- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Bonjour,
Je relis l'Ethique. Comme je ne comprends pas tout je me suis dit que je pouvais ouvrir une discussion ici, pour profiter de vos lumières. J'y poserai mes questions au fur et à mesure.
Définition I : j'aimerais m'assurer des exemples qui me viennent à l'esprit. Causer, c'est ici générer, produire l'existence d'une chose. Quels exemples d'hétéro-causalité ? Est-il juste de dire que ma cause, c'est l'union de mes parents ? Que la cause de l'existence des hommes, c'est l'évolution d'une espèce de primates ? Ou que la cause d'un fruit, c'est l'activité biologique d'un arbre ?
Autre chose : est-il juste de dire que si Spinoza imagine une chose cause de soi, c'est en vertu du principe selon lequel tout s'inscrit dans une chaîne causale, et qu'en la remontant on aboutit donc à quelque chose qui, n'étant causée par rien, doit être sa propre cause (parce qu'on refuse l'idée que quelque chose puisse n'être pas l'effet d'une cause) ?
Définition II : je comprends bien pour les choses qui relèvent de l'étendue. Moins pour les pensées. Que serait une pensée limitée par une autre pensée ? L'exemple qui me vient à l'esprit : Pensée A : "Spinoza est un homme", limitée par pensée B, "Spinoza est un homme + a vécu au XVIIe siècle", limitée par pensée C, "Spinoza est un homme + a vécu au XVIIe siècle + a écrit des œuvres philosophiques". Qu'est-ce qu'une pensée, ici, en tant que "chose" ?
Voilà pour le moment.
Je relis l'Ethique. Comme je ne comprends pas tout je me suis dit que je pouvais ouvrir une discussion ici, pour profiter de vos lumières. J'y poserai mes questions au fur et à mesure.
Définition I : j'aimerais m'assurer des exemples qui me viennent à l'esprit. Causer, c'est ici générer, produire l'existence d'une chose. Quels exemples d'hétéro-causalité ? Est-il juste de dire que ma cause, c'est l'union de mes parents ? Que la cause de l'existence des hommes, c'est l'évolution d'une espèce de primates ? Ou que la cause d'un fruit, c'est l'activité biologique d'un arbre ?
Autre chose : est-il juste de dire que si Spinoza imagine une chose cause de soi, c'est en vertu du principe selon lequel tout s'inscrit dans une chaîne causale, et qu'en la remontant on aboutit donc à quelque chose qui, n'étant causée par rien, doit être sa propre cause (parce qu'on refuse l'idée que quelque chose puisse n'être pas l'effet d'une cause) ?
Définition II : je comprends bien pour les choses qui relèvent de l'étendue. Moins pour les pensées. Que serait une pensée limitée par une autre pensée ? L'exemple qui me vient à l'esprit : Pensée A : "Spinoza est un homme", limitée par pensée B, "Spinoza est un homme + a vécu au XVIIe siècle", limitée par pensée C, "Spinoza est un homme + a vécu au XVIIe siècle + a écrit des œuvres philosophiques". Qu'est-ce qu'une pensée, ici, en tant que "chose" ?
Voilà pour le moment.
- SirgabNiveau 4
Bonjour,
Pour Spinoza, tout étant singulier, et donc tout mode fini est causé, c'est à dire est amené à exister, par un autre mode fini, et ainsi de suite à l'infini. on peut illustrer ceci par les générations : l'être vivant est engendré par un ou plusieurs vivants, etc. C'est tout à fait compatible avec la théorie de l'évolution. On peut dire que le fruit est causé par l'activité de l'arbre, laquelle est causée par l'activité conjointe du soleil, du co2, de l'eau et des minéraux, lequels sont eux-mêmes causés par des actions physiques particulières, et ainsi de suite, etc.
Si Spinoza reconnaît l'existence d'une cause de soi, c'est à dire de la substance éternelle et infinie qui est Dieu, c'est effectivement par nécessité logique. La substance existe nécessairement, en vertu du fait que rien ne peut s'opposer à son existence. Les modes finis, eux, n'existent pas nécessairement, car on peut empêcher leur existence, ils sont conditionnés. On peut empêcher un couple de se marier et donc d'avoir des enfants. Mais on ne peut pas empêcher Dieu d'être, c'est absurde. Ce n'est donc pas en vertu du fait que la chaîne causale doit avoir un terme premier lui même non causé - argument aristotélicien -, mais plutôt en vertu du fait que la substance ne peut pas ne pas exister, ou encore que sa non existence est contradictoire.
Une pensée limitée par une autre pensée ; puisque l'ordre des pensées est le même que l'ordre des choses - principe de l'immanentisme, la pensée ne transcende pas le réel -, cela implique que ce qui limite les choses limite aussi les pensées. Le fait que la tomate soit un mode fini, conditionné, fait que la représentation de la tomate est aussi une représentation finie, conditionnée. Puisque la tomate a besoin d'eau, je dois aussi me représenter que la tomate a besoin d'eau, et ainsi la pensée d'une tomate est tout aussi limitée que la tomate elle-même.
Pour Spinoza, tout étant singulier, et donc tout mode fini est causé, c'est à dire est amené à exister, par un autre mode fini, et ainsi de suite à l'infini. on peut illustrer ceci par les générations : l'être vivant est engendré par un ou plusieurs vivants, etc. C'est tout à fait compatible avec la théorie de l'évolution. On peut dire que le fruit est causé par l'activité de l'arbre, laquelle est causée par l'activité conjointe du soleil, du co2, de l'eau et des minéraux, lequels sont eux-mêmes causés par des actions physiques particulières, et ainsi de suite, etc.
Si Spinoza reconnaît l'existence d'une cause de soi, c'est à dire de la substance éternelle et infinie qui est Dieu, c'est effectivement par nécessité logique. La substance existe nécessairement, en vertu du fait que rien ne peut s'opposer à son existence. Les modes finis, eux, n'existent pas nécessairement, car on peut empêcher leur existence, ils sont conditionnés. On peut empêcher un couple de se marier et donc d'avoir des enfants. Mais on ne peut pas empêcher Dieu d'être, c'est absurde. Ce n'est donc pas en vertu du fait que la chaîne causale doit avoir un terme premier lui même non causé - argument aristotélicien -, mais plutôt en vertu du fait que la substance ne peut pas ne pas exister, ou encore que sa non existence est contradictoire.
Une pensée limitée par une autre pensée ; puisque l'ordre des pensées est le même que l'ordre des choses - principe de l'immanentisme, la pensée ne transcende pas le réel -, cela implique que ce qui limite les choses limite aussi les pensées. Le fait que la tomate soit un mode fini, conditionné, fait que la représentation de la tomate est aussi une représentation finie, conditionnée. Puisque la tomate a besoin d'eau, je dois aussi me représenter que la tomate a besoin d'eau, et ainsi la pensée d'une tomate est tout aussi limitée que la tomate elle-même.
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Merci pour ces explications.
Mais quelle serait alors la pensée qui viendrait limiter la pensée de la tomate ?
Sirgab a écrit:Puisque la tomate a besoin d'eau, je dois aussi me représenter que la tomate a besoin d'eau, et ainsi la pensée d'une tomate est tout aussi limitée que la tomate elle-même.
Mais quelle serait alors la pensée qui viendrait limiter la pensée de la tomate ?
- SirgabNiveau 4
Pour répondre au plus simple, on peut dire que l'idée de la tomate est limitée par toutes les autres idées qui ne sont pas elle. De la même manière qu'une tomate n'est pas une banane, l'idée de la tomate n'est pas l'idée de la banane par exemple. l'ordre des choses et des idées coïncide bien.
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