- Isis39Enchanteur
Les résultats de l'enquête PISA : un grand coup de pied dans la fourmilière. Bilan d'une semaine d'hystérie éducative. Qui sera suivie ou non d'effet.
1° La plupart des enseignants, de tous les établissements, même des plus favorisés, font le même constat. Depuis quelques années, ils ont l'impression d'avoir des classes deux en un : une tête de classe éblouissante mais aussi des élèves totalement largués, presque prostrés. PISA ne nous apprend rien, mais elle conforte notre impression personnelle, singulière, locale. Ce qui n'est pas négligeable. C'est révoltant, scandaleux, c'est le contraire de ce que l'on voudrait. Produisons-nous des cancres ? Pas au sens où l'école fabriquerait des "crétins". Assister à nos cours vaut mieux que ne pas y assister, nous ne sommes pas malfaisants, ni source de saccage ou de perdition. Nous laissons, en revanche, faute d'espace, de suivi, de réaction immédiate, de culture de la responsabilité, de marge de manœuvre, l’échec s'installer, se déployer, s'incruster. Les injonctions (faire le programme, aider les plus faibles, émuler les plus forts) sont difficiles à concilier, le rythme est ardu à trouver. Tout cela nous laisse l'impression de courir de nombreux lièvres à la fois.
2° Une bonne nouvelle, notamment en ce qui concerne mon premier point : la création de 4000 postes au collège. Cela peut être l'occasion de redonner de l'unité et du suivi à l'enseignement. Au collège, les élèves quittent l'unité de l'école primaire. Ils ont de multiples professeurs qui ont de multiples classes. Cela manque de point fixe, de repères. On a toujours le sentiment de ne pas avoir les coudées franches, l'espace (physique, aussi) nécessaire. Il faut du tutorat, du temps de discussion avec les élèves (pas des heures de vie de classe défouloir !)(c'est fou comme discuter vingt minutes avec un élève peut changer les choses, mais ces vingt minutes, il faut les trouver, tout est tellement serré), de la liberté, de l'air. Mon rêve : des profs volants. Pas des bœufs-carottes, ni des missi dominici, ni des super profs à compétences (les chouchous de l'Inspection qui vivent avec une clef USB autour du cou !). Des enseignants qui ont de l'expérience (ça ne manque pas), qui, une partie de leur service, s'occuperaient des élèves de leur établissement, feraient des interventions à l'école maternelle, élémentaire, iraient conseiller avec bienveillance et science de jeunes collègues. Il faut décloisonner, faire circuler (pas les joints !), ouvrir un peu les forteresses. Des professeurs des écoles viendraient au collège retrouver leurs anciens élèves et leur faire cours. Des professeurs du secondaire iraient faire des interventions en maternelle ou en primaire, évoquer leur discipline (je m'imagine bien raconter l'Odyssée à des grandes sections). Du lien, de la continuité, de la réactivité, de l'air. Tout ce dont nous manquons.
3° On a tout mélangé. Vincent Peillon semble s'attaquer à un nouveau sujet par jour à un rythme quasiment sarkozien. Cela donne l'impression, en retour, que tous les sujets sont liés. On finit par croire que le statut des profs de prépa nuit à l'apprentissage de la lecture en CP. Ça conduit à monter les uns contre les autres, à désigner des privilégiés. Le bonheur des uns ne fait pas ici le malheur des autres. Les classes préparatoires (formidable formation pour devenir professeur au demeurant, j'y ai plus appris pour faire cours qu'à l'IUFM !)(elles apprennent même au prof l'effet que ça fait, d'avoir des notes pourries, ce qui n'est pas donné à tous les bons élèves) ne sont coupables de rien. En revanche, par leur excellence, elles soulignent cruellement le dénuement d'autres secteurs de l'éducation. Il s'agirait de les imiter dans ce qu'elles ont de bien plus que de les critiquer avec aigreur et amertume. De même, la réforme des rythmes est à mes yeux une dépense aberrante de moyens, une conception fausse de la lutte contre l’échec scolaire mais elle n'aggrave rien. Bref, il s'agirait d'éviter les faux débats dans le débat.
La suite : http://maragoyet.blog.lemonde.fr/2013/12/07/bilan-dune-semaine-dhysterie-educative/
Même si je ne partage pas tout, j'aime bien ce qu'écrit Mara Goyet.
- arguinNiveau 8
"une tête de classe éblouissante" ....Comme on aimerait qu'elle dise vrai ! :gratte:
- keroGrand sage
arguin a écrit:"une tête de classe éblouissante" ....Comme on aimerait qu'elle dise vrai ! :gratte:
Dans pratiquement toutes les classes que j'ai jusqu'à maintenant, au-delà des masses d'élèves décrocheurs/faibles, il y a aussi des élèves qui font un travail réellement de qualité.
- InfinimentHabitué du forum
kero a écrit:arguin a écrit:"une tête de classe éblouissante" ....Comme on aimerait qu'elle dise vrai ! :gratte:
Dans pratiquement toutes les classes que j'ai jusqu'à maintenant, au-delà des masses d'élèves décrocheurs/faibles, il y a aussi des élèves qui font un travail réellement de qualité.
Certes, mais je trouve que parler de "tête de classe éblouissante" est un peu excessif... Il y en a, sans doute, mais c'est loin d'être le cas partout. Pour ma part, j'ai quelques très bons élèves, fins, travailleurs. Mais j'ai rarement eu des élèves "éblouissant[s]". On en vient à considérer comme exceptionnels des élèves qui font leur travail d'élèves. Studieux, attentifs, appliqués. Bons, voire très bons, voire excellents, je ne leur enlève rien. Des élèves qui devraient être "normaux". Des élèves, tout simplement.
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Ah ! la belle chose, que de savoir quelque chose !
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