- chloe2504Niveau 5
Bonjour à tous,
j'ai envie de créer une séquence (GT) sur le plaisir ou le désir (je ne suis pas encore fixée) en poésie en 1ère. Mais j'avoue que mon esprit en vacances n'arrive à penser qu'aux Fleurs du mal... Auriez-vous quelques idées?
j'ai envie de créer une séquence (GT) sur le plaisir ou le désir (je ne suis pas encore fixée) en poésie en 1ère. Mais j'avoue que mon esprit en vacances n'arrive à penser qu'aux Fleurs du mal... Auriez-vous quelques idées?
- RogerMartinBon génie
Sur le désir, Desnos, "J'ai tant rêvé de toi"?
1926, tiré du recueil "A la mystérieuse", publié avec Corps et biens en 1930. Il y en a une autre version qu'il aurait composé en camp de concentration, et récité avant sa mort après la libération du camp où il était enfermé, mais maintenant on pense que c'est simplement qu'il a récité son poème original et qu'il a été mal retranscrit. Attention sur le net presque toutes les versions sont fautives, là tout est bon ponctuation (il n'y en a pas beaucoup) etc. > 7 paragraphes dans les bonnes éditions.
J'ai tant rêvé de toi que tu perds la réalité.
Est-il encore temps d'atteindre ce corps vivant et de baiser sur cette bouche la naissance de la voix qui m'est chère ?
J'ai tant rêvé de toi que mes bras habitués en étreignant ton ombre à se croiser sur ma poitrine ne se plieraient pas au contour de ton corps, peut-être.
Et que, devant l'apparence réelle de ce qui me hante et me gouverne depuis des jours et des années je deviendrais une ombre sans doute,
Ô balances sentimentales.
J'ai tant rêvé de toi qu'il n'est plus temps sans doute que je m'éveille. Je dors debout, le corps exposé à toutes les apparences de la vie et de l'amour et toi, la seule qui compte aujourd'hui pour moi, je pourrais moins toucher ton front et tes lèvres que les premières lèvres et le premier front venus.
J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé, couché avec ton fantôme qu'il ne me reste plus peut-être, et pourtant, qu'à être fantôme parmi les fantômes et plus ombre cent fois que l'ombre qui se promène et se promènera allègrement sur le cadran solaire de ta vie.
1926, tiré du recueil "A la mystérieuse", publié avec Corps et biens en 1930. Il y en a une autre version qu'il aurait composé en camp de concentration, et récité avant sa mort après la libération du camp où il était enfermé, mais maintenant on pense que c'est simplement qu'il a récité son poème original et qu'il a été mal retranscrit. Attention sur le net presque toutes les versions sont fautives, là tout est bon ponctuation (il n'y en a pas beaucoup) etc. > 7 paragraphes dans les bonnes éditions.
J'ai tant rêvé de toi que tu perds la réalité.
Est-il encore temps d'atteindre ce corps vivant et de baiser sur cette bouche la naissance de la voix qui m'est chère ?
J'ai tant rêvé de toi que mes bras habitués en étreignant ton ombre à se croiser sur ma poitrine ne se plieraient pas au contour de ton corps, peut-être.
Et que, devant l'apparence réelle de ce qui me hante et me gouverne depuis des jours et des années je deviendrais une ombre sans doute,
Ô balances sentimentales.
J'ai tant rêvé de toi qu'il n'est plus temps sans doute que je m'éveille. Je dors debout, le corps exposé à toutes les apparences de la vie et de l'amour et toi, la seule qui compte aujourd'hui pour moi, je pourrais moins toucher ton front et tes lèvres que les premières lèvres et le premier front venus.
J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé, couché avec ton fantôme qu'il ne me reste plus peut-être, et pourtant, qu'à être fantôme parmi les fantômes et plus ombre cent fois que l'ombre qui se promène et se promènera allègrement sur le cadran solaire de ta vie.
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Yo, salut ma bande ! disait toujours le Samouraï.
I User5899.
User 17706 s'est retiré à Helsingør.
Strange how paranoia can link up with reality now and then.
- OudemiaBon génie
Vaste programme !
Regarde donc au XVIe s., ou dans une des anthologies (amoureuse ou érotique) de Jean-Paul Goujon.
Regarde donc au XVIe s., ou dans une des anthologies (amoureuse ou érotique) de Jean-Paul Goujon.
- eliamEsprit éclairé
Louise Labbé que tu peux aussi donner en cursive mais aussi Ronsard.
- Asha KrakenNeoprof expérimenté
Et je pensais à Clément Marot.
- ysabelDevin
Cette année j'avais fait un GT sur le baiser au XVIe siècle ; les élèves ont bien aimé
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« vous qui entrez, laissez toute espérance ». Dante
« Il vaut mieux n’avoir rien promis que promettre sans accomplir » (L’Ecclésiaste)
- OrlandaFidèle du forum
Chez Apollinaire, en terme d'écriture du désir, tu seras bien servie!
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"Nous vivons à une époque où l'ignorance n'a plus honte d'elle-même". Robert Musil
- MrBrightsideEmpereur
-Chez Verlaine tu as le désir entre femmes dans Les Amies. Le moins explicite que j'ai trouvé
Sur le Balcon
Toutes deux regardaient s’enfuir les hirondelles :
L’une pâle aux cheveux de jais, et l’autre blonde
Et rose, et leurs peignoirs légers de vieille blonde
Vaguement serpentaient, nuages, autour d’elles.
Et toutes deux, avec des langueurs d’asphodèles,
Tandis qu’au ciel montait la lune molle et ronde,
Savouraient à longs traits l’émotion profonde
Du soir et le bonheur triste des cœurs fidèles.
Telles, leurs bras pressant, moites, leurs tailles souples,
Couple étrange qui prend pitié des autres couples,
Telles, sur le balcon, rêvaient les jeunes femmes.
Derrière elles, au fond du retrait riche et sombre,
Emphatique comme un trône de mélodrame
Et plein d’odeurs, le Lit, défait, s’ouvrait dans l’ombre.
-Plus vieux, chez Thibaut de Champagne, Ausi Comne Unicorne Sui:
[...]
Madame, quand devant vous je fus
et vous vis pour la première fois
mon coeur battait si fort
qu'il resta avec vous quand je m'en fus.
Il fut alors emmené sans rançon
prisonnier de la douce geôle
dont les piliers sont de désir,
les portes d'agréable vision
et les chaines de tendre espoir.
[...]
-Ou encore Adam de la Halle:
[...] Doux visage, virginal maintien,
corps séduisant
à vous voir coeur d'acier
éclate et s'ouvre à la joie.
Pour mon malheur j'allais à la fontaine
où je vous vis l'autre jour,
car je n'avais plus coeur au retour.
Or me voici,
à attendre sa grâce.
(Les deux derniers poèmes viennent de l'Anthologie de la poésie lyrique française des XIIe et XIIIe siècles (Gallimard, édition bilingue)
Sur le Balcon
Toutes deux regardaient s’enfuir les hirondelles :
L’une pâle aux cheveux de jais, et l’autre blonde
Et rose, et leurs peignoirs légers de vieille blonde
Vaguement serpentaient, nuages, autour d’elles.
Et toutes deux, avec des langueurs d’asphodèles,
Tandis qu’au ciel montait la lune molle et ronde,
Savouraient à longs traits l’émotion profonde
Du soir et le bonheur triste des cœurs fidèles.
Telles, leurs bras pressant, moites, leurs tailles souples,
Couple étrange qui prend pitié des autres couples,
Telles, sur le balcon, rêvaient les jeunes femmes.
Derrière elles, au fond du retrait riche et sombre,
Emphatique comme un trône de mélodrame
Et plein d’odeurs, le Lit, défait, s’ouvrait dans l’ombre.
-Plus vieux, chez Thibaut de Champagne, Ausi Comne Unicorne Sui:
[...]
Madame, quand devant vous je fus
et vous vis pour la première fois
mon coeur battait si fort
qu'il resta avec vous quand je m'en fus.
Il fut alors emmené sans rançon
prisonnier de la douce geôle
dont les piliers sont de désir,
les portes d'agréable vision
et les chaines de tendre espoir.
[...]
-Ou encore Adam de la Halle:
[...] Doux visage, virginal maintien,
corps séduisant
à vous voir coeur d'acier
éclate et s'ouvre à la joie.
Pour mon malheur j'allais à la fontaine
où je vous vis l'autre jour,
car je n'avais plus coeur au retour.
Or me voici,
à attendre sa grâce.
(Les deux derniers poèmes viennent de l'Anthologie de la poésie lyrique française des XIIe et XIIIe siècles (Gallimard, édition bilingue)
- Asha KrakenNeoprof expérimenté
Ah ben je voulais ajouter Verlaine, grillée par MrB, j'ajoute donc Musset et Théophile Gautier à la liste.
- MrBrightsideEmpereur
Muhaha, ne jamais sous-estimer un prof d'anglais
(Et encore, je ne propose pas de trucs en traduction, dommage il y a du très hot dans la poésie puritaine américaine )
(Et encore, je ne propose pas de trucs en traduction, dommage il y a du très hot dans la poésie puritaine américaine )
- chloe2504Niveau 5
Merci beaucoup pour toutes ces idées! Ysabel, peux-tu m'en dire plus sur cette séquence sur le baiser? Je trouve cela très intéressant et je pense aussi que ce serait l'avis de mes élèves.
- ysabelDevin
C'est ce GT avec comme problématique : comment l'écriture poétique rend-elle le baiser plus ou moins sensuel ?
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« vous qui entrez, laissez toute espérance ». Dante
« Il vaut mieux n’avoir rien promis que promettre sans accomplir » (L’Ecclésiaste)
- NLM76Grand Maître
Sur le désir : toute La princesse de Clèves
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Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- JPhMMDemi-dieu
ou celle de Jean-Jacques Pauvert en 5 tomes.Oudemia a écrit:Vaste programme !
Regarde donc au XVIe s., ou dans une des anthologies (amoureuse ou érotique) de Jean-Paul Goujon.
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Labyrinthe où l'admiration des ignorants et des idiots qui prennent pour savoir profond tout ce qu'ils n'entendent pas, les a retenus, bon gré malgré qu'ils en eussent. — John Locke
Je crois que je ne crois en rien. Mais j'ai des doutes. — Jacques Goimard
- SeiGrand Maître
Toujours Verlaine :
« LES COQUILLAGES»
Chaque coquillage incrusté
Dans la grotte où nous nous aimâmes
A sa particularité.
L’un a la pourpre de nos âmes
Dérobée au sang de nos cœurs
Quand je brûle et que tu t’enflammes ;
Cet autre affecte tes langueurs
Et tes pâleurs alors que, lasse,
Tu m’en veux de mes yeux moqueurs ;
Celui-ci contrefait la grâce,
De ton oreille, et celui-là,
Ta nuque rose, courte et grasse ;
Mais un, entre autres, me troubla.
Dans la poésie amoureuse baroque, il y a beaucoup de poèmes troublants sur le désir, en particulier le désir pour la femme morte.
Je songeais que Philis des enfers revenue
Belle comme elle était à la clarté du jour
Voulait qu’à son fantôme encor je fis l’amour
Et que comme Ixion j’embrassasse une nue
Son ombre dans mon lit se glisse toute nue
Et me dit Cher Tircis me voici de retour
Je n’ai fait qu’embellir dans le triste séjour
Où depuis mon départ le sort m’a retenue
Je viens pour rebaiser le plus beau des amants
Je viens pour remourir dans tes embrassements
Alors quand cette idole eût abusé ma flamme
Elle me dit Adieu je m’en vais chez les morts
Comme tu t’es vanté d’avoir baisé mon corps
Tu pourras te vanter d’avoir baisé mon âme
Théophile de Viau
(…)
Il mêle dans ton Deuil tant d’agréables charmes
Il s’y montre partout avecques tant d’appas
Sylvie que tu dois un jour verser des larmes
D’avoir pû par ce deuil causer tant de trépas
Henri Piccardt
Songe tandis que l’Aube est attendue
Viens sur mon lit doucement te couler
Et ne me peins ni fantômes en l’air
Ni cerf volant ni chimère cornue
Peins-moi plutôt celle Idée connue
De ma maîtresse et fais-la égaler
À elle même en douceur de parler
Et me la mets devant moi toute nue
Fais que nos feux nous puissions apaiser
Ores d’un sec or’ d’un moite baiser
Et que ses lys et ses roses je touche
Et charme-moi d’un tel contentement
Qu’à mon réveil je croie fermement
Avoir joui de sa grâce farouche
Pierre Le Loyer
« LES COQUILLAGES»
Chaque coquillage incrusté
Dans la grotte où nous nous aimâmes
A sa particularité.
L’un a la pourpre de nos âmes
Dérobée au sang de nos cœurs
Quand je brûle et que tu t’enflammes ;
Cet autre affecte tes langueurs
Et tes pâleurs alors que, lasse,
Tu m’en veux de mes yeux moqueurs ;
Celui-ci contrefait la grâce,
De ton oreille, et celui-là,
Ta nuque rose, courte et grasse ;
Mais un, entre autres, me troubla.
Dans la poésie amoureuse baroque, il y a beaucoup de poèmes troublants sur le désir, en particulier le désir pour la femme morte.
Je songeais que Philis des enfers revenue
Belle comme elle était à la clarté du jour
Voulait qu’à son fantôme encor je fis l’amour
Et que comme Ixion j’embrassasse une nue
Son ombre dans mon lit se glisse toute nue
Et me dit Cher Tircis me voici de retour
Je n’ai fait qu’embellir dans le triste séjour
Où depuis mon départ le sort m’a retenue
Je viens pour rebaiser le plus beau des amants
Je viens pour remourir dans tes embrassements
Alors quand cette idole eût abusé ma flamme
Elle me dit Adieu je m’en vais chez les morts
Comme tu t’es vanté d’avoir baisé mon corps
Tu pourras te vanter d’avoir baisé mon âme
Théophile de Viau
(…)
Il mêle dans ton Deuil tant d’agréables charmes
Il s’y montre partout avecques tant d’appas
Sylvie que tu dois un jour verser des larmes
D’avoir pû par ce deuil causer tant de trépas
Henri Piccardt
Songe tandis que l’Aube est attendue
Viens sur mon lit doucement te couler
Et ne me peins ni fantômes en l’air
Ni cerf volant ni chimère cornue
Peins-moi plutôt celle Idée connue
De ma maîtresse et fais-la égaler
À elle même en douceur de parler
Et me la mets devant moi toute nue
Fais que nos feux nous puissions apaiser
Ores d’un sec or’ d’un moite baiser
Et que ses lys et ses roses je touche
Et charme-moi d’un tel contentement
Qu’à mon réveil je croie fermement
Avoir joui de sa grâce farouche
Pierre Le Loyer
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