Niveau des élèves très très faible

Bonjour,

Arrivé à la moitié du premier trimestre, je prends conscience que le niveau de mes élèves de 4ème est d'une faiblesse extrême. J'ai déjà enseigné en ZEP-REP mais je n'avais jamais vu ça auparavant.

Des mots tels que "vaste" ou "un quart d'heure" ne sont tout simplement pas connus...

Dans ces conditions, le programme n'est pas faisable et la plupart des textes se trouvant dans le manuel demeurent parfaitement incompréhensibles pour les élèves.

Certains d'entre eux (un tiers ) peuvent faire jusqu'à 90 fautes sur 15 lignes. Certaines rédactions ne sont pas lisibles. Syntaxiquement et graphiquement, ce n'est pas même du niveau d'un élève de CM1...

Dans ces deux classes, il y a malgré tout 2 ou 3 élèves qui suivent et qui ont un niveau tout juste correct.

Que faire ? Proposer deux ou trois choses différentes en fonction du niveau des élèves ? Je n'y arrive pas. Je n'ai pas le temps. Je suis en début de carrière et le temps de service, la constitution d'un cours classique et la correction de copies représentent déjà plus de 40h de travail hebdomadaire. Et je suis de surcroît exténué et démotivé.  

On a parfois l'impression avec de très bonnes classes, dans de très bons établissements, que les élèves s'en sortiront de toute façon, sans ou avec nous. J'ai le même sentiment, mais la situation est inverse. Certains élèves sont trop loin, trop loin...

Welcome !

Ashtrak a écrit:Welcome !

+1, Welcome sur la planète EN.

Les miens en première n'ont qu'une phrase à la bouche : "J'con prends paaaaaaaaaaaaaaas...".

Phrase entendue :
avant le cours,
pendant le cours,
après le cours,
avant les exercices d'application,
pendant les exercices d'application,
après les exercices d'application,
avant la distribution des TP,
pendant la distribution des TP,
après la distribution des TP,
avant l'exécution du TP,
pendant l'exécution du TP,
après l'exécution du TP,
avant le contrôle oral,
pendant le contrôle oral,
après le contrôle oral,
avant le contrôle écrit,
pendant le contrôle écrit,
après le contrôle écrit,
avant la correction,
pendant la correction,
après la correction.

Ponctué à la fin par : "J'ai rien con pris !".

Et je passe à la connaissance suivante.

Hum hum, hier c'est une élève de terminale qui m'a dit qu'elle ne comprenait rien à une vidéo super facile à suivre. Le reste de la classe prenait des notes et elle, avec ses yeux grand ouverts, ne trouvait même pas de quoi relever un mot ou deux. Je sens qu'elle va avoir une super note au bac d'anglais.

Les citoyens de demain...amoureux de leur servitude!

J'ai plusieurs terminales S qui ne sont pas dérangés de voir l'ion Fe3+ se dissoudre dans l'air... et leur note se dissoudre significativement aussi du coup.

En 5ème, on m'a demandé il y a quelques jours ce qu'étaient un "curé" et un "fossé". :shock:

Paraffin a écrit:Hum hum, hier c'est une élève de terminale qui m'a dit qu'elle ne comprenait rien à une vidéo super facile à suivre. Le reste de la classe prenait des notes et elle, avec ses yeux grand ouverts, ne trouvait même pas de quoi relever un mot ou deux. Je sens qu'elle va avoir une super note au bac d'anglais.

Oui parce qu'en plus ils font de l'anglais

Hier, une élève de seconde a découvert que le Vatican n'était pas en Chine et qu'il existait un département qui s'appelait la Loire ( ce n'est pas comme si on était dans l'Allier).
Une autre n'avait jamais entendu le nom de Berlusconi et à la question de savoir qui dirigeait la Russie aujourd'hui était toute contente de répondre :"Staline!"
Tout ça en littérature et société . O n'explore plus, on touche le fond !

Je suis aussi effarée. J'ai ramassé de petites choses mais là la première vraie éval' est catastrophique. Ce n'est pas du français pour la plupart. Je ne sais pas quoi faire, les moyennes sont catastrophiques. Je suis stagiaire, et du coup, je me demande comment noter, adapter les évaluations. Beaucoup d’élèves sont en grande difficulté et ne font pas d'efforts non plus. Brefle, je me pose mille questions.

roxanne a écrit:Hier, une élève de seconde a découvert que le Vatican n'était pas en Chine et qu'il existait un département qui s'appelait la Loire ( ce n'est pas comme si on était dans l'Allier).
Une autre n'avait jamais entendu le nom de Berlusconi et à la question de savoir qui dirigeait la Russie aujourd'hui était toute contente de répondre :"Staline!"
Tout ça en littérature et société . O n'explore plus, on touche le fond !

On touchait le fond il y a dix ans, là, on utilise les élèves pour tenter d'extraire proprement du gaz de schiste.

Non mais vraiment Cripure et les autres, j'ai envie de pleurer tellement c'est mauvais. ça me semble insurmontable.

En 1re S, on a décortiqué des maximes de La Rochefoucauld et j'ai donné en devoir (1h) des aphorismes du Dictionnaire du Diable de Bierce, écrits sur le même principe. Questions de corpus (mais corpus de 10l sur auteur unique, donc) à la façon bac, donc pas passionnantes, mais "pour avoir des points" : comment Bierce s'y prend-il pour argumenter ? (J'attends l'observation qu'il n'y a pas d'arguments et que la maxime s'adresse au vécu individuel du lecteur qui doit en éprouver le caractère vrai) ; quelle vision de l'homme se dégage de cet ensemble de textes ? (vision pessimiste, on illustre ou on explique brièvement, et c'est bon). Les deux questions ont été travaillées sur des Pensées de Pascal au préalable et sur les maximes de La Rochefoucauld. Bilan : 5,8/20, les deux questions sont oubliées au profit d'une paraphrase fautive...
Les notes vont de 20 à 0,5, 4 élèves ont la moyenne (sur 32).
Sur 32 élèves, 26 ne connaissent pas l'expression "tourner le dos à quelqu'un".
On continue ?

J'ai aussi des notes catastrophiques pour une classe de Term... Je suis effarée qu'ils ne sachent pas certaines bases. J'ai espoir que la note les fasse se bouger un peu le derrière et qu'ils prennent conscience que ça ne va pas tomber du ciel... Mais bon, c'est juste un espoir.
Et oui on leur demande aussi de parler en espagnol à ces pôvres petits choux! mais bon quand on passe au français ce n'est pas mieux. J'ai vu les "animeaux" aujourd'hui.
Edit: et là le garçon déteste les ipocrite. :shock:

Cripure a écrit:On touchait le fond il y a dix ans, là, on utilise les élèves pour tenter d'extraire proprement du gaz de schiste.

Je ne devrais pas en rire, mais je trouve ça très bon !

Je suis en train de corriger un contrôle d'histoire en 3e et je découvre avec stupéfaction que Périclès était un dieu et que César a battu Vercingétorix au 52ème siècle av.J.-C.
Et je ne parle pas du nombre de fautes d'orthographe. La collègue de français leur a fait une dictée non notée, elle a corrigé avec eux en réexpliquant les règles de grammaire, et le lendemain elle leur a refait la même dictée, notée cette fois ; il y a plusieurs 0.

:chev:

A vous lire, je me sens moins seule.
Le niveau des classes de sportifs et des bilangues est un peu meilleur (encore que cette année, les 6e bilangue sont beaucoup moins bons) mais pour le reste c'est tout pareil dans mon collège.
Une chose est sûre c'est que je ne cherche pas à finir le programme, je prends mon temps, je fais beaucoup d'oral, je prends de moins en moins de textes comme documents, et quand on travaile sur un texte, j'y passe énormément de temps, je ne donne pas grand chose à faire à la maison, je fais quasiment tout en classe. Et si un inspecteur me reproche de ne pas finir le programme (ce qui s'est passé la dernière fois), je lui demande comment il faut faire (je n'ai pas eu de réponse ! mais mon inspecteur est compréhensif)
On a des élèves très faibles, certains qui ne comprennent pas et donc qui ne travaillent pas, certains qui ne travaillent pas et donc qui ne comprennennt pas, des élèves qui sont arrivés en France depuis peu (on en a beaucoup, de partout : Syrie, Arménie, Tchétchenie, Irak, Mali, Soudan ... que des pays où il fait bon vivre) et qui ne maîtrisent pas le français, des dys truc-machins-bidules avec PAI ou non, certains qui relèvent de SEGPA mais qui n'y vont pas car c'est dans un autre collège (la notre a été fermée il y a cinq ans) ou qui n'y sont pas acceptés alors qu'ils ne savent ni lire ni écrire (cas d'un 6e cette année), et avec ça des sourds en intégration complète (mais c'est parfois eux les meilleures de la classe).
Avec tout ça, oui le niveau est très faible et mes moyennes sont très basses. Et pourtant j'adapte, j'adapte mes cours, j'adapte mes contrôles mais cela ne suffit pas.
Ah oui j'oubliais 83% de réussite au brevet et une grande majorité des élèves qui passent en 2de GT puisque les parents l'ont demandé, et la chef qui s'en félicite (désolée collègues de lycée)
C'est pas grave, ça ira mieux l'année prochaine grâce aux EPI .

J'ai les mêmes 4e ici. Ils ne sont tout simplement pas capables de faire une simple phrase sujet+verbe.
Bon mardi dernier, j'ai expliqué à un élève qu'une île ne flottait pas..

sookie a écrit:A vous lire, je me sens moins seule.
Le niveau des classes de sportifs et des bilangues est un peu meilleur (encore que cette année, les 6e bilangue sont beaucoup moins bons) mais pour le reste c'est tout pareil dans mon collège.
Une chose est sûre c'est que je ne cherche pas à finir le programme, je prends mon temps, je fais beaucoup d'oral, je prends de moins en moins de textes comme documents, et quand on travaile sur un texte, j'y passe énormément de temps, je ne donne pas grand chose à faire à la maison, je fais quasiment tout en classe. Et si un inspecteur me reproche de ne pas finir le programme (ce qui s'est passé la dernière fois), je lui demande comment il faut faire (je n'ai pas eu de réponse ! mais mon inspecteur est compréhensif)
On a des élèves très faibles, certains qui ne comprennent pas et donc qui ne travaillent pas, certains qui ne travaillent pas et donc qui ne comprennennt pas, des élèves qui sont arrivés en France depuis peu (on en a beaucoup, de partout : Syrie, Arménie, Tchétchenie, Irak, Mali, Soudan ... que des pays où il fait bon vivre) et qui ne maîtrisent pas le français, des dys truc-machins-bidules avec PAI ou non, certains qui relèvent de SEGPA mais qui n'y vont pas car c'est dans un autre collège (la notre a été fermée il y a cinq ans) ou qui n'y sont pas acceptés alors qu'ils ne savent ni lire ni écrire (cas d'un 6e cette année), et avec ça des sourds en intégration complète (mais c'est parfois eux les meilleures de la classe).
Avec tout ça, oui le niveau est très faible et mes moyennes sont très basses. Et pourtant j'adapte, j'adapte mes cours, j'adapte mes contrôles mais cela ne suffit pas.
Ah oui j'oubliais 83% de réussite au brevet et une grande majorité des élèves qui passent en 2de GT puisque les parents l'ont demandé, et la chef qui s'en félicite (désolée collègues de lycée)
C'est pas grave, ça ira mieux l'année prochaine grâce aux EPI .

Ben dis-donc 83% c'est très bien pour un niveau très très faible; Cela veut dire que toi et tes collègues faites du bon travail. Dans certains collèges, le taux est à environ 75% il me semble. Après concernant la majorité des élèves qui passent en 2de GT , tant que le conseil (donc la parole de l'adulte) dit non , et que vous avez noté justement durant toute l'année de 3ème, vous avez fait votre travail. Après si les parents veulent forcer le passage, c'est leur problème. De toute façon ils finiront désormais en STMG, c'est là qu'on met désormais les élèves non adaptés à la filière générale. Une cruche que j'avais en seconde il y a deux ans et qui refusait la réorientation en bac Pro a eu son bac STMG en juin. On voit désormais le niveau . Pourquoi STMG? Ben parce que ça ne coûte pas grand chose (moins que la filière pro). Même certains élèves choisissent volontairement la STMG car comme me l'a dit l'un d'eux, "en filière générale il faut bosser".

Tatane78 a écrit:Bonjour,

Arrivé à la moitié du premier trimestre, je prends conscience que le niveau de mes élèves de 4ème est d'une faiblesse extrême. J'ai déjà enseigné en ZEP-REP mais je n'avais jamais vu ça auparavant.

Des mots tels que "vaste" ou "un quart d'heure" ne sont tout simplement pas connus...

Dans ces conditions, le programme n'est pas faisable et la plupart des textes se trouvant dans le manuel demeurent parfaitement incompréhensibles pour les élèves.

Certains d'entre eux (un tiers ) peuvent faire jusqu'à 90 fautes sur 15 lignes. Certaines rédactions ne sont pas lisibles. Syntaxiquement et graphiquement, ce n'est pas même du niveau d'un élève de CM1...

Dans ces deux classes, il y a malgré tout 2 ou 3 élèves qui suivent et qui ont un niveau tout juste correct.

Que faire ? Proposer deux ou trois choses différentes en fonction du niveau des élèves ? Je n'y arrive pas. Je n'ai pas le temps. Je suis en début de carrière et le temps de service, la constitution d'un cours classique et la correction de copies représentent déjà plus de 40h de travail hebdomadaire. Et je suis de surcroît exténué et démotivé.  

On a parfois l'impression avec de très bonnes classes, dans de très bons établissements, que les élèves s'en sortiront de toute façon, sans ou avec nous. J'ai le même sentiment, mais la situation est inverse. Certains élèves sont trop loin, trop loin...

L'année dernière, en 4è, mes élèves ne savaient pas ce qu'était une tringle à rideaux, pour le texte de Théophile Gautier en devoir sur table.

Et chez moi les 3e ne savent pas ce qu'est un plancher... et il y en a même un qui pense que "vaste" désigne un récipient pour mettre des fleurs...

Cela veut surtout dire que le brevet est très facile et qu'on remonte leur note.
En fait, les sportifs font remonter la moyenne et les résultats de la 3e prepapro sont comptés avec
(mais c'est vrai qu'on fait du bon travail !)

pinioufette a écrit:Et chez moi les 3e ne savent pas ce qu'est un plancher... et il y en a même un qui pense que "vaste" désigne un récipient pour mettre des fleurs...

J'ai déjà raconté qu'en 1re S, l'an dernier, certains ne savaient pas ce qu'est un balcon...
J'avais répondu : "C'est là où il y a du monde"

C'est assez curieux d'ailleurs parce qu'à côté de ça, il y a des gamins qui ne sont pas forcément très forts à l'écrit maos qui ont une vraie culture soit politique soit littéraire et on le découvre un peu par hasard et là c'est le fossé avec les autres qui ne comprennent même pas de quoi on leur parle.