Je suis déçue, j'en ai marre...

... J'étais heureuse hier soir à l'idée de retrouver mes élèves. Mes cours étaient bétonnés. Certes, après quatre heures de pause dans la journée, mon énergie s'est un peu "ébouriffée". Et puis il y a eu cette dernière heure avec les 4èmes. Toujours les mêmes: voilà l'abrupte réalité. Beaucoup n'avaient pas (soi-disant) leur carnet de correspondance (puisqu'ils n'avaient pas non plus fait leur travail pendant les vacances). Et beaucoup ont cherché, parmi mon lot de garçons immatures, à me tester de nouveau (je parle sans lever le doigt, j'attends le trait d'humour de Mme Mezzo voce, je tambourine sous la table, etc). Un rien m'a agacé avec eux, ce soir, tout simplement parce que j'étais déçue de retrouver mes élèves tels qu'ils sont: non des élèves idéalisés au cours de ces quinze jours de congés, mais des vrais de vrais élèves, toujours là pour faire joujou plutôt que pour travailler. Du coup, fort peu à même de lutter, j'ai fait passer toute la classe à l'écrit. Je ne suis pas contente de moi et me sens très mauvaise enseignante, très-très mauvaise enseignante, ce soir.

Et quand tu les as fait passer à l'écrit, ils ont été plus calmes? Vous avez pu travailler? Parce que c'est ça le critère pour être "bonne enseignante"

Prends un peu de recul : tu cumulais à cette heure-là tous les inconvénients : tu avais attendu quatre heures (et quoi qu'on en dise, on ne peut pas appeler ça quatre heures de pause), tu avais des 4e (pas les plus malins ni les plus assidus) et c'était la dernière heure de la journée pour tous. Bon, ça ne s'est pas bien passé mais un jour ne fait pas l'autre ! Ne prends pas l'attitude de ces élèves comme une agression contre toi et ne culpabilise pas de t'énerver. Tu es humaine, ils ont réagi comme des gamins et demain est un autre jour !

Pourquoi te sens-tu mauvaise ? Ils ne voulaient pas bosser et tu n'avais plus d'énergie, tu as trouvé la solution : faire passer toute la classe à l'écrit. Ils ont bossé, tu as gagné. Nos conditions de travail ne sont pas normales, nous n'avons pas à nous mettre en quatre sans jamais faillir pour que chaque cours soit passionnant.

Reine Margot a écrit:Et quand tu les as fait passer à l'écrit, ils ont été plus calmes? Vous avez pu travailler? Parce que c'est ça le critère pour être "bonne enseignante"

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Mezzo voce a écrit:... J'étais heureuse hier soir à l'idée de retrouver mes élèves. Mes cours étaient bétonnés. Certes, après quatre heures de pause dans la journée, mon énergie s'est un peu "ébouriffée". Et puis il y a eu cette dernière heure avec les 4èmes. Toujours les mêmes: voilà l'abrupte réalité. Beaucoup n'avaient pas (soi-disant) leur carnet de correspondance (puisqu'ils n'avaient pas non plus fait leur travail pendant les vacances). Et beaucoup ont cherché, parmi mon lot de garçons immatures, à me tester de nouveau (je parle sans lever le doigt, j'attends le trait d'humour de Mme Mezzo voce, je tambourine sous la table, etc). Un rien m'a agacé avec eux, ce soir, tout simplement parce que j'étais déçue de retrouver mes élèves tels qu'ils sont: non des élèves idéalisés au cours de ces quinze jours de congés, mais des vrais de vrais élèves, toujours là pour faire joujou plutôt que pour travailler. Du coup, fort peu à même de lutter, j'ai fait passer toute la classe à l'écrit. Je ne suis pas contente de moi et me sens très mauvaise enseignante, très-très mauvaise enseignante, ce soir.  

Ouais bah bienvenue au club. Moi c'est pareil. J'avais préparé un cours de 1ère bétonné pendant les vacances, résultat, j'ai toujours l'impression d'être Mme Soporwoman puisqu'ils n'ont pas l'air d'avoir besoin de somnifères. Je les endors, c'est un fait. Et je me sens hyper nulle.
Courage en tout cas :flower: On va y arriver

Nous ne sommes pas des histrions. Nous n'avons pas reçu de formation arts du spectacle, nulle culpabilité à nourrir.

Est-ce que tu les as punis? (heure de colle...)

Je m'attends à peu près à la même chose quand j'accueillerai mes 4° mercredi Mais je ne désespère pas, je les aurai, un jour, je les aurai...

Les grands moments de solitude où, face à une classe entière, on a l'impression de présenter les règles du curling en norvégien à des passionnés de foot espagnols.

Ca fait partie du boulot, je crois.

Mezzo voce a écrit:... J'étais heureuse hier soir à l'idée de retrouver mes élèves. Mes cours étaient bétonnés. Certes, après quatre heures de pause dans la journée, mon énergie s'est un peu "ébouriffée". Et puis il y a eu cette dernière heure avec les 4èmes. Toujours les mêmes: voilà l'abrupte réalité. Beaucoup n'avaient pas (soi-disant) leur carnet de correspondance (puisqu'ils n'avaient pas non plus fait leur travail pendant les vacances). Et beaucoup ont cherché, parmi mon lot de garçons immatures, à me tester de nouveau (je parle sans lever le doigt, j'attends le trait d'humour de Mme Mezzo voce, je tambourine sous la table, etc). Un rien m'a agacé avec eux, ce soir, tout simplement parce que j'étais déçue de retrouver mes élèves tels qu'ils sont: non des élèves idéalisés au cours de ces quinze jours de congés, mais des vrais de vrais élèves, toujours là pour faire joujou plutôt que pour travailler. Du coup, fort peu à même de lutter, j'ai fait passer toute la classe à l'écrit. Je ne suis pas contente de moi et me sens très mauvaise enseignante, très-très mauvaise enseignante, ce soir.

Il faut essayer de prendre de la distance... Tu ne peux pas les changer, il faut faire avec...

Merci pour vos messages. je m'aperçois que mon titre ("J'ai en marre", Pfff: j'ai édité) est l'exact reflet de mon état, je ne parle même plus français. A l'écrit, ils ont tous travaillé (bien ou mal, je verrai plus tard les copies, mais à vue d’œil, au regard du peu de soin apporté à certaines copies, ça sent mauvais). Alors, oui, ils ont travaillé: j'ai envoyé un récalcitrant faire son travail dans une autre salle, qui se permettait de faire des commentaires à voix haute comme si on avait élevé les cochons ensemble. Puis, j'ai annoncé un contrôle sur le cours qui aurait dû avoir lieu aujourd’hui pour la fois suivante avec un mot dans le carnet à faire signer par les parents, cours que j'ai remis polycopié, brut en somme, aux élèves. Bref, nul. Jézabel, nous devrions entamer une correspondance entre ces deux classes, elles s'entendraient à merveille, il faut croire...

Ashtrak a écrit:Les grands moments de solitude où, face à une classe entière, on a l'impression de présenter les règles du curling en norvégien à des passionnés de foot espagnols.

Ca fait partie du boulot, je crois.

C'était un peu mon sentiment ce soir. Malheureusement, je n'ai aucun recul aujourd'hui: j'ai l'impression de faire marche arrière et d'être de nouveau dans ma peau de stagiaire de l'an dernier. Pour répondre à la question de savoir pourquoi je me sens mauvaise enseignante, eh bien je ne sais pas: j'associe "cours nul=enseignante (moi, donc) nulle". Et je me dis toujours qu'ils ne sont ainsi qu'avec moi. Peut-être que j'explique mal, qu'ils ne pompent rien, donc passent le temps à chercher des moyens de diversion. Il ne manquerait plus à présent que les parents se révoltent à lire le mot.

Reine Margot a écrit:Et quand tu les as fait passer à l'écrit, ils ont été plus calmes? Vous avez pu travailler? Parce que c'est ça le critère pour être "bonne enseignante"

Je relis plus posément vos messages. Le critère pour être un "bon enseignant", ce serait donc que les élèves travaillent, coûte que coûte? Je me raccroche à l'idée, alors. Je ne sais pas s'ils ont réussi leur travail (ma foi non, hein), mais ils ont fait l'effort, après un virulent sermon monastique. Si je devais fouiller, je pense que la question qui me taraude est celle du respect. J'établis plus ou moins consciemment l'équation: "je teste mon enseignant = je ne respecte pas mon enseignant". Je vais continuer à travailler sur mon recul.

ma formulation était un peu provocatrice, je veux dire que si tu fais travailler tes élèves et que ce n'est pas le bazar, qu'ils apprennent quelque chose avec toi, on ne peut guère t'en demander plus.

Mezzo voce a écrit:

Reine Margot a écrit:Et quand tu les as fait passer à l'écrit, ils ont été plus calmes? Vous avez pu travailler? Parce que c'est ça le critère pour être "bonne enseignante"

Je relis plus posément vos messages. Le critère pour être un "bon enseignant", ce serait donc que les élèves travaillent, coûte que coûte? Je me raccroche à l'idée, alors. Je ne sais pas s'ils ont réussi leur travail (ma foi non, hein), mais ils ont fait l'effort, après un virulent sermon monastique. Si je devais fouiller, je pense que la question qui me taraude est celle du respect. J'établis plus ou moins consciemment l'équation: "je teste mon enseignant = je ne respecte pas mon enseignant". Je vais continuer à travailler sur mon recul.

Tu as fait ce qu'il fallait. Qu'aurais-tu voulu, qu'est-ce qui te pose problème? que les élèves, et le cours, ne soient pas conformes à l'idéal que tu t'en fais?
Hélas, certaines classes demandent ce genre de traitement justement pour respecter leur enseignant. Et, la preuve que c'est ce qu'ils attendaient (de la fermeté de ta part) c'est qu'ils se sont mis à bosser, le respect, tu l'as eu quelque part.

Reine Margot a écrit:certaines classes demandent ce genre de traitement justement pour respecter leur enseignant.

Visiblement...
Tout n'est pas clair pour moi, mais en somme, j'étais déçue de voir que beaucoup n'avaient pas fait leur travail pendant les vacances, que beaucoup réintégraient le cours dans la bonne humeur, d'accord, mais aussi un dangereux relâchement, etc. Oui, je pense que j'ai idéalisé mes zozos ces vacances et que la reprise a été brutale. Et je n'aime pas faire de sermon monastique à la classe entière. Quand je ne m'adresse plus à un élève bien précis pour le remettre à la place mais à la classe (c'est la première fois), j'ai le sentiment que j'ai perdu la main. C'est aussi la première fois que j'ai le sentiment d'être isolée: on est vraiment seul face à ses problèmes, plus ou moins importants. Heureusement qu'il y a ce forum.

Être un bon enseignant, c'est comme par hasard aussi lié aux élèves. .. Je me trouve bien "meilleure " avec mes adorables 1ère qu'avec mes pénibles secondes. ..

Mezzo voce a écrit:

Ashtrak a écrit:Les grands moments de solitude où, face à une classe entière, on a l'impression de présenter les règles du curling en norvégien à des passionnés de foot espagnols.

Ca fait partie du boulot, je crois.

C'était un peu mon sentiment ce soir. Malheureusement, je n'ai aucun recul aujourd'hui: j'ai l'impression de faire marche arrière et d'être de nouveau dans ma peau de stagiaire de l'an dernier. Pour répondre à la question de savoir pourquoi je me sens mauvaise enseignante, eh bien je ne sais pas: j'associe "cours nul=enseignante (moi, donc) nulle". Et je me dis toujours qu'ils ne sont ainsi qu'avec moi. Peut-être que j'explique mal, qu'ils ne pompent rien, donc passent le temps à chercher des moyens de diversion. Il ne manquerait plus à présent que les parents se révoltent à lire le mot.

j'entame ma 4e année (et avec bonheur, même si je suis fort déçue par mes L, bien souvent, cette année), après avoir passé une année de stage et une année de néotit pas faciles (à chaque fois j'ai hérité de LA seconde sur les 13, ou 14 secondes, qui était la pire, et de loin), et je peux te dire qu'avec le temps, avec des classes parfois plus faciles certaines années, et surtout, surtout, avec une vie équilibrée et remplie à côté (d'un point de vue affectif, intellectuel, culturel), ce sentiment de "je suis nulle" passe. Il s'estompe aussi, il est vrai, grâce aux satisfactions de voir nos élèves nous remercier en fin d'année, parfois (avoir des classes à examen aide aussi !).
Pourtant qu'est ce que j'ai pu ma flageller quand un cours ne marchait pas, quand je les endormais ou quand j'avais le bordel... eh bien non, ce n'est pas toi le problème, la plupart du temps c'est leur manque de réceptivité qui est en cause. Avec le temps tu verras que le même cours peut en passionner d'autres.
Douter de temps en temps est fécond, et tu as de toute façon 40 ans devant toi pour devenir une très bonne prof. Qu'est ce qu'on s'emmerderait si on faisait des cours parfait dès l'année de néotit, tu ne crois pas ?

mets leur des heures de colle la prochaine fois et fais un rapport sur celui qui tambourine sous la table.

Mezzo voce a écrit:

Reine Margot a écrit:Et quand tu les as fait passer à l'écrit, ils ont été plus calmes? Vous avez pu travailler? Parce que c'est ça le critère pour être "bonne enseignante"

Je relis plus posément vos messages. Le critère pour être un "bon enseignant", ce serait donc que les élèves travaillent, coûte que coûte? Je me raccroche à l'idée, alors. Je ne sais pas s'ils ont réussi leur travail (ma foi non, hein), mais ils ont fait l'effort, après un virulent sermon monastique. Si je devais fouiller, je pense que la question qui me taraude est celle du respect. J'établis plus ou moins consciemment l'équation: "je teste mon enseignant = je ne respecte pas mon enseignant". Je vais continuer à travailler sur mon recul.

Je crois que oui, pour ce que j'ai mis en gras. Comme tout le monde, j'ai des élèves qui ne travaillent pas , refusent même de s'y mettre ( va par exemple faire bosser certains 3èmes en latin , tiens, avec leur idée bien ancrée d'arrêter définitivement...) , des classes très dures oàù tout est contesté, où on ne peut pas tourner la tête car il ne faut jamais les lâcher du regard. Eh bien, je prépare un cours, je projette (même un lecture analytique, hein, avec intro, I, II, ..) , et je leur dis qu'au moins, ceux qui veulent réussir auront quelque chose à apprendre, et tant pis pour les autres.
Quant au respect, ce sont des sauvageons qui ont l'esprit de meute, donc le courage qui va avec, et l'irrespect se répand dès lors qu'il y a quelques bons à rien à grande gueule. Tu n'es pour rien à ça, sinon tu serais la seule en France. Hors, la discipline est peut-être le problème n° 1 de l'EN, avant même le problème du travail (qui en découle en partie).

Merci Ecusette et Kalypso. lapdm, on m'appelle "Madame Colle" en vie scolaire: je ne cesse de coller, de mettre des croix, des observations, de rédiger des rapports. De temps à autre, je varie, tout en restant ferme: l'humour aussi ("clacher") aide. Là, tout le monde a été d'une certaine manière puni, forcé de travailler et de travailler aussi pour la prochaine fois puisqu'il y aura contrôle. Je vais reprendre comme en début d'année, quitte à être parfois dans un rapport de duel avec certains, duel cependant respectueux. Mais ça me fatigue...

Moi j'ai eu longtemps un complexe d'infériorité par rapport à mes collègues en me disant que leurs cours avaient l'air tellement mieux et intéressants que les miens. Sauf que je me rends compte que les sacrés drôles que je me récupère en 4ème ont eu ces mêmes collègues en 6ème et en 5ème et n'ont donc pas commencé à avoir leur niveau lamentable et leur manque d'intérêt avec moi. Du coup maintenant je relativise et je fais au mieux pour les faire progresser.

Merci, Lefteris, ton message me réconforte. Mais si la discipline est le problème n°1, pourquoi personne ne l'aborde en équipe, comme si le sujet devait demeurer tabou? Un super collègue est resté discuter avec moi ce soir (je lui envoie en masse des zozos dans sa classe): on a pris la décision d'aller assister aux cours de l'un et de l'autre. Il est vraiment génial... mais c'est le seul.

Mezzo voce a écrit:

Reine Margot a écrit:Et quand tu les as fait passer à l'écrit, ils ont été plus calmes? Vous avez pu travailler? Parce que c'est ça le critère pour être "bonne enseignante"

Je relis plus posément vos messages. Le critère pour être un "bon enseignant", ce serait donc que les élèves travaillent, coûte que coûte? Je me raccroche à l'idée, alors. Je ne sais pas s'ils ont réussi leur travail (ma foi non, hein), mais ils ont fait l'effort, après un virulent sermon monastique. Si je devais fouiller, je pense que la question qui me taraude est celle du respect. J'établis plus ou moins consciemment l'équation: "je teste mon enseignant = je ne respecte pas mon enseignant". Je vais continuer à travailler sur mon recul.

Ce serait plutôt "je teste mon enseignant = je cherche à voir s'il mérite le respect".

Ce sont des adolescents, ils s'amusent, ils testent. Rien n'est sérieux pour eux, sauf quelques moments rares.

Mes super pénibles il y a deux ans avaient été sages pendant une inspection. Et m'avaient dit après le grand classique "On a été bien, hein, Madame?!" Et pourtant je n'aurais pas parié un centime sur un effort de leur part même dans ces circonstances.

C'est pour cela qu'une fois la réputation posée, au bout d'un an, c'est quand même plus facile. Pas un lit de rose, mais plus facile quand même.

Je suis persuadée que tu fais ce qu'il faut, étant donné ce que tu décris. Courage