- NLM76Grand Maître
Pour reprendre une discussion noyée dans un autre fil, sur la correction du bac.
_________________
Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- IphigénieProphète
Eh bien voilà!
Ce que dit Celeborn sur le fil EAF est parfait
Expliquer qu'ils sont utiles quand ils sont à contre-thème: le vocabulaire du jardin dans un texte de Verlaine qui décrit un jardin est sans intérêt ; par contre celui du temps qui passe peut apporter quelque chose et ainsi de suite: il le dit mieux que moi avec l'exemple du vocabulaire de la musique dans un texte sur la guerre.
Ce que dit Celeborn sur le fil EAF est parfait
Expliquer qu'ils sont utiles quand ils sont à contre-thème: le vocabulaire du jardin dans un texte de Verlaine qui décrit un jardin est sans intérêt ; par contre celui du temps qui passe peut apporter quelque chose et ainsi de suite: il le dit mieux que moi avec l'exemple du vocabulaire de la musique dans un texte sur la guerre.
- glucheNiveau 10
Je fais partie des opposants aux champs lexicaux. Je n'utilise jamais cette expression et quand un élève l'emploie, c'est l'occasion pour moi de leur dire que je ne veux pas entendre parler de champs lexicaux. Je ne doute pas que des collègues les utilisent intelligemment, je n'ai jamais constaté que c'était le cas chez un élève: l'élève croit avoir dit qqch en repérant un champ lexical et il n'a encore rien dit.
Mais pourquoi tant de haine? me direz-vous. Je me souviens d'avoir donné à des élèves de 1re le poème "Midi" de Héredia à commenter. Il y a "ombre", "sombre", donc le champ lexical de l'obscurité, donc ça se passe la nuit, ai-je pu lire dans les copies d'un certain nombre d'élèves qui, manifestement, n'avaient pas lu le titre .
Le champ lexical est pour moi le symbole de ce que j'appelle le commentaire hors-sol. Les élèves relèvent des mots, des procédés en parcourant le texte et, à partir de là, élaborent des interprétations... sans tenir compte du sens général du texte, c'est-à-dire sans lire vraiment. Or les mots ne prennent complétement sens que leur contexte, dans la syntaxe du texte.
Mais pourquoi tant de haine? me direz-vous. Je me souviens d'avoir donné à des élèves de 1re le poème "Midi" de Héredia à commenter. Il y a "ombre", "sombre", donc le champ lexical de l'obscurité, donc ça se passe la nuit, ai-je pu lire dans les copies d'un certain nombre d'élèves qui, manifestement, n'avaient pas lu le titre .
Le champ lexical est pour moi le symbole de ce que j'appelle le commentaire hors-sol. Les élèves relèvent des mots, des procédés en parcourant le texte et, à partir de là, élaborent des interprétations... sans tenir compte du sens général du texte, c'est-à-dire sans lire vraiment. Or les mots ne prennent complétement sens que leur contexte, dans la syntaxe du texte.
- 0massilia0Niveau 6
Du coup je remets mon lien qui va dans le sens du premier commentaire, car je le trouve clair.
http://www.site-magister.com/chlex.htm#axzz4kj3SDbKj
"Vous n'auriez aucun mal à repérer le champ lexical de la machine (mots en rouge). Mais l'intérêt de ce "champ lexical" reste très limité, renvoyant simplement à une description réaliste qui n'authentifie que vaguement le souci d'objectivité tant de fois manifesté par Zola. Décrivant le milieu de la mine dans Germinal, celui des petits ouvriers parisiens dans L'Assommoir etc., il rencontre fatalement sous sa plume le vocabulaire de ces milieux. On dira alors que le champ lexical est ici simplement thématique.
En revanche, il est plus surprenant de rencontrer dans ce texte un vocabulaire animalier (mots en bleu) commandé par le regard inquiet de Gervaise. C'est par cette étrangeté qu'un univers nouveau se manifeste, tout entier jailli d'un imaginaire par lequel l'écrivain exprime l'envahissement de la machine dans le monde des hommes et la menace sournoise qu'il fait planer sur eux. Ce champ lexical a une valeur métaphorique et, se superposant au premier, il vient l'enrichir et le dépasser.
Convenons donc qu'un champ lexical ne fait vraiment sens que s'il est perçu grâce au décalage que les mots manifestent à l'égard des représentations habituelles ou commandées par le réel."
http://www.site-magister.com/chlex.htm#axzz4kj3SDbKj
"Vous n'auriez aucun mal à repérer le champ lexical de la machine (mots en rouge). Mais l'intérêt de ce "champ lexical" reste très limité, renvoyant simplement à une description réaliste qui n'authentifie que vaguement le souci d'objectivité tant de fois manifesté par Zola. Décrivant le milieu de la mine dans Germinal, celui des petits ouvriers parisiens dans L'Assommoir etc., il rencontre fatalement sous sa plume le vocabulaire de ces milieux. On dira alors que le champ lexical est ici simplement thématique.
En revanche, il est plus surprenant de rencontrer dans ce texte un vocabulaire animalier (mots en bleu) commandé par le regard inquiet de Gervaise. C'est par cette étrangeté qu'un univers nouveau se manifeste, tout entier jailli d'un imaginaire par lequel l'écrivain exprime l'envahissement de la machine dans le monde des hommes et la menace sournoise qu'il fait planer sur eux. Ce champ lexical a une valeur métaphorique et, se superposant au premier, il vient l'enrichir et le dépasser.
Convenons donc qu'un champ lexical ne fait vraiment sens que s'il est perçu grâce au décalage que les mots manifestent à l'égard des représentations habituelles ou commandées par le réel."
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Iphigénie a écrit:il le dit mieux que moi avec l'exemple du vocabulaire de la musique dans un texte sur la guerre.
Ce serait quand même moyennement étonnant dans un texte relatant une bataille se déroulant au XVIIIe siècle, par exemple.
J'essaye de me réexpliquer de façon très courte : ce ne sera jamais (allez, rarement) le champ lexical lui-même, parce qu'il est là qui sera surprenant, mais bien plutôt l'emploi qu'on fera des mots qu'on peut y trouver (emploi qui peut être surprenant, ou non). Si il y a le champ lexical de la musique dans ma bataille, mais qu'on trouve ces mots parce que le conteur, par exemple, parle des fifres et des tambours, on ne s'étonnera pas. Si, tout à coup, le mot "harmonie" se trouve lié, je sais pas moi, à "enfer", par exemple, là ça deviendra intéressant. Mais la notion de champ lexical n'enveloppe nullement celle d'emploi des mots, et seulement les liens qu'ils ont entre eux.
L'exemple d'0massilia0 le montre bien, en fait : l'analyse ne consiste pas à dire qu'il y a un champ lexical, mais à dire qu'il a une "valeur métaphorique". Quand on parle de métaphore, on parle bien du fonctionnement du texte (ça reste dommage de ne pas examiner les choses de plus près encore, mais bon). C'est la métaphore qui compte, pas le lexique. Mais alors, pourquoi dire d'abord qu'il y a un champ lexical, au lieu de passer directement à la métaphore ?... J'avais dans l'autre topic réécrit le texte pour montrer qu'il ne suffit pas que le champ soit présent faire ce qu'on prétend qu'il fait.
- IphigénieProphète
Si, c'est étonnant par une vision esthétique de la guerre : même au XVIIIE ou surtout au XVIIIE justement. C'est bien l'enjeu de la critique. Ça va avec les te deum....
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Non. Sauf pour quelqu'un qui n'a aucune idée de ce qu'était la guerre au XVIIIe siècle. Si on veut la rendre belle, il ne suffit pas de mentionner les musiciens. Qu'est-ce que fait Voltaire ? Il leur donne une importance particulière, associe les sons qu'ils émettent à celui des canons, de sorte que c'est tout le bruit de la bataille qui devient un concert. Il part de ce qui est là tout bêtement, tout banalement pour l'époque, et le transforme. C'est cela qu'il faut montrer pour rendre compte de son texte.
- IphigénieProphète
Mais Voltaire le sait très bien mais justement il le fait voir autrement à ses contemporains: il y a canons et canons. Quelques décennies plus tard c'est Fabrice à Waterloo.Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Non. Sauf pour quelqu'un qui n'a aucune idée de ce qu'était la guerre au XVIIIe siècle. Si on veut la rendre belle, il ne suffit pas de mentionner les musiciens.
Mais je suis évidemment d'accord pour dire que les champs lexicaux ce ne sont pas juste des mots glanés au fil du texte mais leur enracinement dans le texte, pour garder la métaphore agricole.
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Pour le faire voir autrement, il ne se contente pas de placer du lexique musical dans son texte, chose qu'il serait difficile de ne pas faire à son époque, pour raconter une bataille ; il en fait un usage particulier, par l'importance qu'il leur accorde et les liens qu'il crée entre ces mots et d'autres mots. Ce n'est pas la présence de ce lexique qui compte, mais bien ce qui en est fait.
Ah, donc nous sommes d'accord. À ce moment-là, il ne me reste plus que cette question : si c'est l'enracinement qui compte, pourquoi parler d'abord de champ lexical au lieu de caractériser directement cet enracinement ? J'ai bien compris, dans l'autre topic, qu'il n'était pas forcément nuisible de le dire. Mais qu'est-ce que ça apporte de plus ? Je n'ai d'ailleurs jamais eu de peine, crois-je, à dire ce que disent ceux qui se servent de cette notion.
Iphigénie a écrit:Mais je suis évidemment d'accord pour dire que les champs lexicaux ce ne sont pas juste des mots glanés au fil du texte mais leur enracinement dans le texte, pour garder la métaphore agricole. Wink
Ah, donc nous sommes d'accord. À ce moment-là, il ne me reste plus que cette question : si c'est l'enracinement qui compte, pourquoi parler d'abord de champ lexical au lieu de caractériser directement cet enracinement ? J'ai bien compris, dans l'autre topic, qu'il n'était pas forcément nuisible de le dire. Mais qu'est-ce que ça apporte de plus ? Je n'ai d'ailleurs jamais eu de peine, crois-je, à dire ce que disent ceux qui se servent de cette notion.
- User17706Bon génie
Voltaire ? Oh, vous savez, les champs lexicaux du XIXe siècle... #CrossTopic #Pardon #VraimentDésolé
- IphigénieProphète
L'associé de Zadig, selon Lefèvre?PauvreYorick a écrit:Voltaire ? Oh, vous savez, les champs lexicaux du XIXe siècle... #CrossTopic #Pardon #VraimentDésolé
- CelebornEsprit sacré
Iphigénie a écrit:Eh bien voilà!
Ce que dit Celeborn sur le fil EAF est parfait
Expliquer qu'ils sont utiles quand ils sont à contre-thème: le vocabulaire du jardin dans un texte de Verlaine qui décrit un jardin est sans intérêt ; par contre celui du temps qui passe peut apporter quelque chose et ainsi de suite: il le dit mieux que moi avec l'exemple du vocabulaire de la musique dans un texte sur la guerre.
Je rappelle juste ce que je dsais, puisque c'est sur un autre fil
Bien sûr qu'il faut voir l'emploi qui est fait. Néanmoins, le seul intérêt que j'ai trouvé aux champs lexicaux (« les champs désespérés sont les champs lexicaux », disait un ami ^^), c'est bien lorsqu'ils sont inattendus. Relever le lexique de la guerre dans un texte sur la guerre, ce n'est pas très intéressant. En revanche, y relever le lexique de la musique, là ça peut devenir intéressant. Le lexique de l'amour dans une rencontre amoureuse, bof. Mais celui de la religion (ou de la cuisine) c'est tout de suite autre chose. Alors ça ne suffit pas, mais ça devient un élément d'analyse très intéressant, et qui peut même guider une interprétation générale du texte.
_________________
"On va bien lentement dans ton pays ! Ici, vois-tu, on est obligé de courir tant qu'on peut pour rester au même endroit. Si on veut aller ailleurs, il faut courir au moins deux fois plus vite que ça !" (Lewis Carroll)
Mon Blog
- CelebornEsprit sacré
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Pour le faire voir autrement, il ne se contente pas de placer du lexique musical dans son texte, chose qu'il serait difficile de ne pas faire à son époque, pour raconter une bataille ; il en fait un usage particulier, par l'importance qu'il leur accorde et les liens qu'il crée entre ces mots et d'autres mots. Ce n'est pas la présence de ce lexique qui compte, mais bien ce qui en est fait.
Mais c'est toujours ce qui en est fait qui compte. Maintenant, Voltaire (puisque c'est bien à lui que je pensais) pourrait parfaitement ne pas mentionner la musique, quand bien même à l'époque, etc. C'est un choix d'écrivain. Ensuite, on est d'accord que le champ lexical ne fait pas tout, et que les antithèses et les énumérations qui vont avec sont là pour une raison précise. Il n'empêche, insister autant (un champ lexical, ce n'est pas juste 2 mots en 10 lignes), peu importe l'époque, sur le lexique de la musique dans un texte sur la guerre, c'est signifiant, et c'est heureux que l'élève puisse le remarquer, dût-il en passer par les champs lexicaux pour cela.
_________________
"On va bien lentement dans ton pays ! Ici, vois-tu, on est obligé de courir tant qu'on peut pour rester au même endroit. Si on veut aller ailleurs, il faut courir au moins deux fois plus vite que ça !" (Lewis Carroll)
Mon Blog
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
C'est l'insistance qui est signifiante (entre autres choses), comme tu le dis. Mais, entre parler de champ lexical pour dire ce que fait Voltaire de ces mots, et dire, par exemple, qu'il y a un complément du nom avant de dire que c'est une métaphore, je ne vois pas la différence, en fait. Bien sûr, d'une manière ou d'une autre, si l'élève aboutit à une véritable analyse, je ne sanctionne pas le fait de m'avoir d'abord parlé de champ lexical.
- NLM76Grand Maître
D'ailleurs, je ne vois l'avantage de ce terme sur celui de "vocabulaire". Le vocabulaire de l'amour, de la musique, etc.
_________________
Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- IphigénieProphète
Je me souviens que mon prof d'histoire en KH était plié en deux quand on lui parlait de champ lexical: et c'était pas hier...
- Thalia de GMédiateur
Oh que non !Iphigénie a écrit:Je me souviens que mon prof d'histoire en KH était plié en deux quand on lui parlait de champ lexical: et c'était pas hier...
C'est celui qui passait nos copies à la machine à écrire avec un ruban rouge tant son écriture était épouvantable.
Pardon du hs, mais Iphigénie et moi avons des souvenirs de jeunesse communs. Un, deux, trois, soleil !
_________________
Le printemps a le parfum poignant de la nostalgie, et l'été un goût de cendres.
Soleil noir de mes mélancolies.
- IphigénieProphète
pas nos copies, il ajoutait une feuille D'ailleurs dans ses souvenirs de Chagrin d'école, Pennac raconte avoir eu un prof qui faisait cela, je me demande si ça ne pourrait pas être le même... Perso je l'aimais beaucoup, mais les avis étaient très tranchésThalia de G a écrit:Oh que non !Iphigénie a écrit:Je me souviens que mon prof d'histoire en KH était plié en deux quand on lui parlait de champ lexical: et c'était pas hier...
C'est celui qui passait nos copies à la machine à écrire avec un ruban rouge tant son écriture était épouvantable.
Pardon du hs, mais Iphigénie et moi avons des souvenirs de jeunesse communs. Un, deux, trois, soleil !
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum