Classement des dix meilleurs de la classe : effets positifs ou négatifs ?

Moi, ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi ce n'est pas évident, ça.
Un classement ne favorise certainement pas une émulation, mais la compétition bête et méchante. Il ne faut pas oublier que c'est souvent dans les classes d'excellent niveau que se pratique ce genre de petit jeu entre les élèves, et ça se termine rarement bien (mais comme nous, on ne le voit souvent pas, ou trop tard, on argumente souvent dans le sens de "personne n'en est mort). Je ne vois pas pourquoi on institutionnaliserait une des pires dérives de la notation, sachant que dans le meilleur des cas ça n'apporte rien.
Plutôt que d'encourager les gamins à se tirer dans les pattes, je préfèrerais qu'on développe l'autoévaluation ou l'évaluation entre pairs, en anonymant au besoin des extraits de copies intéressantes par les erreurs qu'elles contiennent ou par la pertinence de la démarche. Ça, ça me paraît être pertinent pour aider les élèves à progresser en s'aidant des travaux des autres.

Pour moi, l'émulation est quelque chose de positif mais passe davantage par l'interaction avec les camarades à l'oral, la réalisation d'un projet en groupe...

La compétition ne me semble pas être positive. La mise en compétition "réussira" à certains élèves, une poignée, ceux qui réussissent déjà et qui réussiront toujours. En revanche, elle mettra les autres face à leurs difficultés, les découragera encore davantage.

Ce qui me choque c'est que la compétition permet aux élèves qui réussissent déjà de se distinguer encore davantage reléguant les autres (les moins bons et les mauvais) à regarder les bons devenir encore meilleurs et, par analogie, se regarder eux être et rester mauvais.

C'est cela que je trouve choquant.

Merci, EU, ce qui me choque le plus, c'est effectivement la relégation des moins bons encore plus que le classement lui-même, mais je crains que peu ici y soient sensibles.

EU1 a écrit:Pour moi, l'émulation est quelque chose de positif mais passe davantage par l'interaction avec les camarades à l'oral, la réalisation d'un projet en groupe...

La compétition ne me semble pas être positive. La mise en compétition "réussira" à certains élèves, une poignée, ceux qui réussissent déjà et qui réussiront toujours. En revanche, elle mettra les autres face à leurs difficultés, les découragera encore davantage.

Ce qui me choque c'est que la compétition permet aux élèves qui réussissent déjà de se distinguer encore davantage reléguant les autres (les moins bons et les mauvais) à regarder les bons devenir encore meilleurs et, par analogie, se regarder eux être et rester mauvais.

C'est cela que je trouve choquant.

Entièrement d'accord.
J'ai vécu le classement en maths quand j'étais collégienne et cela m'a dégoûtée des maths alors qu'à la base, je n'étais pas mauvaise .
Le prof poussait le vice jusqu' à nous faire noter sur le cahier la liste des élèves du meilleur au plus mauvais avec la moyenne de chacun . Nous devions encadrer notre moyenne et faire signer le tout à nos parents .  

Un système plein d'humanité poussant chacun à se dépasser, n'en doutons pas...

Tiens c'est marrant moi aussi j'ai vécu ça en maths. J'ai connu ce genre d'annotations sur les copies

1er trimestre (on se bat toujours au début) : 8/20 - 9/20 : "trop juste", "insuffisant" etc etc
2ème trimestre (on commence à se décourager) 5/20 - 7/20 : "niveau non atteint", "insuffisant"
3ème trimestre (on baisse les bras) : 0/20 1/20 "gaspillage d'encre"

Disons que seuls les meilleurs élèves - et leurs parents-semblaient apprécier ce système . C'est vrai que passer de la 4ème à la 1ère place était un vrai challenge.  

Pour les autres, c'était la boule au ventre que nous attendions ce moment à chaque fin de trimestre ; et puis, que chacun connaisse la moyenne des autres sans qu'on nous ait demandé notre avis , c'était éprouvant .

J'ai eu "minable" sur une de mes premières copies de physique (dommage que le jeune prof se soit en plus permis une énorme faute dans l'appréciation, il a achevé de se discréditer), avec le même genre de classement. Je n'ai plus rien fait dans cette matière, jusqu'au bac. Il m'a écoeurée. (Et effectivement, je n'avais pas beaucoup d'appétence pour les matières scientifique. Mais quand même...)

Je vous remercie tous les deux...parce que vous avez distinguer émulation et compétition.

Je n'aime pas cette dernière non seulement parce qu'elle n'aide pas les plus faibles mais aussi parce qu'elle rend les meilleurs odieux, enfin, j'en ai eu des comme cela cette année! Des 5eme insupportables de prétention et de mépris pour leurs congénères moins bons, se permettant de faire des remarques odieuses (l'art de me f....hors de moi rapidement au passage!)

Mais le problème pour moi est de conserver tout de même l'émulation. Cela peut passer par des "compétitions en groupe" genre jeux en LV etc...où l'enjeu est inexistant, puisque pas noté...

Cependant, je me demande quand même toujours si du coup on prépare bien nos élèves par humanité. :| 
Par exemple, si un élève cumule pas/peu d'intérêt intellectuel ou de curiosité et le fait de ne pas être poussé...pourquoi travailler ou améliorer ses résultats. POur le fait de se dépasser soi-même ? Rarement. J'ai vu des élèves changer complètement d'attitude suite à un regard ou deux minutes d'attention d'un prof qui prend le temps de faire une remarque positive à un élève pas trop bon... Mais les moyens sont limités...

Je ne donne pas le classement. Cela n'empêche pas, au moins pour les premiers, qu'ils se le fassent tout seuls.

Je suis une des plus âgées du forum et j'ai connu les classements du CP à quasiment la terminale (une interruption due à mai 68).
Les classements, c'est violent, sauf pour le premier de la classe (moi   ).

Cela dit, les élèves ne sont pas dupes, qu'on les classe ou pas.

Sphinx a écrit:Je ne donne pas le classement. Cela n'empêche pas, au moins pour les premiers, qu'ils se le fassent tout seuls.

Oui mais si tu ne le fait pas, tu ne le cautionne pas...être classé par le prof ou les copains, ce n'est pas tout à fait la même chose!

philann a écrit: J'ai vu des élèves changer complètement d'attitude suite à un regard ou deux minutes d'attention d'un prof qui prend le temps de faire une remarque positive à un élève pas trop bon... Mais les moyens sont limités...

+ 1
J'ai observé la même chose et j'ai les mêmes interrogations .

(prof d'anglais - en collège "normal")

J'ai fait ça, quand j'étais jeune et avant la Grande Réforme de 2006!

Je ne le fais plus car désormais, nous devons évaluer à l'aune de "tâches finales"; exit donc la grammaire! Ineunt des critères (...) à la place.

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Sinon, je suis "à fond" pour le classement!

Dans la vraie vie, nous sommes classé(e)s. C'est un fait.

Dès lors, habituons nos élèves à l'être! (même si ce n'est pas dans l'air du temps!)

Merci pour ces réponses fort intéressantes...

Je m'interrogeais aussi pour savoir si c'est interdit ou non : je ne veux pas non plus qu'on me le reproche ( inspection, CDE , etc )

Ça fait 3 ans que j'expérimente ce système et pour l'instant , c'est globalement positif : classer les dix premiers, c'est classer "pratiquement" la moitié de la classe !
Ce que j'ai remarqué c'est que les élèves moyens pas trop motivés se retrouvaient avec une énergie intellectuelle déconcertante PARCE QU'ils se sont vus dans le top ten ( oui j'affiche tout ça devant la porte de la salle...Bouh la vilaine prof que je suis)

Ce qui m'a surprise : c'est que des élèves que je n'avais pas, avaient demandé à leur prof de faire de même ( et ce n'était pas de bons élèves, ils étaient juste moyens et je suppose qu'ils avaient besoin d'un coup de boost )

philann a écrit:Je vous remercie tous les deux...parce que vous avez distinguer émulation et compétition.

Je n'aime pas cette dernière non seulement parce qu'elle n'aide pas les plus faibles mais aussi parce qu'elle rend les meilleurs odieux, enfin, j'en ai eu des comme cela cette année! Des 5eme insupportables de prétention et de mépris pour leurs congénères moins bons, se permettant de faire des remarques odieuses (l'art de me f....hors de moi rapidement au passage!)

Mais le problème pour moi est de conserver tout de même l'émulation. Cela peut passer par des "compétitions en groupe" genre jeux en LV etc...où l'enjeu est inexistant, puisque pas noté...

Cependant, je me demande quand même toujours si du coup on prépare bien nos élèves par humanité. :| 
Par exemple, si un élève cumule pas/peu d'intérêt intellectuel ou de curiosité et le fait de ne pas être poussé...pourquoi travailler ou améliorer ses résultats. POur le fait de se dépasser soi-même ? Rarement. J'ai vu des élèves changer complètement d'attitude suite à un regard ou deux minutes d'attention d'un prof qui prend le temps de faire une remarque positive à un élève pas trop bon... Mais les moyens sont limités...

Le type d'élève que tu décris, je ne l'ai pas encore rencontré, mais je n'ai pas hâte. De manière générale, je n'apprécie pas du tout les bons élèves qui pensent que leurs bons résultats leur donnent le droit de mal se comporter.
Pour ce qui est de l'émulation, je dirai qu'elle se développe naturellement dans un climat de confiance et de coopération, quand on donne aux élèves des objectifs clairs et ambitieux (mais à leur portée). Bon, c'est sans doute le plus difficile dans ce métier: il faut trouver le bon équilibre.
Et je ne crois pas que nous rendions un mauvais service aux élèves en les préservant d'une compétition stupide et malsaine: l'excuse répétée ad nauseam pour justifier une déréglementation économique complète repose sur le même genre d'axiome et ne convainc pas grand monde, tant on en voit les conséquences dans la finance aujourd'hui. Je pense que les conséquences d'une concurrence excessive dans notre système scolaire sont déjà dévastatrices (avec des élèves intelligents, curieux et pas forcément paresseux qui ne font absolument plus rien, par exemple), et que nous avons tout à gagner à y remédier. Le jeu peut être justement un bon outil pour ça (émulation et coopération).

Sub Rosa a écrit:Merci pour ces réponses fort intéressantes...

Je m'interrogeais aussi pour savoir si c'est interdit ou non : je ne veux pas non plus qu'on me le reproche ( inspection, CDE , etc )

Ça fait 3 ans que j'expérimente ce système et pour l'instant , c'est globalement positif : classer les dix premiers, c'est classer "pratiquement" la moitié de la classe !
Ce que j'ai remarqué c'est que les élèves moyens pas trop motivés se retrouvaient avec une énergie intellectuelle déconcertante PARCE QU'ils se sont vus dans le top ten ( oui j'affiche tout ça devant la porte de la salle...Bouh la vilaine prof que je suis)

Ce qui m'a surprise : c'est que des élèves que je n'avais pas, avaient demandé à leur prof de faire de même ( et ce n'était pas de bons élèves, ils étaient juste moyens et je suppose qu'ils avaient besoin d'un coup de boost )

Et les 10 derniers (en moyenne) ? ceux qui ne sont jamais dans le classement ?

Ouai après tout vous avez raison, à quoi bon se préoccuper des 10 derniers. L'essentiel est de pousser à la performance les dix premiers, les winners, ceux qui réussiront et auront été habitués à écraser les autres.
Les derniers, les loosers, à quoi bon s'en préoccuper.

Vos pratiques me dégoûtent

EU1 a écrit:

Sub Rosa a écrit:Merci pour ces réponses fort intéressantes...

Je m'interrogeais aussi pour savoir si c'est interdit ou non : je ne veux pas non plus qu'on me le reproche ( inspection, CDE , etc )

Ça fait 3 ans que j'expérimente ce système et pour l'instant , c'est globalement positif : classer les dix premiers, c'est classer "pratiquement" la moitié de la classe !
Ce que j'ai remarqué c'est que les élèves moyens pas trop motivés se retrouvaient avec une énergie intellectuelle déconcertante PARCE QU'ils se sont vus dans le top ten ( oui j'affiche tout ça devant la porte de la salle...Bouh la vilaine prof que je suis)

Ce qui m'a surprise : c'est que des élèves que je n'avais pas, avaient demandé à leur prof de faire de même ( et ce n'était pas de bons élèves, ils étaient juste moyens et je suppose qu'ils avaient besoin d'un coup de boost )

Et les 10 derniers (en moyenne) ? ceux qui ne sont jamais dans le classement ?

Ouai après tout vous avez raison, à quoi bon se préoccuper des 10 derniers. L'essentiel est de pousser à la performance les dix premiers, les winners, ceux qui réussiront et auront été habitués à écraser les autres.
Les derniers, les loosers, à quoi bon s'en préoccuper.

Vos pratiques me dégoûtent

Hey doucement, je demande qu'à en discuter : les jugements à l'emporte-pièce sont stériles, et pour le coup : ça me dégoûte !

De plus les bons sentiments puant d'égalitarisme ne créent qu'une chose: l'inégalité!!
Bien pire que le trop de plein de rigorisme...

Je vous laisse méditer ...

Je conçois que le ton du post d'EU te fasse réagir, mais ta tirade sur "l'égalitarisme" ne laisse hélas plus guère de doute sur la nature du problème posé par ta pratique: je pense que tu te fiches des élèves plus faibles, ou qu'au minimum, tu ne te mets pas à leur place. Je trouve que c'est très ennuyeux.

J'ai un œil en permanence sur les "classements" que propose Pronote, mais c'est la fin du classement que je regarde car il indique les élèves avec lesquels un travail particulier doit être mené (problèmes familiaux, médicaux, sociaux, adolescence difficile, réelles difficultés d'apprentissage et solutions à trouver, etc...). Ce sont en fait surtout les dégringolades brutales de classement que je repère, en général symptomatiques d'un "problème" d'origine non-scolaire.
En tant que prof, je n'ai jamais classé les copies, si ce n'est dans l'ordre du plan de classe pour pouvoir les rendre plus rapidement en passant dans les rangs.

La pression par les autres élèves existe qu'on le veuille ou non, qui n'a  jamais eu de classe ou le groupe parvenait à interdire à la plupart des élèves de participer? Qui n'a jamais entendu en classe «T'es qu'une boule» d'un ton méprisant?

Essayer de mettre en place un esprit d'émulation favorable, ce n'est pas nécessairement mettre en place un système ou les dix premiers écrasent les autres, ça peut être juste essayer d'orienter la pression du groupe dans une direction plus favorable aux apprentissages. La motivation par les pairs, simplement. Je ne suis pas sûr qu'un simple classement des dix premiers suffisent, il faut essayer d'impliquer le plus d'élèves possible.

http://pragmaticreform.wordpress.com/2014/06/14/motivation-peer-pressure/

Après, pour la question précise posée, j'aurais détesté qu'on me fasse ça en tant qu'élève et je n'aurais jamais pratiqué comme ça en tant que prof.
(Dit celle qui attend avec impatience les résultats au DNB, mais c'est pas pareil.   )

Je n'ai jamais pratiqué le classement des élèves, et ne compte pas le faire.
Cependant, je suis surprise que la pratique de notre collègue suscite certaines réactions très vives, alors qu'on ne remet pas en question l'affichage du classement des élèves lors du cross annuel dans les collèges.
Dans les deux cas, il s'agit de capacités (physiques/intellectuelles), de travail (scolaire/sportif) et de chance le jour J (forme/ou pas).

Il ne faut peut-être pas exagérer, ce n'est pas parce qu'on met en place ce genre de "carotte" (qu'on l'approuve ou pas, c'est un autre débat) pour les bons élèves qu'on ne se soucie pas des moins bons et qu'on ne leur manifeste aucune attention.

Si. Quand on ne classe que les 10 premiers, le message envoyé, c'est: les autres ne m'intéressent pas.
Je ne comprends pas que ça ne saute pas aux yeux, que cela soit l'intention de la collègue ou pas.

Pour moi, le message envoyé c'est "je ne veux pas stigmatiser ceux qui n'ont pas réussi". Comme quoi...