- IphigénieProphète
Bon, Sphinx, à vrai dire, je suis toujours un peu chagriné qu'on veuille absolument situer les voyages d'Ulysse. Pour moi, passé le cap Soumion, il est dans un univers dessiné par le poème
(bon , je lis en remontant...)
Là aussi, oui et non: l'univers mental est aussi une manière de délimiter le monde homérique; alors chercher à lire Homère comme le guide du routard, non, mais chercher un sens géographique à ces voyages, pourquoi pas, cela fait partie de la multiplicité des sens possibles de l'oeuvre. D'ailleurs ça a au moins permis Schliemann, ce qui n'est pas si mal, finalement . Il me semble que tout le charme de la lecture, c'est de n'admettre aucun interdit, à partir du moment où on débouche sur une idée nouvelle... Si on est sûr avant de commencer de ce que l'on doit ou ne doit pas y trouver,c'est figé, non?
- virgereNeoprof expérimenté
Cripure a écrit:
1) "Pourquoi l'auteur a écrit ça ?" Question sans réponse. Next one !
"Pourquoi l'auteur a écrit ça comme ça ?" 404 Error Answer not found - Next one
"Qu'est-ce que l'auteur veut dire ?" Mais je n'en sais rien, moi. Le sait-il / savait-il lui-même, d'ailleurs ? Ce qui est sûr, c'est qu'il a dit ça. La lecture, c'est un lecteur face à un texte. Que le texte soit pris dans un contexte, oui. Qu'il soit le moyen de parvenir à la réponse à la question de la volonté de l'auteur, je n'en crois pas un mot. Péché d'orgueil du prof pas sûr de lui.
2)Les "décorticages"... Pourquoi l'image de la carapace ? Qu'est-ce qu'un texte sinon des mots ? Bien sûr qu'il y a un plaisir à se laisser porter, c'est le plaisir de la dérive, du rêve, du "point de départ" : le texte, le tableau, la musique est le point de départ d'une perte de conscience, c'est le moyen d'un plaisir. Bon. Mais si on veut tenter de comprendre ? Il faut bien qu'on nous apprenne à lire un texte, à regarder un tableau, à écouter un quatuor à cordes ou une sonate !
3)"Surinterpréter"... Ma foi, il faudrait des exemples précis. J'imagine que nous ne sommes pas tous également inspirés tous les jours.
Sans rancune, hein
Les sur-interprétations, ce sont (c'était) justement les réponses aux trois questions citées.
Et je suis ravie de voir que non, tous les profs de lycée ne font pas ça.
Le décorticage, car il fallait analyser chaque phrase ou presque. J'exagère sans doute, mais c'est le souvenir qu'il m'en est resté.
En tout cas, ce fil est passionnant
Même si je me sens vraiment inculte à côté de vous
- InfinimentHabitué du forum
virgere a écrit:Cripure a écrit:
1) "Pourquoi l'auteur a écrit ça ?" Question sans réponse. Next one !
"Pourquoi l'auteur a écrit ça comme ça ?" 404 Error Answer not found - Next one
"Qu'est-ce que l'auteur veut dire ?" Mais je n'en sais rien, moi. Le sait-il / savait-il lui-même, d'ailleurs ? Ce qui est sûr, c'est qu'il a dit ça. La lecture, c'est un lecteur face à un texte. Que le texte soit pris dans un contexte, oui. Qu'il soit le moyen de parvenir à la réponse à la question de la volonté de l'auteur, je n'en crois pas un mot. Péché d'orgueil du prof pas sûr de lui.
2)Les "décorticages"... Pourquoi l'image de la carapace ? Qu'est-ce qu'un texte sinon des mots ? Bien sûr qu'il y a un plaisir à se laisser porter, c'est le plaisir de la dérive, du rêve, du "point de départ" : le texte, le tableau, la musique est le point de départ d'une perte de conscience, c'est le moyen d'un plaisir. Bon. Mais si on veut tenter de comprendre ? Il faut bien qu'on nous apprenne à lire un texte, à regarder un tableau, à écouter un quatuor à cordes ou une sonate !
3)"Surinterpréter"... Ma foi, il faudrait des exemples précis. J'imagine que nous ne sommes pas tous également inspirés tous les jours.
Sans rancune, hein
Les sur-interprétations, ce sont (c'était) justement les réponses aux trois questions citées.
Et je suis ravie de voir que non, tous les profs de lycée ne font pas ça.
Le décorticage, car il fallait analyser chaque phrase ou presque. J'exagère sans doute, mais c'est le souvenir qu'il m'en est resté.
En tout cas, ce fil est passionnant
Même si je me sens vraiment inculte à côté de vous
Analyser chaque phrase ou presque, cela revient, peu ou prou, à faire une explication linéaire. C'est l'exercice qui se pratique (ou, du moins, se pratiquait...) au CAPES et à l'agrégation, et c'est sans aucun doute le meilleur moyen de s'approprier un texte, de le prendre à bras-le-corps. Le commentaire composé est peut-être plus littéraire, mais il conduit souvent nos élèves à picorer, à saupoudrer et, au bout du compte, à passer à côté du texte.
_________________
Ah ! la belle chose, que de savoir quelque chose !
- User5899Demi-dieu
Oh mais je sais bien, et d'ailleurs, il évoque la Hollande explicitement dans l'"Invitation" en prose, dans Le Spleen de Paris. C'est juste que nous parlions d'étude de texte et que ce que vous appelez "matrice textuelle" ne me semble d'aucun intérêt, autre que celui de l'effort pour connaître un auteur, mais j'avoue que ça me laisse totalement indifférent. Ailleurs rimbaldien, anywhere out of the world, OK, mais pas plus loin. Bon, c'est un choix perso, hein. Pour les voyages d'Ulysse, c'est pareil. Quel intérêt d'aller placer ce pauvre homme sur une carte au jour le jour ?Abraxas a écrit:Cripure, cette histoire de "là-bas" à propos de Baudelaire, c'est juste que l'Invitation au voyage est pompée sur une lettre de Descartes qui lui, clairement, parle de la Hollande.
Mais quand j'ai lu les Fleurs du mal pour la première fois, je l'ignorais. Et ma foi, mon "là-bas" de cette époque était juste "l'ailleurs" rimbaldien. Chacun a les Abyssinies qu'il mérite (c'est ce que j'appelle le syndrome de Borgès, qui proposait de lancer une étude sur l'influence de Kafka sur les Romantiques : nous ne pouvons plus lire Baudelaire sans penser à Rimbaud — ou à Breton, ou à Char). Les anachronismes peuvent être porteurs de pistes, n'est-ce pas…
Si je l'expliquais à des élèves, j'évoquerais Descartes, comme matrice textuelle, mais pas comme matrice de sens. J'imagine que nous en faisons tous de même.
- User5899Demi-dieu
En fait, dans une première version, il parle des "œufs brouillés"iphigénie a écrit:Avec beaucoup moins d'érudition, on peut quand même penser au poème en prose qui renvoie explicitement à la Hollande. Sur ce coup vous êtes bien sévère, Cripure ,et bien savant, Abraxas, mais c'est votre charme...Cripure, cette histoire de "là-bas" à propos de Baudelaire, c'est juste que l'Invitation au voyage est pompée sur une lettre de Descartes qui lui, clairement, parle de la Hollande.
(même si c'est vrai qu'on s'en fiche un peu / EDIT: que ce soit la Hollande, oeuf corse, je ne parle pas de votre charme à tous deux :lol: / , et que c'est surtout le pays de Cocagne, hein... )
Cela dit, si la référence à la Hollande permet aussi d'expliquer pourquoi il parle des "ciels brouillés" et pas des cieux, ça fait aussi avancer le schmilblick.
Non, mais Iphigénie, ne me dites pas que vous n'avez pas subi au Bac la malheureuse explication du couillon de base qui, une fois qu'il vous a dit que là-bas, c'est la Hollande et que mon enfant masseur, c'est Mme trucmuche, n'a plus rien à dire ! Il a collé ses petites étiquettes tout comme son prof et il est content... C'est une approche des textes que je ne comprends pas.
- User5899Demi-dieu
Mais je ne suis sûr de rien, justement. Et surtout pas d'une géographieiphigénie a écrit:Bon, Sphinx, à vrai dire, je suis toujours un peu chagriné qu'on veuille absolument situer les voyages d'Ulysse. Pour moi, passé le cap Soumion, il est dans un univers dessiné par le poème
(bon , je lis en remontant...)
Là aussi, oui et non: l'univers mental est aussi une manière de délimiter le monde homérique; alors chercher à lire Homère comme le guide du routard, non, mais chercher un sens géographique à ces voyages, pourquoi pas, cela fait partie de la multiplicité des sens possibles de l'oeuvre. D'ailleurs ça a au moins permis Schliemann, ce qui n'est pas si mal, finalement . Il me semble que tout le charme de la lecture, c'est de n'admettre aucun interdit, à partir du moment où on débouche sur une idée nouvelle... Si on est sûr avant de commencer de ce que l'on doit ou ne doit pas y trouver,c'est figé, non?
- IphigénieProphète
Mais bien sûr que là c'est exécrable; mais la référence à la Hollande, "en soi", n'est pas une aberration, si elle ouvre des pistes pour avancer dans le texte (sur le rapport à la peinture, sur l'étrange renversement de l"exotisme", etc...Cripure a écrit:En fait, dans une première version, il parle des "œufs brouillés"iphigénie a écrit:Avec beaucoup moins d'érudition, on peut quand même penser au poème en prose qui renvoie explicitement à la Hollande. Sur ce coup vous êtes bien sévère, Cripure ,et bien savant, Abraxas, mais c'est votre charme...Cripure, cette histoire de "là-bas" à propos de Baudelaire, c'est juste que l'Invitation au voyage est pompée sur une lettre de Descartes qui lui, clairement, parle de la Hollande.
(même si c'est vrai qu'on s'en fiche un peu / EDIT: que ce soit la Hollande, oeuf corse, je ne parle pas de votre charme à tous deux :lol: / , et que c'est surtout le pays de Cocagne, hein... )
Cela dit, si la référence à la Hollande permet aussi d'expliquer pourquoi il parle des "ciels brouillés" et pas des cieux, ça fait aussi avancer le schmilblick.
Non, mais Iphigénie, ne me dites pas que vous n'avez pas subi au Bac la malheureuse explication du couillon de base qui, une fois qu'il vous a dit que là-bas, c'est la Hollande et que mon enfant masseur, c'est Mme trucmuche, n'a plus rien à dire ! Il a collé ses petites étiquettes tout comme son prof et il est content... C'est une approche des textes que je ne comprends pas.
- User5899Demi-dieu
Mouais. Bon, on ne sera pas d'accord sur ce point. De toutes façons, ce poème sur le "vivre ensemble", hein, bon !iphigénie a écrit:Mais bien sûr que là c'est exécrable; mais la référence à la Hollande, "en soi", n'est pas une aberration, si elle ouvre des pistes pour avancer dans le texte (sur le rapport à la peinture, sur l'étrange renversement de l"exotisme", etc...Cripure a écrit:En fait, dans une première version, il parle des "œufs brouillés"iphigénie a écrit:
Avec beaucoup moins d'érudition, on peut quand même penser au poème en prose qui renvoie explicitement à la Hollande. Sur ce coup vous êtes bien sévère, Cripure ,et bien savant, Abraxas, mais c'est votre charme...
(même si c'est vrai qu'on s'en fiche un peu / EDIT: que ce soit la Hollande, oeuf corse, je ne parle pas de votre charme à tous deux :lol: / , et que c'est surtout le pays de Cocagne, hein... )
Cela dit, si la référence à la Hollande permet aussi d'expliquer pourquoi il parle des "ciels brouillés" et pas des cieux, ça fait aussi avancer le schmilblick.
Non, mais Iphigénie, ne me dites pas que vous n'avez pas subi au Bac la malheureuse explication du couillon de base qui, une fois qu'il vous a dit que là-bas, c'est la Hollande et que mon enfant masseur, c'est Mme trucmuche, n'a plus rien à dire ! Il a collé ses petites étiquettes tout comme son prof et il est content... C'est une approche des textes que je ne comprends pas.
- IphigénieProphète
Là encore, si c'est pour caricaturer le texte, c'est évidemment exécrable. Maintenant, les pistes d'études sur la jonction entre le texte homérique et les traditions folkloriques archaïques cà et là ouvrent des perspectives nouvelles et intéressantes aussi, à la frontière, il est vrai, entre littérature et (pré)histoire. Enfin, investir le récit homérique dans la géographie méditerranéenne c'est peut-être aussi nous faire voir autrement la Méditerranée, et pas le texte homérique: lequel nourrit l'autre?Cripure a écrit:Mais je ne suis sûr de rien, justement. Et surtout pas d'une géographieiphigénie a écrit:Bon, Sphinx, à vrai dire, je suis toujours un peu chagriné qu'on veuille absolument situer les voyages d'Ulysse. Pour moi, passé le cap Soumion, il est dans un univers dessiné par le poème
(bon , je lis en remontant...)
Là aussi, oui et non: l'univers mental est aussi une manière de délimiter le monde homérique; alors chercher à lire Homère comme le guide du routard, non, mais chercher un sens géographique à ces voyages, pourquoi pas, cela fait partie de la multiplicité des sens possibles de l'oeuvre. D'ailleurs ça a au moins permis Schliemann, ce qui n'est pas si mal, finalement . Il me semble que tout le charme de la lecture, c'est de n'admettre aucun interdit, à partir du moment où on débouche sur une idée nouvelle... Si on est sûr avant de commencer de ce que l'on doit ou ne doit pas y trouver,c'est figé, non?
- IphigénieProphète
BOn , vous me chagrinez là:Cripure a écrit:
Mouais. Bon, on ne sera pas d'accord sur ce point. De toutes façons, ce poème sur le "vivre ensemble", hein, bon !
et si je vous propose une comparaison entre poème en prose (qui va dans le sens de la précision, où la Hollande devient" la Chine du Nord" d'où son côté oriental) et le poème en vers qui lui va au contraire dans le sens de l'imprécision et du vague volontaire et le climat du rêve, est ce que vous acceptez le point de départ hollandais comme porteur de sens, ou éclairant pour amener le "paysage intérieur"?
Pour le" vivre ensemble": pas question :lol: On a au moins ce point d'accord;)
- profecolesHabitué du forum
Dalva a écrit:J'ai eu la même réaction qu'Aletheia en lisant ta question arcenciel ! Mais j'espère que tu ne vas pas mal le prendre !
J'observe d'énormes (énormissimes) différences selon les écoles d'où nous arrivent les élèves de 6e. En revanche, et de façon assez dramatique, j'ai l'impression qu'ensuite ça se nivelle année après année, et pas dans le bon sens : ils oublient tout, comprennent de moins en moins (comme s'ils cherchaient à compliquer ce qui est simple, d'ailleurs), et ce n'est qu'en fin de 4e ou en 3e que tout à coup (pour certains), la lumière se fait.
Il y a évidemment toujours, dans quasiment chacune de mes classes, des cas étonnants qui connaissent tout comme intuitivement, même des choses qu'ils ne peuvent manifestement pas avoir travaillé. Ils n'ont pas forcément les termes pour le dire mais ils comprennent et analysent correctement toutes les structures, et il suffit de leur donner une fois le mot qui leur manque pour qu'ils le retiennent et le réemploient à bon escient.
J'en suis même venue à me dire qu'il en va pour la grammaire comme pour l'orthographe et que, entre ceux qui la possèdent intuitivement et ceux à qui elle restera à jamais imperméable, il est une masse qui doit beaucoup travailler pour se l'approprier. Et cela, j'ai du mal à le concevoir, car c'est de la pure logique (bien plus que l'orthographe) et de la rigueur.
Le mot est lâché...
Je fais exactement le même constat en primaire. Et cela me désespère.
Mes élèves de CM1 ont appris à lire pendant 2 ans avec Ribambelle au CP et au CE1 (méthode dite mixte mais à départ global). Ils y ont appris l'"anti-rigueur" : je m'aide du contexte, des images, j'essaie de deviner les mots. Cela leur pose problème en lecture bien sûr mais aussi et surtout en grammaire.
J'en fais beaucoup dans ma classe : en rituel le matin, en dépassant allègrement les horaires alloués à cette matière dans les programmes, en essayant aussi d'y introduire un peu de ludique (des défis, un championnat ...), en suivant une progression très rigoureuse inspirée du SLECC (d'abord les natures puis les fonctions). Résultat : à part ceux qui savaient déjà lire en entrant au CP (soit 3 ou 4 élèves de ma classe) et les très logiques et rigoureux, le gros de la troupe peine vraiment. Et ce qui me désole, c'est qu'ils m'ont dit en fin d'année que la matière qui les avait le plus rebutés dans l'année était la grammaire ...
Je ne sais vraiment plus comment m'y prendre pour l'année prochaine ...
- MalicouNiveau 8
clairlaure a écrit:Mon problème après lecture de ce genre de post, c'est que je me sens souvent nulle, idiote et pas à la hauteur de l'enseignement. Et pourtant je bosse, je bosse, je bosse...
Il me semble que justement si tu es sur le forum, si tu sais que tu peux t'améliorer (parce que personne n'est parfait; même s'il ne faut pas non plus croire qu'on est "nulle, idiote, pas à la hauteur") alors tu es un bon professeur!
- Presse-puréeGrand sage
Malicou a écrit:clairlaure a écrit:Mon problème après lecture de ce genre de post, c'est que je me sens souvent nulle, idiote et pas à la hauteur de l'enseignement. Et pourtant je bosse, je bosse, je bosse...
Il me semble que justement si tu es sur le forum, si tu sais que tu peux t'améliorer (parce que personne n'est parfait; même s'il ne faut pas non plus croire qu'on est "nulle, idiote, pas à la hauteur") alors tu es un bon professeur!
+1
Il ne faut pas ressentir ce fil comme une humiliation mais comme une source de réflexion sur ta pratique et ta vision du métier.
_________________
Homines, dum docent, discunt.Sénèque, Epistulae Morales ad Lucilium VII, 8
"La culture est aussi une question de fierté, de rapport de soi à soi, d’esthétique, si l’on veut, en un mot de constitution du sujet humain." (Paul Veyne, La société romaine)
"Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres". La Boétie
"Confondre la culture et son appropriation inégalitaire du fait des conditions sociales : quelle erreur !" H. Pena-Ruiz
"Il vaut mieux qu'un élève sache tenir un balai plutôt qu'il ait été initié à la philosophie: c'est ça le socle commun" un IPR
- AlbiusNiveau 10
Je n'ai pas relu tout le fil, pardon si cela a été déjà évoqué, mais cela pose à mon envie un autre (?)problème: l'étude littéraire d'un texte traduit en général. Je n'en puis plus de ces manuels où, à la fin de chaque extrait, figure "traduit de..." -Cripure a écrit: A quoi sert d'étudier les épithètes homérqiues en français ? Quand Ulysse se prénomme à Polyphème "Outis", qui signifie "pas quelqu'un", et qu'en français on l'appelle "Personne", ce qui signifie "quelqu'un" ; quand on ne fait pas le rapprochement phonétique "outis" / "mètis" (de "polymètis"), à quoi cela sert-il ? Qu'est-ce que ça veut dire, "Polyphème" ? C'est quoi, un "peuple sans pain" ? Qu'est-ce que c'est, un héros grec, dans une oeuvre qui fait ressurgir LE héros de la Guerre de Troie qui préférerait être esclave d'un paysan fauché plutôt que héros mort ?
Vous croyez que la séquence permet d'entrer dans un texte ? La séquence est un machin qui vise à survoler les textes, au nom du mépris sacré qu'on doit avoir pour les enfants qui constituent l'enseignement de masse.
La séquence est dans l'enseignement ce qui produit la bouse.
Qu'il faille ouvrir le champ de la culture, certes!
Mais enfin, il me semble qu'aborder une oeuvre en traduction, c'est un peu comme étudier un tableau à partir d'une reproduction en noir et blanc. Je sais bien que nous sommes obligés d'en passer par là pour les textes anciens en 6e, mais parfois trop c'est trop ! Je crois que dans le manuel que nous utilisions, le pourcentage d'extraits rédigés directement en français ne devait pas dépasser 20% !
D'accord, il y a de très "bonnes" traductions -mais enfin, toujours, Traduttore, traditore, tout de même !-. Et pour ce qui concerne l'Antiquité, c'est parfois le français désuet estampillé université années 20 qui pose les pires problèmes de compréhension aux élèves. Un inspecteur à qui je le faisais remarquer, partageant le constat, m'invita sérieusement à traduire les passages moi-même ! .
Donc, mis à part les incontournables, surtout en 6e du fait du programme, je fais tout ce que je peux pour proposer des textes issus du domaine francophone.
- barègesÉrudit
Abraxas a écrit:Cripure, cette histoire de "là-bas" à propos de Baudelaire, c'est juste que l'Invitation au voyage est pompée sur une lettre de Descartes qui lui, clairement, parle de la Hollande.
Mais quand j'ai lu les Fleurs du mal pour la première fois, je l'ignorais. Et ma foi, mon "là-bas" de cette époque était juste "l'ailleurs" rimbaldien. Chacun a les Abyssinies qu'il mérite (c'est ce que j'appelle le syndrome de Borgès, qui proposait de lancer une étude sur l'influence de Kafka sur les Romantiques : nous ne pouvons plus lire Baudelaire sans penser à Rimbaud — ou à Breton, ou à Char). Les anachronismes peuvent être porteurs de pistes, n'est-ce pas…
Si je l'expliquais à des élèves, j'évoquerais Descartes, comme matrice textuelle, mais pas comme matrice de sens. J'imagine que nous en faisons tous de même.
C'est un peu ce que décrit Pierre Bayard avec le plagiat par anticipation, il me semble qu'il se référait à Borgès... Et un livre à relire, un !
- V.MarchaisEmpereur
Oui, enfin, L'Odyssée en vo, moi-même, j'aurais du mal (doux euphémisme étant donné qu'en matière de grec, je ne connais même pas tout l'alphabet :lol: ). Ce serait pourtant dommage de se priver de cette référence. Mesure et circonspection, une fois encore...
- IphigénieProphète
Presse-purée a écrit:Malicou a écrit:clairlaure a écrit:Mon problème après lecture de ce genre de post, c'est que je me sens souvent nulle, idiote et pas à la hauteur de l'enseignement. Et pourtant je bosse, je bosse, je bosse...
Il me semble que justement si tu es sur le forum, si tu sais que tu peux t'améliorer (parce que personne n'est parfait; même s'il ne faut pas non plus croire qu'on est "nulle, idiote, pas à la hauteur") alors tu es un bon professeur!
+1
Il ne faut pas ressentir ce fil comme une humiliation mais comme une source de réflexion sur ta pratique et ta vision du métier.
Nous avons tous beaucoup à apprendre les uns des autres: c'est justement ce qu'on ne fait pas assez en salle des profs pour beaucoup de raison (y compris le besoin de se détendre) mais c'est dommage: c'est même tout l'intérêt et la richesse du forum, non? Y compris de rencontrer des gens qui ne pensent pas comme nous, d'ailleurs, c'est un exercice salutaire...
- arcencielGrand Maître
+1iphigénie a écrit:Presse-purée a écrit:Malicou a écrit:
Il me semble que justement si tu es sur le forum, si tu sais que tu peux t'améliorer (parce que personne n'est parfait; même s'il ne faut pas non plus croire qu'on est "nulle, idiote, pas à la hauteur") alors tu es un bon professeur!
Il ne faut pas ressentir ce fil comme une humiliation mais comme une source de réflexion sur ta pratique et ta vision du métier.
Nous avons tous beaucoup à apprendre les uns des autres: c'est justement ce qu'on ne fait pas assez en salle des profs pour beaucoup de raison (y compris le besoin de se détendre) mais c'est dommage: c'est même tout l'intérêt et la richesse du forum, non? Y compris de rencontrer des gens qui ne pensent pas comme nous, d'ailleurs, c'est un exercice salutaire...
- SphinxProphète
Cripure a écrit:V.Marchais a écrit:Cripure, vous qui êtes bien plus spécialiste d'Homère que moi, qu'en dites-vous ?Houla ! :PNon, non, non, je ne suis spécialiste de rien, je suis prof du secondaire ! :PJ'espère au contraire apprendre de Sphinx comme nous apprenons des autres docteurs de ce site ! Mais vous vous doutez bien, Véronique, Sphinx, Abraxas, que je ne puis que souscrire à ce que vous présentez, puisque vous montrez ici même ce qu'est travailler sur un texte : mettre en évidence ce que présente le texte, et non partir d'une réalité préexistante au texte pour montrer comment ce dernier est bien conforme à la réalité....Sphinx a écrit:Ceci sans vouloir répondre à la place de monsieur Cripure dont j'attends l'intervention avec intérêt
- Spoiler:
mais je fais ma thèse sur Homère alors j'ai voulu mettre mon grain de sel
Bon, Sphinx, à vrai dire, je suis toujours un peu chagriné qu'on veuille absolument situer les voyages d'Ulysse. Pour moi, passé le cap Soumion, il est dans un univers dessiné par le poème et rien n'est plus vain que la pénible démarche de Bérard, à mon avis. C'est comme ceux qui veulent absolument que quand Baudelaire écrit "là-bas", il faille comprendre "la Hollande"
A vrai dire, je ne faisais pas référence au travail de Bérard, que je trouve intéressant mais pas plus révélateur que cela quand il s'agit d'étudier le texte proprement dit. Mais comme la question de départ portait sur les interprétations de la figure d'Ulysse, je voulais parler de la réaction des peuples dans l'Antiquité, qui avaient déjà la même démarche : les Romains, à l'unanimité, plaçaient Circé au monte Circeo à côté de Sperlonga. Je trouve cet aspect particulièrement intéressant, puisqu'il montre que les barbares mêmes qui étaient censés avoir été pacifiés par la visite du héros civilisateur, au bout de quelques siècles, applaudissaient des deux mains à cette idée ;)Vrai aussi pour Diomède dans le sud de l'Italie, au point de lui développer des légendes que les Grecs considéraient comme tout à fait mineures, vrai pour Anténor à Padoue, etc... Je dois préciser, je ne travaille pas sur le texte d'Homère proprement dit mais sur sa réception.
- AmaliahEmpereur
Reine Margot a écrit:n'empêche que je reste toujours sur mon problème de double progression (même si je n'enseigne plus ça m'a toujours agacée de ne pas trouver de solution).
Si on fait de la lecture-écriture d'un côté et de la grammaire-orthographe de l'autre, il y a bien un moment où ça se rejoint (ne serait-ce quand on montre comment les outils de la langue produisent tel effet). On va faire un peu de stylistique dans les cours de lecture (utiliser la grammaire pour montrer comment le texte construit telle impression), et de l'application de la grammaire dans les textes (montrer par exemple l'utilisation de tel temps, pour cela il faut un texte).
Donc on finit par tout croiser, alors finalement pourquoi faire 2 progressions séparées qui vont sans cesse se chevaucher et se rejoindre au bout du compte au lieu de n'en faire qu'une?
j'avais essayé de monter des progressions annuelles mais devant un tel schmilblick j'étais revenue à une seule progression, donc une suite de séquences.
Parfois les faits de langue servent à éclairer le texte, mais les élèves ne sont pas vierges de toute notion grammaticale, donc ils peuvent aussi convoquer une notion sans que tu ne l'aies revue en détails avec eux.
J'ai une progression grammaticale bien séparée : chaque année je sais que j'aborderai un certain nombre de notions dans un ordre prédéfini et immuable. Et il y a certaines notions que je déplace selon le thème de ma séquence. Par exemple les valeurs du présent en 6e que je vois forcément en même temps que les fables ou le passé simple que je ne fais pas pendant la poésie ou le théâtre. Je réfléchis donc à l'ordre de mes séquences, puis je déplace certaines notions grammaticales pour que ce soit le plus rigoureux possible.
- CathEnchanteur
Du coup je pense à David Lodge (dans Un tout petit Monde, je crois) et au personnage qui, de guerre lasse et un peu soûl, déclare travailler sur l'influence de T.S Eliot sur Shakespeare, ce qui lui vaut un regain d'intérêt de la part des personnes présentes..
- User5899Demi-dieu
Nan !iphigénie a écrit:BOn , vous me chagrinez là:Cripure a écrit:
Mouais. Bon, on ne sera pas d'accord sur ce point. De toutes façons, ce poème sur le "vivre ensemble", hein, bon !
et si je vous propose une comparaison entre poème en prose (qui va dans le sens de la précision, où la Hollande devient" la Chine du Nord" d'où son côté oriental) et le poème en vers qui lui va au contraire dans le sens de l'imprécision et du vague volontaire et le climat du rêve, est ce que vous acceptez le point de départ hollandais comme porteur de sens, ou éclairant pour amener le "paysage intérieur"?
- User5899Demi-dieu
Ah, les réceptions d'Ulysse ! Quand il arriva sur l'Olympe, il trouva des Ferrero partout et ce fut cool !Sphinx a écrit:Cripure a écrit:V.Marchais a écrit:Cripure, vous qui êtes bien plus spécialiste d'Homère que moi, qu'en dites-vous ?Houla ! :PNon, non, non, je ne suis spécialiste de rien, je suis prof du secondaire ! :PJ'espère au contraire apprendre de Sphinx comme nous apprenons des autres docteurs de ce site ! Mais vous vous doutez bien, Véronique, Sphinx, Abraxas, que je ne puis que souscrire à ce que vous présentez, puisque vous montrez ici même ce qu'est travailler sur un texte : mettre en évidence ce que présente le texte, et non partir d'une réalité préexistante au texte pour montrer comment ce dernier est bien conforme à la réalité....Sphinx a écrit:Ceci sans vouloir répondre à la place de monsieur Cripure dont j'attends l'intervention avec intérêt
- Spoiler:
mais je fais ma thèse sur Homère alors j'ai voulu mettre mon grain de sel
Bon, Sphinx, à vrai dire, je suis toujours un peu chagriné qu'on veuille absolument situer les voyages d'Ulysse. Pour moi, passé le cap Soumion, il est dans un univers dessiné par le poème et rien n'est plus vain que la pénible démarche de Bérard, à mon avis. C'est comme ceux qui veulent absolument que quand Baudelaire écrit "là-bas", il faille comprendre "la Hollande"
A vrai dire, je ne faisais pas référence au travail de Bérard, que je trouve intéressant mais pas plus révélateur que cela quand il s'agit d'étudier le texte proprement dit. Mais comme la question de départ portait sur les interprétations de la figure d'Ulysse, je voulais parler de la réaction des peuples dans l'Antiquité, qui avaient déjà la même démarche : les Romains, à l'unanimité, plaçaient Circé au monte Circeo à côté de Sperlonga. Je trouve cet aspect particulièrement intéressant, puisqu'il montre que les barbares mêmes qui étaient censés avoir été pacifiés par la visite du héros civilisateur, au bout de quelques siècles, applaudissaient des deux mains à cette idée ;)Vrai aussi pour Diomède dans le sud de l'Italie, au point de lui développer des légendes que les Grecs considéraient comme tout à fait mineures, vrai pour Anténor à Padoue, etc... Je dois préciser, je ne travaille pas sur le texte d'Homère proprement dit mais sur sa réception.
- User5899Demi-dieu
cath5660 a écrit:Du coup je pense à David Lodge (dans Un tout petit Monde, je crois) et au personnage qui, de guerre lasse et un peu soûl, déclare travailler sur l'influence de T.S Eliot sur Shakespeare, ce qui lui vaut un regain d'intérêt de la part des personnes présentes..
Rappelons-nous, bien sûr, également le célèbre Pierre MénardV.Marchais a écrit::lol!:
Le fameux roman La Maison des feuilles développe pas mal la question des échos littéraires, également.
- LMVénérable
Amaliah a écrit:Reine Margot a écrit:n'empêche que je reste toujours sur mon problème de double progression (même si je n'enseigne plus ça m'a toujours agacée de ne pas trouver de solution).
Si on fait de la lecture-écriture d'un côté et de la grammaire-orthographe de l'autre, il y a bien un moment où ça se rejoint (ne serait-ce quand on montre comment les outils de la langue produisent tel effet). On va faire un peu de stylistique dans les cours de lecture (utiliser la grammaire pour montrer comment le texte construit telle impression), et de l'application de la grammaire dans les textes (montrer par exemple l'utilisation de tel temps, pour cela il faut un texte).
Donc on finit par tout croiser, alors finalement pourquoi faire 2 progressions séparées qui vont sans cesse se chevaucher et se rejoindre au bout du compte au lieu de n'en faire qu'une?
j'avais essayé de monter des progressions annuelles mais devant un tel schmilblick j'étais revenue à une seule progression, donc une suite de séquences.
Parfois les faits de langue servent à éclairer le texte, mais les élèves ne sont pas vierges de toute notion grammaticale, donc ils peuvent aussi convoquer une notion sans que tu ne l'aies revue en détails avec eux.
J'ai une progression grammaticale bien séparée : chaque année je sais que j'aborderai un certain nombre de notions dans un ordre prédéfini et immuable. Et il y a certaines notions que je déplace selon le thème de ma séquence. Par exemple les valeurs du présent en 6e que je vois forcément en même temps que les fables ou le passé simple que je ne fais pas pendant la poésie ou le théâtre. Je réfléchis donc à l'ordre de mes séquences, puis je déplace certaines notions grammaticales pour que ce soit le plus rigoureux possible.
Je fais la même chose.
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