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- marjoDoyen
Je n'ai pas réussi à trouver un titre très clair : si un modérateur passe par ici et a une meilleure idée, qu'il n'hésite pas à changer.
Je voudrais faire part d'un "problème" (là encore, je ne sais pas si le mot est bien choisi) que je rencontre depuis 4 ou 5 ans : chaque année, dans mes classes, j'ai tendance à me focaliser sur un élève en particulier, qui correspond à un type bien précis :
- un garçon
- avec un fort potentiel
- mais dont la majeure partie de ce potentiel reste inexploitée pour diverses raisons (fainéantise, esprit de contradiction, manque de confiance en soi, environnement familial pas porteur...)
Tous les ans, je repère un élève avec ce type de profil, et je vais à tout prix essayer de le pousser, quitte à être sur son dos en permanence, obsédée par l'idée de "créer le déclic" chez ce gamin-là. En soi, ce ne serait pas vraiment un problème sauf que même si j'essaie d'être impartiale, je me demande si ma "préférence" ne finit pas par être perçue par les autres élèves, voire l'élève concerné. De plus, je prends tellement à coeur le fait de créer un effet Pygmalion avec les élèves répondant à ce profil que ça finit par tourner à l'idée fixe, et chaque mauvaise note ou attitude négative de la part de l'élève, même avec un autre collègue, est vécue par moi comme un échec.
Bref, je voulais savoir si ça vous était déjà arrivé, si vous aviez des explications/interprétations à ce phénomène.
Je voudrais faire part d'un "problème" (là encore, je ne sais pas si le mot est bien choisi) que je rencontre depuis 4 ou 5 ans : chaque année, dans mes classes, j'ai tendance à me focaliser sur un élève en particulier, qui correspond à un type bien précis :
- un garçon
- avec un fort potentiel
- mais dont la majeure partie de ce potentiel reste inexploitée pour diverses raisons (fainéantise, esprit de contradiction, manque de confiance en soi, environnement familial pas porteur...)
Tous les ans, je repère un élève avec ce type de profil, et je vais à tout prix essayer de le pousser, quitte à être sur son dos en permanence, obsédée par l'idée de "créer le déclic" chez ce gamin-là. En soi, ce ne serait pas vraiment un problème sauf que même si j'essaie d'être impartiale, je me demande si ma "préférence" ne finit pas par être perçue par les autres élèves, voire l'élève concerné. De plus, je prends tellement à coeur le fait de créer un effet Pygmalion avec les élèves répondant à ce profil que ça finit par tourner à l'idée fixe, et chaque mauvaise note ou attitude négative de la part de l'élève, même avec un autre collègue, est vécue par moi comme un échec.
Bref, je voulais savoir si ça vous était déjà arrivé, si vous aviez des explications/interprétations à ce phénomène.
- tannatHabitué du forum
Ton histoire me fait penser à la pièce de G.B. Shaw Pygmalion, devenue comédie musicale édulcorée mais charmante : My Fair Lady...
Cela ne t'aide pas beaucoup mais la lecture de la pièce ou la vision de la comédie musicale pourrait peut-être te faire du bien...
Un extrait :
https://www.youtube.com/watch?v=MJr9SSJKkII
Cela ne t'aide pas beaucoup mais la lecture de la pièce ou la vision de la comédie musicale pourrait peut-être te faire du bien...
Un extrait :
https://www.youtube.com/watch?v=MJr9SSJKkII
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« Nous naissons tous fous. Quelques-uns le demeurent. » Samuel Beckett
« C'est un malheur que les hommes ne puissent d'ordinaire posséder aucun talent sans avoir quelque envie d'abaisser les autres.» Vauvenargues
- marjoDoyen
Bon, j'ai toujours pas de réponse à ma question, d'avis ou de témoignage allant dans le même sens (ou pas d'ailleurs)...
- User17706Bon génie
Le fait d'identifier le schéma répétitif ne le désamorce pas ?
- marjoDoyen
PauvreYorick a écrit:Le fait d'identifier le schéma répétitif ne l'atténue pas ?
Un peu : disons que comme j'en suis consciente, j'essaie de me freiner et de ne pas être systématiquement sur le dos de l'élève en question.
Ce n'est véritablement que la 3e fois que ça m'arrive (sur 6 ans de "carrière").
- SeiGrand Maître
Ca ne t'évoque pas des trucs vécus ?
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"Humanité, humanité, engeance de crocodile."
- tannatHabitué du forum
Une sorte de défi pour toi-même ? Quelqu'un que tu voudrais sauver de lui-même ?
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« Nous naissons tous fous. Quelques-uns le demeurent. » Samuel Beckett
« C'est un malheur que les hommes ne puissent d'ordinaire posséder aucun talent sans avoir quelque envie d'abaisser les autres.» Vauvenargues
- marjoDoyen
Sei a écrit:Ca ne t'évoque pas des trucs vécus ?
C'est la question que je me suis posée mille fois. Je ne crois pas. Je n'étais pas du tout dans ce schéma-là étant élève : première de la classe, hyper discrète et hyper sage, poussée par un père ayant abandonné ses études et qui ne tolérait pas le moindre écart à l'école (ni dans le comportement, ni dans les notes). Mais peut-être que ça suffit comme explication : comme j'ai toujours été poussée à donner le meilleur de moi-même à l'école (pour quelle réussite aujourd'hui franchement... fin de la parenthèse...), peut-être est-ce pour cette raison que je ne "supporte" pas de voir des gamins intelligents se gâcher pour de fausses raisons.
- JennyMédiateur
Je pense qu'effectivement ce profil est plus courant chez les garçons.
L'an dernier, j'ai également beaucoup encouragé un de mes élèves difficiles qui avait du potentiel. Je me retrouve un peu dans ce que tu dis, sauf que je ne reproduis pas le même schéma cette année (mais c'est ma deuxième année). Je trouvais que c'était du gâchis et j'avais envie de lui montrer qu'il était capable de réussir. Il n'était pas sûr de lui, il avait tendance à suivre les élèves perturbateurs et violents de la classe, il avait un vécu très difficile et était placé. Je pense avoir pu l'aider un peu. De toute manière, on est humains et on peut être touché par certains parcours...
L'an dernier, j'ai également beaucoup encouragé un de mes élèves difficiles qui avait du potentiel. Je me retrouve un peu dans ce que tu dis, sauf que je ne reproduis pas le même schéma cette année (mais c'est ma deuxième année). Je trouvais que c'était du gâchis et j'avais envie de lui montrer qu'il était capable de réussir. Il n'était pas sûr de lui, il avait tendance à suivre les élèves perturbateurs et violents de la classe, il avait un vécu très difficile et était placé. Je pense avoir pu l'aider un peu. De toute manière, on est humains et on peut être touché par certains parcours...
- SeiGrand Maître
marjolie.june a écrit:Sei a écrit:Ca ne t'évoque pas des trucs vécus ?
C'est la question que je me suis posée mille fois. Je ne crois pas. Je n'étais pas du tout dans ce schéma-là étant élève : première de la classe, hyper discrète et hyper sage, poussée par un père ayant abandonné ses études et qui ne tolérait pas le moindre écart à l'école (ni dans le comportement, ni dans les notes). Mais peut-être que ça suffit comme explication : comme j'ai toujours été poussée à donner le meilleur de moi-même à l'école (pour quelle réussite aujourd'hui franchement... fin de la parenthèse...), peut-être est-ce pour cette raison que je ne "supporte" pas de voir des gamins intelligents se gâcher pour de fausses raisons.
Oui, ça sent la projection. Tu te comporterais comme... ton père ? pour sauver… ton père ? pour éviter qu'il n'abandonne ses études ? et réaliser son désir profond qu'il aurait voulu accomplir à travers toi, soit de réussir brillamment ses études ? En tout cas, on devine un sacré sac de noeuds. A voir avec un psy peut-être ?
Edit : c'est d'autant plus frappant que tu sembles estimer ne pas avoir réussi, avoir échoué, ne pas avoir satisfait le désir du père. (pfou, pardon pour les termes, mais bon…)
- SeiferÉrudit
Sinon, dans le fond, ce n'est pas ton problème. Je remarque également de gros fumistes, j'ai même parfois l'impression de me voir à leur âge. Je me dis qu'on finira sûrement collègues dans une dizaine d'années.
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De tout cimetière naît un champ de fleurs.
- JennyMédiateur
marjolie.june a écrit:De plus, je prends tellement à coeur le fait de créer un effet Pygmalion avec les élèves répondant à ce profil que ça finit par tourner à l'idée fixe, et chaque mauvaise note ou attitude négative de la part de l'élève, même avec un autre collègue, est vécue par moi comme un échec.
Par contre, ce passage m'interroge plus…
Autant il me paraît normal de vouloir pousser certains élèves, ça semble t'affecter… et il faudrait peut être que tu mettes davantage de distance.
- marjoDoyen
Jenny a écrit:marjolie.june a écrit:De plus, je prends tellement à coeur le fait de créer un effet Pygmalion avec les élèves répondant à ce profil que ça finit par tourner à l'idée fixe, et chaque mauvaise note ou attitude négative de la part de l'élève, même avec un autre collègue, est vécue par moi comme un échec.
Par contre, ce passage m'interroge plus…
Autant il me paraît normal de vouloir pousser certains élèves, ça semble t'affecter… et il faudrait peut être que tu mettes davantage de distance.
Le problème est surtout là. Je ne fais pas vraiment de mal à ces élèves en les poussant un peu, par contre, de mon côté, il est clair que je m'investis trop dans leur devenir.
- supersosoSage
Qu'est-ce que tu en sais... Ils ont peut-être besoin aussi que tu les laisses tranquilles...
- marjoDoyen
supersoso a écrit:Qu'est-ce que tu en sais... Ils ont peut-être besoin aussi que tu les laisses tranquilles...
Oui, c'est vrai. C'est ce que je m'efforce de faire depuis que je me suis rendue compte de ce schéma répétitif.
- JennyMédiateur
Je pense que ça se travaille aussi, j'essaie de faire en sorte de penser à autre chose quand je rentre ou quand mon copain rentre. Je pense que c'est important de faire une coupure avec le boulot (même si parfois j'ai du mal à ne plus y penser le soir ou à ne pas être en colère quand je vois certaines situations).
Les encourager pendant ton cours ça me semble positif, t'occuper de ce qu'ils font dans d'autres cours, ça me semble en dehors de tes missions, surtout si tu n'es pas leur PP
Les encourager pendant ton cours ça me semble positif, t'occuper de ce qu'ils font dans d'autres cours, ça me semble en dehors de tes missions, surtout si tu n'es pas leur PP
- marjoDoyen
Jenny a écrit:Je pense que ça se travaille aussi, j'essaie de faire en sorte de penser à autre chose quand je rentre ou quand mon copain rentre. Je pense que c'est important de faire une coupure avec le boulot (même si parfois j'ai du mal à ne plus y penser le soir ou à ne pas être en colère quand je vois certaines situations).
Les encourager pendant ton cours ça me semble positif, t'occuper de ce qu'ils font dans d'autres cours, ça me semble en dehors de tes missions, surtout si tu n'es pas leur PP
Justement, j'avais réussi ces dernières années à faire la coupure entre le boulot et la vie perso, et cette année je retombe dans ce travers.
Cette année, pour le gamin qui me préoccupe, je suis bien sa PP.
- Madame EléphantNiveau 2
Mais euh, t'es pas leur mère. Et ceux en difficulté qui veulent bosser, mais ont du mal et voudraient s'en sortir, tu leur accordes autant d'énergie aussi ?
Franchement, n'y a-t-il pas assez à faire dans une classe ? Si tu penses à ça, ça pourrait t'aider non ?
J'en ai un peu assez du "il a des capacités, si seulement il les exploitait!". Ben moi, quand j'étais au collège, je m'enquiquinais à bosser, en maths et en physique, sans résultats, pour voir les feignasses glorifiées et se voir dérouler le tapis rouge "pour les aider". S'ils ont des capacités mais ne les exploitent pas, tant pis pour leur pomme si papa-maman ne leur bottent pas le séant. Des élèves volontaires attendent d'être tirés vers le haut en se faisant indiquer la marche à suivre.
Pour moi, c'est simple : un élève "à capacité" ne veut rien faire ? Il ne fait rien. Un élève est en difficulté ? Je l'aide à raccrocher les wagons pour limiter la casse.
Franchement, n'y a-t-il pas assez à faire dans une classe ? Si tu penses à ça, ça pourrait t'aider non ?
J'en ai un peu assez du "il a des capacités, si seulement il les exploitait!". Ben moi, quand j'étais au collège, je m'enquiquinais à bosser, en maths et en physique, sans résultats, pour voir les feignasses glorifiées et se voir dérouler le tapis rouge "pour les aider". S'ils ont des capacités mais ne les exploitent pas, tant pis pour leur pomme si papa-maman ne leur bottent pas le séant. Des élèves volontaires attendent d'être tirés vers le haut en se faisant indiquer la marche à suivre.
Pour moi, c'est simple : un élève "à capacité" ne veut rien faire ? Il ne fait rien. Un élève est en difficulté ? Je l'aide à raccrocher les wagons pour limiter la casse.
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"Travailler sans soucis de gloire ou de fortune
A tel voyage auquel on pense, dans la lune !
N'écrire jamais rien qui de soi ne sortit
Et modeste d'ailleurs, se dire :"mon petit,
Sois satisfait des fleurs, des fruits, même des feuilles
Si c'est dans ton jardin à toi que tu les cueilles !"
Edmond Rostand Cyrano de Bergerac
- LizdarcyFidèle du forum
Parfaitement dit, Madame Éléphant. Tous ceux qu'on regarde sans voir parce qu'ils ne font pas de bruit, comparé à l'énergie déployée pour raccrocher les enquiquineurs, ça me fiche le cafard...
- DimkaVénérable
Et les élèves concernés, comment réagissent-ils ?marjolie.june a écrit:De plus, je prends tellement à coeur le fait de créer un effet Pygmalion avec les élèves répondant à ce profil que ça finit par tourner à l'idée fixe, et chaque mauvaise note ou attitude négative de la part de l'élève, même avec un autre collègue, est vécue par moi comme un échec.
Quand j’étais moi-même élève, j’ai toujours extrêmement mal pris les profs qui établissaient ce type de relation, de projections ou d’attentes basées sur l’affect (par exemple, je n’ai jamais supporté les « tu me déçois », c’était viscéral, et d’ailleurs ça l’est toujours), et ça a toujours été complètement contreproductif. Le rôle de « sauvé » est très dur à assumer, quand la démarche vient unilatéralement de celui qui se pose en « sauveur », il me semble.
En fait, du point de vue de l’élève, accepter ce genre de relation, c’est un peu accepter un sentiment d’obligation très fort, très stressant (peur de décevoir, devoir de faire au mieux selon les attentes de l’autre, et sans possibilité de reprendre sa liberté, de s’extraire de son regard, de ses attentes, de sa vision des choses : je respecte le règlement pour ne pas me faire punir, ce n’est pas du tout la même chose que je respecte le règlement pour faire plaisir à M. ou Mme Machin. Si j’ai envie d’expérimenter ponctuellement ma liberté, ce n’est pas la même chose de prendre le risque d’avoir une heure de colle et de risquer de décevoir quelqu’un).
_________________
- Spoiler:
- marjoDoyen
Je n'avais pas envisagé les choses sous cet angle : c'est extrêmement intéressant Dimka (et du coup, ça m'aide).
- Prof2Niveau 1
Bonjour à tous,
Je suis nouvelle sur ce forum. Je l'ai découvert il y a quelque temps, parcouru, et je m'y suis plue. Je me suis donc inscrite :-)
Ce sujet me parle, car je me retrouve tout à fait dans ce témoignage. (Hormis le fait que, dans mon cas, il s'agisse aussi bien de garçons que de filles)
Je suis également obnubilée par le fait pousser vers l'avant un ou deux élèves , considérés comme "perdus" par le reste de l'école, en décrochage scolaire, à la dérive, peu sûrs d'eux, en pleine révolte, sur la voie de la délinquance, avec soucis familiaux importants venant se greffer aux autres difficultés, mais avec un potentiel important, et dont je suis certaine qu'ils peuvent aller loin, même si plus personne ne croit en eux.
Il s'agit vraiment d'un défi pour moi, c'est plus fort que moi. Je ne peux m'empêcher de les secouer, motiver, encourager, montrer qu'ils valent quelque chose, contrairement à leur conviction profonde, que quelqu'un croit en eux. Et je suis aussi constamment sur leur dos, avec comme conséquences la gratitude de l'élève en question, mais aussi les réactions négatives de certains collègues (et parfois élèves).
De la part des élèves, il s'agit de jalousie. Cela se produit uniquement lorsque l'élève que je soutiens est rejeté par les autres. En quelque sorte, ces derniers m'en veulent de le soutenir, faute de quoi "ils en seraient débarrassés"...
Dans les cas d'élève bien intégré au sein de sa classe, la réaction des élèves est tout autre: ils me sont reconnaissants de les appuyer dans leur démarche de soutien.
De la part de collègues, par contre, j'ai plus de mal à définir l'origine des reproches sous-entendus. Soi-disant pour me protéger... De quoi?
Malgré tout , je continue à m'accrocher, c'est plus fort que moi, d'autant qu'avec les années d'expérience (15 ans), je constate que les résultats ont toujours été positifs, et que des années après, ces mêmes élèves sont devenus proches de moi, me remercient encore régulièrement, voire, pour certains, me disent qu'ils ne savent pas ce qu'ils seraient devenus si je n'avais pas croisé leur chemin...
Mais je me pose souvent la question de savoir si c'est bien ou mal... Il est clair que c'est injuste par rapport à d'autres. Mais d'autres en ont moins besoin... Je n'ai jamais repoussé personne qui venait me trouver non plus.
Toute la question est de savoir où est la limite de l'égalité / équité...
À chaque acte posé dans une vie, il y a quelque part cette "injustice": vous ne pouvez pas donner à tous les mendiants que vous croisez, par exemple... Est-ce une raison pour dire que du coup, vous ne donnerez à aucun?
Non, car d'autres leur donneront à eux et pas à celui que vous avez aidé, et au final cela s'équilibrera....
Bref, vaste débat, mais qui m'intéresse .
Il soulève également le rôle du prof: transmettre sa matière uniquement... Ou est-ce malgré tout un être humain, pourvu de sentiments/sensibilité.
Le côté humain peut-il parfois prendre le dessus? Si pas, au nom de quoi?
Je suis nouvelle sur ce forum. Je l'ai découvert il y a quelque temps, parcouru, et je m'y suis plue. Je me suis donc inscrite :-)
Ce sujet me parle, car je me retrouve tout à fait dans ce témoignage. (Hormis le fait que, dans mon cas, il s'agisse aussi bien de garçons que de filles)
Je suis également obnubilée par le fait pousser vers l'avant un ou deux élèves , considérés comme "perdus" par le reste de l'école, en décrochage scolaire, à la dérive, peu sûrs d'eux, en pleine révolte, sur la voie de la délinquance, avec soucis familiaux importants venant se greffer aux autres difficultés, mais avec un potentiel important, et dont je suis certaine qu'ils peuvent aller loin, même si plus personne ne croit en eux.
Il s'agit vraiment d'un défi pour moi, c'est plus fort que moi. Je ne peux m'empêcher de les secouer, motiver, encourager, montrer qu'ils valent quelque chose, contrairement à leur conviction profonde, que quelqu'un croit en eux. Et je suis aussi constamment sur leur dos, avec comme conséquences la gratitude de l'élève en question, mais aussi les réactions négatives de certains collègues (et parfois élèves).
De la part des élèves, il s'agit de jalousie. Cela se produit uniquement lorsque l'élève que je soutiens est rejeté par les autres. En quelque sorte, ces derniers m'en veulent de le soutenir, faute de quoi "ils en seraient débarrassés"...
Dans les cas d'élève bien intégré au sein de sa classe, la réaction des élèves est tout autre: ils me sont reconnaissants de les appuyer dans leur démarche de soutien.
De la part de collègues, par contre, j'ai plus de mal à définir l'origine des reproches sous-entendus. Soi-disant pour me protéger... De quoi?
Malgré tout , je continue à m'accrocher, c'est plus fort que moi, d'autant qu'avec les années d'expérience (15 ans), je constate que les résultats ont toujours été positifs, et que des années après, ces mêmes élèves sont devenus proches de moi, me remercient encore régulièrement, voire, pour certains, me disent qu'ils ne savent pas ce qu'ils seraient devenus si je n'avais pas croisé leur chemin...
Mais je me pose souvent la question de savoir si c'est bien ou mal... Il est clair que c'est injuste par rapport à d'autres. Mais d'autres en ont moins besoin... Je n'ai jamais repoussé personne qui venait me trouver non plus.
Toute la question est de savoir où est la limite de l'égalité / équité...
À chaque acte posé dans une vie, il y a quelque part cette "injustice": vous ne pouvez pas donner à tous les mendiants que vous croisez, par exemple... Est-ce une raison pour dire que du coup, vous ne donnerez à aucun?
Non, car d'autres leur donneront à eux et pas à celui que vous avez aidé, et au final cela s'équilibrera....
Bref, vaste débat, mais qui m'intéresse .
Il soulève également le rôle du prof: transmettre sa matière uniquement... Ou est-ce malgré tout un être humain, pourvu de sentiments/sensibilité.
Le côté humain peut-il parfois prendre le dessus? Si pas, au nom de quoi?
- marjoDoyen
Je pense que le côté humain prend plus facilement le dessus dans les établissements dits difficiles, dans lesquels les élèves eux-mêmes nous sollicitent plus fréquemment sur ce terrain-là.
Ensuite, il y a l'histoire personnelle de chacun qui joue. Pour ma part, je pense (je l'ai compris grâce à vous) que ce qui me pousse à me focaliser plus particulièrement sur les élèves potentiellement doués mais pas très bosseurs, c'est le fait qu'en tant qu'ancienne bonne élève, je ne comprends pas qu'on puisse ne pas donner le meilleur de soi-même, surtout quand on a, a priori, des aptitudes importantes. Cela ne peut pas faire de mal à ces élèves d'être "poussés", mais j'ai compris qu'il fallait que je fasse attention à ne pas être tout le temps derrière eux (je l'ai compris il y a un moment déjà, et je me suis efforcée de rectifier le tir avec le gamin en question, parce que je sentais justement qu'il avait besoin de respirer).
Ce à quoi il faut prendre garde, c'est à ne pas se montrer injuste, comme tu le dis. Il faut s'efforcer de ne pas mettre en avant l'élève en question s'il ne le mérite pas, et essayer de valoriser tout le monde (du moins tous ceux qui le méritent ou qui s'en donnent la peine).
Ensuite, il y a l'histoire personnelle de chacun qui joue. Pour ma part, je pense (je l'ai compris grâce à vous) que ce qui me pousse à me focaliser plus particulièrement sur les élèves potentiellement doués mais pas très bosseurs, c'est le fait qu'en tant qu'ancienne bonne élève, je ne comprends pas qu'on puisse ne pas donner le meilleur de soi-même, surtout quand on a, a priori, des aptitudes importantes. Cela ne peut pas faire de mal à ces élèves d'être "poussés", mais j'ai compris qu'il fallait que je fasse attention à ne pas être tout le temps derrière eux (je l'ai compris il y a un moment déjà, et je me suis efforcée de rectifier le tir avec le gamin en question, parce que je sentais justement qu'il avait besoin de respirer).
Ce à quoi il faut prendre garde, c'est à ne pas se montrer injuste, comme tu le dis. Il faut s'efforcer de ne pas mettre en avant l'élève en question s'il ne le mérite pas, et essayer de valoriser tout le monde (du moins tous ceux qui le méritent ou qui s'en donnent la peine).
- SeiGrand Maître
Si tous les profs anciennement bons élèves agissaient comme toi, on ne serait pas sortis de l'auberge.
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"Humanité, humanité, engeance de crocodile."
- Prof2Niveau 1
Dans certains cas, c'est l'élève lui-même qui est demandeur et n'a pas envie d'être lâché ...
Mais il est vrai que s'il trouvait cela lourd, je n'insisterais pas.
@Sei: pourquoi ne serions-nous pas sortis de l'auberge? Libre à chacun d'agir ou pas, non? Cela pose-t-il problème aux autres collègues? (Vraie question)
Mais il est vrai que s'il trouvait cela lourd, je n'insisterais pas.
@Sei: pourquoi ne serions-nous pas sortis de l'auberge? Libre à chacun d'agir ou pas, non? Cela pose-t-il problème aux autres collègues? (Vraie question)
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