Page 1 sur 3 • 1, 2, 3
- dassonNiveau 5
Bonjour,
J'ai lu ici et là que la place laissée à l'apprentissage de la démonstration était restreinte dans les récents programmes.
Depuis quelques dizaines d'années il m'a semblé que cet apprentissage constituait une part importante de l'enseignement des mathématiques, lié pour moi à l'apprentissage du français.
Pas assez de temps, trop difficile, ringard ?
Je vois par exemple que les angles inscrits ne sont plus "au programme" ?
Leur utilisation serait pourtant agréable aux Dieux grecs, les meilleursspinning smiley sticking its tongue out
Un exemple d'utilisation qui donne l'occasion d'une démonstration d'une propriété remarquablement simple :
https://www.youtube.com/watch?v=zJj2gnI7o48&t=13s
J'ai lu ici et là que la place laissée à l'apprentissage de la démonstration était restreinte dans les récents programmes.
Depuis quelques dizaines d'années il m'a semblé que cet apprentissage constituait une part importante de l'enseignement des mathématiques, lié pour moi à l'apprentissage du français.
Pas assez de temps, trop difficile, ringard ?
Je vois par exemple que les angles inscrits ne sont plus "au programme" ?
Leur utilisation serait pourtant agréable aux Dieux grecs, les meilleursspinning smiley sticking its tongue out
Un exemple d'utilisation qui donne l'occasion d'une démonstration d'une propriété remarquablement simple :
https://www.youtube.com/watch?v=zJj2gnI7o48&t=13s
- Jean RoussieNiveau 1
La démonstration formelle comme elle s'enseignait en s'appuyant sur la géométrie n'est plus forcément à l'ordre du jour et semble remplacée par le concept plus vague de "preuve". Des pans entiers de la géométrie (théorème des milieux, angles inscrits...) sont sortis du programme du collège alors que la translation et la rotation sont réintroduits bien que les vecteurs n'entrent en jeu qu'en classe de seconde.
Cependant les règles de calcul algébrique peuvent permettre d'introduire la démonstration algébrique à partir d'exemples génériques dès la cinquième (par exemple l'impossibilité de la division par zéro) ou dans des cas généraux à partir de la quatrième (division et multiplication par l'inverse, somme de fractions, produits de relatifs) ...
L'important reste de leur apprendre à construire et à exprimer un raisonnement logique, de maitriser les techniques de calcul et d'avoir un regard critique sur des informations statistiques... avec chaque semaine 3,5h de mathématiques et un minimum de 7h de lobotomie par les écrans.
Le challenge est de taille, Sisyphe à côté ferait office de petit bras...
Cependant les règles de calcul algébrique peuvent permettre d'introduire la démonstration algébrique à partir d'exemples génériques dès la cinquième (par exemple l'impossibilité de la division par zéro) ou dans des cas généraux à partir de la quatrième (division et multiplication par l'inverse, somme de fractions, produits de relatifs) ...
L'important reste de leur apprendre à construire et à exprimer un raisonnement logique, de maitriser les techniques de calcul et d'avoir un regard critique sur des informations statistiques... avec chaque semaine 3,5h de mathématiques et un minimum de 7h de lobotomie par les écrans.
Le challenge est de taille, Sisyphe à côté ferait office de petit bras...
_________________
Où il y a une volonté, il y a un chemin...
- Badiste75Habitué du forum
Le théorème des milieux n'est pas hors programme. Certes les documents d'accompagnement ne sont pas prescriptifs mais ils en parlent. Et je ne suis que prof de lycée.
voir page 4 :
http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Geometrie_plane/31/2/RA16_C4_MATH_geo_plane_doc_maitre_574312.pdf
voir page 4 :
http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Geometrie_plane/31/2/RA16_C4_MATH_geo_plane_doc_maitre_574312.pdf
- dassonNiveau 5
Merci à Jean Roussie pour sa réponse qui élargit mon propos et éclaire de façon simple la situation actuelle.
Je pensais à l'apprentissage de la démonstration en géométrie que j'enseignais au siècle dernier. Le premier exemple en sixième portait sur les médiatrices d'un triangle.
Insistance classique sur la distinction à faire entre "ce qui est connu" (on disait plus souvent hypothèse) et ce qui est à démontrer (conclusion), chaque affirmation devant être justifiée en référence à l'hypothèse ou bien à un résultat de cours ou bien à un résultat déjà démontré, en recherchant précision et concision...
Et on roulait aussi sa bosse de Sisyphe
https://www.youtube.com/watch?v=M5weURcXZU8
Merci à Badiste75 pour le lien vers une page que j'aurais du lire, c'est bien écrit.
Et j'y ai appris que les quelques vidéos récentes que j'ai commises sur les transformations et qualifiées de "conformes aux programmes du cycle 4" ne sont pas tellement conformes !
Je pensais à l'apprentissage de la démonstration en géométrie que j'enseignais au siècle dernier. Le premier exemple en sixième portait sur les médiatrices d'un triangle.
Insistance classique sur la distinction à faire entre "ce qui est connu" (on disait plus souvent hypothèse) et ce qui est à démontrer (conclusion), chaque affirmation devant être justifiée en référence à l'hypothèse ou bien à un résultat de cours ou bien à un résultat déjà démontré, en recherchant précision et concision...
Et on roulait aussi sa bosse de Sisyphe
https://www.youtube.com/watch?v=M5weURcXZU8
Merci à Badiste75 pour le lien vers une page que j'aurais du lire, c'est bien écrit.
Et j'y ai appris que les quelques vidéos récentes que j'ai commises sur les transformations et qualifiées de "conformes aux programmes du cycle 4" ne sont pas tellement conformes !
- William FosterExpert
dasson a écrit:(...)
Merci à Badiste75 pour le lien vers une page que j'aurais du lire, c'est bien écrit.
Et j'y ai appris que les quelques vidéos récentes que j'ai commises sur les transformations et qualifiées de "conformes aux programmes du cycle 4" ne sont pas tellement conformes !
Mais comme les programmes de cycle 4 ne sont pas vraiment conformes aux programmes de cycle 4 (Cf ex. 1 du DNB métropole 2017), notamment sur les transformations, je crois que ce n'est pas vraiment grave et qu'il vaut mieux une vidéo/ une leçon / une vision intéressante qu'un truc conforme
_________________
Tout le monde me dit que je ne peux pas faire l'unanimité.
"Opinions are like orgasms : mine matters most and I really don't care if you have one." Sylvia Plath
Vérificateur de miroir est un métier que je me verrais bien faire, un jour.
- PrezboGrand Maître
Jean Roussie a écrit:La démonstration formelle comme elle s'enseignait en s'appuyant sur la géométrie n'est plus forcément à l'ordre du jour et semble remplacée par le concept plus vague de "preuve". Des pans entiers de la géométrie (théorème des milieux, angles inscrits...) sont sortis du programme du collège alors que la translation et la rotation sont réintroduits bien que les vecteurs n'entrent en jeu qu'en classe de seconde.
Cependant les règles de calcul algébrique peuvent permettre d'introduire la démonstration algébrique à partir d'exemples génériques dès la cinquième (par exemple l'impossibilité de la division par zéro) ou dans des cas généraux à partir de la quatrième (division et multiplication par l'inverse, somme de fractions, produits de relatifs) ...
Bonjour,
je me permets d'intervenir, moi qui suis prof en lycée, père d'une collégienne et parfois un peu perplexe quand je vois le travail qu'elle ramène à la maison.
J’avoue que je ne suis même pas sûr de bien cerner ce qu'est une "démonstration algébrique". Tu aurais un exemple ?
Globalement, les élèves qui arrivent aujourd'hui au lycée ont une vision très nébuleuse de ce qu'est une démonstration, ou même simplement de ce qui est attendu dans une question qui commence par "montrer que".
(Mais on peut prolonger plus tard : je suis colleur en maths sup, je vois que les bacheliers S fraichement diplômés ont une vision très nébuleuse de ce qu'est un théorème ou une hypothèse à vérifier.)
Le problème ne me semble pas la conscience professionnelle individuelle des profs de maths, en majorité bonne, mais bien les programmes, et, plus profondément, les conceptions des mathématiques qu'ils sous-entendent.
Jean Roussie a écrit:
L'important reste de leur apprendre à construire et à exprimer un raisonnement logique, de maitriser les techniques de calcul et d'avoir un regard critique sur des informations statistiques... avec chaque semaine 3,5h de mathématiques et un minimum de 7h de lobotomie par les écrans.
Le challenge est de taille, Sisyphe à côté ferait office de petit bras...
Sur le début de ce passage, bien d'accord. (Et 7h me semble très en-dessous de la moyenne réelle...)
Pour ce qui est du regard critique sur les informations statistiques, je dirais qu’en l'état actuel des choses ce n'est peut-être pas le plus urgent tant qu'on n'a pas un minimum d’idées préalablement claires en maths, et d'ailleurs pas forcément uniquement le problème des maths.)
- pailleauquebecFidèle du forum
Il y a plusieurs aspects de ce problème.
Tout d'abord il y a une passion historique française de la géométrie déductive (relire le discours de la méthode de Descartes dans lequel il explique qu'il a découvert les mécanismes de la pensée rationnelle à travers la géométrie). Le raisonnement géométrique était très formalisé dans le but de travailler aussi la rédaction, la logique et la rigueur.
Nous avions un corpus d'exercices très complet permettant de former l'élève au raisonnement déductif.
Nos professeurs de mathématiques ont été formés à cet exercice au moins jusqu'aux années 90. Cette géométrie a permis de former au raisonnement avec une assez grande efficacité des générations entières d'élèves.
D'ailleurs, petite parenthèse en passant, la critique des dérives technologiques de nos sociétés a fait beaucoup de mal par ricochet à la pensée rationnelle, qui reste pour moi une condition pour permettre un minimum d'éveil des consciences. Pour moi la démonstration et la formation au raisonnement permet ensuite d'accéder au raisonnement philosophique.
Le problème c'est que les tests internationaux qui sont maintenant nos objectifs depuis une vingtaine d'années sont très pauvres en géométrie Euclidienne déductive.
De plus, le numérique a fortement poussé à la substitution de la géométrie Euclidienne par la géométrie analytique. C'est d'ailleurs la seule géométrie qui subsiste (calculs de longueurs et d'angles, travail dans un repère, droites, courbes,...).
Un dernier phénomène plus récent est la volonté de former au raisonnement par l'algorithmique qui viendrait se substituer à la géométrie. Mais nous n'avons pas de preuve que cet enseignement donnera d'aussi bons résultats (mon avis est qu'il est très probable que ce ne soit pas le cas, pour beaucoup de raisons, mais cela reste à prouver).
Pour ma part j'ai choisi de garder un vrai enseignement de la géométrie (déductive et analytique) et de réduite la part de l'algorithmique. J'ai aussi choisi de formaliser un minimum.
Dans les arbitrages que j'ai du faire j'ai beaucoup réduit mes heures en salle info, et on a de supers collègues de techno qui enseignent le plus possible d'algorithmique.
Il est d'ailleurs urgent de se faire ses propres manuels/fiches d'exercices, pour pouvoir réellement faire des choix en conscience, car du côté des manuels, en géométrie c'est la misère intellectuelle.
Les programmes sont de plus en plus flous et contradictoires. Par exemple les cas d'égalité des triangles font leur retour. Il est aussi maintenant possible de les dépasser (c'est explicitement autorisé). Beaucoup de notions disparaissent en effet.
Ce qui a fait beaucoup de mal, ce sont les discours en formation : bienveillance, complaisance, et manque d’exigence.
Ce qui a conduit les collègues, surchargés et fatigués (et parfois fainéants), à interpréter à minima les programmes.
Il faut quand même dire qu'on peut former au raisonnement autrement que par la géométrie en algèbre et en arithmétique par exemple. Mais cela demande des exercices un minimum exigeants et un cours consistant sur ces sujets.
Même les manuels de Singapour utilisent un peu de géométrie pour former au raisonnement (les chapitres sur les calculs d'angles dans les figures sont d'ailleurs excellents). Mais celle-ci est peu formalisée.
Tout d'abord il y a une passion historique française de la géométrie déductive (relire le discours de la méthode de Descartes dans lequel il explique qu'il a découvert les mécanismes de la pensée rationnelle à travers la géométrie). Le raisonnement géométrique était très formalisé dans le but de travailler aussi la rédaction, la logique et la rigueur.
Nous avions un corpus d'exercices très complet permettant de former l'élève au raisonnement déductif.
Nos professeurs de mathématiques ont été formés à cet exercice au moins jusqu'aux années 90. Cette géométrie a permis de former au raisonnement avec une assez grande efficacité des générations entières d'élèves.
D'ailleurs, petite parenthèse en passant, la critique des dérives technologiques de nos sociétés a fait beaucoup de mal par ricochet à la pensée rationnelle, qui reste pour moi une condition pour permettre un minimum d'éveil des consciences. Pour moi la démonstration et la formation au raisonnement permet ensuite d'accéder au raisonnement philosophique.
Le problème c'est que les tests internationaux qui sont maintenant nos objectifs depuis une vingtaine d'années sont très pauvres en géométrie Euclidienne déductive.
De plus, le numérique a fortement poussé à la substitution de la géométrie Euclidienne par la géométrie analytique. C'est d'ailleurs la seule géométrie qui subsiste (calculs de longueurs et d'angles, travail dans un repère, droites, courbes,...).
Un dernier phénomène plus récent est la volonté de former au raisonnement par l'algorithmique qui viendrait se substituer à la géométrie. Mais nous n'avons pas de preuve que cet enseignement donnera d'aussi bons résultats (mon avis est qu'il est très probable que ce ne soit pas le cas, pour beaucoup de raisons, mais cela reste à prouver).
Pour ma part j'ai choisi de garder un vrai enseignement de la géométrie (déductive et analytique) et de réduite la part de l'algorithmique. J'ai aussi choisi de formaliser un minimum.
Dans les arbitrages que j'ai du faire j'ai beaucoup réduit mes heures en salle info, et on a de supers collègues de techno qui enseignent le plus possible d'algorithmique.
Il est d'ailleurs urgent de se faire ses propres manuels/fiches d'exercices, pour pouvoir réellement faire des choix en conscience, car du côté des manuels, en géométrie c'est la misère intellectuelle.
Les programmes sont de plus en plus flous et contradictoires. Par exemple les cas d'égalité des triangles font leur retour. Il est aussi maintenant possible de les dépasser (c'est explicitement autorisé). Beaucoup de notions disparaissent en effet.
Ce qui a fait beaucoup de mal, ce sont les discours en formation : bienveillance, complaisance, et manque d’exigence.
Ce qui a conduit les collègues, surchargés et fatigués (et parfois fainéants), à interpréter à minima les programmes.
Il faut quand même dire qu'on peut former au raisonnement autrement que par la géométrie en algèbre et en arithmétique par exemple. Mais cela demande des exercices un minimum exigeants et un cours consistant sur ces sujets.
Même les manuels de Singapour utilisent un peu de géométrie pour former au raisonnement (les chapitres sur les calculs d'angles dans les figures sont d'ailleurs excellents). Mais celle-ci est peu formalisée.
- JPhMMDemi-dieu
Pas que française.pailleauquebec a écrit:Il y a plusieurs aspects de ce problème.
Tout d'abord il y a une passion historique française de la géométrie déductive.
Lire Euclide, à ce titre, par exemple.
_________________
Labyrinthe où l'admiration des ignorants et des idiots qui prennent pour savoir profond tout ce qu'ils n'entendent pas, les a retenus, bon gré malgré qu'ils en eussent. — John Locke
Je crois que je ne crois en rien. Mais j'ai des doutes. — Jacques Goimard
- Jean RoussieNiveau 1
@Prezbo : Je ne fais pas le défenseur des nouveaux programmes, je ne fais qu'exprimer ce que j'en ai compris dans la formation reçue lors de mon stage à l'ESPE et dans les journées de stage de formation (formatage ?) dispensés par nos IPR lors de la mise en place de la réforme ou de la lecture des documents officiels.
Je suis personnellement persuadé que l'apprentissage de la démonstration formelle est un excellent (indispensable ?) exercice pour apprendre à structurer sa pensée. La géométrie proposait un terrain d'expérimentation idéal pour (essayer de) transmettre ça à nos élèves de collège. Ce n'est plus ce que semble penser l'institution dont nous sommes des rouages. J'en prend acte bien que je le déplore.
Pour ce qui est d'exemples de démonstrations algébriques, on peut utiliser la définition du quotient pour prouver qu'en multipliant numérateur et dénominateur par le même nombre non nul on ne change pas la valeur d'un quotient ; que le quotient de deux nombres peut se ramener à un produit ou prouver la méthode de sommation de deux fractions de même dénominateur; que la division par zéro est impossible qui est une démonstration par l'absurde abordable dès la cinquième. On peut aussi construire les méthodes de multiplication de relatifs à partir de la multiplication par zéro et de la définition de l'opposé d'un nombre. La liste est loin d'être exhaustive.
"La démonstration du théorème des milieux n'est plus un attendu du programme", cela illustre mon propos. Il va de soit que le traiter n'est pas interdit. En fait, sans le dire, au nom de la différentiation et sous couvert d'approfondissements possibles, on segmente l'enseignement et (à mon humble avis) on sonne le glas du service public d'éducation nationale.
Je suis personnellement persuadé que l'apprentissage de la démonstration formelle est un excellent (indispensable ?) exercice pour apprendre à structurer sa pensée. La géométrie proposait un terrain d'expérimentation idéal pour (essayer de) transmettre ça à nos élèves de collège. Ce n'est plus ce que semble penser l'institution dont nous sommes des rouages. J'en prend acte bien que je le déplore.
Pour ce qui est d'exemples de démonstrations algébriques, on peut utiliser la définition du quotient pour prouver qu'en multipliant numérateur et dénominateur par le même nombre non nul on ne change pas la valeur d'un quotient ; que le quotient de deux nombres peut se ramener à un produit ou prouver la méthode de sommation de deux fractions de même dénominateur; que la division par zéro est impossible qui est une démonstration par l'absurde abordable dès la cinquième. On peut aussi construire les méthodes de multiplication de relatifs à partir de la multiplication par zéro et de la définition de l'opposé d'un nombre. La liste est loin d'être exhaustive.
"La démonstration du théorème des milieux n'est plus un attendu du programme", cela illustre mon propos. Il va de soit que le traiter n'est pas interdit. En fait, sans le dire, au nom de la différentiation et sous couvert d'approfondissements possibles, on segmente l'enseignement et (à mon humble avis) on sonne le glas du service public d'éducation nationale.
_________________
Où il y a une volonté, il y a un chemin...
- PrezboGrand Maître
pailleauquebec a écrit:Il y a plusieurs aspects de ce problème.
Tout d'abord il y a une passion historique française de la géométrie déductive (relire le discours de la méthode de Descartes dans lequel il explique qu'il a découvert les mécanismes de la pensée rationnelle à travers la géométrie). Le raisonnement géométrique était très formalisé dans le but de travailler aussi la rédaction, la logique et la rigueur.
Nous avions un corpus d'exercices très complet permettant de former l'élève au raisonnement déductif.
Nos professeurs de mathématiques ont été formés à cet exercice au moins jusqu'aux années 90. Cette géométrie a permis de former au raisonnement avec une assez grande efficacité des générations entières d'élèves.
D'ailleurs, petite parenthèse en passant, la critique des dérives technologiques de nos sociétés a fait beaucoup de mal par ricochet à la pensée rationnelle, qui reste pour moi une condition pour permettre un minimum d'éveil des consciences. Pour moi la démonstration et la formation au raisonnement permet ensuite d'accéder au raisonnement philosophique.
Le problème c'est que les tests internationaux qui sont maintenant nos objectifs depuis une vingtaine d'années sont très pauvres en géométrie Euclidienne déductive.
Je ne suis pas sûr que le déclin de la géométrie déductive commence avec la montée en puissance des tests internationaux. Ils ont peut-être eu un rôle, mais seulement dans un passé récent, et le déclin me semble avoir commencé avant.
Sans être un spécialiste de l'histoire de l'enseignement, il y a sans doute eu une "passion" pour cet enseignement avant la période des maths modernes, un quasi-oubli pendant cette période, puis une réintroduction, mais une réintroduction à moité, sans le remettre franchement au cœur le l'enseignement des maths.
Puis, par la suite, comme cet enseignement est exigeant, qu’il faut y passer du temps pour le faire correctement et qu'il peut se montrer sélectif (en gros, certains élèves peuvent y rester bloqué), et qu'on arrivait en plein dans la période de massification, on l'a affaibli, peu à peu, mais sans jamais vraiment l'assumer.
D'où cette situation de milieu du gué actuel : des éléments de géométrie qui me semblent rester au programme du collège, mais saupoudrés de façon disparate, trop lacunaires pour faire un tout cohérent, trop peu poussés pour permettre de faire des démonstrations vraiment motivantes intellectuellement.
Faut-il revenir à la situation antérieure, alors que les pressions sont fortes pour faire aussi autre chose en maths ? Je ne sais pas. Je ne sais pas si c'est réaliste. En tout cas, si on veut faire (bien) de la géométrie déductive, il faudrait du temps, et des programmes complets et cohérents.
pailleauquebec a écrit:
De plus, le numérique a fortement poussé à la substitution de la géométrie Euclidienne par la géométrie analytique. C'est d'ailleurs la seule géométrie qui subsiste (calculs de longueurs et d'angles, travail dans un repère, droites, courbes,...).
Un dernier phénomène plus récent est la volonté de former au raisonnement par l'algorithmique qui viendrait se substituer à la géométrie. Mais nous n'avons pas de preuve que cet enseignement donnera d'aussi bons résultats (mon avis est qu'il est très probable que ce ne soit pas le cas, pour beaucoup de raisons, mais cela reste à prouver).
Pour ma part j'ai choisi de garder un vrai enseignement de la géométrie (déductive et analytique) et de réduite la part de l'algorithmique. J'ai aussi choisi de formaliser un minimum.
Dans les arbitrages que j'ai du faire j'ai beaucoup réduit mes heures en salle info, et on a de supers collègues de techno qui enseignent le plus possible d'algorithmique.
Il est d'ailleurs urgent de se faire ses propres manuels/fiches d'exercices, pour pouvoir réellement faire des choix en conscience, car du côté des manuels, en géométrie c'est la misère intellectuelle.
Les programmes sont de plus en plus flous et contradictoires. Par exemple les cas d'égalité des triangles font leur retour. Il est aussi maintenant possible de les dépasser (c'est explicitement autorisé). Beaucoup de notions disparaissent en effet.
Ce qui a fait beaucoup de mal, ce sont les discours en formation : bienveillance, complaisance, et manque d’exigence.
Ce qui a conduit les collègues, surchargés et fatigués (et parfois fainéants), à interpréter à minima les programmes.
Il faut quand même dire qu'on peut former au raisonnement autrement que par la géométrie en algèbre et en arithmétique par exemple. Mais cela demande des exercices un minimum exigeants et un cours consistant sur ces sujets.
Le problème des raisonnements dans d'autres domaines de la géométrie, c'est qu'il me semblent encore beaucoup plus abstraits et hors-sol pour les élèves, si on veut les fonder sur des définitions rigoureuse. C'est l'impression que me donnent les exemples cités par Jean Roussie, mais encore une fois il faudrait voir un exemple de ce qui est exigé en matière de rédaction.
Sinon, ma fille qui est en quatrième, classe et collège plutôt de bon niveau, ne m'a jamais ou presque ramené un exemple de démonstration à rédiger à la maison. Dire qu'il n'est "pas interdit" de traiter certains points, j'ai peur que ça signifie concrètement que seuls quelques-un des derniers des mohicans les traiteront.
- AndréCNiveau 9
Je n'ai pas regardé les programme de sup, mais les transformations telles qu'elles sont vues au collège permettent de faire comprendre simplement ce qu'un un groupe par exemple.Prezbo a écrit:
D'où cette situation de milieu du gué actuel : des éléments de géométrie qui me semblent rester au programme du collège, mais saupoudrés de façon disparate, trop lacunaires pour faire un tout cohérent, trop peu poussés pour permettre de faire des démonstrations vraiment motivantes intellectuellement.
Faut-il revenir à la situation antérieure, alors que les pressions sont fortes pour faire aussi autre chose en maths ? Je ne sais pas. Je ne sais pas si c'est réaliste. En tout cas, si on veut faire (bien) de la géométrie déductive, il faudrait du temps, et des programmes complets et cohérents.
C'est une très bonne introduction à l'algèbre linéaire.
- JPhMMDemi-dieu
Tout dépend comment c'est fait.
_________________
Labyrinthe où l'admiration des ignorants et des idiots qui prennent pour savoir profond tout ce qu'ils n'entendent pas, les a retenus, bon gré malgré qu'ils en eussent. — John Locke
Je crois que je ne crois en rien. Mais j'ai des doutes. — Jacques Goimard
- AndréCNiveau 9
Je vous invite à lire les livres d'algèbre écrits par les mathématiciens russes, par exemple le « cours d'algèbre supérieure » de A. Kurosh aux éditions Mir.
Les russes ont l'art d'expliquer simplement.
Les russes ont l'art d'expliquer simplement.
- JPhMMDemi-dieu
Intéressant, merci.
https://www.chasse-aux-livres.fr/prix/P140518428/cours-d-algebre-superieure-kurosh-a?query=kurosh%20alg%C3%A8bre
Flûte, c'est plus réédité... et pour une occaz, c'est pas donné !
https://www.chasse-aux-livres.fr/prix/P140518428/cours-d-algebre-superieure-kurosh-a?query=kurosh%20alg%C3%A8bre
Flûte, c'est plus réédité... et pour une occaz, c'est pas donné !
_________________
Labyrinthe où l'admiration des ignorants et des idiots qui prennent pour savoir profond tout ce qu'ils n'entendent pas, les a retenus, bon gré malgré qu'ils en eussent. — John Locke
Je crois que je ne crois en rien. Mais j'ai des doutes. — Jacques Goimard
- wanaxFidèle du forum
C'est évident. Maintenant, les gens ont voulu l'égalité, ils l'ont.Prezbo a écrit:
Puis, par la suite, comme cet enseignement est exigeant, qu’il faut y passer du temps pour le faire correctement et qu'il peut se montrer sélectif (en gros, certains élèves peuvent y rester bloqué), et qu'on arrivait en plein dans la période de massification, on l'a affaibli, peu à peu, mais sans jamais vraiment l'assumer.
( Même technique en spé maths: nous avions les similitudes, donc de la géométrie, avec en sus la difficulté de voir jongler avec des raisonnements géométriques, des calculs dans C ou carrément avec de la géométrie analytique, choisir quel point de vue utiliser. )
Il fallait être capable de 'voir' les figures, connaître des théorèmes, avoir une culture géométrique minimale ( composée de deux réflexions, centre du cercle inscrit, c'était très varié. )
Il fallait être capable de calculer comme un bourrin ( avec des u z barre + u barre z... )
Il fallait être capable d'organiser sa pensée, pour démontrer.
En lieu et place des similitudes, nous avons eu droit aux matrices. Très peu de choses à connaître, des calculs faciles et toujours identiques.
Une entreprise piscicole dispose de deux bassins A et B. On modélise...
Montrer que les matrices A et B sont des matrices inverses ( des 3x3... )
Montrer que U_{n+1} = A^n . U_0
Toujours la même chose, aucune part d'initiative, pas de possibilité de choisir une méthode dans une boîte à outils pleine...
Des exercices pour robots experts des fiches bristol et des surligneurs fluos.
Mais enfin, la spécialité mathématiques est devenue moins sélective ! Hourrah !
- AndréCNiveau 9
Edit : l'ancien lien était un livre en anglais mais son contenu n'avait pas de rapport avec la couverture.JPhMM a écrit:Intéressant, merci.
https://www.chasse-aux-livres.fr/prix/P140518428/cours-d-algebre-superieure-kurosh-a?query=kurosh%20alg%C3%A8bre
Flûte, c'est plus réédité... et pour une occaz, c'est pas donné !
Voici, la traduction anglaise :
En téléchargement ici : https://docslide.net/download/link/higher-algebra-by-a-kurosh
Mais, c'est long et lent car à 40 Ko/s ...
sinon, en Allemagne à 28 € https://www.abebooks.fr/rechercher-livre/titre/cours-d%27algebre-superieure/ancien-occasion/
- JPhMMDemi-dieu
Merci
_________________
Labyrinthe où l'admiration des ignorants et des idiots qui prennent pour savoir profond tout ce qu'ils n'entendent pas, les a retenus, bon gré malgré qu'ils en eussent. — John Locke
Je crois que je ne crois en rien. Mais j'ai des doutes. — Jacques Goimard
- AndréCNiveau 9
Je viens de finir de le télécharger, malheureusement, c'est la traduction anglaise !
- AndréCNiveau 9
Je viens de m'apercevoir que le lien que j'ai donné précédemment ne correspondait pas au livre de A. Kurosh, sa couverture était la bonne, mais son contenu était celui d'un autre livre. J'ai édité le message précédent pour que les deux liens soient désormais identiques, ils pointent vers la traduction anglaise.
Voici (après vérification) la traduction anglaise du livre :
https://docslide.net/download/link/higher-algebra-by-a-kurosh
J'ai le livre en français, si quelqu'un m'indique où je peux le faire scanner (et si c'est légal), je veux bien faire scanner mon livre et le mettre à disposition.
Voici (après vérification) la traduction anglaise du livre :
https://docslide.net/download/link/higher-algebra-by-a-kurosh
J'ai le livre en français, si quelqu'un m'indique où je peux le faire scanner (et si c'est légal), je veux bien faire scanner mon livre et le mettre à disposition.
- JPhMMDemi-dieu
Merci. Je regarderai si je ne peux pas l'acquérir. Merci pour la proposition, que je garde sous le coude.
_________________
Labyrinthe où l'admiration des ignorants et des idiots qui prennent pour savoir profond tout ce qu'ils n'entendent pas, les a retenus, bon gré malgré qu'ils en eussent. — John Locke
Je crois que je ne crois en rien. Mais j'ai des doutes. — Jacques Goimard
- Al9Niveau 10
AndréC a écrit:Je n'ai pas regardé les programme de sup, mais les transformations telles qu'elles sont vues au collège permettent de faire comprendre simplement ce qu'un un groupe par exemple.Prezbo a écrit:
D'où cette situation de milieu du gué actuel : des éléments de géométrie qui me semblent rester au programme du collège, mais saupoudrés de façon disparate, trop lacunaires pour faire un tout cohérent, trop peu poussés pour permettre de faire des démonstrations vraiment motivantes intellectuellement.
Faut-il revenir à la situation antérieure, alors que les pressions sont fortes pour faire aussi autre chose en maths ? Je ne sais pas. Je ne sais pas si c'est réaliste. En tout cas, si on veut faire (bien) de la géométrie déductive, il faudrait du temps, et des programmes complets et cohérents.
C'est une très bonne introduction à l'algèbre linéaire.
. Déjà, il faudrait qu'il ait compris à quoi correspondent visuellement une translation ou une rotation avant çà et même de ce qu'est une symétrie. Alors, faire comprendre la notion de groupe. Et en plus, je ne vois pas l'intérêt du tout au collège.
- ycombeMonarque
Le faire scanner est légal.AndréC a écrit:Je viens de m'apercevoir que le lien que j'ai donné précédemment ne correspondait pas au livre de A. Kurosh, sa couverture était la bonne, mais son contenu était celui d'un autre livre. J'ai édité le message précédent pour que les deux liens soient désormais identiques, ils pointent vers la traduction anglaise.
Voici (après vérification) la traduction anglaise du livre :
https://docslide.net/download/link/higher-algebra-by-a-kurosh
J'ai le livre en français, si quelqu'un m'indique où je peux le faire scanner (et si c'est légal), je veux bien faire scanner mon livre et le mettre à disposition.
C'est diffuser le scan qui risque fort de ne pas l'être.
_________________
Assurbanipal: "Passant, mange, bois, divertis-toi ; tout le reste n’est rien".
Franck Ramus : "Les sciences de l'éducation à la française se font fort de produire un discours savant sur l'éducation, mais ce serait visiblement trop leur demander que de mettre leur discours à l'épreuve des faits".
- William FosterExpert
Lu dans une copie d'élève de 3ème. A la question "Démontrer que ...", il a répondu "Démontrer, c'est le contraire de montrer, donc je ne le montre pas."
Connaissant le gus, je ne crois pas à la théorie de l'humour volontaire.
Connaissant le gus, je ne crois pas à la théorie de l'humour volontaire.
_________________
Tout le monde me dit que je ne peux pas faire l'unanimité.
"Opinions are like orgasms : mine matters most and I really don't care if you have one." Sylvia Plath
Vérificateur de miroir est un métier que je me verrais bien faire, un jour.
- AndréCNiveau 9
Vous avez mal lu mon message.Al9 a écrit:AndréC a écrit:
Je n'ai pas regardé les programme de sup, mais les transformations telles qu'elles sont vues au collège permettent de faire comprendre simplement ce qu'un un groupe par exemple.
C'est une très bonne introduction à l'algèbre linéaire.
. Déjà, il faudrait qu'il ait compris à quoi correspondent visuellement une translation ou une rotation avant çà et même de ce qu'est une symétrie. Alors, faire comprendre la notion de groupe. Et en plus, je ne vois pas l'intérêt du tout au collège.
Page 1 sur 3 • 1, 2, 3
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum