Quel titre pour la séance sur Ulysse et Circé?

Allez, je vous accorde que ce n'est pas un problème vital, mais je suis dans ma séquence "Découvrir Ulysse, un héros épique", on a déjà vu la force, le courage d'Ulysse avec la tempête, puis son imprudence et son orgueil, mais aussi son intelligence avec le cyclope, et là je bloque sur Circé.
En gros on a vu comment ce texte est à la fois un mythe et un conte, que Circé est un personnage de "tentation" qui essaie de faire oublier Ithaque à Ulysse et comment Ulysse sauve la vie à ses compagnons. Sur quoi insisteriez-vous en titre de la séance (qu'on ne met qu'après coup!)? "Découvrir le sens de l'amitié d'Ulysse" me semble réducteur, "Découvrir une magicienne de l'Antiquité" me fait perdre de vue Ulysse, bref une idée? Ou une suggestion si j'oublie une grande dimension du texte?

Bonsoir,

J'arrive un peu tard - peut-être trop, découvrant ce forum. Je vous propose : "Ulysse, garant de l'ordre des choses".
L'épisode avec Circé met en parallèle, par le jeu des répétitions épiques, l'attitude d'Ulysse et celle de ses compagnons (c'est une analyse de J. de Romilly que je vous livre ici) : tandis que les compagnons se signalent par leur peur et leur imprudence, Ulysse se signale par son courage, son respect des règles (il obéit aux injonctions d'Hermès) et sa prudence. Cela lui permet de démasquer la sorcière qui avait l'apparence de tout, sauf d'une sorcière, et de rendre leur apparence à ses compagnons : il ramène l'ordre dans un univers qui avait été bouleversé par la malignité de Circé. Et si celle-ci est effectivement une tentatrice, il ne faut pas occulter le fait que, finalement, c'est elle qui est séduite par Ulysse. Là encore, retournement au profit de l'affirmation du héros. C'est qu'Ulysse est aussi un séducteur - on peut le faire remarquer aux élèves, ça les fait rire, mais j'admets que c'est un peu court comme titre de séance !

Bien cordialement,
Véronique.

Un peu trop tard pour cette année, mais je garde l'idée en tête en tout cas, l'analyse que vous proposez est très convaincante! Merci beaucoup. Pouvez-vous me dire dans quel ouvrage je peux trouver l'analyse de J. de Romilly?

Bonjour,

Je crois que c'était tout simplement dans son Précis de littérature grecque. Sinon, c'est dans son Homère. Mais je penche plutôt pour le premier.

Cordialement,
Véronique.

PS : je ne sais pas si c'était clair : l'analyse de la grande Jacqueline portait sur la fonction des formules épiques. Pour le reste (Ulysse formé à travers des épreuves qualifiantes à devenir garant d'un certain ordre), mon analyse est plutôt inspirée des travaux de Jacques Perret et des études sur l'hybris dans la littérature grecque (voir les articles de Mac Dowell et les bibliographes de Christophe Paillard). Tenez, je vous recommande chaleureusment la lecture de ceci, qui ne prend qu'un moment et est très éclairante.
http://agora.qc.ca/reftext.nsf/Documents/Destin--Le_destin_dans_le_mythe_grec_et_lethique_du_partage_par_Christophe_Paillard

Merci pour les renseignements et le lien.

Mais pour que les élèves comprennent bien l'itinéraire d'Ulysse du guerrier modèle au roi vertueux, ne faudrait-il pas leur fournir un extrait de L'Iliade avant même de commencer L'Odyssée?

Quant au roi vertueux qu'est censé devenir Ulysse, comment savoir s'il le devient vraiment alors que L'Odyssée s'achève par les paroles d'Athéna enjoignant Ulysse à faire cesser le massacre?

Et pourquoi lui doit-il passer par toutes ces épreuves alors que ses compagnons rentrent chez eux à la fin de la guerre de Troie? Cette dernière question m'a été posée par les élèves et j'avoue avoir un peu séché! Je leur ai répondu, sans être tout à fait sûre de moi ,que les épreuves qu'il surmontait ne faisaient que rehausser son prestige et que plus elles étaient difficiles, plus elles montraient sa valeur.

Bonsoir,

Quelques éléments de réponse non exhaustifs, dans l'ordre.

- Oui, c'est tout de même mieux de connaître un peu L'Iliade pour bien comprendre L'Odyssée. Ce qui ne signifie pas qu'on doit nécessairement avoir lu l'oeuvre (nous n'aurions jamais le temps). Personnellement, je présente l'histoire à mes élèves, je raconte quelques épisodes, comme celui du cheval de Troie, nous travaillons sur Achille, et puis j'envoie L'Odyssée. Mais il y a certainement autant de manière d'introduire cette oeuvre que de collègues !

- Comment savoir si Ulysse obéira à l'injonction divine d'arrêter les poursuites ? Parce que c'est marqué dans le texte ! Voici les derniers vers de L'Odyssée traduits par Frédéric Dufour :

Ulysse lui obéit, le cœur plein de joie. Puis un
contrat sacré unit à jamais les deux partis sous l’inspiration d’Athéné, fille
de Zeus, dieu de l’égide, Athéné dont la voix et l’aspect étaient ceux de
Mentor.

- Quant à votre dernière question, elle contient tout le mystère de l'élection héroïque ou l'aristie. Etre un héros, c'est un privilège qui se paie. L'exemple le plus frappant en est peut-être Achille, sommé de choisir entre deux destinées, l'une longue et obscure, l'autre glorieuse et brève. Quelle meilleure définition du héros : éclat passager, sous le signe de l'arbitraire - ou plus exactement du destin auquel nul ne saurait déroger. Les épreuves d'Ulysse ont une fonction qualifiante. Les autres sont rentrés chez eux mais n'auront jamais la stature de l'homme aux mille ruses : destinée paisible et obscure, à rebours de celle des héros.

Cela répond-il à vos question ?
Cordialement,
Véronique.

Merci beaucoup d'avoir pris le temps de me répondre!

Juste pour le retard d'Ulysse, quelques éléments sont aussi apportés par le fait que les Grecs ont tout d'abord mis Athéna en colère en incendiant un de ses temples ; ensuite, Ulysse a fait le choix de rester en arrière avec Agamemnon qui voulait faire des sacrifices pour apaiser les dieux, alors que Ménélas (dispute des deux Atrides, partage des Achéens en deux camps) voulait repartir immédiatement. Je vois dans cette dispute, dans le fait que les Grecs ne soient pas restés unis, une raison aussi pour que plusieurs d'entre eux aient connu des épreuves au cours de leur retour : Ménélas lui-même a dérivé jusqu'en Egypte et n'a pu rentrer qu'après avoir triomphé de Protée et obtenu ses recommandations, Agamemnon a été assassiné par Egisthe, seul le sage Nestor est parvenu à bon port sans encombre, ce qui n'est sans doute pas un hasard... Il est vrai que c'est une explication un peu trop "à la lettre", mais elle peut convenir aussi aux élèves, en leur donnant les deux versions.

Merci Lulamae!

Bon, j'ose upper le topic, car dans le premier message Amaliah dit que cette histoire est entre mythe et conte.
Quelqu'un pourrait-il préciser ?

J'y ai réfléchi un peu et je n'ai pas trouvé grand chose...

Eléments du conte : une sorcière-magicienne, une métamorphose, une baguette magique, un adjuvant (Hermès) et un opposant.

Eléments du mythe : Circé est présentée comme une déesse ; il y a un dieu (Hermès)... Et puis, quoi d'autre ?

Dernière chose, dans l'édition que j'ai choisie (Hatier poche, collège), cette histoire fait 100 lignes. J'ai prévu de consacrer 2 heures à cette séance, mais j'hésite soit à diviser l'histoire en 2 (1ère heure : les mésaventures des compagnons d'Ulysse ; 2ème heure : Hermès et le triomphe d'Ulysse) soit à tout lire dès la première heure, puis commencer à travailler dessus selon un objectif précis, ce qui permettra dans la seconde heure de relire l'histoire entièrement et de travailler dessus selon un 2ème objectif.
Qu'en pensez-vous ?

Je vais faire cette lecture demain ou mardi avec les élèves. Dans mon édition aussi, les extraits sont longs. Jeurdi dernier on a lu à haute voix le texte du Cyclope (neuf pages d'une traite, tous les élèves sont passés à l'oral), puis on a expliqué le texte, le tout a duré 2h. Là pour Circé, je leur ai demandé de lire l'épisode à la maison, ce qui me permettra de gagner du temps.

Pour le mythe et le conte, je dis simplement aux élèves qu'on est dans une épopée qui appartient à la mythologie grecque (héros, dieux, aventures extraordinaires) mais que certains détails évoquent le conte. Après j'ai organisé mon étude en deux temps : Le monde de Circé, un monde à l'envers, puis Ulysse, un héros.
Et je ne donne plus de titre à ma séance! Je me contente de faire écrire "Circé".

Merci !

Mais pourquoi le monde de Circé est-il un monde à l'envers ?

Circé utilise ses pouvoirs pour donner au monde une apparence fausse et trompeuse. Elle, la magicienne qui se comporte en prédatrice, elle a l'apparence d'une belle femme à la voix enjôleuse ; et les braves types qui ont croisé son chemin ont l'apparence de porcs ou de bêtes sauvages. Ulysse arrive et remet de l'ordre dans tout ça.

C'est un motif que l'on retrouve effectivement dans les contes, avec le héros jeté par un personnage maléfique dans une place qui n'est pas la sienne (toutes ces filles de roi traitées comme des servantes par une belle-mère acariâtre) et qui retrouve à la fin, par la grâce des fées, la place qui est la sienne.

C'est marrant de lire que tu venais de découvrir le forum, Véronique! Le temps passe. Et le TDL ainsi que tes interventions m'ont permis d'améliorer grandement l'étude de ce texte.   

Ah ! Merci.
C'est vrai que ça fait drôle de relire ce post après toutes ces années.

Bon eh bien merci, je vais essayer de me débrouiller avec tout ça, et si je n'y arrive pas je reviendrai vous demander de l'aide.

Je t'ai envoyé un mp, Larsson.

J'ai répondu.

Merci.

"Ulysse face au merveilleux" ?