Recherche exemple d'oeuvre où subjectivité de l'auteur déforme la réalité historique

Bonjour,

J'ai soumis à mes élèves de 3e un sujet type brevet de mon invention: "La littérature, le cinéma et les autres arts peuvent-ils nous permettre de mieux connaître l'Histoire" (inspiré du sujet de 2017)
Je prépare le corrigé et propose l'argument "non, car la subjectivité de l'auteur déforme nécessairement la réalité". Et je cherche un exemple, si possible correspondant au programme de 3e, pour illustrer cet argument. Une idée?
Merci d'avance pour votre aide, et bel après-midi!

Subjectivité + idéologie : Naissance d'une nation de Griffith. Autant en emporte le vent.

Dumas, Chateaubriand?

Pour un niveau collège, La Case de l'Oncle Tom ?

Merci pour vos réponses! Je vais pousser le bouchon, mais pourriez-vous justifier ( ) en expliquant en quoi la réalité historique est distordue dans le roman que vous citez ?

Je pensais par exemple à Persepolis, de Marjane Satrapi, mais peut-on dire que la réalité qu'elle décrit est déformée ? Malheureusement, je ne pense pas...
Ou alors, préciser en parlant de la scène où Marjane est arrêtée dans la rue par deux gardiennes de la Révolution qui sont dessinées presque comme de longs serpents se dressant sur son passage pour lui nuire ? Ou dans le tableau "La liberté guidant le peuple", avec l'allégorie de la liberté qui n'était évidemment pas présente sous cette forme lors de cet épisode de la révolution de Juillet 1830?

Je pense à des uchronies, Le Complot contre l'Amérique de Roth, Le Maître du haut château de Dick, mais je ne suis pas sûre que cela corresponde à ce que tu cherches... (Oui je ne t'aide pas trop...)

Pour moi, mais c'est peut être une opinion toute personnelle, les exemples que tu cites (Satrapi et Delacroix) ne correspondent pas à une déformation de l'histoire, mais à une représentation de celle-ci (tu utilises toi même le mot allégorie)

Il faut que je cherche dans mes archives, mais j'ai le souvenir d'un texte autobiographique dans lequel l'auteur raconte l'arrivée des troupes allemandes dans sa ville lorsqu'il était enfant, souvenir très marquant pour lui, et qui apprend à l'âge adulte que c'est un faux souvenir, qu'il n'aurait jamais pu assister à cela, qu'il a fusionné ça avec un souveni de défilé.
Est-ce que cela pourrait correspondre à ce que tu cherches ?

Sinon, il y a de très beaux textes de survivants de la Shoah qui expliquent que seul le recours à l'art et donc à un récit de fiction ont pu leur permettre de rendre compte de ce qu'ils ont vécu, et de le transmettre. Je dois pouvoir te retrouver ça si ça t'intéresse.

Henriette, ton message me fait penser à Jorge Semprun qui raconte comment Rimbaud et Baudelaire les ont aidés, lui et les autres prisonniers, à survivre à Buchenwald.

Henriette, c'est André Gide qui croit avoir assisté à l'entrée des Allemands dans Rouen alors qu'il se rappelle seulement d'un défilé aux flambeaux (Si le grain ne meurt).

Oui, c'est ça, c'est Gide ! Merci Bartlebooth.

Maldoror1, Semprun justement, si je me souviens bien, explique ce recours à la fiction dans Si c'est un homme.

Dans L'écriture ou la vie, pour Jorge Semprun ("Raconter bien, ça veut dire : de façon à être entendu. On n’y parviendra pas sans un peu d’artifice. Suffisamment d’artifice pour que ça devienne de l’art !")

Et des élèves de 3e sont capables d’argumenter avec exemples sur ce sujet ( très beau au demeurant) ?

Oui ! Merci à vous deux pour vos précisions.

Je trouve aussi le sujet pointu. ; )
Sinon, je pense que Shakespeare convient parfaitement à ce que tu recherches. Tu peux observer par exemple la vision sanguinaire qu'il dresse de Richard III et le propos plus mesuré des historiens.

Il y a sans doute aussi des choses du côté du récit de la Révolution française (peut-être le récit de la mort de Louis XVI et Marie-Antoinette chez Michelet ? plus accessible : le film de Sofia Coppola, Marie-Antoinette).

Personnellement, je trouve que la citation de Semprun est trop subtile pour être bien comprise par des jeunes de 3e. Son témoignage ne reste-t-il pas très précieux pour comprendre l'histoire ? l'artifice de la narration peut-il suffire pour parler de déformation ? J'ai l'impression que les questionnements se rapportent davantage à ceux inhérents à l'autobiographie.

Le début de C'est la guerre de Calaferte ? Un enfant de 11 ans décrit à sa hauteur le jour de la mobilisation générale. Il est content que ce soit la guerre parce qu'il entend qu'on ne battra plus les enfants. C'est en plus un récit autobiographique, tout à fait adapté en 3e.

Hope and glory.
Le blitz vu à hauteur d'enfant .
Un énorme terrain de jeu.

Ils vont tuer Robert Kennedy, Marc Dugain

mimi a écrit:Hope and glory.
Le blitz vu à  hauteur d'enfant .
Un énorme terrain de jeu.

Un de mes films préférés, magnifique. Scénario parfait où tout s'enchaîne naturellement sans effort apparent.

Tu pourrais regarder le petit livre de Jean-Yves Le Naour "Fusillé sur un brancard" où il raconte deux fois le même fait historique malheureux de 14-18. Une fois sous un jour favorable à la victime et l'autre fois aux juges, sous couvert de travail d'historien.

IL y a, mais c'est peut-être trop polémique "le juif Süss" de Lion Feuchtwanger. L'auteur, juif lui même, pacifiste et par la suite antinazi forcené, voit son roman historique défiguré par les nazis qui en feront l'archétype du film raciste.

Les westerns et la vision des Indiens d'Amérique devraient aussi faire l'affaire...

Je pense aussi à Notre-Dame de Paris, de Hugo, ou à Gladiator.

Pour ma part, je trouve que les œuvres qui mettent en scène un regard d'enfant ne déforment pas vraiment la réalité historique.

Braveheart.Pas de kilts, pas de peintures guerrières et encore moins de lardon incestueux pour Isabelle de France.

A peu près tout Michel Zevaco ...

Merci pour toutes vos réponses (je ne trouvais plus le poste ! ) que je lis avec grand intérêt.

@Henriette, je pense que tu confonds Semprun et Primo Levi car dans Si c'est un homme, celui-ci raconte aussi comment ses souvenirs de La Divine Comédie de Dante l'ont aidé à survivre aux camps (si je me souviens bien de mes cours d'élève de 1ère L ! )

@Roxanne: Oui, certains élèves s'en sont bien sortis! Leurs arguments, en gros, sont
- oui, les arts peuvent nous permettre d'accéder à certains pans de l'Histoire, qui en constituent la toile de fond (le ghetto de Varsovie dans le Pianiste, la clandestinité des Juifs dans Le Journal d'Anne Frank, la 1ère GM dans Cris de Laurent Gaudé, sont les exemples les plus courants (et le devoir type brevet portait sur un extrait de Cris étudié en OI)) ou carrément le propos (Pearl Harbour)
- non, l'art déforme la réalité (là, ils ne pensent pas à me parler de l'incontournable part de subjectivité introduite par l'artiste, mais nous verrons cela en correction), en la mettant en scène, et citent par exemple Le sacre de Napoléon (ah, bah voilà un exemple à reprendre! Mais j'en aurais voulu un du même acabit dans une œuvre littéraire), qui représente un événement historique de manière erronée (mensongère !) ou Titanic qui ajoute une histoire d'amour fictive à l'histoire réelle.

@Maju, je suis d'accord avec ta remarque concernant La liberté guidant le peuple (l'intention de l'artiste est bien de faire une allégorie, de représenter une idée); pour Persepolis, je ne sais pas... Il me semble être tout de même assez proche, avec cet exemple, de l'idée que l'auteur puisse déformer la représentation de la réalité en y imprimant sa subjectivité, elle qui traduit dans le dessin l'impression qu'elle a ressentie lors de cet épisode plus que les faits bruts. Mais en effet, on ne peut pas vraiment parler de déformation de la réalité historique ici, mais peut-être simplement de point de vue...

Je n'ai toujours pas vu Marie-Antoinette, mais il me semble que cet exemple pourrait en effet parler à des 3e, et Brave heart, aussi. Et Gladiator.

Je confesse mon ignorance, mais dans Notre dame de Paris, quel événement (ou personnage) historique serait déformé ( pas Quasimodo, bien sûr ! ) ?

Du grain à moudre, merci!