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lilith888
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Le français, c'est nul... - Page 4 Empty Re: Le français, c'est nul...

par lilith888 Dim 20 Sep 2009 - 20:32
Ruthven, que te répondre ?
La science a un objet et une méthode dis tu : l'objet c'est donc le texte - et lui seul -, la méthode, je répondrais la textique, mais comme elle n'est pas encore reconnue, je ne m'y risque pas - du moins, pas encore -

La littérature parle du monde et de l'imaginaire, on est d'accord. Mais pour moi, ceci ne représente pas l'essentiel de la littérature. Si la littérature se réduit à ça, autant regarder un film, qui fait le même effet (d'ailleurs, combien d'élèves rétorquent cela quand on leur demande de lire un livre ? Et comment les blamer si on ne leur a pas montré auparavant les spécificités de la littérature en tant que telle ?)

Je ne comprends à vrai dire pas ce champ lexical du dessèchement et de sécheresse que tu emploies. Bien au contraire ! Oui, on dépouille le texte, mais est-il pour autant désséché ? Je ne pense pas.
Sur un autre fil, j'avais donné la métaphore du tour de magie. Pour moi, c'est exactement cela : soit on se contente de rêver devant le tour de magie, soit on en cherche les ficelles. La deuxième solution, effectivement, fait disparaître la notion de magie, mais elle me semble beaucoup plus pertinente.
Pour un texte en dialogue avec un autre, je parle d'intertextualité et là, encore, c'est un outil extrêmement porteur (d'ailleurs, je l'utilise très souvent, mais aussi de manière non chronologique, puisque je ne me demande pas si l'intertextualité a été voulue ou non : elle est là, point)

Enfin, on ne dissocie pas forcément la forme du fond. On part du fond pour arriver à la forme.
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par lilith888 Dim 20 Sep 2009 - 20:35
doctor who a écrit:Bon, évidemment, pas du tout d'accord avec Lilith666 (pourquoi ne pas avoir choisi ce pseudo, c'était raccord avec la photo et la référence biblique apocryphe?).
Les lettres sont avec la philo la matière la plus "humaine" et la moins factuelle.

Je ne suis évidemment pas d'accord. La philosophie exprime des pensées sur l'homme, et c'est sa principale fonction.
La littérature a quelque chose en plus : le style.

Par contre, merci d'éviter les remarques sur les pseudo, ce n'est pas vraiment le sujet du débat non ?
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par lilith888 Dim 20 Sep 2009 - 20:39
doctor who a écrit:
Quant à la phrase disant que l'important n'est pas ce qui est écrit mais la manière dont c'est écrit, elle fait preuve d'un formalisme hardcore dont la plupart des universitaires est revenue depuis longtemps.
Qu'il faille un traitement de choc pour les étudiants de première année en fac ou en prépa, afin qu'ils sortent de l'illusion référentielle, je peux le comprendre (bien que la manière dont c'est dit ici me fait un peu peur). Mais est-ce vraiment utile au lycée, au collège, voire en primaire (si, si, il y a des instits qui vont jusque là)?

Le formalisme hardcore ? Où donc ? Si l'on postule que la littérature se résume à une histoire et des personnages, je réitère ma question : pourquoi ne pas voir un film ? Ou une émission de télé réalité ? (là aussi, on a une histoire et des persos)

Je ne vois pas le scandale de dire que l'on va étudier la manière dont un texte est écrit !
Les étudiants qui arrivent en fac, la plupart du temps, se cantonnent à la paraphrase ou à l'interprétation creuse "je ressens ce que ressens l'auteur". Pour moi, il est primordial de leur montrer autre chose pour enfin comprendre les tenants et les aboutissants d'un texte.

Et les collégiens, c'est pareil ! A quelque chose près, mes cours en collège ne diffèrent pas tellement de ceux que je donne en fac... Et je vous rassure, ces derniers s'en portent très bien, et, très souvent, ils en redemandent.
doctor who
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par doctor who Dim 20 Sep 2009 - 20:41
Lilith, j'ai l'impression que nos pratiques face à un texte sont moins éloignées que notre vision théorique de l'enseignement de la littérature.
Pour ma part, c'est la notion de "magie" que je ne comprend pas. Elle suppose, comme tu la présentes, une tromperie, une illusion. Cela dénie à la littérature toute portée existentielle et philosophique. Il y a quelque part dans le passé un type qui a écrit un livre, que moi, élève, ou plutôt personne singulière, je lis. Et ce type ne cherche pas forcément à m'avoir, à m'en mettre plein les yeux. Et quand c'est le cas, j'ai aussi le droit de vouloir en avoir plein les yeux (et aussi de m'intéresser aux coulisses du spectacle, mais seulement après la représentation).
Sinon, effectivement, la littérature n'est qu'un immense sophisme (ce qu'elle n'est qu'en partie).
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par doctor who Dim 20 Sep 2009 - 20:47
Nous n'enseignons pas qu'à des futurs étudiants en lettres. Comme je l'ai dit, un choc est nécessaire en début de cursus universitaire. Mais toi, tu préconises l'électrochoc antibiographique et antiréférentiel à chaque cours de chaque année de la scolarité d'un élève!
Pour moi, les illusions des étudiants ne vient pas de ce qu'on les a gavé de biographisme, mais que leur culture est dérisoire. Ils ne connaissent pas les conditions matérielles de production des oeuvres. Les auteurs sont des abstractions tirées d'une frise chronologique (dans le meilleur des cas).
Il faut connaître les conditions de production d'un texte pour pouvoir leur donner leur juste place, qu'elles soient historiques ou biographiques.
Après, c'est vrai que cela demande un gros travail de décillage après le bac.
ysabel
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par ysabel Dim 20 Sep 2009 - 20:47
On ne cherche pas à savoir ce qui est écrit mais comment c’est écrit,


C'est ce que je dis aux élèves pour expliquer ce qu'est une LA ou un commentaire MAIS avant d'en arriver là, il faut que les gamins aient compris ce qui est écrit.
Quand j'étudie un extrait des Tragiques, si je ne commence pas par traduire le texte en français moderne ils ne pourront jamais expliquer comment c'est écrit.

L'auteur est important. Une oeuvre est issue d'un être humain qui a un vécu. C'est un peu comme le lyrisme : la fictionnalisation du JE. et toute son histoire et l'Histoire ne peuvent se déconnecter totalement de l'oeuvre littéraire. Qu'aurait été l'oeuvre de Verlaine sans Rimbaud ?

Heureusement que la littérature c'est aussi une histoire et des personnages : j'adore découvrir une nouvelle oeuvre, avoir cette lecture naïve de celle qui découvre... quelle plaisir.

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« vous qui entrez, laissez toute espérance ». Dante

« Il vaut mieux n’avoir rien promis que promettre sans accomplir » (L’Ecclésiaste)
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par doctor who Dim 20 Sep 2009 - 20:55
Et désolé pour la remarque sur le pseudo. C'était une tentative de détendre l'atmosphère qui a lamentablement échoué. J'aime la polémique mais ne veux pas attaquer l'autre là où il ne veut pas qu'on l'attaque.
Docteur OX
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par Docteur OX Dim 20 Sep 2009 - 20:55
Que c'est beau vos débats...Le français, c'est nul... - Page 4 Icon_eek

Mais moi je suis prof d'hist-géo éduc-civ...Le français, c'est nul... - Page 4 Suspect

Et pas un seul bon forum pour nous à l'horizon sur la toile ! Le français, c'est nul... - Page 4 Icon_rolleyes ( et pas d'Abraxas aussi...)

Miserere nobis. Le français, c'est nul... - Page 4 Icon_sad
John
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par John Dim 20 Sep 2009 - 20:57
Docteur Ox, il suffit de ramener ici des enseignants d'HG.

En se serrant un peu, on vous fera de la place !

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"Qui a construit Thèbes aux sept portes ? Dans les livres, on donne les noms des Rois. Les Rois ont-ils traîné les blocs de pierre ? [...] Quand la Muraille de Chine fut terminée, Où allèrent ce soir-là les maçons ?" (Brecht)
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par lilith888 Dim 20 Sep 2009 - 21:01
doctor who a écrit:Nous n'enseignons pas qu'à des futurs étudiants en lettres. Comme je l'ai dit, un choc est nécessaire en début de cursus universitaire. Mais toi, tu préconises l'électrochoc antibiographique et antiréférentiel à chaque cours de chaque année de la scolarité d'un élève!
Pour moi, les illusions des étudiants ne vient pas de ce qu'on les a gavé de biographisme, mais que leur culture est dérisoire. Ils ne connaissent pas les conditions matérielles de production des oeuvres. Les auteurs sont des abstractions tirées d'une frise chronologique (dans le meilleur des cas).
Il faut connaître les conditions de production d'un texte pour pouvoir leur donner leur juste place, qu'elles soient historiques ou biographiques.
Après, c'est vrai que cela demande un gros travail de décillage après le bac.

On est totalement d'accord sur le problème de la culture. Effectivement, je cherche, et ce à chaque cours, à combler le vide intersidéral qui peuple l'esprit de nos élèves. Bien entendu que je parle de l'auteur, de l'époque. Mais un moment, c'est tout. Après, on passe au texte, et à lui seul.
Finalement, comme tu le dis, nos pratiques ne doivent pas tant différer que cela.
Ce que je refuse, surtout, c'est une vision entièrement naïve et chimérique de la littérature. L'inspiration a bon dos.
Cela ne vous hérisse-t-il pas le poil d'entendre pour tout et n'importe quoi, à la tv, par exemple, "c'est un pur moment de poésie" ? Comme si la poésie se résumait à un truc joli qui fait ressentir des choses.
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par lilith888 Dim 20 Sep 2009 - 21:05
doctor who a écrit:
Pour ma part, c'est la notion de "magie" que je ne comprend pas. Elle suppose, comme tu la présentes, une tromperie, une illusion. Cela dénie à la littérature toute portée existentielle et philosophique. Il y a quelque part dans le passé un type qui a écrit un livre, que moi, élève, ou plutôt personne singulière, je lis. Et ce type ne cherche pas forcément à m'avoir, à m'en mettre plein les yeux. Et quand c'est le cas, j'ai aussi le droit de vouloir en avoir plein les yeux (et aussi de m'intéresser aux coulisses du spectacle, mais seulement après la représentation).

tromperie, je ne pense pas. Illusion non plus, je dirais plus "premier plan". Bien entendu qu'il faut comprendre le sens d'un texte avant de l'étudier, je pense qu'on est tous d'accord là dessus. Mais cela prend finalement peu de temps non ? C'est la première étape. Ensuite, on passe à l'analyse profonde.
J'ai toujours pensé, et j'en suis convaincue, qu'on n'attend pas forcément de moi que je sois une passionnée, les élèves ne sont pas des mini moi et je ne désire pas qu'ils me ressemblent dans mes goûts. En tant que professeur, je me considère plus comme spécialiste. Après, on peut être passionnée ET spécialiste, mais spécialiste avant tout.
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par lilith888 Dim 20 Sep 2009 - 21:08
ysabel a écrit:
L'auteur est important. Une oeuvre est issue d'un être humain qui a un vécu. C'est un peu comme le lyrisme : la fictionnalisation du JE. et toute son histoire et l'Histoire ne peuvent se déconnecter totalement de l'oeuvre littéraire. Qu'aurait été l'oeuvre de Verlaine sans Rimbaud ?
.

cCest là que je ne suis pas d'accord : quid de l'affaire des "faux Rimbaud", pourtant identifiables par leur style à du Rimbaud ? Quid des pastiches et des faux ? L'oeuvre pour moi, c'est avant tout du style. Et comme un auteur est un spécialiste du style, il sait ce qu'il écrit, ou non. Donc la sincérité là dedans me paraît très très hasardeuse.
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Hamlette
Fidèle du forum

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par Hamlette Dim 20 Sep 2009 - 21:11
Faire disparaître la notion d'auteur, je crois que c'est quelque chose qu'on peut se permettre... quand on a cette notion d'auteur. De la culture, du savoir lire... Ce qui n'est pas le cas de nos élèves (pas des miens en tout cas). Quand j'entends dans mes classes que si les romans au 18ème siècle sont si longs, c'est parce qu'ils n'avaient que ça à faire à l'époque... je ne vois pas comment l'étude d'un texte sans contexte peut être autre chose qu'une coquille vide avec de si beaux présupposés.

Je ne parle pas de revenir aux temps (mythologiques ?) du Lagarde et Michard et d'être esclave du tout biographique, mais même pour relire une oeuvre à la lumière de son temps il faut comprendre comment, pourquoi elle est née.

Enfin, je trouve moi-même passionant ce jeu qui consiste à analyser la forme de l'écriture, pour tenter de comprendre comment elle opère. Pourquoi, comment, ce texte me fait-il ressentir ceci ou cela ? Mais là encore, le jeu est gâché avec des élèves qui ne savent pas lire, qui n'ont que très peu de références culturelles et très peu de mots pour s'exprimer, et alors cela n'aboutit qu'à un saucissonage grotesque. Vouloir échapper à cela, ce n'est pas pour autant ne voir que de l'inspiration mystique dans la littérature.
roxanne
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Oracle

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par roxanne Dim 20 Sep 2009 - 21:20
mais l'un empêche-t-il l'autre ?quand j'étais en lycée , il y avait biographie détaillée et contexte historique et puis analyse du texte en utilisant les procédés , comme des outils ni plus ni moins .
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par lilith888 Dim 20 Sep 2009 - 21:21
Hamlette a écrit:Enfin, je trouve moi-même passionant ce jeu qui consiste à analyser la forme de l'écriture, pour tenter de comprendre comment elle opère. Pourquoi, comment, ce texte me fait-il ressentir ceci ou cela ? Mais là encore, le jeu est gâché avec des élèves qui ne savent pas lire, qui n'ont que très peu de références culturelles et très peu de mots pour s'exprimer, et alors cela n'aboutit qu'à un saucissonage grotesque. Vouloir échapper à cela, ce n'est pas pour autant ne voir que de l'inspiration mystique dans la littérature.

mais nous sommes donc tout à fait d'accord ! Par contre, d'où peut venir un tel vide culturel chez les élèves ? Ce manque de vocabulaire ? Ce déficit en lecture ? Il est évident qu'avec de tels élèves, ces pratiques ne sont pas envisageables, et je trouve cela très dommage.
Mais est-ce cela un élève lambda ? Si la réponse est oui, notre siècle est définitivement entré dans l'ère du minable et du ras des paquerettes.
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par lilith888 Dim 20 Sep 2009 - 21:22
roxanne a écrit:mais l'un empêche-t-il l'autre ?quand j'étais en lycée , il y avait biographie détaillée et contexte historique et puis analyse du texte en utilisant les procédés , comme des outils ni plus ni moins .

je le répète : je ne refuse pas l'apport biographique et historique, seulement je laisse cela dans la case "culture", et ça ne prend pas beaucoup de temps. Ensuite, c'est concentration maximale sur le texte et ses outils.
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Cath
Enchanteur

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par Cath Dim 20 Sep 2009 - 21:35
John a écrit:
Pour ma part (j'ai 42 ans) je n'avais jamais entendu parler d'énoncé ancré/coupé, de grille de registre (c'est bien ça?) et de je ne sais quoi avant de venir sur ce forum... Et c'est ma fille, en 4°, qui m'a fait découvrir l'idée de nouvelle "à chute"! (j'ai fait comme si je connaissais...)

C'était dans les programmes et dans les manuels avant d'être sur le forum. :lecteur:


Nan, pas en LP ! Wink


Sinon, lilith888, bien sûr que l'étude du style (appelons-ça comme ça) est importante...Ce que j'ai écrit, c'est qu'un texte n'est pas qu'un ensemble de procédés de style qu'il suffirait donc de copier pour produire de la littérature...C'est me semble-t-il, un peu trop ce qu'on veut nous faire dire aux élèves: les moyens deviennent la fin.
doctor who
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par doctor who Dim 20 Sep 2009 - 21:37
Bon, on est d'accord alors?
Et bien non finalement.
Selon moi, le but du lycée, a fortiori du collège, n'est pas de faire de nos élèves des techniciens de la littérature. Je n'accorde dans mes cours qu'une place accessoire aux outils d'analyse, privilégiant la compréhension et l'interprétation. Ne pas apprendre des tonnes de jargon technique ne veut pas dire qu'on n'aille pas loin dans le texte. Et pour justifier une interprétation, il faut des éléments d'analyse. Mais seulement des éléments!

J'ai la faiblesse de penser qu'un élève ayant pas mal lu, ainsi qu'une culture littéraire solide, peut comprendre l'aspect esthétique (donc stylistique, mais pas seulement) d'un texte, de manière intuitive.

Et cela ne revient pas à dire tout et n'importe quoi sur les textes. Je me souviesn avoir beaucoup choqué des collègues étrangers enseignant à des sections de lycée international en leur expliquant que la critique littéraire à la française cherchait à trouver la vérité d'un texte, et qu'il n'y en avait qu'une (infiniment complexe, nuancée, dialectiquement articulée). Ce programme ambitieux ne souffre pas le manque de rigueur, non?
doctor who
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par doctor who Dim 20 Sep 2009 - 21:39
D'accord avec cath560. La notion d'"outils", qu'ils soient stylistiques ou "de la langue", mériterait une longue discussion.
Eole
Eole
Niveau 9

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par Eole Dim 20 Sep 2009 - 22:01
Bonsoir,

Merci d’abord pour ce riche post auquel j’ose à peine apporter ma contribution. Je n’ai en effet guère le bagage intellectuel pour cela, mais j’aimerais faire part d’une petite expérience perso.

Le ressenti face à un texte, le sentiment, je n’ai connu cela que très tard. Je m’en suis finalement toujours plus ou moins sorti en regardant le détail du texte, en analysant les figures de style, en interprétant les tournures de phrases…

On peut avoir ou ne pas avoir la qualité de « sentir » un texte, mais cela se développe assez difficilement (ne vous souvenez-vous pas du français au collège à notre époque, quand on avait l’impression que le prof notait de manière complètement subjective ? Aviez-vous révisé pour l'écrit du bac de français ?). Le jour du contrôle, soit on comprenait le texte et c’était tant mieux, soit on était largué…

Je crois que c’était la volonté (naïve) du virage des programmes depuis quelques années. D’après ce que j’ai compris, il s’agissait de mettre sur un pied d’égalité l’élève issu d’un milieu cultivé (familier des livres, et donc ouvert à une certaine sensibilité littéraire) et l’élève de milieu défavorisé (privé de cette culture). Evidemment, je caricature. Si vous parlez à un élève issu d’un milieu cultivé de Victor Hugo, ça lui parlera, alors que l’élève de ZEP, à part le nom de la rue où habite son cousin, bof. Par contre, si vous leur parlez de schéma actantiel, d’énoncé coupé/ancré, de registre pathétique, les deux sont face à quelque chose d’inconnu… ils partent donc sur un pied d’égalité.

Je dis souvent aux élèves que le français, c’est de l’imagination mise dans une boîte : d’accord pour la fantaisie, la magie, mais il faut aussi des règles, des outils. Je pense que vouloir faire passer en priorité le fond ou la forme est une erreur, car des élèves seront plus sensibles à l’un ou à l’autre.

Par contre, susciter l’intérêt des élèves pour ces outils, et ne pas étouffer le texte en le disséquant (c’est le sujet initial du post), ça c’est un problème, et je partage complètement le dégoût et la déception d’Hamlette.

Pour rendre tout cela vivant, pas de solution miracle. J’essaie péniblement de développer deux choses :
1.Comme cela a déjà été dit, je truffe mes cours d’anecdotes concernant le texte. Je fais des ponts avec des scènes de films, des anecdotes parfois vécues, des articles, des situations concrètes qui montrent que ce que dit le texte n’est pas une abstraction mais renvoie à ce qu’on peut vivre quotidiennement. C’est donc important pour moi de parler de l’auteur, de leur expliquer l’origine d’un écrit. D’ailleurs, si quelqu’un a un bouquin à conseiller qui donnerait des anecdotes sur tel ou tel auteur, je suis preneur, je pense que ça aide à rendre tout cela plus vivant (La Littérature pour les Nuls ?).
2.Faire écrire les élèves pour qu’ils prennent conscience de la nécessité de manipuler les notions : par exemple, on fait avec les 3è en ce moment un projet autobiographique, ce qui leur permettra à mon sens de saisir les enjeux de ce genre : vérité/mensonge, choix du souvenir, recul vis-à-vis de soi même, crainte du jugement des autres…

Ce qui m’inquiète enfin, c’est la difficulté croissante pour les élèves de se plonger dans un texte. Même Maupassant, qui passait comme une lettre à la poste à mon époque, leur semble très ancien (un élève de 3è m’a dit que Maupassant, vu comme il écrivait, avait dû vivre au Moyen Age, un autre en seconde me demandait s’il existait des traductions de L’Ecole des Femmes en français correct…) affraid . La langue littéraire leur est de plus en plus inconnue et donc rebutante, et je ne vois pas comment la tendance pourrait s’inverser…
humhum

PS : désolé pour cette tartine, et merci à ceux qui auront eu le courage de la lire... Smile
ysabel
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Devin

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par ysabel Dim 20 Sep 2009 - 22:07
Même Maupassant, qui passait comme une lettre à la poste à mon époque, leur semble très ancien (un élève de m’a dit que Maupassant, vu comme il écrivait, avait dû vivre au Moyen

Tu sais, pour les ado, avant l'invention du portable c'est le Moyen-Âge...

Parle-leur de l'époque- pas si lointaine (les années 1970) où il n'y avait pas le tél dans toutes les maisons, où la télévision n'avait que qq heures de programme par jours, où toutes les maisons n'avaient pas de salle de bain... et tu verras leur tête effarée se demandant comment on pouvait vivre comme cela.

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par doctor who Dim 20 Sep 2009 - 22:14
Ce "virage", dont tu parles, a été très mal négocié. Je pense que Vial et consorts ont voulu emprunter la voie rapide : réduction de la littérature à une somme de procédés, qu'il suffirait d'apprendre et d'appliquer pour égaler les "héritiers".
Cette voie est en fait impraticable. Le français, cela n'a pas l'évidence d'une démonstration mathématique, qui parle à l'intuition de chacun. Les élèves les plus en difficulté sont ceux qui captent le moins ces notions.
La voie la plus longue, et la seule praticable, c'est la fréquentation intensive, dès la primaire, des textes, des auteurs, des personnages, des histoires qui font la littérature.
doctor who
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Doyen

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par doctor who Dim 20 Sep 2009 - 22:15
Ce genre de remarques méprisantes sur le passé ne mérite qu'une chose : un gros et savant foutage de gueule!
Isia
Isia
Sage

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par Isia Dim 20 Sep 2009 - 23:09
Je me sens concernée par le désarroi d'Hamlette également, mais je n'ai pas assez de culture pour m'épancher sur le sujet... Toutes vos références me renvoient d'ailleurs à mon inculture !

Pour répondre à Eole, j'ai en tête un titre qui peut être instructif : Qu'est-ce qu'un écrivain ? d'Alain Duchesne et de Thierry Leguay aux éditions Mots et Cie

C'est une mine d'anecdotes... d'ailleurs, je m'en vais de ce pas relire certaines pages.... ça me changera de La littérature pour les nuls... qui trône aux pieds de mon lit !
Dwarf
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par Dwarf Lun 21 Sep 2009 - 20:49
Ruthven a écrit:
La dissociation radicale entre le fond et la forme - cette dernière étant seule pensée comme phénomène esthétique - n'y a-t-il pas déjà une posture sophistique ? Le propre de la littérature n'est-il pas justement dans la liaison intime entre les deux ? L'implication réciproque entre le fond et la forme est nié au profit d'une sécheresse formelle.

Ruthven, nous avons déjà eu ce débat avec Lilith - mais je ne sais plus sur quel poste... Le français, c'est nul... - Page 4 Icon_scratch
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Abraxas
Doyen

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par Abraxas Mar 22 Sep 2009 - 7:36
marmottine a écrit:
Pour répondre à Eole, j'ai en tête un titre qui peut être instructif : Qu'est-ce qu'un écrivain ? d'Alain Duchesne et de Thierry Leguay aux éditions Mots et Cie

C'est une mine d'anecdotes... d'ailleurs, je m'en vais de ce pas relire certaines pages.... ça me changera de La littérature pour les nuls... qui trône aux pieds de mon lit !

Ah, Thierry est un ami… Il avait co-commis il y a… longtemps une Petite fabrique de littérature qui est un bijou — chez les bouquinistes et Chapitre.com, malheureusement : Magnard ne suit pas ses livres.
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