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« Vous êtes le mal » (2) : de Brighelli à Luc Ferry, la diversité des styles anti-Meirieu Empty « Vous êtes le mal » (2) : de Brighelli à Luc Ferry, la diversité des styles anti-Meirieu

par Aevin 7th Avril 2012, 16:43
Le suite ...
L'annonce de la parution du livre se trouve ici. Il s'agit d'un extrait du livre (p. 191-194)

Janvier-février 2010. Les élections régionales de mars approchent. Quelques semaines plus tôt, j’ai suivi une journée de la campagne de Philippe Meirieu en Rhône-Alpes. Je publie dans Le Monde une page « portrait » intitulée « Classe verte ». Le texte n’omet pas, bien sûr, l’image de « destructeur des savoirs » assignée à Meirieu par certains polémistes, et cite parmi ces derniers Jean-Paul Brighelli, avec qui j’ai eu pour l’occasion une conversation téléphonique.

Il en reste une phrase, sans surprise mais sans dérapage particulier, sur le caractère « toujours habile à réorienter ses idées dans le sens du vent » prêté au candidat par Brighelli. Surprise : l’article paru, celui-ci, au lieu de se montrer content d’être cité, m’appelle, furieux, me traite d’irresponsable, m’accuse de le monter contre Meirieu à l’heure où les menaces qui pèsent sur l’école réclament de dépasser les clivages. Apparemment oublieux de ses années de polémiques au lance-flammes, il exige que je démente ses propos auprès de Meirieu… Je n’en ferai rien.

La clé de ces étrangetés finit par apparaître : Brighelli - qui, aujourd’hui, présente Meirieu comme « le mal » - est alors en train de lui courir après pour le convaincre de publier un livre en commun…

Je ne suis pas porte-parole de Philippe Meirieu, vis-à-vis de qui - tout le livre Un pédagogue dans la Cité en témoigne -, mon respect humain et intellectuel ne m’empêche pas de me comporter en journaliste. Mais, justement, je crois avoir contribué - sur sa personne, son parcours et sur le contexte des débats sur l’éducation, - à un nécessaire travail de fond. A mesure que l’actualité fera écho à certains aspects de ce livre, je continuerai à en publier ici des extraits. Il y a du stock…

Comme promis précédemment, voici donc un passage de Un pédagogue dans la Cité où j’interroge Meirieu sur ce surprenant épisode. Ce dernier répond sur Brighelli et enchaîne (suite à une relance de ma part) sur Luc Ferry. J’arrête l’extrait à cet endroit, mais il faut savoir que d’autres personnalités, plus loin dans le texte, en prennent copieusement pour leur grade, sans invectives mais avec fermeté. Comme dans un débat, quoi…

L.C.

Question. Nous n’en avons pas fini avec vos nombreux et parfois étonnants adversaires. Je pense à cette proposition qui vous a été faite, à l’automne 2010 (au début 2010 en fait, c’est une erreur non corrigée dans le livre, ndlr), par le pamphlétaire Jean-Paul Brighelli, grand pourfendeur de pédagogues devant l’éternel. Plusieurs années durant, au fil de ses livres, il vous présente comme le chef de file du «pédagogisme», courant qu’il définit ni plus ni moins comme un nouveau pétainisme. Et tout d’un coup, il vous propose de faire un livre en commun pour défendre l’école publique… Finalement, «l’anti- Meirieu» est-il juste un vêtement que l’on porte ou que l’on ôte à sa guise ?

Réponse. L’exemple que vous citez est très particulier, lié au personnage de Jean-Paul Brighelli… J’ai effectivement reçu avec perplexité sa proposition réitérée, insistante, de faire un ouvrage avec lui, qu’il me présentait avec la gourmandise de qui prépare un coup fumant. On a parfois le sentiment, avec cet homme-là, que la visibilité de son positionnement prime sur toutes les autres considérations.

Il est vrai qu’un livre à deux voix, vous et lui, aurait pu faire une belle opération éditoriale, mais pourquoi écarter l’idée de sa sincérité ? Que cela vous agrée ou non, vous êtes un peu les deux faces d’une même médaille. Sa proposition était aussi une forme de reconnaissance, en même temps qu’un dédit implicite puisqu’on ne voit pas un «démocrate» faire alliance avec un représentant du «pétainisme» ! Et les menaces qui pèsent sur l’école publique ne sont-elles pas d’une telle gravité qu’elles justifieraient une «union sacrée» de ses défenseurs ?

Il n’y a pas d’« union sacrée » possible avec un personnage qui ne vous tend la main que pour mieux vous faire un mauvais coup. Et puis, cet homme incarne le mépris de la pédagogie. Toute forme de complicité avec lui aurait légitimement été considérée par celles et ceux avec qui je travaille – que j’aie ou non des désaccords avec eux – comme une trahison. On a beau se vouloir magnanime, certaines accusations sont rédhibitoires. On peut accepter un débat contradictoire, mais un travail en commun, c’est autre chose ! Le sens du dialogue ne nous condamne pas aux alliances indignes et aucune cause ne justifie qu’on sacrifie toute rigueur pour faire un coup médiatique… Je me sens assez de points communs avec certains de mes « adversaires » pour engager des collaborations avec eux. Ainsi, venons-nous de terminer un ouvrage avec Bernard Stiegler et Denis Kambouchner (L’Ecole, le numérique et la société qui vient) : or je vous ai déjà dit que ce dernier a consacré un livre entier, Une école contre l’autre, paru il y a onze ans maintenant, à dénoncer mes « errances pédagogistes ».

Nous pouvons néanmoins débattre sereinement car nous partageons des valeurs fondatrices : le souci de convaincre plutôt que d’impressionner, le goût pour l’argumentation plutôt que pour la métaphore vacharde, la volonté de faire le vrai plutôt que de «marquer des points»… Mais Jean-Paul Brighelli n’est pas de ce bois-là ! Il fait partie de ces pamphlétaires qui, tout en exaltant l’effort, la rigueur et la culture, se comportent eux-mêmes avec une désinvolture intellectuelle stupéfiante. Les choses essentielles pour moi n’ont pas la moindre importance pour lui : ni les travaux de recherche en éducation, ni les écrits des pédagogues historiques, ni les expériences militantes de ceux qui s’en réclament et cherchent à faire reculer la fatalité. Comme d’autres, la rumeur lui suffit, du moment qu’elle alimente sa rhétorique de la dénonciation.

Vous avez aussi été attaqué par des personnalités plus modérées, comme Luc Ferry…

Et toujours avec la même désinvolture ! Car, en réalité, dans les multiples livres qui me prennent à partie, très peu d’auteurs prennent la peine d’analyser vraiment mon travail. Ainsi, quand Luc Ferry, après avoir quitté le ministère de l’Éducation nationale, publie un ouvrage de bilan, Comment peut-on être ministre ?, il consacre un chapitre à discuter mes thèses et, à travers elles, à dénoncer le pédagogisme. Mais il le fait sans citer aucun de mes livres et exclusivement à partir d’un petit entretien paru dans La Croix. Il construit ainsi toute une théorie, fondée sur deux phrases tirées de leur contexte, qui lui permettent d’expliquer la grande différence entre les pédagogues comme moi et les philosophes comme lui : tout se jouerait, selon lui, dans la manière de concevoir les rapports entre la motivation et le travail. Les pédagogues feraient de la motivation un préalable au travail alors que les philosophes sauraient, eux, que le travail est un préalable à la motivation. Comme tout cela paraît simple et de bon sens ! Et comme tout cela, en fait, est ignorant ! Le projet des pédagogues, en effet, a toujours consisté à dépasser cette fausse opposition. Pour ce qui me concerne, j’ai, de plus, et à de nombreuses reprises, expliqué que je préférais, de loin, le terme de « mobilisation » à celui de « motivation ». Cela pour bien signifier, justement, que l’engagement d’un sujet dans ses apprentissages ne devait pas être subordonné à ses désirs préexistants, mais pouvait émerger de l’attraction des savoirs eux-mêmes, dès lors que ces derniers lui étaient proposés avec la volonté explicite de mobiliser son intelligence. J’ai dénoncé le caractère socialement sélectif du « préalable de la motivation » et souligné que, contrairement aux idées reçues, un apprentissage exigeant et complexe pouvait mobiliser des enfants et des adolescents, même en difficulté, tandis que des exercices simplistes les ennuyaient profondément.

J’ai tenté de comprendre comment pouvait s’effectuer cette mobilisation et, même, de proposer des outils pour aider les enseignants à avancer dans ce sens. Mais Luc Ferry s’en moque ! Il n’a pas lu mes travaux et préfère surfer sur une opposition facile.

Il n’a pas lu non plus – et c’est infiniment plus grave – le livre majeur de Célestin Freinet, L’éducation du travail. Cela ne l’empêche pas de légiférer sur les questions éducatives avec un bel aplomb! Pour être complet sur ce thème, il faut aussi reconnaître – ce qui n’est pas une excuse – que la pédagogie est un peu pousse-au-crime en matière de débat. Elle se prête particulièrement à ce genre de dérives où l’on oppose, de manière caricaturale, des notions qu’il faudrait, tout au contraire, articuler : travail et motivation, mais aussi contrainte et liberté, autorité de l’adulte et respect de l’enfant, acquisition des connaissances et formation de la personnalité, etc. Enfin, peut-être, ai-je aussi, de mon côté, le tort d’accepter de m’exprimer sous forme d’entretiens qui paraissent dans la presse sans que je puisse toujours les relire, de participer à des émissions de vulgarisation et dans des formats qui obligent à la simplification ou à l’incomplétude du propos, ce qui me fait prêter le flanc à ce type d’attaques…

Alors ça… Vous étiez à peine en train d’esquisser une réplique un peu énergique et vous voilà déjà dans l’autocritique, en proie à la culpabilité ! Vous rendez-vous compte ? Croyez-vous que Luc Ferry, si je vais l’interviewer, va se demander à haute voix s’il n’a pas été excessif à votre égard ? Croyez-vous que Jean-Paul Brighelli va écrire Mes excuses aux pédagogues et que Natacha Polony, un autre auteur qui vous traite sans égards, va publier Pourquoi je me suis trompée ?

Je crains que non! Mais c’est leur problème ! Et je suis fidèle, sur ce point, à la devise de Vladimir Jankélévitch: « Je suis le gardien de tes droits. Mais je ne suis pas le gendarme de tes devoirs. »

[url=La source]http://education.blog.lemonde.fr/2012/04/02/vous-etes-le-mal-2-de-brighelli-a-luc-ferry-la-diversite-des-styles-anti-meirieu/[/url]

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« Vous êtes le mal » (2) : de Brighelli à Luc Ferry, la diversité des styles anti-Meirieu Empty Re: « Vous êtes le mal » (2) : de Brighelli à Luc Ferry, la diversité des styles anti-Meirieu

par yphrog 9th Avril 2012, 22:48
zont rien compris, ces gogz, c'est lui le Mal Twisted Evil :

« Vous êtes le mal » (2) : de Brighelli à Luc Ferry, la diversité des styles anti-Meirieu 1221333459755

calimero

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