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- Tem-toGrand sage
Cripure a écrit:Petitfils a écrit:
Sorry repas familial agrandi. Je reviens après.
Il y a une belle oie à ce repas agrandi ?
Non et il n'y a pas non plus de voisins ou d'employés.
- Invité ElExpert spécialisé
Oui, pardon, c'est que j'étais en vadrouille...
J'ai réussi à lire un peu:
- C. Anfray, "La Faute (originelle) de l'abbé Mouret", Cahiers naturalistes 2005 (79)
très éclairant, et remettant le roman dans la perspective des RM et notamment dans son lien (confirmé donc) avec La Conquête de Plassans; elle étudie les diverses modalités de lecture du mythe originel
- O. R. Hansen, La Chute de la Femme, L'Ascension d'un Dieu victimisé dans l'oeuvre d'Emile Zola (1996)
je ne veux pas dire trop de bêtises (il y a, sinon, une recension -sans véritable critique d'ailleurs- descriptive du livre ici: http://www.cahiers-naturalistes.com/chute_dela_femme.html), mais je le mentionne surtout pour dire qu'il ne m'a pas convaincu et même fait perdre mon temps; l'idée est que la grande motivation de Zola, quoi qu'il en ait, c'est la vision obsédante de la femme porteuse de mort; elle offre donc une lecture plus ou moins psychanalytique des RM qui me laisse personnellement songeur; je préfère qu'on s'en tienne au texte...
- S. Ménard, Emile Zola et les aveux du corps. Les savoirs du roman naturaliste (2014)
alors là Je regrette de n'avoir pas eu le temps de tout lire car elle propose une lecture d'ensemble des RM, avec des références riches et des commentaires précis. L'idée est d'envisager le personnage zolien sous l'angle de la "bête d'aveu"; elle étudie notamment "l'hystérique, la dévote, le fou, le criminel et l'écrivain".
- S. Guermès, La religion de Zola. Naturalisme et déchristianisation (2003)
histoire de chipoter, je signale qu'il n'y pas d'index locorum, une honte! A part ça, magistral. la problématique est bien plus large que le roman et je n'ai pas eu le temps de lire tout ce que je voulais, mais j'ai glané quelques informations utiles
Bref, il ressort de ces lectures les remarques suivantes (pardon si je ne structure pas assez):
- J'ai beaucoup changé d'avis sur le caractère critique voire satirique du roman, comme me le suggérait Cripure. Les premières pages, par exemple, me semblent maintenant relever en effet de la description réaliste et être le fruit du travail des carnets. Le personnage de Serge n'est pas l'objet d'une satire de Zola, c'est bien une évidence. Cependant, il y a des thèmes annexes qui sont présents et révèlent la méfiance ou le rejet de Zola: par exemple les effets néfastes de la révélation des tentations et des péchés sur une jeune séminariste par la lecture des manuels de confession (on trouve ça aussi chez Michelet ou les Goncourt); de pair avec cela la dévotion mariale de Serge qui confine à l'érotomanie (incomplet sexuellement, le prêtre est sur-initié à la sexualité par les manuels de confession; pour en avoir un jour feuilleté un, je dois reconnaître que c'est fort instructif...); si Serge est un personnage en soi, reste que la figure du prêtre fait l'objet d'une défiance ("déréglé biologiquement et socialement", il forme lui-même des personnages liminaires comme la dévote hystérique ou la jeune fille perverse) cf. lettre de Zola à JB Baille (10 août 1860) "[je n'accepte pas que] des hommes faillibles et fragiles puissent gouverner leurs semblables au nom du ciel"; la confession fait aussi l'objet d'une satire féroce: cf. la scène où la Teuse passe son temps à nettoyer le confessionnal, et où elle ramasse des copeaux de pommes laissés là par Catherine et Vincent avec des cheveux et un morceau de ruban > le lieu est détourné (la faute originelle étant signifiée clairement) par Zola qui trouve à la confession un érotisme coupable (idem ches les Goncourt d’ailleurs)
- j’ai aussi lu des choses intéressantes sur la déformation anatomique de Serge après le séminaire : je m’en servirai pour illustrer un motif naturaliste (je ferai une comparaison avec les visages des mineurs dans Germinal ou de Pierre Froment dans Lourdes) : on lit dans le roman « on avait tué l’homme en lui, il le sentait, il était heureux de se savoir à part, créature châtrée, déviée, marquée de la tonsure ainsi qu’une brebis du Seigneur » > l’animalisation est bien constitutive d’une critique de la prêtrise
- cependant, cela n’est pas l’objectif premier, S. Guermès donnant raison à Cripure ; elle cite les dossiers préparatoires, fiches personnages : « je veux autant que possible effacer le monde clérical autour de mon personnage. Je ne fais pas une étude sur les prêtres, seur leur vie, mais sur une question particulière, dans un cadre d’art ». Bon, bien sûr, entre les intentions et les faits…
- les deux personnages de Serge et d’Albine peuvent être considérés comme échappant au projet des RM car ils sont hors du temps et de l’espace. Certes, ils opposent des types sociaux. A noter qu’Albine incarne le rachat possible de l’humanité car bien qu’elle pousse Serge à la sexualité (en fait, il était déjà « défloré » par ses lectures techniques du séminaire, cf supra) elle représente une certaine fidélité à l’esprit du christianisme (« je suis ta femme (…) C’est toi qui m’as faite »). Serge, c’est le passage du Christianisme au Catholicisme (je suis étonné que Guermès, sur ce point, ne parle pas de Renan ou de Loisy et de leur éventuelle (je ne prends pas de risque !) influence sur Zola)
Je continuerai un peu plus tard…
J'ai réussi à lire un peu:
- C. Anfray, "La Faute (originelle) de l'abbé Mouret", Cahiers naturalistes 2005 (79)
très éclairant, et remettant le roman dans la perspective des RM et notamment dans son lien (confirmé donc) avec La Conquête de Plassans; elle étudie les diverses modalités de lecture du mythe originel
- O. R. Hansen, La Chute de la Femme, L'Ascension d'un Dieu victimisé dans l'oeuvre d'Emile Zola (1996)
je ne veux pas dire trop de bêtises (il y a, sinon, une recension -sans véritable critique d'ailleurs- descriptive du livre ici: http://www.cahiers-naturalistes.com/chute_dela_femme.html), mais je le mentionne surtout pour dire qu'il ne m'a pas convaincu et même fait perdre mon temps; l'idée est que la grande motivation de Zola, quoi qu'il en ait, c'est la vision obsédante de la femme porteuse de mort; elle offre donc une lecture plus ou moins psychanalytique des RM qui me laisse personnellement songeur; je préfère qu'on s'en tienne au texte...
- S. Ménard, Emile Zola et les aveux du corps. Les savoirs du roman naturaliste (2014)
alors là Je regrette de n'avoir pas eu le temps de tout lire car elle propose une lecture d'ensemble des RM, avec des références riches et des commentaires précis. L'idée est d'envisager le personnage zolien sous l'angle de la "bête d'aveu"; elle étudie notamment "l'hystérique, la dévote, le fou, le criminel et l'écrivain".
- S. Guermès, La religion de Zola. Naturalisme et déchristianisation (2003)
histoire de chipoter, je signale qu'il n'y pas d'index locorum, une honte! A part ça, magistral. la problématique est bien plus large que le roman et je n'ai pas eu le temps de lire tout ce que je voulais, mais j'ai glané quelques informations utiles
Bref, il ressort de ces lectures les remarques suivantes (pardon si je ne structure pas assez):
- J'ai beaucoup changé d'avis sur le caractère critique voire satirique du roman, comme me le suggérait Cripure. Les premières pages, par exemple, me semblent maintenant relever en effet de la description réaliste et être le fruit du travail des carnets. Le personnage de Serge n'est pas l'objet d'une satire de Zola, c'est bien une évidence. Cependant, il y a des thèmes annexes qui sont présents et révèlent la méfiance ou le rejet de Zola: par exemple les effets néfastes de la révélation des tentations et des péchés sur une jeune séminariste par la lecture des manuels de confession (on trouve ça aussi chez Michelet ou les Goncourt); de pair avec cela la dévotion mariale de Serge qui confine à l'érotomanie (incomplet sexuellement, le prêtre est sur-initié à la sexualité par les manuels de confession; pour en avoir un jour feuilleté un, je dois reconnaître que c'est fort instructif...); si Serge est un personnage en soi, reste que la figure du prêtre fait l'objet d'une défiance ("déréglé biologiquement et socialement", il forme lui-même des personnages liminaires comme la dévote hystérique ou la jeune fille perverse) cf. lettre de Zola à JB Baille (10 août 1860) "[je n'accepte pas que] des hommes faillibles et fragiles puissent gouverner leurs semblables au nom du ciel"; la confession fait aussi l'objet d'une satire féroce: cf. la scène où la Teuse passe son temps à nettoyer le confessionnal, et où elle ramasse des copeaux de pommes laissés là par Catherine et Vincent avec des cheveux et un morceau de ruban > le lieu est détourné (la faute originelle étant signifiée clairement) par Zola qui trouve à la confession un érotisme coupable (idem ches les Goncourt d’ailleurs)
- j’ai aussi lu des choses intéressantes sur la déformation anatomique de Serge après le séminaire : je m’en servirai pour illustrer un motif naturaliste (je ferai une comparaison avec les visages des mineurs dans Germinal ou de Pierre Froment dans Lourdes) : on lit dans le roman « on avait tué l’homme en lui, il le sentait, il était heureux de se savoir à part, créature châtrée, déviée, marquée de la tonsure ainsi qu’une brebis du Seigneur » > l’animalisation est bien constitutive d’une critique de la prêtrise
- cependant, cela n’est pas l’objectif premier, S. Guermès donnant raison à Cripure ; elle cite les dossiers préparatoires, fiches personnages : « je veux autant que possible effacer le monde clérical autour de mon personnage. Je ne fais pas une étude sur les prêtres, seur leur vie, mais sur une question particulière, dans un cadre d’art ». Bon, bien sûr, entre les intentions et les faits…
- les deux personnages de Serge et d’Albine peuvent être considérés comme échappant au projet des RM car ils sont hors du temps et de l’espace. Certes, ils opposent des types sociaux. A noter qu’Albine incarne le rachat possible de l’humanité car bien qu’elle pousse Serge à la sexualité (en fait, il était déjà « défloré » par ses lectures techniques du séminaire, cf supra) elle représente une certaine fidélité à l’esprit du christianisme (« je suis ta femme (…) C’est toi qui m’as faite »). Serge, c’est le passage du Christianisme au Catholicisme (je suis étonné que Guermès, sur ce point, ne parle pas de Renan ou de Loisy et de leur éventuelle (je ne prends pas de risque !) influence sur Zola)
Je continuerai un peu plus tard…
- GilbertineNeoprof expérimenté
Bravo Elpenor, merci de partager.
Le concept d'érotomanie est très éclairant pour Serge .
Un lien peut être établi entre l'abbé Tolbiac dans Une Vie de Maupassant et Frère Archangias. On trouve une scène identique : la destruction du nid et le piétinement de la chienne en gésine.
Je devrais avancer davantage aujourd'hui.
Le concept d'érotomanie est très éclairant pour Serge .
Un lien peut être établi entre l'abbé Tolbiac dans Une Vie de Maupassant et Frère Archangias. On trouve une scène identique : la destruction du nid et le piétinement de la chienne en gésine.
Je devrais avancer davantage aujourd'hui.
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"votre mystère étant resté là où est mort mon silence"
- Tem-toGrand sage
Ah oui tiens, j'avais oublié cela. Le prêtre (pas Serge hein) vu comme un destructeur de vie et qui finalement dévoie sa vocation en considérant l'existence comme un fatal et éternel nid de péchés dont on se demande si elle valait la peine d'être créée.Gilbertine a écrit:
Un lien peut être établi entre l'abbé Tolbiac dans Une Vie de Maupassant et Frère Archangias On trouve une scène identique : la destruction du nid et le piétinement de la chienne en gésine.
Je devrais avancer davantage aujourd'hui.
Il y a aussi, chez Zola, deux prêtres qui se succèdent à Montsous (Germinal) je crois. Le premier indifférent, fuyant et ambitieux (il ressemble à Faujas), le deuxième lutteur social et consolateur.
- Invité ElExpert spécialisé
Ils sont récurrents en effet. S. Guermès fait également une longue énumération des romans de la seconde moitié du XIXè qui font d'un prêtre leur personnage principal. Elle fait remarquer que Zola en a souvent fait des recensions dans ses journaux, souvent pour prendre position contre le célibat des prêtres.
- OudemiaBon génie
Elpenor, merci pour la bibliographie
Dans La Conquête de Plassans , ch. VII L'abbé avait un mépris d'homme et de prêtre pour la femme et une autre semblable plus loin, mais j'étais couchée quand je l'ai lue hier soir et je ne la retrouve pas : là c'est bien le jugement de Zola sur le clergé.
Quant au jardin, Mouret dit au début que c'est son petit paradis, je n'ai pas relevé le reste, sauf que c'est un lieu clos et organisé, quadrillé.
- coquille:
Dans La Conquête de Plassans , ch. VII L'abbé avait un mépris d'homme et de prêtre pour la femme et une autre semblable plus loin, mais j'étais couchée quand je l'ai lue hier soir et je ne la retrouve pas : là c'est bien le jugement de Zola sur le clergé.
Quant au jardin, Mouret dit au début que c'est son petit paradis, je n'ai pas relevé le reste, sauf que c'est un lieu clos et organisé, quadrillé.
- Invité ElExpert spécialisé
Oups, coquille éditée, merci Oudemia.Oudemia a écrit:Elpenor, merci pour la bibliographie; je n'ai lu jusqu'à maintenant aucun ouvrage critique sur Zola , à ma décharge, pas eu à le faire étudier au lycée, mais je vais réparer ça.
- coquille:
dans ta mention d'Anfray, ce n'est pas la Chute de P.
Dans La Conquête de Plassans , ch. VII L'abbé avait un mépris d'homme et de prêtre pour la femme et une autre semblable plus loin, mais j'étais couchée quand je l'ai lue hier soir et je ne la retrouve pas : là c'est bien le jugement de Zola sur le clergé.
Quant au jardin, Mouret dit au début que c'est son petit paradis, je n'ai pas relevé le reste, sauf que c'est un lieu clos et organisé, quadrillé.
Pour le jardin comme Paradis, je fais une fiche avec les références intertextuelles qui confirment ce propos de Serge, je la posterai quand il sera fini!
Je me sens obligé de lire tout cela parce qu'ayant eu une nette préférence pour Balzac je m'aperçois que je connais mal Zola. Je commence à avoir les idées plus claires (et aussi grâce à toutes vos contributions: merci!) et vais relire l'ensemble des RM en lirolitage.
- InvitéInvité
@ Elpenor: vous connaissez peut-être l'ouvrage de Sylvie Collot?
Les lieux du désir: topologie amoureuse de Zola. Belle étude sur les corps et les paysages zoliens. Si mes souvenirs sont bons, La Faute... est, très logiquement, souvent cité.
Les lieux du désir: topologie amoureuse de Zola. Belle étude sur les corps et les paysages zoliens. Si mes souvenirs sont bons, La Faute... est, très logiquement, souvent cité.
- Invité ElExpert spécialisé
Ah non! Merci pour la référence!maldoror1 a écrit:@ Elpenor: vous connaissez peut-être l'ouvrage de Sylvie Collot?
Les lieux du désir: topologie amoureuse de Zola. Belle étude sur les corps et les paysages zoliens. Si mes souvenirs sont bons, La Faute... est, très logiquement, souvent cité.
- InvitéInvité
Je vous en prie!elpenor a écrit:Ah non! Merci pour la référence!maldoror1 a écrit:@ Elpenor: vous connaissez peut-être l'ouvrage de Sylvie Collot?
Les lieux du désir: topologie amoureuse de Zola. Belle étude sur les corps et les paysages zoliens. Si mes souvenirs sont bons, La Faute... est, très logiquement, souvent cité.
- Tem-toGrand sage
elpenor a écrit: Je me sens obligé de lire tout cela parce qu'ayant eu une nette préférence pour Balzac je m'aperçois que je connais mal Zola. Je commence à avoir les idées plus claires (et aussi grâce à toutes vos contributions: merci!) et vais relire l'ensemble des RM en lirolitage.
J'ai presque lu tous les RM les uns à la suite des autres. Après L'Argent (sublime) j'en suis à La Débâcle qui est parti pour être celui que j'aime le moins. Enfin, peut-être va-t-il me retourner plus tard mais pour l'instant, je fais une pause. Un peu saturé je suis. Celui qui m'a le plus choqué est sans conteste La Terre, (trop c'est trop... terrible) bien "pire" que L'Assommoir à mes yeux.
Moi, c'est Balzac que je connais bien moins. J'avais lu Illusions perdues et Splendeurs et misères... adolescent et je n'ai pas envie de m'y remettre (pavés !). J'ai tout de même relu La Peau de chagrin et Le Chef d'oeuvre inconnu (à part dans son oeuvre) mais ni Le Père Goriot, ni Le Lys dans la vallée, ni Eugénie Grandet J'en ai une image trop compassée, trop datée, passéiste.
Il faudra pourtant que je me mette au Colonel Chabert, beaucoup disent que c'est exploitable au collège.
En revanche, j'ai adoré Les Diaboliques de Barbey d'Aurevilly. Sa polémique avec Zola est intéressante. Allez je vais peut-être faire crier mais si je ne le fais pas ici, où le ferais-je ? Peut-on considérer Barbey comme un naturaliste de la noblesse finissante ?
- User5899Demi-dieu
Bon, je l'ai dit, je n'ai jamais étudié la Faute, j'ai donc glané quelques idées de lectures intéressantes, merci Elpenor ! Je viens d'acheter Zola ou la fenêtre condamnée, thèse d'Emilie Piton-Foucault, mais la lecture en est impossible pour l'instant.
Tu verras, Elpenor, pourquoi Balzac et Zola sont souvent appréciés par des personnes différentes. On les rapproche sous la bannière un peu bête du réalisme, mais le naturalisme, c'est vraiment autre chose (et c'est finalement très consubstantiel à Zola, alors que le réalisme peut se rencontrer presque partout, y compris d'ailleurs chez Zola) : on est vraiment dans une ode à la vie et à la pulsion ("vie" est d'ailleurs le dernier mot des RM, je dis ça pour les structuralistes ). C'est pour ça que c'est énorme et parfois cafouilleux. Bon, pour les élèves, tu as intérêt à trier
Tu verras, Elpenor, pourquoi Balzac et Zola sont souvent appréciés par des personnes différentes. On les rapproche sous la bannière un peu bête du réalisme, mais le naturalisme, c'est vraiment autre chose (et c'est finalement très consubstantiel à Zola, alors que le réalisme peut se rencontrer presque partout, y compris d'ailleurs chez Zola) : on est vraiment dans une ode à la vie et à la pulsion ("vie" est d'ailleurs le dernier mot des RM, je dis ça pour les structuralistes ). C'est pour ça que c'est énorme et parfois cafouilleux. Bon, pour les élèves, tu as intérêt à trier
- GilbertineNeoprof expérimenté
J'avance un peu dans La Faute entre deux pâmoisons forcées devant les oeuvres spirographiques ou playmobilesques du boutonneux.
La basse-cour contre le cimetière et le Paradou font deux lieux complémentaires. Le fumier sert de motif commun, comme l' "ordure" dans L'Assommoir. Alors que Désirée a "poussé en plein fumier", Jeanbernat veut y reposer. Albine est une fille de l'air et du soleil, pas de la terre.
En ce sens, je creuse du côté de l'alliance des éléments : le soleil et les arbres d'un côté, la terre et les pierres de l'autre.
Je suis une grosse quiche en délires onomastiques et ait subi une cruelle humiliation à l'oral de Normale à cause de cette faiblesse. N'hésite pas, Elpenor, à l'occasion, à m'envoyer ta fiche sur les noms propres, cela m'éclairera sans doute.
Petitfils, voir Barbey comme un naturaliste de la noblesse finissante est intéressant. Dans "Le dessous de cartes d'une partie de whist", il herborise
La basse-cour contre le cimetière et le Paradou font deux lieux complémentaires. Le fumier sert de motif commun, comme l' "ordure" dans L'Assommoir. Alors que Désirée a "poussé en plein fumier", Jeanbernat veut y reposer. Albine est une fille de l'air et du soleil, pas de la terre.
En ce sens, je creuse du côté de l'alliance des éléments : le soleil et les arbres d'un côté, la terre et les pierres de l'autre.
Je suis une grosse quiche en délires onomastiques et ait subi une cruelle humiliation à l'oral de Normale à cause de cette faiblesse. N'hésite pas, Elpenor, à l'occasion, à m'envoyer ta fiche sur les noms propres, cela m'éclairera sans doute.
Petitfils, voir Barbey comme un naturaliste de la noblesse finissante est intéressant. Dans "Le dessous de cartes d'une partie de whist", il herborise
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"votre mystère étant resté là où est mort mon silence"
- Invité ElExpert spécialisé
Oui, le naturalisme comme prolongement du réalisme (bêtise que j'ai souvent entendu ou lu dans les "manuels" ou introductions), j'en suis bien revenu. Et je commence à vraiment goûter cet élan vers la "vie" dont tu parles.
Ça bouillonne encore, et en effet, ce qui va rester dans le cours est toujours fumeux dans mon esprit
La grande question qui me turlupine, c'est le découpage du texte pour la LA. J'aimerais vraiment faire le chapitre II, 15 comme suggéré par Gilbertine, je suis toujours plus convaincu que c'est une idée excellente. Allez, je le poste: si quelqu'un veut proposer un découpage... (je l'embrasse d'avance)
(je copie-colle Wikisource sans correction ni relecture pour l'instant; il y a peut-être des coquilles)
Ça bouillonne encore, et en effet, ce qui va rester dans le cours est toujours fumeux dans mon esprit
La grande question qui me turlupine, c'est le découpage du texte pour la LA. J'aimerais vraiment faire le chapitre II, 15 comme suggéré par Gilbertine, je suis toujours plus convaincu que c'est une idée excellente. Allez, je le poste: si quelqu'un veut proposer un découpage... (je l'embrasse d'avance)
(je copie-colle Wikisource sans correction ni relecture pour l'instant; il y a peut-être des coquilles)
- Spoiler:
- Ils descendirent, ils marchèrent au milieu du jardin, sans que Serge cessât de sourire. Il n’aperçut les verdures que dans les miroirs clairs des yeux d’Albine. Le jardin, en les voyant, avait eu comme un rire prolongé, un murmure satisfait volant de feuille en feuille, jusqu’au bout des avenues les plus profondes. Depuis des journées, il devait les attendre, ainsi liés à la taille, réconciliés avec les arbres, cherchant sur les couches d’herbe leur amour perdu. Un chut solennel courut sous les branches. Le ciel de deux heures avait un assoupissement de brasier. Des plantes se haussaient pour les regarder passer.
— Les entends-tu ? demandait Albine à demi-voix. Elles se taisent quand nous approchons. Mais, au loin, elles nous attendent, elles se confient de l’une à l’autre le chemin qu’elles doivent nous indiquer… Je t’avais bien dit que nous n’aurions pas à nous inquiéter des sentiers. Ce sont les arbres qui me montrent la route, de leurs bras tendus.
En effet, le parc entier les poussait doucement. Derrière eux, il semblait qu’une barrière de buissons se hérissât, pour les empêcher de revenir sur leurs pas ; tandis que, devant eux, le tapis des gazons se déroulait, si aisément, qu’ils ne regardaient même plus à leurs pieds, s’abandonnant aux pentes douces des terrains.
— Et les oiseaux nous accompagnent, reprenait Albine. Ce sont des mésanges, cette fois. Les vois-tu ?… Elles filent le long des haies, elles s’arrêtent à chaque détour, pour veiller à ce que nous ne nous égarions pas. Ah ! si nous comprenions leur chant, nous saurions qu’elles nous invitent à nous hâter.
Puis, elle ajoutait :
— Toutes les bêtes du parc sont avec nous. Ne les sens-tu pas ? Il y a un grand frôlement qui nous suit : ce sont les oiseaux dans les arbres, les insectes dans les herbes, les chevreuils et les cerfs dans les taillis, et jusqu’aux poissons, dont les nageoires battent les eaux muettes… Ne te retourne pas, cela les effrayerait ; mais je suis sûre que nous avons un beau cortége.
Cependant, ils marchaient toujours, d’un pas sans fatigue. Albine ne parlait que pour charmer Serge de la musique de sa voix. Serge obéissait à la moindre pression de la main d’Albine. Ils ignoraient l’un et l’autre où ils passaient, certains d’aller droit où ils voulaient aller. Et, à mesure qu’ils avançaient, le jardin se faisait plus discret, retenait le soupir de ses ombrages, le bavardage de ses eaux, la vie ardente de ses bêtes. Il n’y avait plus qu’un grand silence frissonnant, une attente religieuse.
Alors, instinctivement, Albine et Serge levèrent la tête. En face d’eux était un feuillage colossal. Et, comme ils hésitaient, un chevreuil, qui les regardait de ses beaux yeux doux, sauta d’un bond dans les taillis.
— C’est là, dit Albine.
Elle s’approcha la première, la tête de nouveau tournée, tirant à elle Serge ; puis, ils disparurent derrière le frisson des feuilles remuées, et tout se calma. Ils entraient dans une paix délicieuse.
C’était, au centre, un arbre noyé d’une ombre si épaisse, qu’on ne pouvait en distinguer l’essence. Il avait une taille géante, un tronc qui respirait comme une poitrine, des branches qu’il étendait au loin, pareilles à des membres protecteurs. Il semblait bon, robuste, puissant, fécond ; il était le doyen du jardin, le père de la forêt, l’orgueil des herbes, l’ami du soleil qui se levait et se couchait chaque jour sur sa cime. De sa voûte verte, tombait toute la joie de la création : des odeurs de fleurs, des chants d’oiseaux, des gouttes de lumière, des réveils frais d’aurore, des tiédeurs endormies de crépuscule. Sa séve avait une telle force, qu’elle coulait de son écorce ; elle le baignait d’une buée de fécondation ; elle faisait de lui la virilité même de la terre. Et il suffisait à l’enchantement de la clairière. Les autres arbres, autour de lui, bâtissaient le mur impénétrable qui l’isolait au fond d’un tabernacle de silence et de demi-jour ; il n’y avait là qu’une verdure, sans un coin de ciel, sans une échappée d’horizon, qu’une rotonde, drapée partout de la soie attendrie des feuilles, tendue à terre du velours satiné des mousses. On y entrait comme dans le cristal d’une source, au milieu d’une limpidité verdâtre, nappe d’argent assoupie sous un reflet de roseaux. Couleurs, parfums, sonorités, frissons, tout restait vague, transparent, innommé, pâmé d’un bonheur allant jusqu’à l’évanouissement des choses. Une langueur d’alcôve, une lueur de nuit d’été mourant sur l’épaule nue d’une amoureuse, un balbutiement d’amour à peine distinct, tombant brusquement à un grand spasme muet, traînaient dans l’immobilité des branches que pas un souffle n’agitait. Solitude nuptiale, toute peuplée d’êtres embrassés, chambre vide, où l’on sentait quelque part, derrière des rideaux tirés, dans un accouplement ardent, la nature assouvie aux bras du soleil. Par moments, les reins de l’arbre craquaient ; ses membres se raidissaient comme ceux d’une femme en couches ; la sueur de vie qui coulait de son écorce pleuvait plus largement sur les gazons d’alentour, exhalant la mollesse d’un désir, noyant l’air d’abandon, pâlissant la clairière d’une jouissance. L’arbre alors défaillait avec son ombre, ses tapis d’herbe, sa ceinture d’épais taillis. Il n’était plus qu’une volupté.
Albine et Serge restaient ravis. Dès que l’arbre les eut pris sous la douceur de ses branches, ils se sentirent guéris de l’anxiété intolérable dont ils avaient souffert. Ils n’éprouvaient plus cette peur qui les faisait se fuir, ces luttes chaudes, désespérées, dans lesquelles ils se meurtrissaient, sans savoir contre quel ennemi ils résistaient si furieusement. Au contraire, une confiance absolue, une sérénité suprême les emplissaient ; ils s’abandonnaient l’un à l’autre, glissant lentement au plaisir d’être ensemble, très-loin, au fond d’une retraite miraculeusement cachée. Sans se douter encore de ce que le jardin exigeait d’eux, ils le laissaient libre de disposer de leur tendresse ; ils attendaient, sans trouble, que l’arbre leur parlât. L’arbre les mettait dans un aveuglement d’amour tel, que la clairière disparaissait, immense, royale, n’ayant plus qu’un bercement d’odeur.
Ils s’étaient arrêtés, avec un léger soupir, saisis par la fraîcheur musquée.
— L’air a le goût d’un fruit, murmura Albine.
Serge, à son tour, dit très-bas :
— L’herbe est si vivante, que je crois marcher sur un coin de ta robe.
Ils baissaient la voix par un sentiment religieux. Ils n’eurent pas même la curiosité de regarder en l’air, pour voir l’arbre. Ils en sentaient trop la majesté sur leurs épaules. Albine, d’un regard, demandait si elle avait exagéré l’enchantement des verdures. Serge répondait par deux larmes claires, qui coulaient sur ses joues. Leur joie d’être enfin là restait indicible.
— Viens, dit-elle à son oreille, d’une voix plus légère qu’un souffle.
Et elle alla, la première, se coucher au pied même de l’arbre. Elle lui tendit les mains avec un sourire, tandis que lui, debout, souriait aussi, en lui donnant les siennes. Lorsqu’elle les tint, elle l’attira à elle, lentement. Il tomba à son côté. Il la prit tout de suite contre sa poitrine. Cette étreinte les laissa pleins d’aise.
— Ah ! tu te rappelles, dit-il, ce mur qui semblait nous séparer… Maintenant, je te sens, il n’y a plus rien entre nous… Tu ne souffres pas ?
— Non, non, répondit-elle. Il fait bon.
Ils gardèrent le silence, sans se lâcher. Une émotion délicieuse, sans secousse, douce comme une nappe de lait répandue, les envahissait. Puis, Serge promena les mains le long du corps d’Albine. Il répétait :
— Ton visage est à moi, tes yeux, ta bouche, tes joues… Tes bras sont à moi, depuis tes ongles jusqu’à tes épaules… Tes pieds sont à moi, tes genoux sont à moi, toute ta personne est à moi.
Et il lui baisait le visage, sur les yeux, sur la bouche, sur les joues. Il lui baisait les bras, à petits baisers rapides, remontant des doigts jusqu’aux épaules. Il lui baisait les pieds, il lui baisait les genoux. Il la baignait d’une pluie de baisers, tombant à larges gouttes, tièdes comme les gouttes d’une averse d’été, partout, lui battant le cou, les seins, les hanches, les flancs. C’était une prise de possession sans emportement, continue, conquérant les plus petites veines bleues sous la peau rose.
— C’est pour me donner que je te prends, reprit-il. Je veux me donner à toi tout entier, à jamais ; car, je le sais bien à cette heure, tu es ma maîtresse, ma souveraine, celle que je dois adorer à genoux. Je ne suis ici que pour t’obéir, pour rester à tes pieds, guettant tes volontés, te protégeant de mes bras étendus, écartant du souffle les feuilles volantes qui troubleraient ta paix… Oh ! daigne permettre que je disparaisse, que je m’absorbe dans ton être, que je sois l’eau que tu bois, le pain que tu manges. Tu es ma fin. Depuis que je me suis éveillé au milieu de ce jardin, j’ai marché à toi, j’ai grandi pour toi. Toujours, comme but, comme récompense, j’ai vu ta grâce. Tu passais dans le soleil, avec ta chevelure d’or ; tu étais une promesse m’annonçant que tu me ferais connaître, un jour, la nécessité de cette création, de cette terre, de ces arbres, de ces eaux, de ce ciel, dont le mot suprême m’échappe encore… Je t’appartiens, je suis esclave, je t’écouterai, les lèvres sur tes pieds.
Il disait ces choses, courbé à terre, adorant la femme. Albine, orgueilleuse, se laissait adorer. Elle tendait les doigts, les seins, les lèvres, aux baisers dévots de Serge. Elle se sentait reine, à le regarder si fort et si humble devant elle. Elle l’avait vaincu, elle le tenait à sa merci, elle pouvait d’un seul mot disposer de lui. Et ce qui la rendait toute-puissante, c’était qu’elle entendait autour d’eux le jardin se réjouir de son triomphe, l’aider d’une clameur lentement grossie.
Serge n’avait plus que des balbutiements. Ses baisers s’égaraient. Il murmura encore :
— Ah ! je voudrais savoir… Je voudrais te prendre, te garder, mourir peut-être, ou nous envoler, je ne puis pas dire…
Tous deux, renversés, restèrent muets, perdant haleine, la tête roulante. Albine eut la force de lever un doigt, comme pour inviter Serge à écouter.
C’était le jardin qui avait voulu la faute. Pendant des semaines, il s’était prêté au lent apprentissage de leur tendresse. Puis, au dernier jour, il venait de les conduire dans l’alcôve verte. Maintenant, il était le tentateur, dont toutes les voix enseignaient l’amour. Du parterre, arrivaient des odeurs de fleurs pâmées, un long chuchotement, qui contait les noces des roses, les voluptés des violettes ; et jamais les sollicitations des héliotropes n’avaient eu une ardeur plus sensuelle. Du verger, c’étaient des bouffées de fruits mûrs que le vent apportait, une senteur grasse de fécondité, la vanille des abricots, le musc des oranges. Les prairies élevaient une voix plus profonde, faite des soupirs des millions d’herbes que le soleil baisait, large plainte d’une foule innombrable en rut, qu’attendrissaient les caresses fraîches des rivières, les nudités des eaux courantes, au bord desquelles les saules rêvaient tout haut de désir. La forêt soufflait la passion géante des chênes, les chants d’orgue des hautes futaies, une musique solennelle, menant le mariage des frênes, des bouleaux, des charmes, des platanes, au fond des sanctuaires de feuillage ; tandis que les buissons, les jeunes taillis étaient pleins d’une polissonnerie adorable, d’un vacarme d’amants se poursuivant, se jetant au bord des fossés, se volant le plaisir, au milieu d’un grand froissement de branches. Et, dans cet accouplement du parc entier, les étreintes les plus rudes s’entendaient au loin, sur les roches, là où la chaleur faisait éclater les pierres gonflées de passion, où les plantes épineuses aimaient d’une façon tragique, sans que les sources voisines pussent les soulager, tout allumées elles-mêmes par l’astre qui descendait dans leur lit.
— Que disent-ils ? murmura Serge, éperdu. Que veulent-ils de nous, à nous supplier ainsi ?
Albine, sans parler, le serra contre elle.
Les voix étaient devenues plus distinctes. Les bêtes du jardin, à leur tour, leur criaient de s’aimer. Les cigales chantaient de tendresse à en mourir. Les papillons éparpillaient des baisers, aux battements de leurs ailes. Les moineaux avaient des caprices d’une seconde, des caresses de sultans vivement promenées au milieu d’un sérail. Dans les eaux claires, c’étaient des pâmoisons de poissons déposant leur frai au soleil, des appels ardents et mélancoliques de grenouilles, toute une passion mystérieuse, monstrueusement assouvie dans la fadeur glauque des roseaux. Au fond des bois, les rossignols jetaient des rires perlés de volupté, les cerfs bramaient, ivres d’une telle concupiscence, qu’ils expiraient de lassitude à côté des femelles presque éventrées. Et, sur les dalles des rochers, au bord des buissons maigres, des couleuvres, nouées deux à deux, sifflaient avec douceur ; tandis que de grands lézards couvaient leurs œufs, l’échine vibrante d’un léger ronflement d’extase. Des coins les plus reculés, des nappes de soleil, des trous d’ombre, une odeur animale montait, chaude du rut universel. Toute cette vie pullulante avait un frisson d’enfantement. Sous chaque feuille, un insecte concevait ; dans chaque touffe d’herbe, une famille poussait ; des mouches volantes, collées l’une à l’autre, n’attendaient pas de s’être posées pour se féconder. Les parcelles de vie invisibles qui peuplent la matière, les atomes de la matière eux-mêmes, aimaient, s’accouplaient, donnaient au sol un branle voluptueux, faisaient du parc une grande fornication.
Alors, Albine et Serge entendirent. Il ne dit rien, il la lia de ses bras, toujours plus étroitement. La fatalité de la génération les entourait. Ils cédèrent aux exigences du jardin. Ce fut l’arbre qui confia à l’oreille d’Albine ce que les mères murmurent aux épousées, le soir des noces.
Albine se livra. Serge la posséda.
Et le jardin entier s’abîma avec le couple, dans un dernier cri de passion. Les troncs se ployèrent comme sous un grand vent ; les herbes laissèrent échapper un sanglot d’ivresse ; les fleurs, évanouies, les lèvres ouvertes, exhalèrent leur âme ; le ciel lui-même, tout embrasé d’un coucher d’astre, eut des nuages immobiles, des nuages pâmés, d’où tombait un ravissement surhumain. Et c’était une victoire pour les bêtes, les plantes, les choses, qui avaient voulu l’entrée de ces deux enfants dans l’éternité de la vie. Le parc applaudissait formidablement.
- GilbertineNeoprof expérimenté
Si je me souvenais de ce texte alors que ma lecture remonte à sept ou huit ans, c'est qu'il est particulièrement emblématique, j'ai été heureuse de le relire et de voir que je me rappelle le chapitrage.
Je prendrais peut-être depuis le début jusqu'à "Albine et Serge restaient ravis." ou "n’ayant plus qu’un bercement d’odeur."
Je prendrais peut-être depuis le début jusqu'à "Albine et Serge restaient ravis." ou "n’ayant plus qu’un bercement d’odeur."
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"votre mystère étant resté là où est mort mon silence"
- Invité ElExpert spécialisé
Merci beaucoup Gilbertine! Je vais l'imprimer et voir si ça pourrait coller
- doctor whoDoyen
Petitfils a écrit:elpenor a écrit: Je me sens obligé de lire tout cela parce qu'ayant eu une nette préférence pour Balzac je m'aperçois que je connais mal Zola. Je commence à avoir les idées plus claires (et aussi grâce à toutes vos contributions: merci!) et vais relire l'ensemble des RM en lirolitage.
J'ai presque lu tous les RM les uns à la suite des autres. Après L'Argent (sublime) j'en suis à La Débâcle qui est parti pour être celui que j'aime le moins. Enfin, peut-être va-t-il me retourner plus tard mais pour l'instant, je fais une pause. Un peu saturé je suis. Celui qui m'a le plus choqué est sans conteste La Terre, (trop c'est trop... terrible) bien "pire" que L'Assommoir à mes yeux.
Moi, c'est Balzac que je connais bien moins. J'avais lu Illusions perdues et Splendeurs et misères... adolescent et je n'ai pas envie de m'y remettre (pavés !). J'ai tout de même relu La Peau de chagrin et Le Chef d'oeuvre inconnu (à part dans son oeuvre) mais ni Le Père Goriot, ni Le Lys dans la vallée, ni Eugénie Grandet J'en ai une image trop compassée, trop datée, passéiste.
Il faudra pourtant que je me mette au Colonel Chabert, beaucoup disent que c'est exploitable au collège.
En revanche, j'ai adoré Les Diaboliques de Barbey d'Aurevilly. Sa polémique avec Zola est intéressante. Allez je vais peut-être faire crier mais si je ne le fais pas ici, où le ferais-je ? Peut-on considérer Barbey comme un naturaliste de la noblesse finissante ?
Chabert est sublime.
Je te conseillerais la trilogie de l'Histoire des Treize, notamment Ferragus, qui est une perle feuilletonesque.
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Mon blog sur Tintin (entre autres) : http://popanalyse.over-blog.com/
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- Invité ElExpert spécialisé
Bon, alors je dois avouer que j'avais pensé aussi à m'arrêter à "...ravis". J'ai a priori la hantise de donner un texte trop long: quand j'interroge au bac, je trouve toujours que les élèves se plantent si la longueur du texte se prête davantage à une étude littéraire qu'à un commentaire.Gilbertine a écrit:Si je me souvenais de ce texte alors que ma lecture remonte à sept ou huit ans, c'est qu'il est particulièrement emblématique, j'ai été heureuse de le relire et de voir que je me rappelle le chapitrage.
Je prendrais peut-être depuis le début jusqu'à "Albine et Serge restaient ravis." ou "n’ayant plus qu’un bercement d’odeur."
Même si le texte est déjà long comme cela, je n'arrivais pas à me résoudre à supprimer les lignes qui suivent où le jardin est personnifié. Et puis la sorte d'apocatastase qui règne est trop essentielle pour être ignorée dans l'interprétation du texte.
C'est vraiment difficile, tant la cohésion de l'ensemble du chapitre est forte.
Bref, merci une nouvelle fois.
- User5899Demi-dieu
elpenor a écrit:Oui, le naturalisme comme prolongement du réalisme (bêtise que j'ai souvent entendu ou lu dans les "manuels" ou introductions), j'en suis bien revenu. Et je commence à vraiment goûter cet élan vers la "vie" dont tu parles.
Ça bouillonne encore, et en effet, ce qui va rester dans le cours est toujours fumeux dans mon esprit
La grande question qui me turlupine, c'est le découpage du texte pour la LA. J'aimerais vraiment faire le chapitre II, 15 comme suggéré par Gilbertine, je suis toujours plus convaincu que c'est une idée excellente. Allez, je le poste: si quelqu'un veut proposer un découpage... (je l'embrasse d'avance)
(je copie-colle Wikisource sans correction ni relecture pour l'instant; il y a peut-être des coquilles)
- Spoiler:
Ils descendirent, ils marchèrent au milieu du jardin, sans que Serge cessât de sourire. Il n’aperçut les verdures que dans les miroirs clairs des yeux d’Albine. Le jardin, en les voyant, avait eu comme un rire prolongé, un murmure satisfait volant de feuille en feuille, jusqu’au bout des avenues les plus profondes. Depuis des journées, il devait les attendre, ainsi liés à la taille, réconciliés avec les arbres, cherchant sur les couches d’herbe leur amour perdu. Un chut solennel courut sous les branches. Le ciel de deux heures avait un assoupissement de brasier. Des plantes se haussaient pour les regarder passer.
— Les entends-tu ? demandait Albine à demi-voix. Elles se taisent quand nous approchons. Mais, au loin, elles nous attendent, elles se confient de l’une à l’autre le chemin qu’elles doivent nous indiquer… Je t’avais bien dit que nous n’aurions pas à nous inquiéter des sentiers. Ce sont les arbres qui me montrent la route, de leurs bras tendus.
En effet, le parc entier les poussait doucement. Derrière eux, il semblait qu’une barrière de buissons se hérissât, pour les empêcher de revenir sur leurs pas ; tandis que, devant eux, le tapis des gazons se déroulait, si aisément, qu’ils ne regardaient même plus à leurs pieds, s’abandonnant aux pentes douces des terrains.
— Et les oiseaux nous accompagnent, reprenait Albine. Ce sont des mésanges, cette fois. Les vois-tu ?… Elles filent le long des haies, elles s’arrêtent à chaque détour, pour veiller à ce que nous ne nous égarions pas. Ah ! si nous comprenions leur chant, nous saurions qu’elles nous invitent à nous hâter.
Puis, elle ajoutait :
— Toutes les bêtes du parc sont avec nous. Ne les sens-tu pas ? Il y a un grand frôlement qui nous suit : ce sont les oiseaux dans les arbres, les insectes dans les herbes, les chevreuils et les cerfs dans les taillis, et jusqu’aux poissons, dont les nageoires battent les eaux muettes… Ne te retourne pas, cela les effrayerait ; mais je suis sûre que nous avons un beau cortége.
Cependant, ils marchaient toujours, d’un pas sans fatigue. Albine ne parlait que pour charmer Serge de la musique de sa voix. Serge obéissait à la moindre pression de la main d’Albine. Ils ignoraient l’un et l’autre où ils passaient, certains d’aller droit où ils voulaient aller. Et, à mesure qu’ils avançaient, le jardin se faisait plus discret, retenait le soupir de ses ombrages, le bavardage de ses eaux, la vie ardente de ses bêtes. Il n’y avait plus qu’un grand silence frissonnant, une attente religieuse.
Alors, instinctivement, Albine et Serge levèrent la tête. En face d’eux était un feuillage colossal. Et, comme ils hésitaient, un chevreuil, qui les regardait de ses beaux yeux doux, sauta d’un bond dans les taillis.
— C’est là, dit Albine.
Elle s’approcha la première, la tête de nouveau tournée, tirant à elle Serge ; puis, ils disparurent derrière le frisson des feuilles remuées, et tout se calma. Ils entraient dans une paix délicieuse.
C’était, au centre, un arbre noyé d’une ombre si épaisse, qu’on ne pouvait en distinguer l’essence. Il avait une taille géante, un tronc qui respirait comme une poitrine, des branches qu’il étendait au loin, pareilles à des membres protecteurs. Il semblait bon, robuste, puissant, fécond ; il était le doyen du jardin, le père de la forêt, l’orgueil des herbes, l’ami du soleil qui se levait et se couchait chaque jour sur sa cime. De sa voûte verte, tombait toute la joie de la création : des odeurs de fleurs, des chants d’oiseaux, des gouttes de lumière, des réveils frais d’aurore, des tiédeurs endormies de crépuscule. Sa séve avait une telle force, qu’elle coulait de son écorce ; elle le baignait d’une buée de fécondation ; elle faisait de lui la virilité même de la terre. Et il suffisait à l’enchantement de la clairière. Les autres arbres, autour de lui, bâtissaient le mur impénétrable qui l’isolait au fond d’un tabernacle de silence et de demi-jour ; il n’y avait là qu’une verdure, sans un coin de ciel, sans une échappée d’horizon, qu’une rotonde, drapée partout de la soie attendrie des feuilles, tendue à terre du velours satiné des mousses. On y entrait comme dans le cristal d’une source, au milieu d’une limpidité verdâtre, nappe d’argent assoupie sous un reflet de roseaux. Couleurs, parfums, sonorités, frissons, tout restait vague, transparent, innommé, pâmé d’un bonheur allant jusqu’à l’évanouissement des choses. Une langueur d’alcôve, une lueur de nuit d’été mourant sur l’épaule nue d’une amoureuse, un balbutiement d’amour à peine distinct, tombant brusquement à un grand spasme muet, traînaient dans l’immobilité des branches que pas un souffle n’agitait. Solitude nuptiale, toute peuplée d’êtres embrassés, chambre vide, où l’on sentait quelque part, derrière des rideaux tirés, dans un accouplement ardent, la nature assouvie aux bras du soleil. Par moments, les reins de l’arbre craquaient ; ses membres se raidissaient comme ceux d’une femme en couches ; la sueur de vie qui coulait de son écorce pleuvait plus largement sur les gazons d’alentour, exhalant la mollesse d’un désir, noyant l’air d’abandon, pâlissant la clairière d’une jouissance. L’arbre alors défaillait avec son ombre, ses tapis d’herbe, sa ceinture d’épais taillis. Il n’était plus qu’une volupté.
Albine et Serge restaient ravis. Dès que l’arbre les eut pris sous la douceur de ses branches, ils se sentirent guéris de l’anxiété intolérable dont ils avaient souffert. Ils n’éprouvaient plus cette peur qui les faisait se fuir, ces luttes chaudes, désespérées, dans lesquelles ils se meurtrissaient, sans savoir contre quel ennemi ils résistaient si furieusement. Au contraire, une confiance absolue, une sérénité suprême les emplissaient ; ils s’abandonnaient l’un à l’autre, glissant lentement au plaisir d’être ensemble, très-loin, au fond d’une retraite miraculeusement cachée. Sans se douter encore de ce que le jardin exigeait d’eux, ils le laissaient libre de disposer de leur tendresse ; ils attendaient, sans trouble, que l’arbre leur parlât. L’arbre les mettait dans un aveuglement d’amour tel, que la clairière disparaissait, immense, royale, n’ayant plus qu’un bercement d’odeur.
Ils s’étaient arrêtés, avec un léger soupir, saisis par la fraîcheur musquée.
— L’air a le goût d’un fruit, murmura Albine.
Serge, à son tour, dit très-bas :
— L’herbe est si vivante, que je crois marcher sur un coin de ta robe.
Ils baissaient la voix par un sentiment religieux. Ils n’eurent pas même la curiosité de regarder en l’air, pour voir l’arbre. Ils en sentaient trop la majesté sur leurs épaules. Albine, d’un regard, demandait si elle avait exagéré l’enchantement des verdures. Serge répondait par deux larmes claires, qui coulaient sur ses joues. Leur joie d’être enfin là restait indicible.
— Viens, dit-elle à son oreille, d’une voix plus légère qu’un souffle.
Et elle alla, la première, se coucher au pied même de l’arbre. Elle lui tendit les mains avec un sourire, tandis que lui, debout, souriait aussi, en lui donnant les siennes. Lorsqu’elle les tint, elle l’attira à elle, lentement. Il tomba à son côté. Il la prit tout de suite contre sa poitrine. Cette étreinte les laissa pleins d’aise.
— Ah ! tu te rappelles, dit-il, ce mur qui semblait nous séparer… Maintenant, je te sens, il n’y a plus rien entre nous… Tu ne souffres pas ?
— Non, non, répondit-elle. Il fait bon.
Ils gardèrent le silence, sans se lâcher. Une émotion délicieuse, sans secousse, douce comme une nappe de lait répandue, les envahissait. Puis, Serge promena les mains le long du corps d’Albine. Il répétait :
— Ton visage est à moi, tes yeux, ta bouche, tes joues… Tes bras sont à moi, depuis tes ongles jusqu’à tes épaules… Tes pieds sont à moi, tes genoux sont à moi, toute ta personne est à moi.
Et il lui baisait le visage, sur les yeux, sur la bouche, sur les joues. Il lui baisait les bras, à petits baisers rapides, remontant des doigts jusqu’aux épaules. Il lui baisait les pieds, il lui baisait les genoux. Il la baignait d’une pluie de baisers, tombant à larges gouttes, tièdes comme les gouttes d’une averse d’été, partout, lui battant le cou, les seins, les hanches, les flancs. C’était une prise de possession sans emportement, continue, conquérant les plus petites veines bleues sous la peau rose.
— C’est pour me donner que je te prends, reprit-il. Je veux me donner à toi tout entier, à jamais ; car, je le sais bien à cette heure, tu es ma maîtresse, ma souveraine, celle que je dois adorer à genoux. Je ne suis ici que pour t’obéir, pour rester à tes pieds, guettant tes volontés, te protégeant de mes bras étendus, écartant du souffle les feuilles volantes qui troubleraient ta paix… Oh ! daigne permettre que je disparaisse, que je m’absorbe dans ton être, que je sois l’eau que tu bois, le pain que tu manges. Tu es ma fin. Depuis que je me suis éveillé au milieu de ce jardin, j’ai marché à toi, j’ai grandi pour toi. Toujours, comme but, comme récompense, j’ai vu ta grâce. Tu passais dans le soleil, avec ta chevelure d’or ; tu étais une promesse m’annonçant que tu me ferais connaître, un jour, la nécessité de cette création, de cette terre, de ces arbres, de ces eaux, de ce ciel, dont le mot suprême m’échappe encore… Je t’appartiens, je suis esclave, je t’écouterai, les lèvres sur tes pieds.
Il disait ces choses, courbé à terre, adorant la femme. Albine, orgueilleuse, se laissait adorer. Elle tendait les doigts, les seins, les lèvres, aux baisers dévots de Serge. Elle se sentait reine, à le regarder si fort et si humble devant elle. Elle l’avait vaincu, elle le tenait à sa merci, elle pouvait d’un seul mot disposer de lui. Et ce qui la rendait toute-puissante, c’était qu’elle entendait autour d’eux le jardin se réjouir de son triomphe, l’aider d’une clameur lentement grossie.
Serge n’avait plus que des balbutiements. Ses baisers s’égaraient. Il murmura encore :
— Ah ! je voudrais savoir… Je voudrais te prendre, te garder, mourir peut-être, ou nous envoler, je ne puis pas dire…
Tous deux, renversés, restèrent muets, perdant haleine, la tête roulante. Albine eut la force de lever un doigt, comme pour inviter Serge à écouter.
C’était le jardin qui avait voulu la faute. Pendant des semaines, il s’était prêté au lent apprentissage de leur tendresse. Puis, au dernier jour, il venait de les conduire dans l’alcôve verte. Maintenant, il était le tentateur, dont toutes les voix enseignaient l’amour. Du parterre, arrivaient des odeurs de fleurs pâmées, un long chuchotement, qui contait les noces des roses, les voluptés des violettes ; et jamais les sollicitations des héliotropes n’avaient eu une ardeur plus sensuelle. Du verger, c’étaient des bouffées de fruits mûrs que le vent apportait, une senteur grasse de fécondité, la vanille des abricots, le musc des oranges. Les prairies élevaient une voix plus profonde, faite des soupirs des millions d’herbes que le soleil baisait, large plainte d’une foule innombrable en rut, qu’attendrissaient les caresses fraîches des rivières, les nudités des eaux courantes, au bord desquelles les saules rêvaient tout haut de désir. La forêt soufflait la passion géante des chênes, les chants d’orgue des hautes futaies, une musique solennelle, menant le mariage des frênes, des bouleaux, des charmes, des platanes, au fond des sanctuaires de feuillage ; tandis que les buissons, les jeunes taillis étaient pleins d’une polissonnerie adorable, d’un vacarme d’amants se poursuivant, se jetant au bord des fossés, se volant le plaisir, au milieu d’un grand froissement de branches. Et, dans cet accouplement du parc entier, les étreintes les plus rudes s’entendaient au loin, sur les roches, là où la chaleur faisait éclater les pierres gonflées de passion, où les plantes épineuses aimaient d’une façon tragique, sans que les sources voisines pussent les soulager, tout allumées elles-mêmes par l’astre qui descendait dans leur lit.
— Que disent-ils ? murmura Serge, éperdu. Que veulent-ils de nous, à nous supplier ainsi ?
Albine, sans parler, le serra contre elle.
Les voix étaient devenues plus distinctes. Les bêtes du jardin, à leur tour, leur criaient de s’aimer. Les cigales chantaient de tendresse à en mourir. Les papillons éparpillaient des baisers, aux battements de leurs ailes. Les moineaux avaient des caprices d’une seconde, des caresses de sultans vivement promenées au milieu d’un sérail. Dans les eaux claires, c’étaient des pâmoisons de poissons déposant leur frai au soleil, des appels ardents et mélancoliques de grenouilles, toute une passion mystérieuse, monstrueusement assouvie dans la fadeur glauque des roseaux. Au fond des bois, les rossignols jetaient des rires perlés de volupté, les cerfs bramaient, ivres d’une telle concupiscence, qu’ils expiraient de lassitude à côté des femelles presque éventrées. Et, sur les dalles des rochers, au bord des buissons maigres, des couleuvres, nouées deux à deux, sifflaient avec douceur ; tandis que de grands lézards couvaient leurs œufs, l’échine vibrante d’un léger ronflement d’extase. Des coins les plus reculés, des nappes de soleil, des trous d’ombre, une odeur animale montait, chaude du rut universel. Toute cette vie pullulante avait un frisson d’enfantement. Sous chaque feuille, un insecte concevait ; dans chaque touffe d’herbe, une famille poussait ; des mouches volantes, collées l’une à l’autre, n’attendaient pas de s’être posées pour se féconder. Les parcelles de vie invisibles qui peuplent la matière, les atomes de la matière eux-mêmes, aimaient, s’accouplaient, donnaient au sol un branle voluptueux, faisaient du parc une grande fornication.
Alors, Albine et Serge entendirent. Il ne dit rien, il la lia de ses bras, toujours plus étroitement. La fatalité de la génération les entourait. Ils cédèrent aux exigences du jardin. Ce fut l’arbre qui confia à l’oreille d’Albine ce que les mères murmurent aux épousées, le soir des noces.
Albine se livra. Serge la posséda.
Et le jardin entier s’abîma avec le couple, dans un dernier cri de passion. Les troncs se ployèrent comme sous un grand vent ; les herbes laissèrent échapper un sanglot d’ivresse ; les fleurs, évanouies, les lèvres ouvertes, exhalèrent leur âme ; le ciel lui-même, tout embrasé d’un coucher d’astre, eut des nuages immobiles, des nuages pâmés, d’où tombait un ravissement surhumain. Et c’était une victoire pour les bêtes, les plantes, les choses, qui avaient voulu l’entrée de ces deux enfants dans l’éternité de la vie. Le parc applaudissait formidablement.
Je ne comprends pas ce que tu veux dire par "découpage".
Edit
Mais pourquoi coupez-vous le texte ??? Il faut l'étudier en entier !
Elpenor, à l'oral, les candidats n'ont à produire ni une étude littéraire, ni un commentaire, mais une "réponse organisée à une question posée sur un texte lu ou étudié en classe pendant l'année de première". Sur mes textes, j'en ai au moins 4 qui dépassent les 5 pages avec une allégresse printanière.
- Invité ElExpert spécialisé
Rââh, j'étais sûr que ça ne t'irait pas
Oui, je saisis bien le problème, mais vraiment, je n'arrive pas à m'y résoudre même si l'unité du texte en pâtit. Je trouve ça infaisable pour eux...
Mais je comprends, je comprends. Argh.
Oui, je saisis bien le problème, mais vraiment, je n'arrive pas à m'y résoudre même si l'unité du texte en pâtit. Je trouve ça infaisable pour eux...
Mais je comprends, je comprends. Argh.
- IphigénieProphète
Insuffisant certainement, simplificateur assurément, mais je ne vois pas en quoi bêtise.elpenor a écrit:Oui, le naturalisme comme prolongement du réalisme (bêtise que j'ai souvent entendu ou lu dans les "manuels" ou introductions), j'en suis bien revenu. Et je commence à vraiment goûter cet élan vers la "vie" dont tu parles.
- GilbertineNeoprof expérimenté
"il contentait ses besoins de tendresse, en dépensant tous les sous qu'on lui donnait à acheter des images de sainteté, qu'il cachait jalousement, pour en jouir seul"
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"votre mystère étant resté là où est mort mon silence"
- IphigénieProphète
Je ne suis pas grande spécialiste de Zola, mais le dernier que j'ai lu c'est Vérité (son dernier roman, je crois): sur fond d'affaire Dreyfus on retrouve bien, dans cette affaire de mœurs, la très grande violence du combat entre laïcs et religieux à la veille de la séparation de l'Eglise et de l'Etat, et la violence des griefs de Zola contre l'institution religieuse.Gilbertine a écrit:"il contentait ses besoins de tendresse, en dépensant tous les sous qu'on lui donnait à acheter des images de sainteté, qu'il cachait jalousement, pour en jouir seul"
- IphigénieProphète
On trouve des phrases aussi délicieuses dans les pages au séminaire dans Le Rouge et le Noir ...Gilbertine a écrit:"il contentait ses besoins de tendresse, en dépensant tous les sous qu'on lui donnait à acheter des images de sainteté, qu'il cachait jalousement, pour en jouir seul"
(pour le lien entre réalisme et naturalisme
- GilbertineNeoprof expérimenté
Iphigénie a écrit: On trouve des phrases aussi délicieuses dans les pages au séminaire dans Le Rouge et le Noir ...
(pour le lien entre réalisme et naturalisme
Oui, ces pages sont géniales, et les séminaristes qui ne pensent qu'à bouffer... , cela me fait penser que la cantine est un pilier de l'EN.
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"votre mystère étant resté là où est mort mon silence"
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