- oli54Niveau 5
Commençons par le commencement
Et si, dans tout ce qu'a pu proférer Peillon, cette phrase n'était pas la plus juste ?
Même si elle est manichéenne, sachant que dans un système éducatif moderne, tout est intriqué et dès lors que l'on touche à un maillon, c'est toute la chaîne qui risque de sauter...
Nous verrons dans ce sujet que la refondation de l'école doit d'abord viser à résoudre le problème de la réussite aux apprentissages : la journée n'étant pas forcément sur le papier trop longue en classe et les élèves passant peut-être suffisamment de jours par semaine à l'école.
Mais si l'on veut véritablement résoudre un problème, il faut s'attaquer aux véritables causes du problème. Et je crois que cette mauvaise « réussite » est une des conséquences du mal être à l'école.
Au lieu de ne regarder que les conséquences (le sentiment de journée longue, une baisse du niveau), le ministre aurait mieux fait de s'attaquer au vrai problème : le mal être à l'école, des élèves et des enseignants. Plutôt que d'imposer une "réforme du temps" (c'est ce que retiennent principalement les gens), Peillon aurait dû lancer une grande réforme du bien être des enfants et des adultes à l'école (personnel et parents) à l'intérieur de laquelle le temps aurait pu être une variable, de même que le nombre, ou encore l'espace.
Le thème du bien être est infiniment plus fédérateur, innovant, stimulant, parlant que le sous-thème du temps. Avec le temps en idéal, on reste dans une petite logique comptable, tandis qu'avec le bien être en idéal, on est dans une logique existentielle de plus grande envergure.
1) Quels sont les problèmes ?
Hiérarchisons les problèmes et tentons de trouver des solutions à ces problèmes
Le ministre a identifié 4 problèmes :
a) des résultats aux tests des élèves insatisfaisants ?
b) des journées trop longues ?
c) un manque de journées travaillées par semaine ?
d) déséquilibre dans les périodes de vacances ?
Ce qui a été évoqué aussi : le mal être à l'école : la souffrance des élèves à l'école, le manque de confiance en soi des élèves, le malaise des profs.
Est-ce que ces 4 problèmes sont réellement intriqués l'un dans l'autre, au point de ne pouvoir résoudre l'un sans résoudre l'autre. Je ne le pense pas : b) c) et d) peuvent être intriqués (car le dénominateur commun c'est le temps), mais a) peut être traité à part.
Une fois choisi un problème principal, il est toujours possible d'envisager des solutions limitées :
- si les élèves ont du mal pour apprendre, mettons les dans des conditions d'apprentissage optimal
- si la journée est trop longue, il est toujours possible de la raccourcir sans rajouter de demie journée.
- si les élèves ne passent pas assez de jours en classe, il est toujours possible sur le papier de rajouter une voire plusieurs demies journée sans toucher aux horaires des autre jours
- si les vacances sont mal réparties,il est toujours possible de mieux les répartir.
Mais une réforme qui conduirait à tout vouloir résoudre en touchant à tout, sans rien résoudre est risquée.
Il conviendrait dans un premier temps de vérifier les dires du ministre. Tout le monde sait maintenant qu'un ministre peut se tromper, voire mentir délibérément...
2) Des journées trop longues ?
Précisons le problème :
a) des journées trop longues en collectivité ?
b) ou parce que le temps consacré à des travaux scolaires est trop long ?
Il faudrait d'abord être sûr de ce que les chronobiologistes entendent par « journées trop longues ».
Pour résoudre a), la réponse apportée par le ministre n'est pas adaptée.
Pour que la journée en collectivité soit réellement moins longue, la seule solution, c'est de modifier les horaires de travail d'au moins un parent qui pourrait récupérer son enfant pour le faire sortir de l'encadrement collectif et pour qu'il puisse bénéficier d'un temps familial plus long.
Cette solution est malheureusement difficilement applicable.
Si c'est le problème b) qu'il faut résoudre, alors les programmes devraient imposer un temps maximal de temps consacré aux travaux dits « scolaires » ou mieux encore, laisser à chaque enseignant la mesure de ce temps en fonction de sa classe.
En Maternelle, je ne suis pas certain qu'une journée 3h le matin et 3 h l'après midi soit cause de problèmes particuliers. Le sentiment que la journée est longue n'a peut-être pas pour cause la durée de la journée. Ce sentiment de longueur peut venir de la fatigue accumulée par trop d'excitation ou trop de travail demandé. Ce sentiment de longueur pour certains élèves ou pour certains profs peut être ainsi une conséquence d'un véritable problème sous-jacent (trop d'effectifs ? / trop de « travail »...).
Travaillant en Maternelle, avec ma classe actuelle (29 élèves en moyenne et grande section de maternelle), les journées ne semblent pas trop longues aux enfants (pas de pleurs, une attention correcte jusqu'à la fin de la journée, pas de demande répétée « c'est bientôt l'heure des mamans ? ») ni aux adultes. J'avais le même sentiment les années précédentes.
Je ne me suis jamais dit : « la journée est vraiment trop longue, c'est trop long pour les enfants, mais pourquoi ces abrutis nous obligent-ils à venir travailler aussi longtemps par jour ? »
En revanche, je me suis souvent dit : « Mais pourquoi mettent-ils autant d'enfants ensemble ? est-ce une nouvelle forme de torture que l'on expérimente sur des profs ou des enfants ? » « La salle de classe est trop petite, inadaptée » « Il n'y a pas de préau, pas de jardin dans cette école ! » ou encore « Mais qu'a subi cet enfant auparavant ou actuellement pour être ainsi ? ».
Je dirai même le contraire : la journée passe hyper vite (c'est d'ailleurs ce qui est agréable dans ce métier). On ne voit pas le temps passer. J'ai travaillé comme serveur en restaurant, ouvrier en usine, en bureau derrière un ordinateur et là je pouvais dire que la journée était longue. Quant aux élèves, à 11 h ou à 16 h lorsque vient le moment du regroupement, le temps passe trop vite et je ne sais pas si depuis le début de l'année j'ai eu un seul « c'est bientôt l'heure des mamans ?».
Je pense que c'est même une erreur de modifier la longueur de la journée en maternelle.
Pourquoi ? 2 h l'après midi pourrait ainsi être trop court.
3 h le matin et 3 h l'après midi permettent ainsi :
- d'avoir plus ou moins un copié-collé matin / après midi avec des différences d'activités dans les tranches horaires
- de permettre aux petits de dormir et d'aller ensuite travailler
- de permettre aux plus grands de se reposer pendant un temps plus ou moins long (j'impose dans ma classe un demie heure de repos où l'on peut écouter de la musique, des contes...) ce qui est nécessaire après l'excitation de la cantine.
Pour l'élémentaire, je ne sais pas et je voudrais bien l'avis des profs concernés.
3) Un manque de journées travaillées par semaine ?
Quant au problème c), on est là dans un problème général d'éducation nationale :
combien de jours par semaine, un enfant doit-il être retiré à ses parents ?
combien de jours doit-il passer à l'école ?...
Rappelons d'emblée qu'une coupure de l'école au milieu de la semaine a été jugé vitale, nécessaire par nos aïeux et ce depuis 1858 (voire bien avant... cela remonterait à l'Ancien Régime...)
Pourquoi cette coupure a-t-elle été jugée nécessaire ?
- pour faire autre chose que du travail scolaire (catéchisme à l'époque) dans un autre cadre, voire ne rien faire du tout... Rappelons aussi qu'il y a des enfants qui n'aiment pas l'école... le mercredi leur permet de souffler un peu et de supporter le déplaisir d'aller à l'école les 4 autres jours (c'est déjà pas mal pour les enfants de 3 à 5 ans)... 4 jours en collectivité scolaire c'est suffisant en maternelle
- pour permettre aux enfants de se reposer, de se ressourcer pour être en meilleure condition pour la seconde partie de la semaine (meilleure attention observée le jeudi)
- pour permettre aux enseignants de se reposer et de préparer le restant de la semaine.
Si cette coupure a été jugée nécessaire depuis plus de 150 ans, pourquoi penser aujourd'hui qu'elle serait moins nécessaire aux uns et aux autres ?
L'école serait-elle moins stressante aujourd'hui pour les adultes et les enfants qu'auparavant ?
Préparer le restant de la semaine demanderait moins de temps qu'avant ?
Les enfants auraient moins besoin d'attention et de disponibilité ?
Certains systèmes prônent le retrait total de l'enfant à sa famille dès un certain âge (certains utopistes, certaines formes de totalitarisme ou comment s'occuper en "totalité" de l'individu...)
A l'inverse, certains prônent le retrait total de l'enfant de l'école (certains parents s'occupent eux-même de l'éducation scolaire de leur enfant).
Jusqu'en 1969, l'enfant pouvait passer 5 jours complets à l'école (lundi, mardi, mercredi, vendredi, samedi). Petit à petit, le samedi après-midi (1969) et le samedi matin (Sarko) ont été supprimé.
Est-ce aux profs, voire au ministre de l'Education Nationale de décider dunombre de jours qu'un enfant doit être retiré à ses parents ? C'est une question nationale.
Il me semble à priori que les français souhaiteraient majoritairement que leurs enfants soient pris en charge par la collectivité toute la semaine travaillée, pour leur plus grande tranquillité (malheureusement pour ceux qui travaillent). Mais peut-il y avoir un autre choix que l'école ? Oui, si l'on met en place un accueil collectif non scolaire.
On peut imaginer que dans toutes les communes de France des classes aérées (ou couvertes) soient systématiquement mises en place par les collectivités pour que les enfants vivent autre chose que l'école, un jour par semaine.
L'inconvénient c'est le coût, les problèmes d'organisation et les inégalités territoriales (la réforme actuelle en est un avant goût).
On peut aussi imaginer que les élèves passent une journée de plus à l'école élémentaire (une partie ou tout le mercredi), à condition de rémunérer les enseignants pour leurs efforts supplémentaires et pour leur flexibilité (je rappelle que cela ne me semble pas souhaitable). On peut imaginer aussi que certains élèves viennent le mercredi matin, par exemple pour du soutien (dur dur...).
Que faire des différences élémentaire/maternelle ? On peut imaginer 2 concours différents ou si l'on reste dans un concours unique, demander aux profs de maternelle d'aller épauler le mercredi matin leur collègue d'élémentaire.
Personnellement, je préfèrerais que l'on propose autre chose qu'un jour supplémentaire d'école pour les enfants de maternelle. Pour l'épanouissement des enfants, il serait bien de les faire sortir du cadre de la classe et de leur enseignant pour qu'il rencontre d'autres lieux, d'autres adultes, pour faire le mercredi d'autres choses dans un contexte radicalement différent. Je suis totalement opposé en tant que prof à la main mise totale par l'école sur l'individu qu'est l'enfant. Le cadre imposé par l'école aux enfants est dur à vivre. Ce cadre ne doit pas s'imposer un jour supplémentaire par semaine. Les enfants doivent pouvoir vivre dans d'autres conditions. Actuellement l'enfant passe son temps entre l'école, la famille, la garderie, la nounou et quelques activités. Il me semble que le temps passé à l'école est déjà suffisant (en tout cas pour la maternelle, j'attends des opinions des profs d'élémentaire). Le toujours plus est parfois l'ennemi du mieux. Le piège scolaire, c'est aussi le piège de croire que l'enfant doit passer un maximum de temps à l'école.
Pour conclure cette analyse, posons que le problème principal actuel n'est pas la longueur des journées, ni le manque de journées passées à l'école. Ce ne sont pas forcément des problèmes et si cela était vraiment le problème, on se rend compte que résoudre cela ne relève pas que de l'Ecole mais du système global de la société (travail, famille, collectivités).
On risque de s'attaquer ici aux conséquences du véritable problème et non à ses causes : la journée semble peut-être longue aux individus parce qu'elle est psychologiquement fatigante. Si on a l'impression qu'il manque des journées pour parvenir à tout enseigner, alors peut-être faut-il d'abord revoir ce "tout" : que doit-on enseigner ? et peut-être faut-il aussi revoir les modalités d'enseignement.
D'autre part, la coupure du mercredi est bénéfique car les enfants vivent en milieu de semaine autre chose que l'école et sont motivés pour le restant de la semaine.
Le problème principal que le ministre peut et doit tenter de diminuer, c'est l'éventuelle baisse de niveau, les difficultés d'apprentissage, les résultats insatisfaisants aux tests internationaux ou nationaux. En un mot, si cela est vrai, il faut améliorer les apprentissages des élèves et par conséquent les conditions d'apprentissage...
Modifier le temps scolaire n'est pas un problème simple à traiter à la légère sans discussion nationale, sans en tester les conséquences. Pour l'instant le système proposé par le ministre n'a jamais véritablement été mis en place, ni évalué.
Il me semble que la meilleure des démarches pour trouver la solution aux problèmes rencontrés par l'Education nationale, c'est de procéder par expérimentations : faire des tests sur plusieurs années en mesurant au début et à la fin pour voir si il y a une évolution positive et dans quelle mesure.
Exemple d'expérimentation avec protocoles, analystes, chercheurs... :
- tester dans une ville une diminution des effectifs à 15 élèves par classe 4 jours par semaine
- dans une autre 20 élèves par classe 4 jours par semaine
- dans une autre 25 élèves par classe 4 jours par semaine
- dans une autre 15 élèves par classe 5 jours par semaine
- dans une autre 20 élèves par classe 5 jours par semaine
- dans une autre 25 élèves par classe 5 jours par semaine
Et ensuite il conviendra de comparer et d'analyser quel a été le bénéfice dans une ville A de ce système, dans une ville B d'un autre système, sans forcément comparer les résultats de A et B, mais plutôt de A et A' (A' étant les premier résultat de A).
Je ne suis pas expert en protocole expérimental, mais pourquoi une telle démarche n'est pas bien mise en oeuvre ?
Peut-être que l'on se rendra comte que 15 élèves c'est imparfait, que l'idéal c'est 20 élèves par classe ? le nombre a peut être d'importance... ou une importance capitale.
On se rendra peut-être comte que 5 jours c'est mieux (ou pire) que 4 jours... pour les élèves, insupportable à partir de X élèves pour le professeurs...
Pourquoi procéder de manière dogmatique, pourquoi continuer à vivre dans un monde de croyances, d'idéologies ? Généraliser sans expérimenter ? sans évaluer les conséquences ? pourquoi ne pas prendre le temps d'une véritable analyse ?
Tout ce qu'on a eu c'est des « on dit que ». Des communes sont déjà à 5 jours. D'accord, mais elles n'ont pour l'instant jamais appliqué ce qui est effectivement proposé par le ministre. Quelle est l'évolution de leur taux de réussites aux évaluations nationales ? Le passage de 4 jours à 5 jours a-t-il prouvé que les élèves de cette école avaient une meilleure réussite par rapport à ce que cette commune obtenait auparavant ? Fixer un nombre maximal d'élèves par classe ne serait-il pas plus efficace ? Le passage de 4 jours à 5 jours avec des effectifs importants (30 élèves par classe) sera-t-il bénéfique ? Qu'est-ce qui a été observé pour les maternelles ? Est-ce nécessaire pour les maternelles ? N'est-ce pas inutile, voire contre-productif ? Quel est le degré de satisfaction des élèves ? des parents, des enseignants dans telle ou telle situation ? Est-ce que 2 heures l'après-midi ce n'est pas trop court ? Dans le cas d'un passage à 5 jours, y-a-t-il augmentation du nombre de journées maladie des enseignants ? Dans le cas d'une diminution des effectifs, y-a-t-il diminution du nombre de journées maladie des enseignants ? Qu'en est-il des arrêts maladie en fonction des effectifs ?
Je crois qu'avant de s'embarquer dans une réforme aussi importante, il convient d'en mesurer les effets et de répondre à ces questions.
Mais peut-être qu'il y a d'autres problèmes primordiaux à résoudre pour améliorer l'école et qu'ils n'ont pas été évoqués ici.
Je vous invite donc à compléter cette liste. Merci
Et si, dans tout ce qu'a pu proférer Peillon, cette phrase n'était pas la plus juste ?
Même si elle est manichéenne, sachant que dans un système éducatif moderne, tout est intriqué et dès lors que l'on touche à un maillon, c'est toute la chaîne qui risque de sauter...
Nous verrons dans ce sujet que la refondation de l'école doit d'abord viser à résoudre le problème de la réussite aux apprentissages : la journée n'étant pas forcément sur le papier trop longue en classe et les élèves passant peut-être suffisamment de jours par semaine à l'école.
Mais si l'on veut véritablement résoudre un problème, il faut s'attaquer aux véritables causes du problème. Et je crois que cette mauvaise « réussite » est une des conséquences du mal être à l'école.
Au lieu de ne regarder que les conséquences (le sentiment de journée longue, une baisse du niveau), le ministre aurait mieux fait de s'attaquer au vrai problème : le mal être à l'école, des élèves et des enseignants. Plutôt que d'imposer une "réforme du temps" (c'est ce que retiennent principalement les gens), Peillon aurait dû lancer une grande réforme du bien être des enfants et des adultes à l'école (personnel et parents) à l'intérieur de laquelle le temps aurait pu être une variable, de même que le nombre, ou encore l'espace.
Le thème du bien être est infiniment plus fédérateur, innovant, stimulant, parlant que le sous-thème du temps. Avec le temps en idéal, on reste dans une petite logique comptable, tandis qu'avec le bien être en idéal, on est dans une logique existentielle de plus grande envergure.
1) Quels sont les problèmes ?
Hiérarchisons les problèmes et tentons de trouver des solutions à ces problèmes
Le ministre a identifié 4 problèmes :
a) des résultats aux tests des élèves insatisfaisants ?
b) des journées trop longues ?
c) un manque de journées travaillées par semaine ?
d) déséquilibre dans les périodes de vacances ?
Ce qui a été évoqué aussi : le mal être à l'école : la souffrance des élèves à l'école, le manque de confiance en soi des élèves, le malaise des profs.
Est-ce que ces 4 problèmes sont réellement intriqués l'un dans l'autre, au point de ne pouvoir résoudre l'un sans résoudre l'autre. Je ne le pense pas : b) c) et d) peuvent être intriqués (car le dénominateur commun c'est le temps), mais a) peut être traité à part.
Une fois choisi un problème principal, il est toujours possible d'envisager des solutions limitées :
- si les élèves ont du mal pour apprendre, mettons les dans des conditions d'apprentissage optimal
- si la journée est trop longue, il est toujours possible de la raccourcir sans rajouter de demie journée.
- si les élèves ne passent pas assez de jours en classe, il est toujours possible sur le papier de rajouter une voire plusieurs demies journée sans toucher aux horaires des autre jours
- si les vacances sont mal réparties,il est toujours possible de mieux les répartir.
Mais une réforme qui conduirait à tout vouloir résoudre en touchant à tout, sans rien résoudre est risquée.
Il conviendrait dans un premier temps de vérifier les dires du ministre. Tout le monde sait maintenant qu'un ministre peut se tromper, voire mentir délibérément...
2) Des journées trop longues ?
Précisons le problème :
a) des journées trop longues en collectivité ?
b) ou parce que le temps consacré à des travaux scolaires est trop long ?
Il faudrait d'abord être sûr de ce que les chronobiologistes entendent par « journées trop longues ».
Pour résoudre a), la réponse apportée par le ministre n'est pas adaptée.
Pour que la journée en collectivité soit réellement moins longue, la seule solution, c'est de modifier les horaires de travail d'au moins un parent qui pourrait récupérer son enfant pour le faire sortir de l'encadrement collectif et pour qu'il puisse bénéficier d'un temps familial plus long.
Cette solution est malheureusement difficilement applicable.
Si c'est le problème b) qu'il faut résoudre, alors les programmes devraient imposer un temps maximal de temps consacré aux travaux dits « scolaires » ou mieux encore, laisser à chaque enseignant la mesure de ce temps en fonction de sa classe.
En Maternelle, je ne suis pas certain qu'une journée 3h le matin et 3 h l'après midi soit cause de problèmes particuliers. Le sentiment que la journée est longue n'a peut-être pas pour cause la durée de la journée. Ce sentiment de longueur peut venir de la fatigue accumulée par trop d'excitation ou trop de travail demandé. Ce sentiment de longueur pour certains élèves ou pour certains profs peut être ainsi une conséquence d'un véritable problème sous-jacent (trop d'effectifs ? / trop de « travail »...).
Travaillant en Maternelle, avec ma classe actuelle (29 élèves en moyenne et grande section de maternelle), les journées ne semblent pas trop longues aux enfants (pas de pleurs, une attention correcte jusqu'à la fin de la journée, pas de demande répétée « c'est bientôt l'heure des mamans ? ») ni aux adultes. J'avais le même sentiment les années précédentes.
Je ne me suis jamais dit : « la journée est vraiment trop longue, c'est trop long pour les enfants, mais pourquoi ces abrutis nous obligent-ils à venir travailler aussi longtemps par jour ? »
En revanche, je me suis souvent dit : « Mais pourquoi mettent-ils autant d'enfants ensemble ? est-ce une nouvelle forme de torture que l'on expérimente sur des profs ou des enfants ? » « La salle de classe est trop petite, inadaptée » « Il n'y a pas de préau, pas de jardin dans cette école ! » ou encore « Mais qu'a subi cet enfant auparavant ou actuellement pour être ainsi ? ».
Je dirai même le contraire : la journée passe hyper vite (c'est d'ailleurs ce qui est agréable dans ce métier). On ne voit pas le temps passer. J'ai travaillé comme serveur en restaurant, ouvrier en usine, en bureau derrière un ordinateur et là je pouvais dire que la journée était longue. Quant aux élèves, à 11 h ou à 16 h lorsque vient le moment du regroupement, le temps passe trop vite et je ne sais pas si depuis le début de l'année j'ai eu un seul « c'est bientôt l'heure des mamans ?».
Je pense que c'est même une erreur de modifier la longueur de la journée en maternelle.
Pourquoi ? 2 h l'après midi pourrait ainsi être trop court.
3 h le matin et 3 h l'après midi permettent ainsi :
- d'avoir plus ou moins un copié-collé matin / après midi avec des différences d'activités dans les tranches horaires
- de permettre aux petits de dormir et d'aller ensuite travailler
- de permettre aux plus grands de se reposer pendant un temps plus ou moins long (j'impose dans ma classe un demie heure de repos où l'on peut écouter de la musique, des contes...) ce qui est nécessaire après l'excitation de la cantine.
Pour l'élémentaire, je ne sais pas et je voudrais bien l'avis des profs concernés.
3) Un manque de journées travaillées par semaine ?
Quant au problème c), on est là dans un problème général d'éducation nationale :
combien de jours par semaine, un enfant doit-il être retiré à ses parents ?
combien de jours doit-il passer à l'école ?...
Rappelons d'emblée qu'une coupure de l'école au milieu de la semaine a été jugé vitale, nécessaire par nos aïeux et ce depuis 1858 (voire bien avant... cela remonterait à l'Ancien Régime...)
Pourquoi cette coupure a-t-elle été jugée nécessaire ?
- pour faire autre chose que du travail scolaire (catéchisme à l'époque) dans un autre cadre, voire ne rien faire du tout... Rappelons aussi qu'il y a des enfants qui n'aiment pas l'école... le mercredi leur permet de souffler un peu et de supporter le déplaisir d'aller à l'école les 4 autres jours (c'est déjà pas mal pour les enfants de 3 à 5 ans)... 4 jours en collectivité scolaire c'est suffisant en maternelle
- pour permettre aux enfants de se reposer, de se ressourcer pour être en meilleure condition pour la seconde partie de la semaine (meilleure attention observée le jeudi)
- pour permettre aux enseignants de se reposer et de préparer le restant de la semaine.
Si cette coupure a été jugée nécessaire depuis plus de 150 ans, pourquoi penser aujourd'hui qu'elle serait moins nécessaire aux uns et aux autres ?
L'école serait-elle moins stressante aujourd'hui pour les adultes et les enfants qu'auparavant ?
Préparer le restant de la semaine demanderait moins de temps qu'avant ?
Les enfants auraient moins besoin d'attention et de disponibilité ?
Certains systèmes prônent le retrait total de l'enfant à sa famille dès un certain âge (certains utopistes, certaines formes de totalitarisme ou comment s'occuper en "totalité" de l'individu...)
A l'inverse, certains prônent le retrait total de l'enfant de l'école (certains parents s'occupent eux-même de l'éducation scolaire de leur enfant).
Jusqu'en 1969, l'enfant pouvait passer 5 jours complets à l'école (lundi, mardi, mercredi, vendredi, samedi). Petit à petit, le samedi après-midi (1969) et le samedi matin (Sarko) ont été supprimé.
Est-ce aux profs, voire au ministre de l'Education Nationale de décider dunombre de jours qu'un enfant doit être retiré à ses parents ? C'est une question nationale.
Il me semble à priori que les français souhaiteraient majoritairement que leurs enfants soient pris en charge par la collectivité toute la semaine travaillée, pour leur plus grande tranquillité (malheureusement pour ceux qui travaillent). Mais peut-il y avoir un autre choix que l'école ? Oui, si l'on met en place un accueil collectif non scolaire.
On peut imaginer que dans toutes les communes de France des classes aérées (ou couvertes) soient systématiquement mises en place par les collectivités pour que les enfants vivent autre chose que l'école, un jour par semaine.
L'inconvénient c'est le coût, les problèmes d'organisation et les inégalités territoriales (la réforme actuelle en est un avant goût).
On peut aussi imaginer que les élèves passent une journée de plus à l'école élémentaire (une partie ou tout le mercredi), à condition de rémunérer les enseignants pour leurs efforts supplémentaires et pour leur flexibilité (je rappelle que cela ne me semble pas souhaitable). On peut imaginer aussi que certains élèves viennent le mercredi matin, par exemple pour du soutien (dur dur...).
Que faire des différences élémentaire/maternelle ? On peut imaginer 2 concours différents ou si l'on reste dans un concours unique, demander aux profs de maternelle d'aller épauler le mercredi matin leur collègue d'élémentaire.
Personnellement, je préfèrerais que l'on propose autre chose qu'un jour supplémentaire d'école pour les enfants de maternelle. Pour l'épanouissement des enfants, il serait bien de les faire sortir du cadre de la classe et de leur enseignant pour qu'il rencontre d'autres lieux, d'autres adultes, pour faire le mercredi d'autres choses dans un contexte radicalement différent. Je suis totalement opposé en tant que prof à la main mise totale par l'école sur l'individu qu'est l'enfant. Le cadre imposé par l'école aux enfants est dur à vivre. Ce cadre ne doit pas s'imposer un jour supplémentaire par semaine. Les enfants doivent pouvoir vivre dans d'autres conditions. Actuellement l'enfant passe son temps entre l'école, la famille, la garderie, la nounou et quelques activités. Il me semble que le temps passé à l'école est déjà suffisant (en tout cas pour la maternelle, j'attends des opinions des profs d'élémentaire). Le toujours plus est parfois l'ennemi du mieux. Le piège scolaire, c'est aussi le piège de croire que l'enfant doit passer un maximum de temps à l'école.
Pour conclure cette analyse, posons que le problème principal actuel n'est pas la longueur des journées, ni le manque de journées passées à l'école. Ce ne sont pas forcément des problèmes et si cela était vraiment le problème, on se rend compte que résoudre cela ne relève pas que de l'Ecole mais du système global de la société (travail, famille, collectivités).
On risque de s'attaquer ici aux conséquences du véritable problème et non à ses causes : la journée semble peut-être longue aux individus parce qu'elle est psychologiquement fatigante. Si on a l'impression qu'il manque des journées pour parvenir à tout enseigner, alors peut-être faut-il d'abord revoir ce "tout" : que doit-on enseigner ? et peut-être faut-il aussi revoir les modalités d'enseignement.
D'autre part, la coupure du mercredi est bénéfique car les enfants vivent en milieu de semaine autre chose que l'école et sont motivés pour le restant de la semaine.
Le problème principal que le ministre peut et doit tenter de diminuer, c'est l'éventuelle baisse de niveau, les difficultés d'apprentissage, les résultats insatisfaisants aux tests internationaux ou nationaux. En un mot, si cela est vrai, il faut améliorer les apprentissages des élèves et par conséquent les conditions d'apprentissage...
Modifier le temps scolaire n'est pas un problème simple à traiter à la légère sans discussion nationale, sans en tester les conséquences. Pour l'instant le système proposé par le ministre n'a jamais véritablement été mis en place, ni évalué.
Il me semble que la meilleure des démarches pour trouver la solution aux problèmes rencontrés par l'Education nationale, c'est de procéder par expérimentations : faire des tests sur plusieurs années en mesurant au début et à la fin pour voir si il y a une évolution positive et dans quelle mesure.
Exemple d'expérimentation avec protocoles, analystes, chercheurs... :
- tester dans une ville une diminution des effectifs à 15 élèves par classe 4 jours par semaine
- dans une autre 20 élèves par classe 4 jours par semaine
- dans une autre 25 élèves par classe 4 jours par semaine
- dans une autre 15 élèves par classe 5 jours par semaine
- dans une autre 20 élèves par classe 5 jours par semaine
- dans une autre 25 élèves par classe 5 jours par semaine
Et ensuite il conviendra de comparer et d'analyser quel a été le bénéfice dans une ville A de ce système, dans une ville B d'un autre système, sans forcément comparer les résultats de A et B, mais plutôt de A et A' (A' étant les premier résultat de A).
Je ne suis pas expert en protocole expérimental, mais pourquoi une telle démarche n'est pas bien mise en oeuvre ?
Peut-être que l'on se rendra comte que 15 élèves c'est imparfait, que l'idéal c'est 20 élèves par classe ? le nombre a peut être d'importance... ou une importance capitale.
On se rendra peut-être comte que 5 jours c'est mieux (ou pire) que 4 jours... pour les élèves, insupportable à partir de X élèves pour le professeurs...
Pourquoi procéder de manière dogmatique, pourquoi continuer à vivre dans un monde de croyances, d'idéologies ? Généraliser sans expérimenter ? sans évaluer les conséquences ? pourquoi ne pas prendre le temps d'une véritable analyse ?
Tout ce qu'on a eu c'est des « on dit que ». Des communes sont déjà à 5 jours. D'accord, mais elles n'ont pour l'instant jamais appliqué ce qui est effectivement proposé par le ministre. Quelle est l'évolution de leur taux de réussites aux évaluations nationales ? Le passage de 4 jours à 5 jours a-t-il prouvé que les élèves de cette école avaient une meilleure réussite par rapport à ce que cette commune obtenait auparavant ? Fixer un nombre maximal d'élèves par classe ne serait-il pas plus efficace ? Le passage de 4 jours à 5 jours avec des effectifs importants (30 élèves par classe) sera-t-il bénéfique ? Qu'est-ce qui a été observé pour les maternelles ? Est-ce nécessaire pour les maternelles ? N'est-ce pas inutile, voire contre-productif ? Quel est le degré de satisfaction des élèves ? des parents, des enseignants dans telle ou telle situation ? Est-ce que 2 heures l'après-midi ce n'est pas trop court ? Dans le cas d'un passage à 5 jours, y-a-t-il augmentation du nombre de journées maladie des enseignants ? Dans le cas d'une diminution des effectifs, y-a-t-il diminution du nombre de journées maladie des enseignants ? Qu'en est-il des arrêts maladie en fonction des effectifs ?
Je crois qu'avant de s'embarquer dans une réforme aussi importante, il convient d'en mesurer les effets et de répondre à ces questions.
Mais peut-être qu'il y a d'autres problèmes primordiaux à résoudre pour améliorer l'école et qu'ils n'ont pas été évoqués ici.
Je vous invite donc à compléter cette liste. Merci
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