Génération Z' : amis profs du secondaire, ils seront chez vous dans trois ans

Je fais ça régulièrement en LP : ceux qui ne veulent pas bosser, tous au fond, tables face au mur pour ne pas interpeler/être interpelés par les autres.

J'avais ça en fin d'année avec une classe de 3e, ceux qui voulaient aller au lycée ou que ça intéressait avec des cours "préparation au lycée" et les autres avec des cours plus axés technique, à part égale, chacun étant en autonomie pendant que je bossais avec l'autre partie de la classe. Le CDE avait joué le jeu et était venu très officiellement l'annoncer en classe en ajoutant qu'ils avaient bien de la chance que je leur propose ça. Du coup, le bordel sur le thème "on s'en fout, nous ne fera pas pas ça" perdait sa légitimité. Certains des deux "côtés" m'avaient remerciée. Et évidemment, peu à peu il y avait eu des changements de groupes (dans le "bon" sens), d'autant plus que je faisais Antigone avec les "motivés" et que j'avais surjoué le côté scabreux du truc..

Cath a écrit:Je fais ça régulièrement en LP : ceux qui ne veulent pas bosser, tous au fond, tables face au mur pour ne pas interpeler/être interpelés par les autres.

Pas mal comme idée, mais, euh.... pas assez de mur dans la salle !

Fais cours dans un couloir !!

Cath a écrit:Je fais ça régulièrement en LP : ceux qui ne veulent pas bosser, tous au fond, tables face au mur pour ne pas interpeler/être interpelés par les autres.

Je me pose des questions par rapport à ça (attention, je ne critique pas)... Est-ce que cela passerait au niveau de l'inspection, de la direction ou des parents d'élèves et élèves ? Car dans mes classes (et je pense que c'est le cas pour tout le monde), il y a ceux qui ne veulent rien f**e mais n'em***ent personne et se contentent de dormir sur leur table, et il y a les relous qui ne veulent (peuvent rien faire : normal je suis en lycée certains n'ont même pas le niveau 6e dans ma matière) et qui donc sont juste là pour faire ch*** tout le monde : les profs, les camarades bons élèves / travailleurs, les camarades "je veux dormir fichez-moi la paix" et qui donc passent l'heure à t'invectir, te provoquer, mettre le boxon en cours pour être bien sûr que personne ne peut travailler ou même dormir tranquillement, t'apostrophent pour tout et pour rien et se mettent en colère si tu ne réponds pas à leur question du genre "Madame vous aimez les kebabs / vous gagnez combien / avez acheté vos chaussures où? Donc ces élèves-là j'ai peur que si je les isole, ils aillent râler à la direction / CPE / leurs parents en mode "Mme machin elle m'aime pas, elle veut pas que je travaille parce qu'elle m'a isolé en fond de classe, j'ai même pas le droit de travailler car je tourne le dos au tableau", en mode "je suis trop victime de discrimination" (manque plus que le mot raciste et je me fais virer, non ?). Donc je me demande si c'est vraiment faisable cette disposition...

C’est pourquoi j’avais fait ce dispositif et avec l’aval du CDE.

Lisak, bien sûr que ce n'est pas une "bonne" solution, mais à un moment, ça va bien de se battre contre les moulins à vent. Pour moi qui suis en élémentaire, c'est un peu différent. Mais si ça ne plaît pas en haut lieu, qu'on vienne nous montrer comment s'y prendre, et pas un quart d'heure, une journée entière, semaine après semaine. Et avec autre chose que des tablettes et des trucs ludiques pour faire joujou. Ce qui n'est pas normal, c'est cette aboulie, cette inappétence totale pour la découverte et le savoir, qui n'a l'air d'inquiéter personne.

Ah, tiens, en parlant de curiosité, mon conjoint travaille dans un collège où les 5e ont un voyage en Angleterre sur le thème de la magie.Ils vont donc visiter les studios Harry Potter. Un élève a refusé de partir parce que cela l'empêchait de jouer à la ps4 pendant 4 jours...
Quant à mes 3e, ils ont toutes les peines du monde à me trouver des exemples tirés de l'actualité pour argumenter, ne savent pas qui a inventé Mickey, ne connaissent pas les héros Marvel et j'ai réalisé que je savais mieux qu'eux comment fonctionnaient les réseaux sociaux sur lesquels ils passent portant leurs journées... Mais sur le papier, c'est une super classe...

Hermiony a écrit:Ah, tiens, en parlant de curiosité, mon conjoint travaille dans un collège où les 5e ont un voyage en Angleterre sur le thème de la magie.Ils vont donc visiter les studios Harry Potter. Un élève a refusé de partir parce que cela l'empêchait de jouer à la ps4 pendant 4 jours...
Quant à mes 3e, ils ont toutes les peines du monde à me trouver des exemples tirés de l'actualité pour argumenter, ne savent pas qui a inventé Mickey, ne connaissent pas les héros Marvel et j'ai réalisé que je savais mieux qu'eux comment fonctionnaient les réseaux sociaux sur lesquels ils passent portant leurs journées... Mais sur le papier, c'est une super classe...

On cherche des volontaires pour SNT ;-)

Verdurette a écrit: Et avec autre chose que des tablettes et des trucs ludiques pour faire joujou.

Comme les classes en îlots, en V, en U, ou en paquets... Tout cela n'est que cosmétique.

Ce qui n'est pas normal, c'est cette aboulie, cette inappétence totale pour la découverte et le savoir, qui n'a l'air d'inquiéter personne.

Effectivement, des solutions sont proposées alors que les causes réelles sont volontairement ignorées.

Verdurette a écrit:Ce qui n'est pas normal, c'est cette aboulie, cette inappétence totale pour la découverte et le savoir, qui n'a l'air d'inquiéter personne.

Avec des écrans pour divertir en permanence, on n'a pas le temps de s'intéresser au monde physique. Avant, avec les écrans cathodiques, il y avait une limite automatique au temps passé devant.
Je vois aussi un autre facteur, qui est l'évolution de l'attitude face au savoir, venant du poncif selon lequel grâce à la grande bibliothèque Internet ce n'est plus la connaissance qui prime mais l'esprit critique et les compétences documentaires (sauf que si par exemple ce que je cherche est uniquement disponible dans une publication scientifique en russe, il me manquera des connaissances…).

@Roxanne : je me vois mal demander cela à mon équipe de direction et l'expliquer au CPE, et pourtant je ne ne suis pas dans un établissement "bisounours", enfin je ne sais pas... Comme je suis tout juste fraîchement sortie de l'ESPE, j'ai toujours entendu que l'exclusion n'était justifiée qu'en cas de mise en danger d'autrui, or pour moi, mettre un élève en fond de classe le dos au tableau c'est une forme d'exclusion... Encore, et désolée si je ne suis pas assez claire, je ne critique pas, je me demande juste comment on pourrait éventuellement expliquer et justifier  une telle disposition de classe dans le contexte actuel de politique EN / ESPE  "bisousnours / un élève qui frappe son prof / qui le menace d'une arme est un élève en souffrance qui est maltraité par l'institution / la vie donc il doit être excusé et cet enseignant qui lui a mis un 0 mérite ce qui lui arrive".
@Verdurette : mais je suis aussi totalement d'accord avec toi ! Je suis aussi tout effarée que vous de voir que notre système "républicain égalitaire" bien loin de consolider l'ascenseur social pour que tous les élèves issus des milieux défavorisés aient accès à l'éducation dans les mêmes conditions que celui dont le père est chirurgien et la mère avocate et puissent donc s'élever dans la société, ne fait que les enfoncer car au lieu de les faire bosser normalement on doit biberonner les 2-3 (plutôt 10 dans mes groupes) qui n'ont aucune volonté/éducation/ambition réaliste (même Kylian M'Bappé n'est plus un modèle pour eux : le foot, c'est trop fatiguant). J'en ai autant que beaucoup d'entre nous ici marre de me battre pour des gens qui ne veulent absolument rien, à part bouffer des kebabs, glander, et regarder les Chtis à Marseille ! Pour autant, je sais bien que personne (parents et grand public qui penseent pourtant qu'être prof c'est passer 18h par semaine le c*l sur sa chaise à dicter (oui) des trucs aux élèves, certains inspecteurs, les pontes de l'EN, les pédo-psys et autres théoriciens, le ministre et son cabinet etc.) ne souhaiterait prendre notre place, ne serait-ce qu'une minute, donc oui ils savent que ce n'est pas un métier facile, mais dès qu'on explique à tous ces gens comment on bidouille tout le temps, partout, afin d'essayer que le tout fonctionne à peu près, on nous tombe dessus à coup de "on ne rend pas le cours assez ludique / intéressant / spirituel / transfigurant ou je sais pas quoi" et donc que non on ne peut pas laisser ceux qui ne veulent absolument rien f*** derrière sinon on ne vaut même pas d'être vue comme être humain (oui j'exagère, mais pas tant que ça. Vécu...). Et oui, cette aboulie acceptée par tous et pour tous me fait aussi peur que toi...

Lisak35 :" j'ai toujours entendu que l'exclusion n'était justifiée qu'en cas de mise en danger d'autrui, or pour moi, mettre un élève en fond de classe le dos au tableau c'est une forme d'exclusion".

" L'article L 912-1 du Code de l'éducation prévoit que les enseignants sont responsables de l'ensemble
des  activités  scolaires  des  élèves  et,  à  ce  titre,  une  décision  d'exclusion  de  cours  peut  être  prise  en
fonction de l'intérêt général et pour assurer la continuité des activités de la classe.
Justifiée  par  un  comportement  inadapté  au  bon  déroulement  d'un  cours,  l'exclusion  ponctuelle  doit
demeurer  exceptionnelle  et  donner  lieu  systématiquement  à  une  information  écrite  au  conseiller
principal  d'éducation  ainsi  qu'au  chef  d'établissement.  Elle  s'accompagne  d'une  prise  en  charge  de
l'élève  dans  le  cadre  d'un  dispositif  prévu  à  cet  effet  de  manière  à  assurer  la  continuité  de  la
surveillance. "

http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Sanctions_disciplinaires/84/6/03-l-exclusion_197846.pdf

et :

"Article L912-1

   Modifié par Loi n°2005-380 du 23 avril 2005 - art. 47 JORF 24 avril 2005

Les enseignants sont responsables de l'ensemble des activités scolaires des élèves. Ils travaillent au sein d'équipes pédagogiques ; celles-ci sont constituées des enseignants ayant en charge les mêmes classes ou groupes d'élèves ou exerçant dans le même champ disciplinaire et des personnels spécialisés, notamment les psychologues scolaires dans les écoles. Les personnels d'éducation y sont associés.

Les enseignants apportent une aide au travail personnel des élèves et en assurent le suivi. Ils procèdent à leur évaluation. Ils les conseillent dans le choix de leur projet d'orientation en collaboration avec les personnels d'éducation et d'orientation. Ils participent aux actions de formation continue des adultes et aux formations par apprentissage.

Ils contribuent à la continuité de l'enseignement sous l'autorité du chef d'établissement en assurant des enseignements complémentaires.

Leur formation les prépare à l'ensemble de ces missions."

https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006525568&cidTexte=LEGITEXT000006071191&dateTexte=20090112

Voilà.

Lisak35 a écrit:marre de me battre pour des gens qui ne veulent absolument rien, à part bouffer des kebabs, glander, et regarder les Chtis à Marseille !

Il y a bien longtemps que je ne veux plus rien pour eux également. Je regrette simplement que ma fonction d'enseignant m'ait amené à les fréquenter.

D'abord, c'était en fin d'année pas en décembre, et justement, je n'ai mis personne dos au mur, ni exclu qui que ce soit, j'ai fait la fameuse "pédagogie différenciée".

"j'ai fait la fameuse "pédagogie différenciée"
J'ai bien entendu la note d'humour que contient cette phrase, mais même dans le cas contraire vous n'avez pas à vous justifier de quoique ce soit. Auprès de supérieurs hiérarchiques obtus peut-être mais pas sur ce forum.

Ah mais j'avais un CDE à l'ancienne qui même s'il râlait un peu nous soutenait. Une fois, j'avais collé tous les élèves de 3e qui avaient eu moins de 8 à un contrôle de lecture, ce qui faisait 25 élèves sur mes deux classes. Je suis venue les surveiller moi-même un mercredi après-midi, lui était un peu dubitatif sur le mode" bon, on va avoir les parents sur le dos" mais il est venu donner les bulletins de colle en personne en cours à chaque élève, du coup, personne n'avait râlé, ils étaient tous venus et tous les autres livres ont été lus y compris parles autres classes qui avaient eu vent de l'affaire et ce pendant plusieurs années. Certes, j'avais "sacrifié" un mercredi mais ça a fait son petit effet. C'est sûr que si on m'avait dit que ce n'était pas possible et qu'il avait annulé la colle au premier coup de fil de parents, c'était foutu.

Hermiony a écrit:Ah, tiens, en parlant de curiosité, mon conjoint travaille dans un collège où les 5e ont un voyage en Angleterre sur le thème de la magie.Ils vont donc visiter les studios Harry Potter. Un élève a refusé de partir parce que cela l'empêchait de jouer à la ps4 pendant 4 jours...

Ah tiens, pareil ici. L'an dernier on a organisé un voyage Antiquité / Préhistoire dans le sud de la France pour les 6e : gros succès. Cette année, on n'arrive pas à remplir : il y en a une bonne douzaine (sur deux classes) qui ne veulent pas venir, parce que ça ne leur dit rien, parce que le copain ou la copine ne vient pas alors bah eux non plus, parce qu'ils préfèrent rester jouer chez eux (ah ben non mon coco tu iras en cours, faut pas rêver). Le tout avec des parents qui disent "oui" puis "non il n'a plus envie" puis "bon allez d'accord" puis "ben finalement non". Ma collègue qui leur téléphone pour essayer d'obtenir les papiers signés et les premiers chèques s'arrache les cheveux et on va être obligées d'ouvrir aux latinistes de 5e qui ne sont pas venus l'an dernier pour pouvoir partir sans augmenter les prix de façon délirante pour les autres (au moment du premier sondage il y avait suffisamment de "oui", et le premier versement est déjà parti, impossible d'annuler le voyage...)

Je vénère les collègues qui continuent à organiser des voyages...

Ben écoute, l'an dernier ça avait été mon premier, ça s'était super bien passé, les gamins étaient sortis de la grotte Chauvet et des arènes de Nîmes avec des oh et des ah et des étoiles dans les yeux, avaient été très mignons pendant tout le séjour (les pires incidents ayant été quelques vomis dans le car et un zozo qui a jeté des frites sur ses copains au Buffalo Grill), avaient rendus des livrets de voyage très enthousiastes, les parents nous avaient chaudement remerciées et nous avaient attendus au retour du car avec un gros bouquet de fleurs pour chaque prof. Donc on a eu envie de recommencer. Mais là c'est sûr que ça nous douche un peu :|

Lefteris a écrit:

acsyle a écrit:

Lefteris a écrit:
D'autres n'ont pu écrire autre chose que "j'aime les kebabs", ou "j'aime les jeux vidéo"...

Du pain et des jeux. Ils sont prêts à être gouvernés.

Le nouvelle formule correspondant à "du pain et des jeux" a été théorisée  sous le nom de tittytainment. Le capitalisme n'a pas besoin  de 80 % des gens, ou alors comme main d'oeuvre occasionnelle mal payée. Il faut donc l'occuper. Je ressers cet article intéressant de Michéa, mais il y en a des tas d'autres sur le sujet
https://miscellanees01.wordpress.com/2015/09/11/jean-claude-michea-le-tittytainment-et-lenseignement-de-lignorance/

Mais ne sommes-nous pas à blâmer, nous qui essayons de transmettre des connaissances, d'apprendre aux élèves à raisonner ? Dans un monde de Tuches, chtis à Marseille et autres horreurs, un esclave savant et sachant raisonner n'est-il pas plus à plaindre qu'un esclave *** ?

roxanne a écrit:Ah mais j'avais un CDE à l'ancienne qui même s'il râlait un peu nous soutenait. [...] C'est sûr que si on m'avait dit que ce n'était pas possible et qu'il avait annulé la colle au premier coup de fil de parents, c'était foutu.

dita a écrit: un esclave savant et sachant raisonner n'est-il pas plus à plaindre qu'un esclave *** ?

Être une heure, une heure seulement
Être une heure, une heure quelquefois
Être une heure, rien qu'une heure durant
Beau, beau, beau et con à la fois !  

Dhaiphi a écrit:

Lisak35 a écrit:marre de me battre pour des gens qui ne veulent absolument rien, à part bouffer des kebabs, glander, et regarder les Chtis à Marseille !

Il y a bien longtemps que je ne veux plus rien pour eux également. Je regrette simplement que ma fonction d'enseignant m'ait amené à les fréquenter.

quel mépris! On n'est pas enseignant que pour les bons élèves, si tu ne cherches qu'à fréquenter dans tes classes des clones de ce que tu as été comme élève change de métier!On est là pour les é.le.ver c'est notre boulot.

Le but de l'école est d'instruire les élèves. Les éduquer est nécessaire au bon déroulement des cours, mais n'est pas le but final.

tit871 a écrit:Quel mépris ! On est là pour les é.le.ver c'est notre boulot.

Je suis bien au-delà du mépris. Je peux instruire un élève s'il le souhaite, s'il ne le souhaite pas moi non plus.

tit871 a écrit:quel mépris! On n'est pas enseignant que pour les bons élèves, si tu ne cherches qu'à fréquenter dans tes classes des clones de ce que tu as été comme élève change de métier!On est là pour les é.le.ver c'est notre boulot.

On ne parle pas de la même chose.
I y a un gouffre entre un "bon élève", entre "toi il y a trente ans" et les élèves qui s'amènent en classe sans matos, sans avoir fait les devoirs,sans avoir rien appris, mais sans trouver cela problématique, qui posent leur séant sur la chaise et passent le cours bouche ouverte, quelqu que soit le volume sonore, invectivant au passage le prof à chaque fois que ce dernier tente de les rappeler à l'ordre. Ou qui sabotent bien le tout, à grand renfort d'insolence, et retournent la classe entière.

Je suis prof, pas Wonder Woman.