Un ordre de lecture pour Les Rougon-Macquart ?

Voilà, l'autre je me promenais en galante compagnie dans Paris, et la compagnie en question a parlé des anciennes Halles.
Comme j'étais embourbé dans un roman anglais de Wilkie Collins qui me barbait, j'ai sauté sur la référence et j'ai téléchargé Le Ventre de Paris sur ma Kindle (vivent les classiques gratuits.) Sachant donc que j'ai commencé le livre dimanche et qu'il ne me reste que le dernier chapitre, je suppute que d'ici à ce que je me couche, j'en aurais fini. En lisant un peu les synopsis sur le net, je pense continuer avec Au Bonheur des Dames (parce qu'après les Halles, les Grands Magasins, tout ça...)

Ma question est simple: si on veut lire quelques-uns des romans de la série pour le plaisir, y a-t-il un intérêt à suivre la "chronologie"/"généalogie" des romans ou est-ce qu'on peut s'y retrouver malgré tout ?
(Oui je sais, je pose la question alors que je n'ai même pas commencé par le premier...)

Hum, tu me fais revivre ma jeunesse, j'ai été "accro" pendant ma jeunesse, je les ai presque tous lus, sans ordre particulier.

Je viens de reprendre 40 ans plus tard. Pour l'instant je lis Nana.

On s'y retrouve sans problème ! Ne surtout pas louper Pot-Bouille

Hélips a écrit:On s'y retrouve sans problème ! Ne surtout pas louper Pot-Bouille

Oh que oui !!! Pot-Bouille
Je les ai lus une 1ère fois dans le désordre et puis ensuite dans l'ordre. Honnêtement, il n'y a aucun souci.

Je suis une inconditionnelle des Rougon-Macquart, découverts en classe de 1ère avec... Pot-Bouille.

Tu peux les faire dans le désordre. Je te conseille la Débâcle, la Terre, l'Assommoir et Germinal.

Pot-Bouille et Au Bonheur des Dames se suivent, commence peut-être par Pot-Bouille.

Trop tard, je suis déjà dans Au Bonheur des Dames

Je passerai ensuite à pot-Bouille, puisqu'il semble fort plébiscité

L'oeuvre est mon favori! Nana, c'est très drôle.

La Fortune des Rougon est intéressant à lire car il permet de poser les bases de la tare familiale et de comprendre la généalogie.
Il peut être lu suivi du Docteur Pascal qui clôt le cycle et vient bien refermer le tout. Pour les autres, je dirais que l'ordre importe peu.
Dans mes favoris, je mettrais L'Oeuvre que j'adore, L'Argent, Nana, Au Bonheur des Dames, Germinal et sans doute La Fortune des Rougon.

On s'y retrouve, mais quitte à faire, autant les lire dans l'ordre car cela permet de saisir toute la démonstration de Zola et d'assister à la naissance, au développement fou puis à l'effondrement du Second empire. Cela serait à refaire, je les lirais dans l'ordre.

La bête humaine est également très bien, j'en garde un souvenir très fort, avec des scènes étonnamment cinématographiques.
Germinal est indispensable car d'une actualité criante.
(Désolée je suis sur tablette je ne sais pas mettre en italique.)

Etant donné que certains personnages reviennent dans plusieurs volumes, c'est intéressant de le lire dans l'ordre. La Fortune des Rougon pose en effet les bases de la série, la généalogie de la famille (on y apprend par exemple pourquoi Gervaise et Lantier ne sont pas mariés), dans Le Ventre de Paris tu as rencontré Claude Lantier que tu retrouveras dans L'Assommoir et dans L’œuvre...
Quand on en a déjà lu quelques-uns, c'est vraiment intéressant de le lire ensuite dans l'ordre !

Ah oui, pour l'actualité criante, il faut aussi lire Travail, un des évangiles laïcs de Zola !

Lu L'Argent cette année, là aussi très dans le ton de l'actualité sur les traficotages boursiers et la folie des grandeurs. mais pas son meilleur ! un peu lourd, très didactique. On n'"a de cesse de me recommander Le Rêve, prochain sur ma liste. Pot-Bouille formidable ! je n'ai jamais lu dans l'ordre, et lire La Fortune l'an dernier a été intéressant, plein de choses se sont mises en place a posteriori...et je recommande chaudement les contes et nouvelles de Zola, certains sont formidables !

Je ne les ai jamais lus dans l'ordre. J'avais commencé par l'Assommoir puis Au Bonheur des Dames, la Terre (mon préféré), le Ventre de Paris, l'Oeuvre, Pot-Bouille, la Bête humaine, Nana. J'ai commencé la Débâcle.

Je les lis selon mon envie.

Je rejoins les autres : tu peux les lire dans le désordre, j'ai commencé par le Bonheur des dames, puis Nana et ensuite ce fut au gré des tomes que je trouvais dans les étagères de ma famille.

Je dois faire le point avec ma mère pour savoir les tomes qui me manquent et une fois que la saga sera complète, je pense tenter de la lire dans l'ordre pour le plaisir (ou la folie c'est selon)

Personne ne parle de mon préféré donc je le cite histoire de :

La Joie de vivre.

C'est magnifique.

Les personnages secondaires sont d'une justesse incroyable.

Ah oui ! La Joie de Vivre ! Bien sûr, il est remarquable.

Izambard a écrit:Personne ne parle de mon préféré donc je le cite histoire de :

La Joie de vivre.

C'est magnifique.

Les personnages secondaires sont d'une justesse incroyable.

J'allais le dire !
(Mais il est tellement triste...)

Hélips a écrit:On s'y retrouve sans problème ! Ne surtout pas louper Pot-Bouille

Le premier que j'ai lu. J'avais 12 ans. Je lisais tout le temps.
Il y avait Pot-Bouille dans la bibliothèque de mon collège.
Je les ai ensuite presque tous lus en considérant que certains me plaisaient beaucoup (La Bête humaine, L'Assommoir, La Joie de vivre, La faute de l'abbé Mouret, Germinal, Nana, La Curée...) et d'autres pas du tout (Son Excellence Eugène Rougon, L'Argent...). Je n'ai jamais lu la Débâcle et j'ai seulement commencé le Docteur Pascal. Je m'étais lassée.

edit : Le Ventre de Paris, L'Oeuvre, Au Bonheur des Dames sont très bien aussi. Le Rêve est particulier avec la description des martyres, au début et sa fin, très étrange dans l'univers de Zola (l'héroïne s'appelle Angélique et ça ressemble à un conte).

Il y a finalement seulement quelques volumes qui m'ont ennuyée. La Terre est un peu trop cru, aussi...avec un personnage qui s'appelle Jésus et l'auteur qui se laisse un peu trop aller dans la surenchère. La Terre et le Rêve se succèdent dans la série, et c'est vraiment le jour et la nuit. :lol: Ça dépend ce qu'on préfère.

Ensuite, j'avais essayé de lire Proust mais je l'avais trouvé couleur pastel par rapport aux couleurs vives de Zola (comme ça que je l'avais envisagé) et je ne suis pas allée plus loin que Du côté de chez Swann. Non...je suis passée à Stephen King, en fait...

Ah, La Terre ; je me souviens l'avoir étudié avec une classe d'élèves de seconde et en effet, c'est cru ; l'orgasme dans le viol, le pépé que l'on brûle pour son héritage, etc.

Alors voilà, j'ai passé l'année dernière à lire tous les RM dans l'ordre. C'est une vraie expérience humaine et les enchaîner permet de voir une évolution des préoccupations de la deuxième partie du XIXe telles que Zola les a ressenties. Il faut aussi du temps pour tout digérer et dégager une impression générale outre les réflexions sur la génétique et le milieu, celles plus ciblées, ouvrage par ouvrage, sur la science, la technique et le progrès social, la morale, la misère, l'amour, le sexe, la religion, l'altruisme, la politique et le pouvoir, le commerce, l'argent et la spéculation immobilière ou financière, l'éducation des filles, Schopenhauer.
On peut aussi avoir une lecture de la fresque en fonction des moments saillants de la vie de Zola, d'éléments de sa biographie, de l'écrivain qui construit sa carrière littéraire, de ses préoccupations commerciales (notamment à partir de l'Assommoir), des effets sur son oeuvre du déchaînement de la critique...

Trois des principales questions qui se posent à moi à l'issue de ces lectures sont : où s'arrête le réalisme et où commence l'outrance ? Pourquoi cette outrance ?

Ce qui suit n'est que ma brève interprétation de l'intérêt de ces 20 romans et je ne la pose absolument pas comme objective. Chacun sa clef de lecture. Si vous n'êtes pas d'accord, n'hésitez pas à critiquer ce que je propose.

- La Fortune des Rougon et La Conquête de Plassans : pour l'accession au pouvoir par opportunisme politique dans une recherche d'enrichissement et de respectabilité.
- La Curée avec Aristide Rougon, dit Saccard, que l'on retrouvera dans l'Argent : pour l'opportunisme immobilier dans le Paris hausmannien.
- La Faute de l'abbé Mouret : pour le dilemme transcendantal (amour humaine ou amour de Dieu).
- Son Excellence Eugène Rougon : pour la fascination du pouvoir et son exercice au 2nd empire.

- L'Assommoir, la meilleure illustration de la théorie naturaliste avec l'influence génétique et celle du milieu. Sommet d'une révolution littéraire irréversible après les jalons posés par les Goncourt.
Il est est encore plus éclairant de suivre la destinée des personnages qui naissent dans cet ouvrage (les enfants de Gervaise) pour suivre leur destin dans Nana, Germinal, L'Oeuvre, La Bête humaine. Magistral sur les efforts plus ou moins vains pour se sortir de la misère dans le système naturaliste.

- Pot Bouille : Octave Mouret étudie la bonne société parisienne. Une descente en flèche de l'hypocrisie bourgeoise, du paraître au détriment de l'être.
- Dans Au bonheur des dames, le seul roman qui finit bien (en allant vite) avec Octave Mouret qui met en application ce qu'il a constaté dans son étude en l'adaptant dans le domaine du commerce, aux femmes considérées comme des clientes. Octave lance le changement d'échelle de la consommation dans la société bourgeoise. Avec le contre-point social qu'apporte Denise.

- La Joie de vivre : extraordinaire don absolu de soi.
- Germinal : impressionnant tableau minier sur la contestation ouvrière de la domination bourgeoise et industrielle avec le débat sur la grève et la violence, le socialisme, l'anarchisme, le nihilisme.
- L'Oeuvre, la transcendance par l'art jamais abouti. Plongée dans le débat pictural classicisme/réalisme, arrivée de l'impressionnisme et conditions de vie des peintres.
- La Terre : l'Assommoir de la paysannerie, de la ruralité, sur fond de remembrement de la terre nourricière certes, mais à quel prix.... Jean Macquart se débat dans un roman d'outrance qui m'a encore plus marqué que L'Assommoir. On retrouvera le personnage dans La Débâcle.
- Le Rêve : une pause qui nous éloigne du misérabilisme (soufflons un peu). Un amour humain éthéré, baigné de religion à tendance païenne. Presque un conte de fée.
- La Bête humaine : roman du chemin de fer, du désir sexuel meurtrier et incontrôlable malgré tous les efforts. Mise en évidence du cynisme de la justice.
- L'Argent : le retour de l'amoral Saccard qui veut se refaire à la Bourse plus par goût de la puissance que de l'argent. Le marxisme pointe aussi le bout de son nez. Présence de Caroline qui avec Hélène (Une Page d'amour), Denise (Au Bonheur des dames), Pauline (La joie de vivre), Angélique (Le Rêve) est l'un des plus attachant personnage féminin de Zola.
- La Débâcle : sur la défaite de 1870. Ouvrage extrêmement documenté sur l'effondrement militaire d'un second Empire honni par Zola alors que la personne de Napoléon III est plutôt ménagé. Superbes pages, en fin de roman, sur la commune et Paris incendié. Ce n'est pas un ouvrage d'Histoire ("avec sa grande hache"), mais pas loin si l'on en retire les éléments romanesques.
- Conclusion de la série avec Le Docteur Pascal où Zola utilise ses personnages pour nuancer ses préceptes naturalistes exposés avec tellement d'aplomb dans la préface de "La Fortune des Rougon" qui lance le cycle.

Outre les thèmes principaux, il y a, à chaque fois, des histoires d'amour plus ou moins sincères (même romantique : Silvère et Miette dans "La Fortune"), de recherche masculine d'assouvissement sexuel avec plus ou moins de révolte féminine, dans le cadre général de la critique de la bourgeoisie et de la condamnation du viol de la République par Badinguet. Dans chacun des vingt romans figure au moins une fois le mot "débâcle".

A la base de tout cela, il y a l'extravagante tante Dide (Adélaïde Fouque) et la très retorse Félicité Puech, toutes deux présentes dans le premier et le dernier des tomes, la seconde faisant des apparitions toujours très déterminantes au fur et à mesure des opus pour protéger son clan, prête à tout pour, une fois la "respectabilité" acquise, la garder. Dans son genre, quelle maîtresse femme !

Vous l'avez compris : je déteste les Rougon-Macquart !

Petitfils a écrit:- La Faute de l'abbé Mouret : pour le dilemme transcendantal (amour humaine ou amour de Dieu).

Je trouve ce roman glauque dans certains passages, il me met mal à l'aise et évoque Poumeyrol
https://www.google.fr/search?q=poumeyrol&espv=2&biw=1245&bih=923&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ved=0ahUKEwih8tHcuMjOAhVIExoKHYdxDHgQ_AUIBigB
Un univers pourrissant, mais ce n'est qu'une remarque personnelle.

- Le Rêve : une pause qui nous éloigne du misérabilisme (soufflons un peu). Un amour humain éthéré, baigné de religion à tendance païenne. Presque un conte de fée.

Certes, mais tellement mièvre à mes yeux.

Vous l'avez compris : je déteste les Rougon-Macquart !

Oui, oui, on avait compris.  

Merci Petitfils !

Devant la réponse de Petitfils, je me permets de souligner un élément essentiel de ma question :lol:

MrBrightside a écrit:si on veut lire quelques-uns des romans de la série pour le plaisir

MrBrightside a écrit:Devant la réponse de Petitfils, je me permets de souligner un élément essentiel de ma question :lol:

MrBrightside a écrit:si on veut lire quelques-uns des romans de la série pour le plaisir

Ça dépend ce que tu préfères ?
Les jolis contes de fées ? Le Rêve
Les jolis contes de fesses ? Nana
Les histoires glauques dans la cambrousse ? La Terre
Les belles histoires pleines de sentiments qui rappellent Une Vie de Maupassant, en mieux ? La Joie de vivre
Les histoires de psychopathe(s) ? La Bête humaine

etc.

Pour le plaisir, je dirais Pot-Bouille : on rigole bien et l'histoire est simple à comprendre. Octave Mouret arrive à Paris, dans un immeuble, bien résolu à coucher avec toutes les dames qui y habitent. Il se débrouille plutôt bien et en arrière-plan on a les commentaires des domestiques et toute une galerie de personnages mémorables. On n'a pas le temps de s'ennuyer.
Au Bonheur des dames, avec Denise, c'est beaucoup plus sage, même si c'est la suite. Un peu de romantisme après le grand déballage.

Pour le plaisir, MrB, je te conseille tout particulièrement La Joie de Vivre et Le Rêve.
Aucun problème pour une lecture dans le désordre.