Une performance artistique de Jérémie Pujau pose la question de la résistance aux pulsions chez l'être humain.

Extraits :

L’artiste angoumoisin Jérémie Pujau s’est posté en cible vivante, droit comme un i, place Saint-Martial à Angoulême. Devant une caméra cachée et derrière des tréteaux sur lesquels il avait déposé 130 oeufs en libre-service.

Il ne parlait pas, ne bougeait pas, ne sourcillait pas. Rien. Comme un ovni qui assume sa différence. Son but: "Voir la réaction des gens, dans une approche sociétale." Elle n’a guère tardé. Après seulement cinq minutes d’indifférence générale, des jeunes filles curieuses se sont approchées. Ont tout de suite pensé à lui "envoyer un oeuf dans la gueule", dit l’une d’elles sur la vidéo projetée avant-hier soir à la Maison des peuples et de la paix (MPP) d’Angoulême. Elles se sont retenues un temps et ont voulu engager la conversation, vainement. Car Jérémie Pujau restait dans son monde, absolument imperturbable. Alors elles ont commencé à toucher les oeufs, à considérer l’artiste comme l’idiot du village, l’homme à abattre bientôt.

Une "réaction ordinaire" déplore le jeune homme. "Elle est toujours à peu près la même, dans toutes les villes où je fais ça", raconte celui qui entame une tournée qui devait le mener hier à Bordeaux avant de le conduire à Toulouse, Marseille, Lyon puis Lille. Inévitablement et plutôt tôt que tard, l’envie de tirer, la pulsion de rejeter violemment se fait sentir. "Heureusement que ce ne sont que des oeufs, imaginez si c’étaient des pierres ou autre chose", interpelle Jérémie Pujau.

Ce sont surtout les 15-30 ans qui attaquent les premiers, mais avec l’assentiment des adultes, leur complicité sourde et aveugle. Parce que ce public est le plus influençable, le "plus facilement endoctriné par tous les régimes totalitaires."

Endosser le rôle de la cible est "psychologiquement très éprouvant", témoigne Jérémie Pujau. "À chaque fois, c’est un choc immense, même après douze performances de ce type dans différentes villes d’Europe."

http://www.charentelibre.fr/2014/05/17/l-agressivite-hors-de-sa-coquille,1895860.php

La vidéo :

:shock: A la fin, je trouve que c'est extrêmement violent, le garçon se déchaîne et enchaîne les lancer rapides et avec force. Il y a quand-même cette fille (qui je crois a lancé un des premiers oeufs) qui finit par avoir une prise de conscience et par enlever tous les œufs de la table.

C'est courageux, c'est un test qui relève de la sociologie, de la pscho du comportement des foules, mais où est la performance artistique ? M'aurait-elle échappé ?

Mais c'est tout un art de rester stoïque comme il le fait. Razz

C'est le côté happening je suppose qui en fait une performance artistique (mise en scène, participation du public...).

Je connais certains profs qui restent stoïques dans leur mise en scène, avec la participation du public... seraient-ce des artistes ? Very Happy

Oui nous sommes des intermittents du spectacle! Wink

Les professeurs d'Arts Plastiques pourront peut-être nous éclairer s'ils passent par ici...

Ça en dit long sur les pulsions d'agressivité de l'être humain... Sad

Oui, enfin, elles diminuent avec l'âge, quand même. Il n'y a pas beaucoup de mémés et pépés parmi les lanceurs!
Il n'y en a pas beaucoup non plus qui mettent fin au jeu de massacre... Sad

L’artiste angoumoisin s’est posté en cible vivante, droit comme un i, place Saint-Martial à Angoulême. Devant une caméra cachée et derrière des tréteaux sur lesquels il avait déposé 130 oeufs en libre-service.

Il ne parlait pas, ne bougeait pas, ne sourcillait pas. Rien. Comme un ovni qui assume sa différence. Son but: "Voir la réaction des gens, dans une approche sociétale." Elle n’a guère tardé. Après seulement cinq minutes d’indifférence générale, des jeunes filles curieuses se sont approchées. Ont tout de suite pensé à lui "envoyer un oeuf dans la gueule", dit l’une d’elles sur la vidéo projetée avant-hier soir à la Maison des peuples et de la paix (MPP) d’Angoulême. Elles se sont retenues un temps et ont voulu engager la conversation, vainement. Car Jérémie Pujau restait dans son monde, absolument imperturbable. Alors elles ont commencé à toucher les oeufs, à considérer l’artiste comme l’idiot du village, l’homme à abattre bientôt.

http://www.charentelibre.fr/2014/05/17/l-agressivite-hors-de-sa-coquille,1895860.php

Plusieurs choses sont marquantes.
Première chose: remarquez la distance que chacun garde par rapport au type. Je ne comprends pas que personne ne soit venu vers lui, pour essayer de voir s'il réagit quand on passe une main devant ses yeux par exemple... je comprends que l'on puisse avoir peur d'avoir affaire à un fou dangereux, mais quand même.
Personne ne semble s'inquiéter pour lui apparemment (je crois que j'hésiterais à appeler les secours, si je vois une personne immobile comme ça trop longtemps).

Ensuite, lors des premiers jets d’œufs, on voit que c'est fait "pour voir", surtout pour faire réagir cet homme. On sent que les personnes ont conscience d'une certaine transgression, et peur des conséquences (ça m'a aussi fait penser à quelqu'un qui prendrait un bâton pour tâter un animal inconnu, sans savoir comment il va réagir).
Ensuite, les choses tournent doucement à quelque chose de plus défoulatoire (c'est français?), où l'humain passe d'humain à cible (on entend quand même des propos sur le fait que la personne devrait réagir, aller prendre une douche, puis il y a celle qui s'indigne et finit par enlever les œufs.) Cette réaction, ça restaure quand même un peu d'espoir dans l'humanité, et on a envie de lui dire "merci" et d'espérer qu'il y ait toujours des gens comme elle pour mettre fin aux lynchages.

K.

C'est juste horrible.

Un peu l'impression que c'est ma vie.

Je remarque aussi que la fille qui enlève les oeufs à la fin est celle qui a lancé le premier.

KinetteKinette a écrit: défoulatoire

Défoulescent ? Défoulifique ? Défoulantesque ? Razz

C'est assez impressionnant, son histoire, là. Ça mériterait d'être étudié de près.

KinetteKinette a écrit:Je ne comprends pas que personne ne soit venu vers lui

Telle qu'est présentée la vidéo (le choix des séquences est un parti pris... dans le déroulement de la scène ce serait sans doute différent), à la fin j'avais envie d'aller lui faire un bisou, au monsieur. Embarassed

Celadon a écrit:Oui, enfin, elles diminuent avec l'âge, quand même. Il n'y a pas beaucoup de mémés et pépés parmi les lanceurs!
Il n'y en a pas beaucoup non plus qui mettent fin au jeu de massacre...

Il y en a au moins une : à la fin, une dadame à cheveux blancs qui se précipite en trottinant pour se saisir d'un oeuf et l'envoyer prestement :shock: , je n'ai pas compris ce qu'elle dit...

C’est du gaspillage, surtout. Des gens se donnent du mal pour produire de la bouffe, en plus on imagine que ce sont des œufs pas chers, donc issus de l’exploitation des producteurs et de leurs bêtes, le système contribue déjà à un gaspillage inimaginable, et en plus, on trouve moyen de jeter des produits qui étaient parvenus jusqu’aux consommateurs. Et juste pour le fun…

Oudemia a écrit:

Celadon a écrit:Oui, enfin, elles diminuent avec l'âge, quand même. Il n'y a pas beaucoup de mémés et pépés parmi les lanceurs!
Il n'y en a pas beaucoup non plus qui mettent fin au jeu de massacre...

Il y en a au moins une : à la fin, une dadame à cheveux blancs qui se précipite en trottinant pour se saisir d'un oeuf et l'envoyer prestement :shock: , je n'ai pas compris ce qu'elle dit...

Si j'ai bien compris elle disait quelque chose comme "j'aimerais bien comprendre". :lol:

J'ai repassé la video :
-la dadame -aux cheveux plus gris que blancs- demande pourquoi il fait ça
-la caméra était visible : des jeunes filles lui font coucou à un moment, et il y avait quelqu'un qui surveillait : on voit une main à droite qui fait déplacer une jeune fille qui était dans le champ
Je m'interroge sur les coupures, sur la durée cela aurait été plus intéressant (si on peut dire...)

Et je suis d'accord pour le gaspillage, ça me rappelle les débordements du mardi-gras dans certains établissements.

La dadame dit: "Oh ben je vais y aller moi !" puis "Oh *** oui alors !" sûrement parce que le jeune lui dit quelque chose comme: "Ça défoule !" ou "C'est marrant !"

Personnellement je vois des jeunes filles (collégiennes ? lycéennes ?) qui voudraient faire réagir l'artiste pour avoir des réponses, et non le brutaliser, puis qui sont scandalisées par la violence de deux autres jeunes qui, en plus, visent le visage de l'artiste. Je me dis qu'il y a peut-être un peu d'espoir dans la jeunesse, enfin du côté des filles...
Ce qui m'effraie le plus, c'est la dadame. Elle vient clairement pour s'amuser à frapper quelqu'un ! J'aurais voulu voir comment elle réagit quand la jeune enlève les œufs et l'échange qu'elles ont pu avoir après.

C'est vrai que c'est du gaspillage en plus. Au départ, je me suis demandé si, en alternative au fait de voir des gens jeter les œufs, on ne pourrait pas en voir partir avec...
Mais, si la caméra est bien visible, ça change la donne.

Ceci dit, le coup de la caméra biaise un peu la chose: le fait d'avoir un type immobile, une caméra et des œufs bien en évidence peut être identifié comme une sorte d'énigme à résoudre, les gens comprenant qu'on est dans le cadre d'un "happening" (décidément, le français me lâche... j'aurais dû écrire "performance"), et cherchent à savoir ce que veut le môssieur (ceci vaut pour les premiers spectateurs, pas pour la suite). Et, à part jeter les œufs, a-t-on beaucoup d'alternatives (OK, on peut essayer de les mettre en équilibre sur sa tête...).

La remarque d'Oudemia me rappelle des souvenirs de l'année du bac... dans mon établissement on appelait ça "la décale", et c'était juste après la philo... rétrospectivement, j'ai honte d'y avoir participé. Le pire a été quand des copains avec qui j'étais ont voulu arroser de farine un jeune dans la rue. Ils se sont rendus compte un peu tard que ce jeune était trisomique, et qu'ils lui avaient fait une peur bleue (il a crié et a tenté de se protéger). Tout le monde est parti en courant, pas fier... ça vaccine contre ce genre de connerie.

K.

PauvreYorick a écrit:

KinetteKinette a écrit: défoulatoire

Défoulescent ? Défoulifique ? Défoulantesque ?

C'est assez impressionnant, son histoire, là. Ça mériterait d'être étudié de près.

Oh, mais cela a déjà été fait, chez l'être humain et même chez le singe. Tu es sûr que tu veux la réponse?

Sinon il me semble qu'il ne s'agit pas ici de pulsions mais d'actes réfléchis.

L'art dans la rue et les oeufs, en ce moment, ça donne! Razz

Spoiler:

j'ai du mal à croire à la véracité de la vidéo personnellement... le coté caméra caché mais qui en fait est visible, la fille qui commence et qui, comme par hasard, termine. Ca fait trop "monté" je trouve

dandelion a écrit:

PauvreYorick a écrit:

KinetteKinette a écrit: défoulatoire

Défoulescent ? Défoulifique ? Défoulantesque ?

C'est assez impressionnant, son histoire, là. Ça mériterait d'être étudié de près.

Oh, mais cela a déjà été fait, chez l'être humain et même chez le singe. Tu es sûr que tu veux la réponse?

Sauf si tu penses à une étude spécifique que je ne connais pas, je parlais de cette mise en scène particulière, en fait (elle me paraît très complexe). Milgram & variantes, c'est relativement fréquenté.

Je pensais à Milgram bien sûr mais aussi aux travaux de Jane Goodall sur les chimpanzés.
Cette mise en scène est dérangeante aussi par l'interprétation qui en est faite par l'artiste: il a beau dire, les oeufs ne sont pas des pierres. La nature du projectile me semble tout de même devoir être prise en compte (il faudrait essayer avec une arme chargée à blanc, quelque chose me dit que beaucoup passeraient leur chemin...). De plus, contrairement à une situation 'normale' de violence, la victime ne proteste pas, ce qui limite forcément les réactions d'empathie (cela dit, nous savons tous que les principales victimes de violence sont aussi celles qui sont le moins à même de se défendre). Même au niveau artistique, le fait qu'il dise que la même chose se reproduit, et qu'en quelque sorte il attend(dait) ce résultat, ça rend sa 'performance' peu intéressante artistiquement à mon sens.

"L'artiste angoumoisin Jérémie Pujau s'est installé immobile Place Saint-Martial avec une table et trois boîtes d’œufs... dans l'attente de la réaction des passants."

La suite, ici:
http://www.sudouest.fr/2014/05/15/angouleme-il-recoit-des-oeufs-au-visage-pour-une-etude-sociologique-sauvage-1555797-4620.php
affraid

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Angoulême : les passants jettent des oeufs sur l'artiste, un massacre sociétal

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"happening sociologique": il reçoit des oeufs au visage