à les rapprocher beaucoup de cette capacité qu'ils n'ont pas à ce stade).

Bref je ne suis pas demandeur de plus de contenus prescrits, si c'est le sens du questionnement de ce fil.

D'un autre côté je perçois bien la cohérence et la pertinence du raisonnement en apparence paradoxal qui y est développé. Et j'y souscris même d'un point de vue théorique, mais en pratique je peine vraiment à m'y ranger.

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par NLM76 Mer 29 Déc 2021, 11:18
Alors; il faut réfléchir à ce qu'il en est quand tu as un objectif d'analyse littéraire. Mais je pense à la question de la maîtrise de la langue : vocabulaire, grammaire, conjugaison, orthographe... Je pense aussi à la culture acquise (connaissance des textes et des œuvres).
Un autre corrélat de cette affaire : je me dis qu'il est bon d'avoir vraiment un objectif gradué type notation sur 20, où 10/20 = acceptable, 12/20 = ab, etc. En effet, en proposant un objectif qui va au-delà de ce qui est nécessaire pour pouvoir poursuivre la progression, on donne les moyens au pus grand nombre d'avoir les moyens de poursuivre. (Je vis 14/20, et j'ai 10/20 ⇒ j'ai les moyens de continuer. Tout le monde vise 10/20 ⇒ presque personne n'a une maîtrise suffisante des bases pour continuer). Il s'agit à la fois de motivation et d'émulation, et à la fois d'avoir appris plus que nécessaire, pour que ce qui est appris "approximativement" (en fait enfoui dans la mémoire), soutienne ce qui est appris de façon plus précise, plus consciente ET plus automatique (en fait ce qui est automatisé se répartit entre ce qui est appris très fermement et ce qui est appris plus spectralement).

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par Flo44 Mer 29 Déc 2021, 11:48
Je suis aussi d'avis qu'en renonçant à trop d'apprentissages, on prive les élèves de la capacité de comprendre ce qu'ils font, et qu'ils se retrouvent avec des savoirs disparates et inutilisables.
Néanmoins, les heures de cours sont limitées, et il est également nécessaire de revenir plusieurs fois sur chaque notion si on veut qu'elle s'ancre à long terme.
Je trouve qu'il est difficile de trouver une bonne solution à cette équation.
Au début de ma courte carrière, j'essayais d'aller assez lentement pour qu'une notion soit bien assimilée avant de passer à la suivante. Cela posait deux problèmes : les élèves qui comprennent et retiennent tout du premier coup s'ennuyaient, et certains, quoi qu'on fasse, n'y arrivaient pas. Depuis je passe plus vite à la suivante, puis reviens sans cesse sur les notions de début de chapitre. Problèmes restants : les dernières notions de la séquence sont les moins bien apprises (même si j'essaie de faire des révisions sur la séquence suivante), et cela va trop vite pour certains...
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par Ponocrates Mer 29 Déc 2021, 13:02
Il y a un autre aspect : nous ne pouvons jamais savoir ce que les élèves vont retenir. Dans une même classe, un élève A va se saisir de tel ou tel point alors que B en retiendra d'autres. Et ce n'est pas une question de niveau de A ou de B.
Plus l'on voit de choses, plus l'on a de chances qu'ils retiennent des éléments. Mais la répétition est également nécessaire parce que nous ignorons également quand se fera le déclic qui permettra à A ou à B d' '" apprendre" ce que collectivement nous avons répété.
Je ne suis pas spécialiste des sciences de l'éducation- autrement que par ma pratique- mais je crois vraiment que pour l'individu il y a des fenêtres d'apprentissage, un moment où telle chose va enfin rentrer dans la caboche, une conjonction de la compréhension de l'élément avec la conscience de son importance ( qui motive l'apprentissage) et de l'acceptation du petit effort pour graver. Et de mon expérience en tant qu'enseignant nous n'avons pas vraiment de prise sur ce mécanisme : nous présentons, nous répétons, faisons répéter...

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par Iphigénie Mer 29 Déc 2021, 14:56
Je pense pour ma part, qu'une partie du problème vient de ce que l'on "mâche" beaucoup trop le savoir aux élèves, en se sentant également obligés chaque année de reprendre tout à la base:( personnellement j'ai radicalement changé ma façon de faire quand j'ai mesuré, en suivant mes enfants en collège, tout ce que les élèves y ont déjà vu et qui est donc supposé su au lycée.) en rabâchant, on endort les élèves dans une douce routine: si ce n'est pas acquis, ce n'est pas grave, on le reverra plus tard (doctrine d'ailleurs encouragé un temps, peut être encore par certains inspecteurs): eh bien non. Si ça a été vu, c'est exigible.: et inversement si on n'exige jamais, ce ne sera jamais su.

sinon j'aimerais bien, si c'est possible un (petit) exemple concret de ce que Tangleding appelle la démarche d'analyse littéraire en sixième: j'ai du mal à comprendre de quoi il s'agit.
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par Invité Mer 29 Déc 2021, 17:04
Iphigénie a écrit:Je pense pour ma part, qu'une partie du problème vient de ce que l'on "mâche" beaucoup trop le savoir aux élèves, en se sentant également obligés chaque année de reprendre tout à la base:( personnellement j'ai radicalement changé ma façon de faire quand j'ai mesuré, en suivant mes enfants en collège, tout ce que les élèves y ont déjà vu et qui est donc supposé su au lycée.) en rabâchant, on endort les élèves dans une douce routine: si ce n'est pas acquis, ce n'est pas grave, on le reverra plus tard (doctrine d'ailleurs encouragé un temps, peut être encore par certains inspecteurs): eh bien non. Si ça a été vu, c'est exigible.: et inversement si on n'exige jamais, ce ne sera jamais su.
+1
Un ancien élève "sérieux" m'avait raconté une fois que lorsqu'il s'était rendu compte que les choses allaient être refaites d'année en année il avait arrêté d'apprendre. Malgré ces "efforts" pour ne pas trop retenir il a continué à s'ennuyer encore et encore pendant ces moments de révision.
Enfin, même en étant consciente du problème j'ai du mal au quotidien à éviter de revenir sur ce qui a été vu car quand je le fais j'ai l'impression de larguer tout le monde.
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par Tangleding Mer 29 Déc 2021, 18:15
@Iphigénie : j'ai l'impression que cet échange se reproduit régulièrement, ah ah... Tu veux un exemple d'analyse développée par un-e de mes élèves de 6e en autonomie dans un devoir ? Ou un exemple de ce qui "sort" en cours, lorsqu'on travaille ensemble sur un texte ?

En attendant je peux déjà en partie répondre d'un point de vue théorique : ce que j'entends par analyse littéraire en 6e, c'est exactement la même chose qu'au lycée, mais avec un accompagnement plus fort et un rythme soutenable. Mais fondamentalement, c'est le fait d'analyser un procédé d'écriture ou de composition, afin de justifier une interprétation.


Un exemple en spoiler (tiré d'un cours effectif avant les vacances), sur un extrait de l'Odyssée (voir PJ) :

Spoiler:
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par Tangleding Mer 29 Déc 2021, 19:36
@nlm76 : Peux-tu expliciter ceci :

Alors; il faut réfléchir à ce qu'il en est quand tu as un objectif d'analyse littéraire.

Pour la langue, il nous faudrait avoir suffisamment d'heures de français pour y consacrer 2h par semaine, plus 1h par semaine en demi-groupe pour la rédaction.

Et avoir 4 ou 5h par semaine pour la lecture et l'étude de textes (et d'OI).

Actuellement avec ma 6e j'ai 5h par semaine dont 1h en demi groupe, prise sur la marge.

En 5e j'ai 4h30 par semaine, sans aucun temps en demi-groupe.

Le problème c'est que les programmes sont assez peu compatibles avec le volume horaire. Même en imaginant aucune heure perdue ce serait impossible. Avec le volant d'heures que je perds (et même si je prends des RCD pour limiter la casse), c'est du délire complet de mon point de vue.

Mon sentiment est que la quantité de choses à apprendre dépend beaucoup du volume horaire et du volume général du programme du niveau. Il faut une bonne adéquation. En français en collège, sachant qu'il y a la langue et la littérature, le volume horaire est insuffisant. Et l'heure hebdomadaire en demi-groupe devrait être la norme en 6e et 5e, non seulement en français mais aussi en Histoire et géographie.

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par NLM76 Jeu 30 Déc 2021, 07:30
Je visualise moins la "quantité" de choses à apprendre pour ce qui est de l'analyse littéraire.

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par Iphigénie Jeu 30 Déc 2021, 10:58
Tangleding a écrit:@Iphigénie : j'ai l'impression que cet échange se reproduit régulièrement, ah ah... Tu veux un exemple d'analyse développée par un-e de mes élèves de 6e en autonomie dans un devoir ? Ou un exemple de ce qui "sort" en cours, lorsqu'on travaille ensemble sur un texte ?

En attendant je peux déjà en partie répondre d'un point de vue théorique : ce que j'entends par analyse littéraire en 6e, c'est exactement la même chose qu'au lycée, mais avec un accompagnement plus fort et un rythme soutenable. Mais fondamentalement, c'est le fait d'analyser un procédé d'écriture ou de composition, afin de justifier une interprétation.


Un exemple en spoiler (tiré d'un cours effectif avant les vacances), sur un extrait de l'Odyssée (voir PJ) :

Spoiler:

tout d'abord merci d'avoir pris la peine de montrer ta démarche. Je ne sais pas si on te demande de justifier ton propos, pour ma part je ne voulais pas une justification mais juste un éclairage: je n'ai plus de sixième depuis longtemps mais je ne crois pas que je faisais avec eux de l'analyse littéraire réellement, c'est pour cela que tu m'étonnais: ce n'est évidemment pas une attaque, juste une discussion, sur des pratiques visiblement différentes).
C'est effectivement entre nous une ligne de faille (sans doute modernes versus classiques): je serais arrivée au même résultat évidemment et heureusement! (Ulysse se met ici"à hauteur" d'Alkinoos pour pouvoir lui parler), mais je ne serais personnellement pas partie du tout sur le palindrome de "mon nom", (surtout en 6e, car pour moi ce n'est pas un "savoir"nécessaire et surtout parce que je n'y aurais certainement pas pensé ).

Avec l'intelligence collective d'une classe de 6e, cela débouche sur des interprétations intéressantes : on arrive sans peine à l'idée que le nom d'Ulysse est à ce moment de son odyssée tout ce qu'il possède (avec sa science discursive) et la clef qui lui permettra de recouvrer toutes ses autres possessions, qu'il décline dans le second mouvement de l'extrait. C'est aussi la clef dans cet extrait car c'est en s'établissant comme l'hôte égal d'Alcinoos qu'Ulysse sollicite habilement l'aide extraordinaire du roi des Phéaciens.

Je serais beaucoup plus simplement et artisanalement partie de l'explication qu'en Grèce antique, l'identité se décline par le nom (le clan, le genos) et le lieu d'origine: que l'on n'y existe pas comme individu mais par son appartenance au clan et au pays (d'où la terreur du bannissement et de l'exil sur les routes comme pour Oedipe, qui n'est plus digne d'appartenir à aucun "genos") .
Que quand un étranger arrive, on lui pose, comme le fait Alkinoos, la question rituelle: "quel est ton nom (plus souvent: ton"genos" et quel est ton pays" (on voit ça encore dans les dialogues de Platon). Et qu'il est très important pour Ulysse de montrer qu'il a une famille et un pays et qu'il n'est pas un mendiant errant ou pire un banni.
Mais je suis bien consciente que ce faisant, je raconte une histoire et je ne fais pas d'analyse littéraire. Personnellement (mais cela ne veut pas dire que j'ai raison) je préfère en sixième développer leur goût des histoires, et leur sensibilité brute face au récit, plutôt que les outils littéraires du commentaire, qui selon moi vient bien après ce développement. Mais si tu parviens ainsi à captiver tes élèves c'est que c'est certainement bien.
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par Tangleding Jeu 30 Déc 2021, 12:50
@nlm76 : j'ai tendance à penser que dans ce domaine, l'analyse littéraire, il y a relativement peu de choses à apprendre et tout à comprendre. Chaque analyse de texte est un nouvel entraînement. Dans les faits, on peut faire une analyse solide jusqu'au bac en ne connaissant qu'un stock tout à fait modeste de procédés d'écriture.

L'index du "128" Les Figures de style de Catherine Fromilhague recense 94 figures de style. Au sein de ce corpus, j'ai dénombré 25 figures de style couramment analysées en collège et même en lycée. Et encore, en réalité c'est plutôt 22 figures de style car le chiasme, la métonymie et la prosopopée sont assez rares, et peuvent être rapprochées schématiquement d'autres figures de style plus courantes. [EDIT: Il faut ajouter les procédés spécifiques au théâtre et ce qui relève de la prosodie/versification en vérité, mais bon ça ne fait jamais qu'une bonne trentaine de procédés en tout de la 6e à la 1re.]


Pis encore, en collège l'examen terminal, le DNB ne demande jamais de nommer les procédés, juste de les reconnaître et de les analyser (je trouve que c'est un tort, la rigueur est une compétence utile et mince à la fin, les collégiens peuvent bien mémoriser 22 procédés avec l'orthographe correcte). En lycée j'ai déjà été mis en cause par mes élèves parce que, avec M. ou Mme Tartempion en 2de B, ils ont vu une fiche avec 80 figures de style (et moi je ne leur ai donné aucune fiche, vilain que je suis...). D'ailleurs j'ai pris l'habitude, en collège mais je ferais de même en lycée, de leur montrer ce 128 et de le faire circuler pour court circuiter cette angoisse du nombre de figures de style. Les élèves regardent l'index, refont les comptes, c'est amusant. Je l'apporte aussi aux plénières de rentrée pour rassurer les parents.

Une de mes collègues de lettres compte le vocabulaire technique (nom des figures de style) en points bonus au moins pour ses 6e. J'approuve assez.

Bref l'essentiel en analyse de textes c'est de faire ses gammes, de comprendre la démarche (puisque le mot méthode est honni... Wink )

@Iphigénie : Je ne voulais pas être polémique, et je ne t'accusais pas de l'être. C'est un étonnement car j'ai le sentiment de réexpliquer régulièrement ce que j'entends par analyse littéraire, et ce dont il s'agit en collège (ou ici en 6e).

Il est certain que je suis un pur LM, je n'ai fait du latin que jusqu'en licence, et jamais de grec. Mes connaissances sur la civilisation grecque sont étiques et manquent de rigueur. Dans l'absolu j'ai tendance à penser que le cursus LM et le cursus LC devraient être davantage communs en ce qui concerne l'aspect "civilisation et culture antiques". En fait un bon professeur de lettres, même de lettres modernes, devrait avoir eu des cours d'histoire antique au niveau post bac. Mais je ne peux pas réécrire mon parcours étudiant, au demeurant peu glorieux.

Et d'ailleurs je te remercie pour les éléments de "civi" de ton message, cela m'est utile, j'en manque, au sens où je n'en ai qu'une connaissance confuse, manquant de rigueur, ce qui m'entrave et me fait perdre en efficience lorsque je fais étudier des oeuvres antiques. J'essaie de me mettre à jour mais cela reste du bricolage, cela ne me satisfait pas.

Pour revenir à l'analyse, j'ai pris un exemple un peu extrême, volontairement, non pour impressionner la galerie, d'autant que comme je l'ai dit, j'ai étudié ce même extrait l'an dernier, avec deux 6e de combat, et sans remarquer alors ce palindrome. Mais c'est un exemple un peu emblématique car typiquement je suis tout à fait conscient que cette notion (qu'une 6e connaissait du primaire) est hautement dispensable en 6e et cela n'a pas constitué un objectif de la séance. Par contre la démarche d'analyse est la même que pour une "vulgaire" métaphore ou comparaison, au sens où ce qui importe n'est pas la reconnaissance du procédé pour lui-même, mais bien la capacité d'analyse au service de l'interprétation (de la "construction du sens", comme on dit).

Mais l'exemple le plus "parlant" (surtout pour les non spécialistes, les parents et les élèves !) c'est les tropes. En particulier métaphore et comparaison, pour les premières occurrences en contexte (je n'étudie jamais les figures de style hors étude de texte), je leur fais un schéma avec un cercle pour le comparé, un cercle pour le comparant, et la jonction comme élément commun aux deux. Puis je formalise la méthode d'analyse comme un boeuf : Comparé = ... / Comparant = ... / Point commun = ... / et enfin, le plus important : "Ce que le comparant apporte au comparé = ..." Et là je veux quelque chose de spécifique à CETTE comparaison/métaphore, pas une phrase qui "marche" pour toute métaphore. Je veux ce que CE comparant apporte à CE comparé dans CE TEXTE...

Ca pour le coup c'est tellement formalisé que ça rassure les plus faibles, et ensuite il suffit de pratiquer, et ça finit par être compris.

J'entends l'idée que les 6e peuvent s'intéresser aux histoires, sans analyse. Mais ce qui me gêne c'est qu'à un moment il faut bien introduire à l'analyse sachant que les évaluations, notamment le DNB c'est de l'analyse. Et en outre, en lycée ça va être considéré comme acquis et pas mal de collègues en lycée n'ont pas l'air de comprendre que non en collège, on ne leur apprend pas à faire même un demi-commentaire, cela doit s'apprendre en 2de et ce n'est pas exigible à mon avis des 2ndes au 1er trimestre (désolé pour les collègues en lycée, mais j'ai vu faire).

En outre je me méfie de toute séparation 6e / 5e à cause du projet d'école du socle (et le cycle 3 à cheval sur école et collège en est un exemple). Et de facto un professeur de français en collège a la même qualification qu'un professeur de lettres en lycée, et cela me semble justifié.

En 6e les élèves sont assez malléables intellectuellement, je trouve que c'est bien de les initier sans attendre plus tard, leur apprendre à prendre le pli (qui n'est pas une approche techniciste, je pense que l'exemple donné le montre bien).

J'ai même la faiblesse de penser que les programmes de CM1 et CM2 devraient accorder déjà une place aux textes littéraires et à la démarche d'analyse. A faible dose pour l'analyse. Mais donner plus de place aux textes littéraires dans le 1er degré me semble essentiel (pas au détriment de l'étude de la langue, je le précise).

Enfin l'analyse est en soi un élément de "différenciation", et ça intéresse les élèves. Ca permet de nourrir aussi les élèves ayant un très bon niveau, qui s'ennuient quand même pas mal sans cela du fait de l’hétérogénéité, si on se contente d'établir un tableau "adjuvants/ opposants" d'Ulysse (même en faisant observer que certains dieux jouent sur les deux tableaux... )

Bref je pense que l'analyse a sa place en collège et dès la 6e, mais bien sûr à un rythme raisonnable.

PS : le clavier de mon vieux portable débloque, plusieurs lettres ne fonctionnent quasiment plus. L'achat d'un nouvel ordinateur devient urgent. Désolé si des lettres manquent dans mon message. Je corrige avec le correcteur automatique autant que possible.

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par Iphigénie Jeu 30 Déc 2021, 13:42
Je comprends ta démarche, ce n'a jamais été la mienne: on ne va pas repartir sur le débat autour des figures de style..!
Pour ma part, même en lycée, j'ai toujours dit, je l'avoue, à mes élèves de ne pas perdre leur temps à la veille du bac, comme j'en voyais certains, en apprenant par coeur des listes de figures trouvées sur internet, que cela ne servait à rien et que l'essentiel était d'être capable de bien "sentir" un texte: le reste n'est jamais que description voire source de contresens si on voit la figure mais pas le sens (d'où ma méfiance pour l'"outil" des fig.).
J'appartiens il est vrai à une génération où la première liste de figures de style a dû m'être distribuée en licence...
Ce qui ne veut pas dire que nous n'analysions pas ni d'ailleurs que mes meilleurs élèves ne faisaient pas d'excellents commentaires. Mais c'est sans doute de moins en moins vrai.

Sur le débat analyse versus lecture en 6e, je reste persuadée que l'essentiel est de donner sens et plaisir à leurs lectures: le public a changé, c'est sans doute de plus en plus compliqué. Peut-être certains élèves s'y retrouvent-ils mieux avec des outils, mais personnellement, je trouve cette vision de la littérature très desséchante: il me semble qu'on prend plus de plaisir (enfin qu'on prenait) à lire Le comte de Monte-Cristo qu'à lire les exercices de style de Queneau. Mais bon, question de génération sans doute.
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par Tangleding Jeu 30 Déc 2021, 14:07
Apprendre des listes de figures de style n'a aucun intérêt de mon point de vue. Je ne sais pas si c'est beaucoup pratiqué par la profession. Trop à mon goût.

L'analyse doit permettre d'accéder à un surcroît d'intérêt du texte littéraire. Je ne considère pas qu'il faille opposer lecture et analyse. Quand je lis un texte littéraire, j'effectue ce travail d'analyse de façon automatisée, à la volée, sans rédiger un commentaire de texte. L'exercice formel n'est qu'une forme scolaire de communication de l'analyse. Mais l'essentiel c'est bien l'interprétation qui découle de l'analyse, que celle-ci soit effectuée "à la volée" ou par le truchement d'un exercice scolaire (commentaire, étude linéaire...)

En tout cas dans ma pratique, les élèves n'ont jamais été dégoûtés d'une oeuvre à cause de l'analyse que nous en faisions. Sauf quand on s'enlise dans une OI, ce qui peut arriver. Auquel cas c'est mon échec, pas la condamnation de l'analyse.

Mais je te retourne la question : quel est l'intérêt de l'analyse au lycée selon toi @Iphigénie ?

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par Iphigénie Jeu 30 Déc 2021, 14:23
Si la démarche te convient et convient à tes élèves tu aurais tort d'en changer!
Pour ta question:
Ah! mais au lycée on parle (toujours selon moi) d'autre chose qu'en sixième (pour moi ce n'est pas du tout le même travail: en collège, selon moi l'essentiel est de donner le goût de la lecture, avec les quelques outils vraiment indispensables à la bonne compréhension, peut-être plus essentiellement syntaxiques et sémantiques d'ailleurs que stylistiques à proprement dit)!.. Au lycée, on est plus engagé dans la spécificité littéraire, et je ne pense pas que j'y voie autre chose que toi: voir comment le texte est écrit, pour mieux comprendre, en finesse,  ce qui est écrit (ou pas...), en somme.
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par Tangleding Jeu 30 Déc 2021, 15:05
Merci pour l'exemple, de Giraudoux, intéressant. Cela donne envie de le lire.

Je me méfie des implications politiques possibles de formules comme : "pas le même travail en collège et en lycée pour un professeur de lettres". C'est le même travail avec des spécificités dans un cas comme dans l'autre. Mais on travaille sur le même matériau (des textes littéraires) et cela requiert les mêmes qualifications. Il reste la question de l'enseignement de la langue, qui prend plus de place en collège, mais la tendance est de tenter de lui faire une place en lycée.

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par Iphigénie Jeu 30 Déc 2021, 15:08
J'aurais surement dû dire plutôt pas la même graduation en effet: c'est le même travail, tout aussi exigeant et complexe, qui demande des adaptations différentes, (enfin selon moi.)
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par Tangleding Jeu 30 Déc 2021, 15:20
Je suis d'accord.

Et je n'ai jamais demandé à des collégiens de faire un commentaire de texte. Par contre j'exige dès la 6e qu'ils développent leurs réponses, qu'ils les nourrissent d'analyses. Ce que je leur apprends à faire, bien entendu.

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par NLM76 Jeu 30 Déc 2021, 19:54
Par exemple, je pense à une procédure que j'induis dans mon Libellus de latin. Dans les exercices, il faut à chaque fois aller chercher dans le lexique les mots à utiliser, si on ne les a pas encore fixés dans la mémoire. Le processus de recherche et de repérage est important et utile pour la mémorisation. Mais en allant chercher un seul mot à la fois, on ne fait fonctionner que la mémoire de travail; en plus il est quasi impossible de les convaincre d'écrire sur leur cahier le mot, sa construction et ses traductions à chaque fois. [Maintenant, je pourrais peut⁻être plus convaincant.]
De ce fait, je me demande si je ne vais pas mettre, avant une série d'exercices, en tête, la liste des mots à utiliser dans les exercices (sans traduction), en demandant d'aller les chercher dans le lexique, et de les recopier en préalable. Voire de les apprendre une première fois ? Il s'agit de donner à voir qu'il y a vraiment quelque chose à apprendre, sur quoi il faudra se concentrer.

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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
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par Tangleding Jeu 30 Déc 2021, 20:47
NLM76 a écrit:Par exemple, je pense à une procédure que j'induis dans mon Libellus de latin. Dans les exercices, il faut à chaque fois aller chercher dans le lexique les mots à utiliser, si on ne les a pas encore fixés dans la mémoire. Le processus de recherche et de repérage est important et utile pour la mémorisation. Mais en allant chercher un seul mot à la fois, on ne fait fonctionner que la mémoire de travail; en plus il est quasi impossible de les convaincre d'écrire sur leur cahier le mot, sa construction et ses traductions à chaque fois. [Maintenant, je pourrais peut⁻être plus convaincant.]
De ce fait, je me demande si je ne vais pas mettre, avant une série d'exercices, en tête, la liste des mots à utiliser dans les exercices (sans traduction), en demandant d'aller les chercher dans le lexique, et de les recopier en préalable. Voire de les apprendre une première fois ? Il s'agit de donner à voir qu'il y a vraiment quelque chose à apprendre, sur quoi il faudra se concentrer.
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par Baldred Jeu 30 Déc 2021, 21:29
Tangleding a écrit:Apprendre des listes de figures de style n'a aucun intérêt de mon point de vue. Je ne sais pas si c'est beaucoup pratiqué par la profession. Trop à mon goût.

L'analyse doit permettre d'accéder à un surcroît d'intérêt du texte littéraire. Je ne considère pas qu'il faille opposer lecture et analyse. Quand je lis un texte littéraire, j'effectue ce travail d'analyse de façon automatisée, à la volée, sans rédiger un commentaire de texte. L'exercice formel n'est qu'une forme scolaire de communication de l'analyse. Mais l'essentiel c'est bien l'interprétation qui découle de l'analyse, que celle-ci soit effectuée "à la volée" ou par le truchement d'un exercice scolaire (commentaire, étude linéaire...)

En tout cas dans ma pratique, les élèves n'ont jamais été dégoûtés d'une oeuvre à cause de l'analyse que nous en faisions. Sauf quand on s'enlise dans une OI, ce qui peut arriver. Auquel cas c'est mon échec, pas la condamnation de l'analyse.

Mais je te retourne la question : quel est l'intérêt de l'analyse au lycée selon toi @Iphigénie ?

Pardonnez-moi d'intervenir dans votre intéressant échange.
L'adulte, et le prof, ont souvent tendance à considérer l'enfant, et l'élève, comme un être incomplet. Je pense qu'un élève de 6e ne possède évidemment pas les éléments de connaissance du monde, mais il en a une expérience déjà très riche qui lui ouvre la voie à une compréhension parfois impressionnante, pour peu que son intérêt soit éveillé, et disponible.... L'étude, que je présente sans problème comme une analyse, d'un texte peut aller aussi loin que leur propre analyse est capable d'aller. Mon travail est alors de formaliser, de mettre en méthode, de dépasser le grand bavardage, de l'utiliser pour une meilleure compréhension du texte et des procédés.
Peut-être connaissez-vous les travaux de Boimare et son livre Ces enfants empêchés de penser. Vos remarques sur Ulysse me paraissent aller dans ce sens. La lecture avec eux par exemple du Feuilleton d'Ulysse de M.Szac permet d'aborder avec les élèves la plupart des grandes questions d'interprétation morales, philosophiques mais aussi littéraires. Le niveau de compréhension et d'analyse peut-être surprenant, et l'intérêt des élèves évident, dès lors qu'on les considère comme des êtres sensibles et sociaux complets.
Mathsenstock
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Niveau 5

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par Mathsenstock Ven 31 Déc 2021, 00:20
Comme Flo44, je trouve l'enseignement des maths de plus en plus compliqué : les élèves passant d'un niveau à l'autre automatiquement et les programmes étant indigents, je ne peux m'appuyer sur ...rien !
Avec les collègues on a l'impression de tenter de construire un édifice sur des sables mouvants.

On a enlevé une bonne partie de la difficulté technique du collège, et ça nous manque cruellement au lycée : les liens ne peuvent plus se faire, comment créer un lien avec rien ? ? ?

Au contraire, je vois avec mes enfants que plus ils engrangent de connaissances (en général), plus c'est facile pour eux de découvrir de nouvelles choses : ils font plus facilement les liens avec d'autres notions/événements déjà connus. C'est un cercle vertueux...
(La formation en ligne La psychologie pour les enseignants est intéressante et confirme ces impressions. )


Et sinon je peux retourner en cours de français avec vous ?
Tangleding
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par Tangleding Ven 31 Déc 2021, 13:37
Mathsenstock a écrit:Et sinon je peux retourner en cours de français avec vous ?
Tu connais combien de figures de style ?

Smile

santeverre

Pour la langue je dirais que davantage qu'une quantité, c'est aussi une question de rythme, pour permettre l'automatisation. Il faudrait 2h par semaine pour la langue, certains de mes collègues y parviennent mais impossible pour moi de dépasser les deux tiers du programme de littérature si je fais ça.

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