- HocamSage
Il y a exactement 30 ans, le 17 décembre 1987, Marguerite Yourcenar mourait sur l'île des Monts Déserts, aux États-Unis. L'occasion de repenser à ces « expériences avec le temps » qu'elle faisait :
À cette aune, Marguerite Yourcenar est très proche de nous. C'est une banalité de dire que ses œuvres regorgent de passages d'une grande profondeur, mais quelques piqûres de rappel pourraient se faire sur ce fil.
Carnet de notes de Mémoires d'Hadrien a écrit:Expériences avec le temps : dix-huit jours, dix-huit mois, dix-huit années, dix-huit siècles. Survivance immobile des statues qui, comme la tête de l’Antinoüs Mondragone, au Louvre, vivent encore à l’intérieur de ce temps mort. Le même problème considéré en termes de générations humaines ; deux douzaines de paires de mains décharnées, quelque vingt-cinq vieillards suffiraient pour établir un contact ininterrompu entre Hadrien et nous.
À cette aune, Marguerite Yourcenar est très proche de nous. C'est une banalité de dire que ses œuvres regorgent de passages d'une grande profondeur, mais quelques piqûres de rappel pourraient se faire sur ce fil.
- Thalia de GMédiateur
Je vais énoncer une banalité : pour moi elle incarne la pureté du style, la force limpide de l'écrit.
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Le printemps a le parfum poignant de la nostalgie, et l'été un goût de cendres.
Soleil noir de mes mélancolies.
- HocamSage
C'est bien résumé, Thalia. Quelle femme admirable, tout de même, à tout point de vue. N'hésitez pas à partager vos passages préférés.
- Thalia de GMédiateur
« Petite âme, âme tendre et flottante, compagne de mon corps, qui fut ton hôte, tu vas descendre dans ces lieux pâles, durs et nus, où tu devras renoncer aux jeux d'autrefois. Un instant encore, regardons ensemble les rives familières, les objets que sans doute nous ne reverrons plus...Tâchons d'entrer dans la mort les yeux ouverts. »
Épilogue des Mémoires d"Hadrien
Épilogue des Mémoires d"Hadrien
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Le printemps a le parfum poignant de la nostalgie, et l'été un goût de cendres.
Soleil noir de mes mélancolies.
- CeladonDemi-dieu
Les yeux ouverts, c'est aussi le titre d'un ouvrage d'interviews de M.Y. par Matthieu Galey. Superbe.
J'en ai cité des passages à de nombreuses reprises, surtout ceux concernant la préservation de la nature et notre rapport aux animaux.
J'en ai cité des passages à de nombreuses reprises, surtout ceux concernant la préservation de la nature et notre rapport aux animaux.
- slynopHabitué du forum
J'apprécie beaucoup son recueil Nouvelles Orientales, avec Mémoires d'Hadrien, évidemment.
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"C'est pas moi qu'explique mal, c'est les autres qui sont cons !", Perceval dans Kaamelot.
- InvitéInvité
Celadon a écrit:Les yeux ouverts, c'est aussi le titre d'un ouvrage d'interviews de M.Y. par Matthieu Galey. Superbe.
J'en ai cité des passages à de nombreuses reprises, surtout ceux concernant la préservation de la nature et notre rapport aux animaux.
Oui, ces entretiens sont magnifiques. C'est depuis que je les ai lus que je ne mange plus de bébés animaux, et presque plus de viande tout court. Quant au chef-d'oeuvre qu'est Mémoires d'Hadrien, il faudrait le citer intégralement, mais j'ai notamment été particulièrement sensible au passage sur l'insomnie, au tout début :
" Qu'est notre insomnie, sinon l'obstination maniaque de notre intelligence à manufacturer des pensées, des suites de raisonnements, des syllogismes et des définitions bien à elle, son refus d'abdiquer en faveur de la divine stupidité des yeux clos ou de la sage folie des songes ? L'homme qui ne dort pas [...] se refuse plus ou moins consciemment à faire confiance au flot des choses."
C'est tellement juste, tellement...ça.
- HocamSage
Oui, il faudrait recopier tout le livre ou presque, en effet. Sur un autre fil, j'avais cité ce passage de Mémoires d'Hadrien, encore et toujours :
J'aime beaucoup le rythme de ce chapitre, les incises savamment placées, l'impression d'exactitude qui émerge de la syntaxe même quand on ne fait pas tout à fait attention au fond du propos.M. Yourcenar a écrit:« Dès qu'un objet me répugnait, j'en faisais un sujet d'étude ; je me forçais adroitement à en tirer un motif de joie. En face d'une occurrence imprévue ou quasi désespérée, d'une embuscade ou d'une tempête en mer, toutes les mesures concernant les autres étant prises, je m'appliquais à faire fête au hasard, à jouir de ce qu'il m'apportait d'inattendu. Même au sein de mon pire désastre, j'ai vu le moment où l'épuisement enlevait à celui-ci une part de son horreur, où je le faisais mien en acceptant de l'accepter. Si j'ai jamais à subir la torture, et la maladie va sans doute se charger de m'y soumettre, je ne suis pas sûr d'obtenir longtemps de moi l'impassibilité d'un Thraséas, mais j'aurai du moins la ressource de me résigner à mes cris. Et c'est de la sorte, avec un mélange de réserve et d'audace, de soumission et de révolte soigneusement concertées, d'exigence extrême et de concessions prudentes, que je me suis finalement accepté moi-même »
- faustine62Érudit
Merci. Il y a Les Mémoires d'Hadrien, mais aussi Anna, soror bouleversant.
- CondorcetOracle
Itou (je suis surpris qu'elle n'ait pas été citée avant).
- IphigénieProphète
Oui, en effet...Condorcet a écrit:Itou (je suis surpris qu'elle n'ait pas été citée avant).
- HocamSage
Au-delà des titres, que tout le monde a en tête quand on connaît un peu l'auteur, l'intérêt d'un fil dédié est de pouvoir approfondir un peu, d'entrer dans le détail de sa prose, de voir ce qui en fait la limpidité et la rigueur. Je n'ai pas L'Œuvre au noir en version papier sous la main ce soir, ni vraiment le temps de retrouver les passages exacts qui m'ont le plus marqué, mais n'hésitez pas à développer ce qui vous fait aimer ce livre, ou Alexis, ou les Nouvelles Orientales, ou d'autres encore.
- AphrodissiaMonarque
C'est un pur hasard, j'ai relu les Nouvelles orientales ce week-end.
Est-il bien nécessaire que je précise laquelle a ma préférence ?
Au-delà de l'histoire, au-delà du personnage, c'est la beauté de l'écriture qui me reste, ce style qui me fait ressentir en une phrase toute l'âpreté du monde et de l'existence, cette façon de montrer la lucidité et l'aveuglement, tout à la fois, de l'homme sans ses dieux.
Est-il bien nécessaire que je précise laquelle a ma préférence ?
Au-delà de l'histoire, au-delà du personnage, c'est la beauté de l'écriture qui me reste, ce style qui me fait ressentir en une phrase toute l'âpreté du monde et de l'existence, cette façon de montrer la lucidité et l'aveuglement, tout à la fois, de l'homme sans ses dieux.
Aphrodissia l'entendait, mais de ces paroles déchiquetées par le vent elle ne comprenait que la nécessité d'échapper au village, au mensonge, à la lourde hypocrisie, au long châtiment d'être un jour une vieille femme qui n'est plus aimée.
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