- User17706Bon génie
http://alternatives-economiques.fr/blogs/duru-bellat/2013/12/03/pisa-comment-font-les-autres/
Marie Duru-Bellat a écrit:L’intérêt des enquêtes triennales PISA, qui testent les compétences des élèves de 15 ans dans une soixantaine de pays, loin de délivrer des conclusions définitives sur ce qu’il convient de faire dans notre pays, c’est de déplacer le projecteur sur certains de nos voisins qui semblent à même de faire bouger les lignes en matière d’éducation. Ce qui en soi est important, car c’est peu dire que chez nous on accueille avec un certain fatalisme et le taux élevé d’élèves faibles et les inégalités sociales (peut-être un effet pervers de la diffusion des thèses bourdieusiennes).
Or, la dernière livraison de l’enquête (PISA 2012) révèle que dans certains pays, les élèves ont aujourd’hui des performances significativement meilleures, dans d’autres moins bonnes, que dans les dernières vagues de l’enquête. Il est évidemment impossible de se prononcer avec précision sur les causes de ces évolutions : les enquêtes PISA permettent seulement de rechercher des corrélations avec certaines caractéristiques des systèmes éducatifs et avec certaines réformes, et chacun sait qu’une corrélation est insuffisante pour établir des relations causales. Ainsi, si l’Allemagne voit ses performances s’améliorer, c’est peut-être plus par l’aiguillon qu’a constitué dans ce pays le « choc PISA » diffus des dernières années (la révélation de résultats médiocres et inégalitaires) que par les réformes précises qui ont été lancées dans ce pays pour y réagir. Il est néanmoins utile de recenser ces dernières, même si le seul fait que les enquêtes aient été prises très au sérieux et qu’un consensus national ait émergé pour faire front soit déjà sans doute très important ; notons en l’occurrence le développement de standards et d’évaluations nationales, et l’augmentation du nombre d’écoles offrant désormais une journée complète de cours. Ailleurs, en Pologne (autre pays dont les progressions sont frappantes), c’est le développement d’un cycle secondaire inférieur unifié (à l’instar de notre collège) qu’il faut sans doute invoquer ; ailleurs encore, au Portugal, de multiples changements sont intervenus : forte augmentation des ressources pour les publics défavorisés, réduction du retard scolaire, pilotage plus strict du système sur la base d’évaluations nationales… A contrario, un pays comme la Suède qui était dans les premières enquêtes un pays à la fois aux performances élevées et égalitaires, a vu ses performances se dégrader sensiblement sur ces deux aspects. Il faut dire qu’en Suède, a été développée depuis les années 1990 une politique de décentralisation des établissements et de libéralisation, avec un système de chèques scolaires permettant aux élèves de choisir leur école ; il s’en est suivi une ségrégation accrue des écoles, dont toute la recherche montre que les élèves les plus défavorisés en paient le prix.
On pourrait continuer ainsi, mais d’ores et déjà, certains enseignements clairs peuvent être dégagés, même s’il faut rester prudent et assez vague car tout changement précis doit être en cohérence avec les autres rouages d’un système donné : importance d’un pilotage des résultats sur la base d’évaluations (faut-il rappeler qu’en France les évaluations nationales sont à la fois contestées et peu mobilisées pour le pilotage ?), impact de l’organisation du temps scolaire sur les performances (même s’il n’y a pas un « one best way », il est crucial de gérer le temps scolaire à l’aune des acquis scolaires et de rien d’autre) , caractère délétère de la ségrégation des publics scolaires et de la concurrence entre écoles (deux phénomènes accrus chez nous depuis la suppression de la carte scolaire)… Aucune de ces pistes ne sont magiques, mais elles questionnent d’ores et déjà certains programmes politiques en matière de politique scolaire !
- User5899Demi-dieu
Le problème, c'est que comme tout le monde relaie PISA, ce machin a dans nos consciences désormais une réalité indiscutable. Alors qu'on s'en fout.
- User17706Bon génie
Je suis assez d'accord, quoique je n'aie jamais regardé de très près la méthodologie. Disons que Marie Duru-Bellat est tout de même plus prudente et moins dogmatique que bien des commentateurs.
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