Appel à témoin : Le vote Front National dans le corps enseignant

Journaliste a écrit:Pour répondre à toutes les questions, je suis bien journaliste. Les articles que vous avez dû trouver datent d'une lointaine époque où j'étais stagiaire
Le parallèle avec Star Wars m'est souvent fait ! J'ai l'habitude .

Enfin, pour en revenir au sujet...nous essayons d'avoir un panel de français et des catégories sociaux-professionnelles différentes (ouvrier, cadre, enseignant, infirmière...). L'idée est réellement de comprendre (sans juger, je le répète) ce qui se passe actuellement dans la société française...le vote dans le corps enseignant est passé de 2% à près de 10% pour le Front National. Pourtant cet électorat était marqué à gauche. Que s'est il passé ? Réforme des lycées, des collèges, dégradation des conditions de travail ? Déçus du "Hollandisme" ? On essaye juste de comprendre. Nous ne cherchons pas un militant, mais plus un sympathisant...quelqu'un qui n'aurait jamais voter FN, mais qui a décidé de le faire, ou juste qui pour la première fois pense à le faire. Ou quelqu'un qui la déjà fait aux élections locales.
J'espère avoir répondu à vos questions.

Bonne journée,

Leïla

Attention dans votre article à ne pas prétendre qu'il y aurait un lien de cause à effet entre l'opposition aux réformes et le vote FN. Car si vous utilisez cela comme clef d'explication du vote FN ("comprendre"), n'oubliez pas qu'une majorité des opposants aux réformes ne votent pas FN : 10% de vote FN ça veut bien dire que 90% ne votent pas pour lui. Et il me semble que parmi ces 90% il peut y avoir d'autres phénomènes qui touchent plus de 10% du corps enseignant et qui sont donc plus significatifs que le vote FN. A votre place, j'essaierais aussi (et surtout) de déterminer la proportions d'abstentionnistes chez les professeurs et l'effacement du "vote utile" (par exemple, j'ai voté pour Hollande en 2012, mais en 2017 je voterai à gauche, donc pas pour le PS, et m'abstiendrai si le 2e tour est FN/LR/PS). Il me semble que ces 2 phénomènes-ci sont bien plus significatifs pour comprendre le vote enseignant que la "montée du FN", qui est un topos journalistique. Ainsi, en prenant comme angle d'attaque d'emblée le FN, vous risquez d'occulter les autres changements de vote bien plus significatifs Bref vous risquez de plaquer vos a priori sur une réalité complexe

Je tiens à préciser, et peut-être me suis je mal exprimée...que je ne justifie pas le vote FN uniquement par les contestations des différentes réformes qui ont touché l'éducation nationale. Ce que je voulais dire, c'est qu'il y a une défiance de plus en plus grandissante dans notre société face aux partis traditionnels. Une désillusion que je peux constater tous les jours au travers de mes interviews de toutes les classes sociaux-professionnels.

Entre 2012 et 2015, le vote FN chez les enseignants est passé de 2% à 10%. Certains font certes les mêmes constatations que vous mais ont décidé de donner leur voix à Marine Le Pen. Beaucoup me disent qu'ils n'auraient jamais voté pour Jean-Marie Le Pen. Je pense qu'il est intéressant d'écouter cette partie de nos concitoyens, sans jugement. N'oubliez pas que le FN est crédité à 30% de votes aux élections présidentielles de 2017.
Je ne pense pas que tous les enseignants soient hermétiques à cette montée du FN. Il s'agit ici de comprendre ce qui les a amené à faire ce choix.
Les enseignants militants au FN auxquels j'ai parlé m'ont dit qu'il était très difficile d'assumer leur tendance politique en salle des profs...et qu'il valait mieux agir dans le secret de l'isoloir que d'être ostracisé au travail. Peu de personnes assument chez les enseignants leur vote FN. Je voudrais personnellement juste m'entretenir avec quelqu'un qui (je le répète) est tenté par ce vote...ça ne veut pas dire qu'il va le faire, mais qui y pense.

Ce que je dis c'est que si vous ne mettez pas cette progression en regard d'autres progressions vous ne pourrez pas comprendre les dynamiques du vote des enseignants. Vous pourriez être amenée à dire "le vote FN a progressé de 8% c'est gigantesque" tandis que dans le même temps d'autres dynamiques auront bien plus progressé (je suppose que l'abstention est un fait bien plus massif chez les enseignants que le vote FN). Mais ça impliquerait de sortir des sentiers battus de la pensée journalistique, car tout ce que vous me dites je l'ai entendu 100 fois sur BFM voyez vous... Un peu d'épaisseur et de recherche ça ne ferait pas de mal, histoire de produire un article qui mette en perspective le vote FN dans son environnement électoral, plutôt qu'un énième papier l'étudiant hors-sol comme si c'était l'unique dynamique possible. C'est la différence entre faire un papier sur le vote enseignant et faire un papier sur le vote FN enseignant : le premier donne un aperçu intéressant et nuancé de l'ensemble des dynamiques, tandis que le second prend une partie du tout pour le mettre en exergue, jusqu'à la caricature.

Je te signale que tu n'auras pas le témoignage de @Pierre J banni non à cause de ses idées, mais pour contournement de ban. Il ne peut t'envoyer ni mp, ni courriel.

Question d'une curieuse : as-tu reçu des témoignages de Neos ? Si oui, combien ?
Qu'il soit clair que je ne mène pas une enquête.

Thalia de G a écrit:
Question d'une curieuse : as-tu reçu des témoignages de Neos ? Si oui, combien ?
Qu'il soit clair que je ne mène pas une enquête.

Tu me diras combien de tomates il faut prévoir

Journaliste a écrit:Entre 2012 et 2015, le vote FN chez les enseignants est passé de 2% à 10%.

Perso j'ai lu une progression (?) de 5 % à 10 %, concernant la présidentielle. Parallèlement, JMLP avait fait 20 % en 2012 lorsque les sondages récents donnent 30 % à MLP.
Si je fais une règle de 3, simpliste j'en conviens, ça fait un passage de 1/4 à 1/3 des scores de la population générale, pas une multiplication par 5.

Je travaille sur "le nouvel électorat FN" ; c'est à dire des personnes qui ont décidé ou qui sont tentées de voter MLP pour la première fois en 2017, des nouveaux sympathisants. Pas sur le vote des enseignants en général. Nous faisons un panel de la société française du Nord au Sud et de l'Est à l'Ouest. Nous avons choisi les enseignants comme l'un des profils.
J'ai bien conscience de l'évolution du vote dans le corps enseignants : abstentionnisme, front de gauche, une défiance grandissante face au PS... Je suis allée rencontrer certains de vos confrères. J'ai fait une enquête de terrain.
Mais j'ai un sujet et un angle à tenir.

Journaliste a écrit:
Les enseignants militants au FN auxquels j'ai parlé m'ont dit qu'il était très difficile d'assumer leur tendance politique en salle des profs...et qu'il valait mieux agir dans le secret de l'isoloir que d'être ostracisé au travail. Peu de personnes assument chez les enseignants leur vote FN.

C'est sûr. Faut prévoir une cafetière dans sa salle et du vernis anti-graffitis pour le casier.

Journaliste a écrit:Je travaille sur "le nouvel électorat FN" ; c'est à dire des personnes qui ont décidé ou qui sont tentées de voter MLP pour la première fois en 2017, des nouveaux sympathisants. Pas sur le vote des enseignants en général. Nous faisons un panel de la société française du Nord au Sud et de l'Est à l'Ouest. Nous avons choisi les enseignants comme l'un des profils.
J'ai bien conscience de l'évolution du vote dans le corps enseignants : abstentionnisme, front de gauche, une défiance grandissante face au PS... Je suis allée rencontrer certains de vos confrères. J'ai fait une enquête de terrain.
Mais j'ai un sujet et un angle à tenir.

Vous chercheriez pas plutôt des électeurs anti-FN déçus par le PS? Vous réservez Bercy, on vient vous voir.

Trop exigu.

Je ne pense pas que cette progression du vote FN tienne uniquement aux réformes de l'EN. Les réformes, certes, contribuent à éloigner les profs des votes habituels (ainsi, la "trahison" du PS).

Si on considère que les profs sont des fonctionnaires assez mal rémunérés et mal considérés, que leurs conditions de travail sont de plus en plus difficiles (surtout pour les jeunes, qui débutent en ZEP/REP+), qu'il y a un écart de plus en plus criant entre la hiérarchie et la base, alors il n'est pas étonnant que leur conscience politique se mette à ressembler à celle d'autres fonctionnaires de terrain, comme les policiers et les gendarmes (leurs problèmes sont analogues). Lesquels ont une certaine tendance à voter...

Leodagan a écrit:
Si on considère que les profs sont des fonctionnaires assez mal rémunérés et mal considérés, que leurs conditions de travail sont de plus en plus difficiles (surtout pour les jeunes, qui débutent en ZEP/REP+), alors il n'est pas étonnant que leur conscience politique se mette à ressembler à celle d'autres fonctionnaires de terrain, comme les policiers et les gendarmes.

Je trouve ça d'autant plus étonnant, au contraire, quand on voit ce que proposent la droite et le FN. D'où l'image de PY de la main plongée dans la friteuse pour guérir une brûlûre au doigt.

C'est une image d'éPYnal

Désolé, j'ai ajouté un détail (la question de la hiérarchie).

Rendash a écrit:

Leodagan a écrit:
Si on considère que les profs sont des fonctionnaires assez mal rémunérés et mal considérés, que leurs conditions de travail sont de plus en plus difficiles (surtout pour les jeunes, qui débutent en ZEP/REP+), alors il n'est pas étonnant que leur conscience politique se mette à ressembler à celle d'autres fonctionnaires de terrain, comme les policiers et les gendarmes.

Je trouve ça d'autant plus étonnant, au contraire, quand on voit ce que proposent la droite et le FN. D'où l'image de PY de la main plongée dans la friteuse pour guérir une brûlûre au doigt.

C'est une image d'éPYnal  

Comme tout électeur, les profs votent souvent "contre" et non "pour" !

Oui, mais avec le front nation, c'est "contre, tout contre" !

L'épisode Charlie Hebdo, avec les fameux "200 incidents" dans les collèges, a sûrement eu beaucoup d'effet.