- MarianneNiveau 8
Bonjour.
Je prépare actuellement une séquence sur la poésie pour mes classes de 6ème.
Dans cette séquence, une séance sera consacrée à la versification.
Je présenterai la règle du -e muet selon laquelle, à la fin d'un vers, un mot qui se termine par le son "e" ne se prononce pas et ne compte donc pas pour une syllabe. Jusque là, pas de souci... sauf que je suis confrontée à un cas qui ne correspond pas à cette règle.
En effet, dans un sonnet de Sully Prudhomme (que j'étudie dans le cadre de cette séance), un vers du poème se termine avec le mot "yeux". C'est le son "e" et pourtant il se prononce (il compte comme une syllabe).
Je compte expliquer ce cas aux élèves en leur disant qu'il faut distinguer la voyelle simple (e) de la voyelle complexe (eu). La voyelle simple n'utilise qu'une seule lettre pour faire le son "e" alors que la voyelle complexe utilise deux lettres (la lettre "e" et la lettre "u"). Les voyelles simples ne se prononcent jamais en fin de vers, ce qui n'est pas le cas des voyelles complexes, lesquelles comptent donc pour une syllabe.
Voilà la seule explication que je suis parvenue à trouver mais ai-je raison ? J'ai besoin de vos lumières.
Merci à ceux qui m'auront lue jusqu'au bout et qui me répondront.
Je prépare actuellement une séquence sur la poésie pour mes classes de 6ème.
Dans cette séquence, une séance sera consacrée à la versification.
Je présenterai la règle du -e muet selon laquelle, à la fin d'un vers, un mot qui se termine par le son "e" ne se prononce pas et ne compte donc pas pour une syllabe. Jusque là, pas de souci... sauf que je suis confrontée à un cas qui ne correspond pas à cette règle.
En effet, dans un sonnet de Sully Prudhomme (que j'étudie dans le cadre de cette séance), un vers du poème se termine avec le mot "yeux". C'est le son "e" et pourtant il se prononce (il compte comme une syllabe).
Je compte expliquer ce cas aux élèves en leur disant qu'il faut distinguer la voyelle simple (e) de la voyelle complexe (eu). La voyelle simple n'utilise qu'une seule lettre pour faire le son "e" alors que la voyelle complexe utilise deux lettres (la lettre "e" et la lettre "u"). Les voyelles simples ne se prononcent jamais en fin de vers, ce qui n'est pas le cas des voyelles complexes, lesquelles comptent donc pour une syllabe.
Voilà la seule explication que je suis parvenue à trouver mais ai-je raison ? J'ai besoin de vos lumières.
Merci à ceux qui m'auront lue jusqu'au bout et qui me répondront.
- henrietteMédiateur
Plutôt que de parler du son "e", parle de la lettre "e" qui peut être muette ou non : elle ne constitue pas en soi un son (la preuve, c'est le mal que les élèves ont pour la compter à l'intérieur du vers lorsqu'elle ne s'élide pas alors qu'on ne la prononce pas dans ce mot dans le français courant).
Du coup, dans ton exemple, tu n'as pas affaire au problème de la lettre "e" muette ou non, puisqu'il s'agit d'une diphtongue "eu".
Du coup, dans ton exemple, tu n'as pas affaire au problème de la lettre "e" muette ou non, puisqu'il s'agit d'une diphtongue "eu".
- SacapusHabitué du forum
Marianne a écrit:
En effet, dans un sonnet de Sully Prudhomme (que j'étudie dans le cadre de cette séance), un vers du poème se termine avec le mot "yeux". C'est le son "e" et pourtant il se prononce
Non, ce n’est pas le même son.
Le «e» muet, quand il n’est pas muet, se prononce [ə]. (ou à la rigueur [œ].)
La voyelle dans le mot «yeux», c’est [ø].
- retraitéeDoyen
Il y a une différence en phonétique entre le "e" de le, je, me, belle, et le "eu" de jeu ou de peur! ce ne sont pas du tout les mêmes symboles phonétiques qui les transcrivent. En plus, une rime en yeux est une rime masculine!
Il ne s'agit pas de lettre pour les rimes, mais de phonèmes ! Quand tu as "belle" à la rime, le dernier son entendu est le "l". Si tu as ce mot dans le vers (une belle journée) tu feras sonner en deux syllabes bel-le devant la consonne
Il ne s'agit pas de lettre pour les rimes, mais de phonèmes ! Quand tu as "belle" à la rime, le dernier son entendu est le "l". Si tu as ce mot dans le vers (une belle journée) tu feras sonner en deux syllabes bel-le devant la consonne
- MarianneNiveau 8
Donc il ne s'agit pas de lettres mais plutôt de son ?
D'accord pour la transcription phonétique, pas de problème.
Je perçois bien la différence entre le "eu" de peur et le "e" de je. Pour le "e" de "je" et de "jeux", dans le deuxième cas, il semble que le "e" soit plus long, c'est bien cela ?
D'accord pour la transcription phonétique, pas de problème.
Je perçois bien la différence entre le "eu" de peur et le "e" de je. Pour le "e" de "je" et de "jeux", dans le deuxième cas, il semble que le "e" soit plus long, c'est bien cela ?
- SacapusHabitué du forum
Marianne a écrit:Je perçois bien la différence entre le "eu" de peur et le "e" de je. Pour le "e" de "je" et de "jeux", dans le deuxième cas, il semble que le "e" soit plus long, c'est bien cela ?
Bonjour,
voici une réponse très «FLE» :
Cette intervention me conduit à conclure que votre prononciation du français suit la règle «voyelle fermée dans les syllabes ouvertes, et voyelle ouverte dans les syllabes fermées.» Ce n’est pas la règle orthoépique standard.
Vous percevez la différence entre «peur» et «je», parce qu’à mon avis, vous prononcez [pœR] et [ʒø].
Regardez dans le dictionnaire, on préconise de prononcer je comme [ʒə]. C’est le mot «jeu» qui se prononce [ʒø].
En réalité, même si le dictionnaire préconise de prononcer [ʒə], je ne connais personne en France qui le prononce ainsi. Les gens le prononcent soit [ʒø] comme vous, soit [ʒœ] comme les autres.
C’est-à-dire que plus personne ne sait prononcer le schwa. On confond soit avec [ø], soit avec [œ].
La longueur des voyelles n’est jamais un critère de discrimination entre phonèmes en français.
- egometDoyen
Plutôt que de -e muet, il vaut mieux parle de -e caduc. En effet, il peut tomber, mais pas forcément. Il est souvent nécessaire de le prononcer pour pouvoir articuler les consonnes environnantes.
La diphtongue -eu est très différente. Elle ne peut absolument pas tomber.
Dans "neveu", la première syllabe est parfois avalée, jamais la seconde. "Je l'veux, mon n'veu!" C'est un très bon indice pour savoir comment orthographier ce mot, d'ailleurs. On pourrait multiplier les exemples.
La diphtongue -eu est très différente. Elle ne peut absolument pas tomber.
Dans "neveu", la première syllabe est parfois avalée, jamais la seconde. "Je l'veux, mon n'veu!" C'est un très bon indice pour savoir comment orthographier ce mot, d'ailleurs. On pourrait multiplier les exemples.
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- MarianneNiveau 8
Merci pour tous ces éclaircissements. Je crois que je vais parler de -e caduc. C'est ce qui me semble le plus simple.
- NLM76Grand Maître
Oui, et ce d'autant que dire "le -e" final d'un vers ne se prononce pas est une erreur : il se prononce (en tout cas il le peut), mais il ne compte pas. Ainsi, je crois que les poèmes de Ronsard mis en musique portaient une treizième note dans les vers à rime féminine.
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- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- trompettemarineMonarque
Comme quoi la phonétique est belle... bien plus belle que la syntaxe.
- henrietteMédiateur
En tout cas, comme c'est pour des 6e, si tu veux mon avis, fais tout de même le plus simple possible, en utilisant la terminologie la plus claire possible.
- egometDoyen
nlm76 a écrit:Oui, et ce d'autant que dire "le -e" final d'un vers ne se prononce pas est une erreur : il se prononce (en tout cas il le peut), mais il ne compte pas. Ainsi, je crois que les poèmes de Ronsard mis en musique portaient une treizième note dans les vers à rime féminine.
En fait, c'est très fréquent en chanson. Beaucoup moins dans la déclamation.
Ca explique l'importance des rimes féminines. Une note de plus si tu chantes!
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- marininhaHabitué du forum
En 6e, je leur dit que, si à la fin du vers, on orthographie ce son -e / -es ou -ent, on ne le prononce pas. Plus tard, on pourra développer ... ça tient la route ?
- retraitéeDoyen
À ce sujet, je constate depuis un certain temps que la prononciation des deux -o tend à se confondre, voire à s'inverser. La prononciation méridionale s'impose, semble-t-il.
La côte devient la cote ou la cotte . De même , la confusion entre tache et tâche transforme la première en "travail" et la seconde en "macule" !
NB : le e de je et celui de jeu ne sont pas les mêmes ! En tout cas, je les prononce différemment pour ma part, comme nombre de gens que je connais.
En revanche, les élèves écrivent souvent "cheuveux" pour cheveux"
La côte devient la cote ou la cotte . De même , la confusion entre tache et tâche transforme la première en "travail" et la seconde en "macule" !
NB : le e de je et celui de jeu ne sont pas les mêmes ! En tout cas, je les prononce différemment pour ma part, comme nombre de gens que je connais.
En revanche, les élèves écrivent souvent "cheuveux" pour cheveux"
- egometDoyen
marininha a écrit:En 6e, je leur dit que, si à la fin du vers, on orthographie ce son -e / -es ou -ent, on ne le prononce pas. Plus tard, on pourra développer ... ça tient la route ?
Sauf en chanson.
Ce n'est pas terrible de parler d'orthographe pour la métrique. Il serait difficile d'évoquer tous les cas de figure. C'est imbuvable pour les rimes, par exemple.
Il vaut mieux travailler sur la phonétique directement, en montrant la différence entre le langage courant et le langage poétique. Est-ce que tu peux supprimer le son? Le garder? On peut très bien faire des essais de prononciation devant les élèves. Ils sentent bien ce qui passe et ce qui est lourd.
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- egometDoyen
retraitée a écrit:
NB : le e de je et celui de jeu ne sont pas les mêmes ! En tout cas, je les prononce différemment pour ma part, comme nombre de gens que je connais.
En revanche, les élèves écrivent souvent "cheuveux" pour cheveux"
Mais comment prononcent-ils? Ch'veux ou cheuv'? On peut leur faire remarquer que "cheuveux" n'est pas cohérent avec la prononciation.
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- VioletEmpereur
Je ne comprends pas le problème.
Ce n'est pas un e muet...
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- NLM76Grand Maître
egomet a écrit:En fait, c'est très fréquent en chanson. Beaucoup moins dans la déclamation.nlm76 a écrit:Oui, et ce d'autant que dire "le -e" final d'un vers ne se prononce pas est une erreur : il se prononce (en tout cas il le peut), mais il ne compte pas. Ainsi, je crois que les poèmes de Ronsard mis en musique portaient une treizième note dans les vers à rime féminine.
Et c'est bien dommage...
Inviter les élèves à prononcer les -e dits muets en fin de vers les aide à améliorer leur diction : cela permet d'articuler véritablement la dernière consonne, et à moins "tomber" en fin de vers.
Quant à la règle, elle me paraît simple ainsi : en poésie, tous les -e se prononcent, sauf s'ils sont suivis d'une voyelle.
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- egometDoyen
Si on le prononce, il faut le faire avec légèreté...nlm76 a écrit:egomet a écrit:En fait, c'est très fréquent en chanson. Beaucoup moins dans la déclamation.nlm76 a écrit:Oui, et ce d'autant que dire "le -e" final d'un vers ne se prononce pas est une erreur : il se prononce (en tout cas il le peut), mais il ne compte pas. Ainsi, je crois que les poèmes de Ronsard mis en musique portaient une treizième note dans les vers à rime féminine.
Et c'est bien dommage...
Inviter les élèves à prononcer les -e dits muets en fin de vers les aide à améliorer leur diction : cela permet d'articuler véritablement la dernière consonne, et à moins "tomber" en fin de vers.
Quant à la règle, elle me paraît simple ainsi : en poésie, tous les -e se prononcent, sauf s'ils sont suivis d'une voyelle.
Pas évident. Je ferais des essais.
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- VicomteDeValmontGrand sage
Le "e final" des rimes féminines se prononçait très légèrement au XVIe siècle: ce n'est plus le cas aujourd'hui !
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Cette insigne faveur que votre coeur réclame
Nuit à ma renommée et répugne à mon âme.
- NLM76Grand Maître
Il faut toujours le faire avec légèreté, même à l'intérieur du vers. Un des moyens : marquer la longueur de la voyelle précédente.egomet a écrit:Si on le prononce, il faut le faire avec légèreté...nlm76 a écrit:egomet a écrit:
En fait, c'est très fréquent en chanson. Beaucoup moins dans la déclamation.
Et c'est bien dommage...
Inviter les élèves à prononcer les -e dits muets en fin de vers les aide à améliorer leur diction : cela permet d'articuler véritablement la dernière consonne, et à moins "tomber" en fin de vers.
Quant à la règle, elle me paraît simple ainsi : en poésie, tous les -e se prononcent, sauf s'ils sont suivis d'une voyelle.
Pas évident. Je ferais des essais.
Sinon, écoutez Aznavour; j'aime bien Aznavour
"La bo-hè-me" et non "La bo-hè-meuh"
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- NLM76Grand Maître
Au XVIe siècle, dans le Nord, les gens qui avaient appris à déclamer le disaient. Dans le sud, tous le disaient.VicomteDeValmont a écrit:Le "e final" des rimes féminines se prononçait très légèrement au XVIe siècle: ce n'est plus le cas aujourd'hui !
Aujourd'hui, qui a appris à déclamer ?
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