- OudemiaBon génie
Un peu tard pour poser la question, mais je me souviens seulement à l'instant avoir voulu la poser ici.
Il y a très longtemps un élève de 3e futé m'avait demandé pourquoi orbis n'avait évolué en orbs, comme *urbis en urbs.
J'avais avoué mon ignorance, promis de me renseigner, demandé à mes collègues qui séchaient aussi, vaguement cherché en vain.
J'y ai repensé ce matin, revoyant la 3D à radical en -i avec les 4e...
Qui aurait une explication?
Il y a très longtemps un élève de 3e futé m'avait demandé pourquoi orbis n'avait évolué en orbs, comme *urbis en urbs.
J'avais avoué mon ignorance, promis de me renseigner, demandé à mes collègues qui séchaient aussi, vaguement cherché en vain.
J'y ai repensé ce matin, revoyant la 3D à radical en -i avec les 4e...
Qui aurait une explication?
- yphrogEsprit éclairé
Je ne comprends pas la question. Je ne suis pas latiniste, mais urbs est assez connu pour l'obsurité de son origine (maintenant rapproché du hittite warpa- selon wiktionnaire → http://fr.wiktionary.org/wiki/urbs).
Dans l'Appendix Probi, qu'Elcock décrit comme un manuel pour corriger les mauvaises prononciations au 3e siècle (ou plus tard...), on trouve:
Pour ma part je n'avais jamais entendu parler de l'hypothèse d'une proto-forme *urbis, dont je ne trouve aucune trace dans l'Ernout-Meillet.
Je répète, je n'y connais rien, mais j'ai bien aimé la question, parce qu'il m'a fait descendre des livres que j'aime bien. :lol:
aux experts, maintenant...
Dans l'Appendix Probi, qu'Elcock décrit comme un manuel pour corriger les mauvaises prononciations au 3e siècle (ou plus tard...), on trouve:
Elcock suggère que ces erreurs étaient eventuellement dûes à la proximité avec des mots comme urbs et plebs. (W.D. Elcock, The Romance Languages, 1960)Appendix Probi a écrit:
orbis non orbs
http://bbouillon.free.fr/univ/hl/Fichiers/Probi.htm #74
Pour ma part je n'avais jamais entendu parler de l'hypothèse d'une proto-forme *urbis, dont je ne trouve aucune trace dans l'Ernout-Meillet.
Je répète, je n'y connais rien, mais j'ai bien aimé la question, parce qu'il m'a fait descendre des livres que j'aime bien. :lol:
aux experts, maintenant...
- User5899Demi-dieu
Trop tard maintenant pour aller farfouiller, on verra ça demain ou après
Mais déjà, est-on sûr (en effet, xphrog) que urbs vient de *urbis ?
Mais déjà, est-on sûr (en effet, xphrog) que urbs vient de *urbis ?
- OudemiaBon génie
Alors là, il va falloir que je me remette en question, parce que cela fait des années que je dis aux élèves ce que j'avais appris moi-même: dans *urbis, *montis, le -i- du radical au nominatif est tombé...
C'est trop tard pour les 4e de cette année, auxquels je croyais fournir une information intéressante.
C'est trop tard pour les 4e de cette année, auxquels je croyais fournir une information intéressante.
- IphigénieProphète
non non Oudemia, le i de urbis est bien tombé selon Monteil, qui n'est pas plus clair que ça...
maintenant pourquoi lui et pas celui de orbis, ça j'en sais rien: je laisse les linguistes avisés méditer...
une explication d'amateur: peut-être parce que le mot urbs était beaucoup plus employé, donc sujet à déformation?
ou alors il faut chercher du côté d'une ancienne forme de datif attesté dans les inscriptions, en urbei , qui supposerait un -e- ajouté au yod ( à moins que ce ne soit un schwa?) et plus instable?
Mais pourquoi vous vous faites du mal comme ça , les latinistes? :lol: :lol:
maintenant pourquoi lui et pas celui de orbis, ça j'en sais rien: je laisse les linguistes avisés méditer...
une explication d'amateur: peut-être parce que le mot urbs était beaucoup plus employé, donc sujet à déformation?
ou alors il faut chercher du côté d'une ancienne forme de datif attesté dans les inscriptions, en urbei , qui supposerait un -e- ajouté au yod ( à moins que ce ne soit un schwa?) et plus instable?
Mais pourquoi vous vous faites du mal comme ça , les latinistes? :lol: :lol:
- NLM76Grand Maître
Ce n'est pas "simplement" parce que la 3e déclinaison, mélange plus ou moins aléatoire entre radicaux en -i et radicaux en consonne, c'est le boxon ?
_________________
Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- GlaukopisNiveau 1
"La 3ème [déclinaison] constitue [...] un système autonome [...] On y distingue deux groupes principaux : 1° thèmes consonantiques, type rēx de *reg-s ; 2° thèmes terminés par la sonante -i-. Ces derniers se laissent à leur tour subdiviser en : 1° thèmes sonantiques ayant perdu leur voyelle brève au nominatif : mens de *mentis; 2° thèmes sonantiques proprement dits : class-i-s, secur-i-s." (A. Ernout, Morphologie historique du latin, Paris, Klincksieck, 1953, p. 35, § 40).
Cette classification se retrouve dans les grammaires latines usuelles dans le secondaire sous les appellations :
Faux imparisylllabiques : thèmes sonantiques ayant perdu cette sonante.
La même analyse peut être faite en ce qui concerne la 3ème décl. grecque.
Aussi bien dans les grammaires usuelles que chez Ernout, les faux imparisyllabiques se reconnaissent à leur gén. pl. en -i-um, avec la sonante, face aux vrais imparisyllabiques ou la désinence -um s'ajoute directement à la consonne du thème.
Urbs, gén. pl. urbium, a donc indubitablement perdu la sonante i d'un nom. sg. plus ancien *urb-i-s.
Reste la question principale : Pourquoi la perte de la sonante dans urbs et non dans orbis ?
Les deux mots ont un thème monosyllabique de structure identique (syllabe longue par position avec l'occlusive finale [b]) : orb- et urb-.
Or (M. Niedermann, Précis de phonétique historique du latin, Paris, Klincksieck, 1953, p. 47) : "La syncope d'un i s'observe dans le nominatif du singulier des thèmes en -i- après une consonne occlusive, lorsque la syllabe précédente était longue par nature ou par position." Et il cite urbs dans ses exemples.
Le même, quelques lignes plus bas : "Il existe pourtant des mots en assez grand nombre, dans lesquels le groupe occlusive + is apparaît inchangé bien que précédé d'une syllabe longue". Et de citer orbis parmi ses exemples. Page suivante : "orbs, blâmé comme vulgarisme dans l'Appendix Probi 74, pourrait suggérer l'hypothèse que les formes phonétiques se seraient conservées dans la langue du peuple, tandis que, dans la langue littéraire, l'i absorbé par la syncope aurait été restitué d'après des mots comme cīvis "citoyen" [...], où il avait échappé à la syncope. Mais l'on hésitera à étendre une telle explication à tout l'ensemble des exceptions qui viennent d'être signalées."
Cette syncope est donc capricieuse. D'autre part, de nombreuses confusions ont rapproché au sg. les imparisyllabiques (à l'acc. sg. en -em) et les parisyllabiques (dont l'acc. sg. originel en -im ne s'est conservé que dans quelques mots (vim, turrim, securim, etc., alors que la désinence est passée à -em dans la plupart des cas). Ces confusions et croisements ont pu contribuer à maintenir orbis dans la classe des parisyllabiques, alors que urbs passait à celle des faux imparissllabiques.
De telles caprices s'observent dans toutes les langues. Ainsi, des confusions se sont produites en bas-latin entre les verbes en -ēre et les verbes en -ĕre qui ont entraîné en français et en italien des déplacements d'accent tonique sur les infinitifs, voire des doublons : manēre donne en anc. fs manoir (avec l'accent resté sur le ē) et maindre, qui suppose un *mánĕre.
Mais sans irrégularités, l'étude des langues serait-elle aussi passionnante ?
Cette classification se retrouve dans les grammaires latines usuelles dans le secondaire sous les appellations :
- imparisyllabiques (thèmes consonantiques) ;
- parisyllabiques : thèmes sonantiques en -i- ayant conservé la sonante au nom. sg. ;
Faux imparisylllabiques : thèmes sonantiques ayant perdu cette sonante.
La même analyse peut être faite en ce qui concerne la 3ème décl. grecque.
Aussi bien dans les grammaires usuelles que chez Ernout, les faux imparisyllabiques se reconnaissent à leur gén. pl. en -i-um, avec la sonante, face aux vrais imparisyllabiques ou la désinence -um s'ajoute directement à la consonne du thème.
Urbs, gén. pl. urbium, a donc indubitablement perdu la sonante i d'un nom. sg. plus ancien *urb-i-s.
Reste la question principale : Pourquoi la perte de la sonante dans urbs et non dans orbis ?
Les deux mots ont un thème monosyllabique de structure identique (syllabe longue par position avec l'occlusive finale [b]) : orb- et urb-.
Or (M. Niedermann, Précis de phonétique historique du latin, Paris, Klincksieck, 1953, p. 47) : "La syncope d'un i s'observe dans le nominatif du singulier des thèmes en -i- après une consonne occlusive, lorsque la syllabe précédente était longue par nature ou par position." Et il cite urbs dans ses exemples.
Le même, quelques lignes plus bas : "Il existe pourtant des mots en assez grand nombre, dans lesquels le groupe occlusive + is apparaît inchangé bien que précédé d'une syllabe longue". Et de citer orbis parmi ses exemples. Page suivante : "orbs, blâmé comme vulgarisme dans l'Appendix Probi 74, pourrait suggérer l'hypothèse que les formes phonétiques se seraient conservées dans la langue du peuple, tandis que, dans la langue littéraire, l'i absorbé par la syncope aurait été restitué d'après des mots comme cīvis "citoyen" [...], où il avait échappé à la syncope. Mais l'on hésitera à étendre une telle explication à tout l'ensemble des exceptions qui viennent d'être signalées."
Cette syncope est donc capricieuse. D'autre part, de nombreuses confusions ont rapproché au sg. les imparisyllabiques (à l'acc. sg. en -em) et les parisyllabiques (dont l'acc. sg. originel en -im ne s'est conservé que dans quelques mots (vim, turrim, securim, etc., alors que la désinence est passée à -em dans la plupart des cas). Ces confusions et croisements ont pu contribuer à maintenir orbis dans la classe des parisyllabiques, alors que urbs passait à celle des faux imparissllabiques.
De telles caprices s'observent dans toutes les langues. Ainsi, des confusions se sont produites en bas-latin entre les verbes en -ēre et les verbes en -ĕre qui ont entraîné en français et en italien des déplacements d'accent tonique sur les infinitifs, voire des doublons : manēre donne en anc. fs manoir (avec l'accent resté sur le ē) et maindre, qui suppose un *mánĕre.
Mais sans irrégularités, l'étude des langues serait-elle aussi passionnante ?
- doublecasquetteEnchanteur
Et klebs, ça se disait klebis, avant ?
DC véto
DC véto
- yphrogEsprit éclairé
kilāb, il semblerait :lol:
merci Glaukopis, et bienvenue!
merci Glaukopis, et bienvenue!
- OudemiaBon génie
Glaukopis a écrit:
Or (M. Niedermann, Précis de phonétique historique du latin, Paris, Klincksieck, 1953, p. 47) : "La syncope d'un i s'observe dans le nominatif du singulier des thèmes en -i- après une consonne occlusive, lorsque la syllabe précédente était longue par nature ou par position." Et il cite urbs dans ses exemples.
Le même, quelques lignes plus bas : "Il existe pourtant des mots en assez grand nombre, dans lesquels le groupe occlusive + is apparaît inchangé bien que précédé d'une syllabe longue". Et de citer orbis parmi ses exemples. Page suivante : "orbs, blâmé comme vulgarisme dans l'Appendix Probi 74, pourrait suggérer l'hypothèse que les formes phonétiques se seraient conservées dans la langue du peuple, tandis que, dans la langue littéraire, l'i absorbé par la syncope aurait été restitué d'après des mots comme cīvis "citoyen" [...], où il avait échappé à la syncope. Mais l'on hésitera à étendre une telle explication à tout l'ensemble des exceptions qui viennent d'être signalées."
Cette syncope est donc capricieuse. D'autre part, de nombreuses confusions ont rapproché au sg. les imparisyllabiques (à l'acc. sg. en -em) et les parisyllabiques (dont l'acc. sg. originel en -im ne s'est conservé que dans quelques mots (vim, turrim, securim, etc., alors que la désinence est passée à -em dans la plupart des cas). Ces confusions et croisements ont pu contribuer à maintenir orbis dans la classe des parisyllabiques, alors que urbs passait à celle des faux imparissllabiques.
De telles caprices s'observent dans toutes les langues. Ainsi, des confusions se sont produites en bas-latin entre les verbes en -ēre et les verbes en -ĕre qui ont entraîné en français et en italien des déplacements d'accent tonique sur les infinitifs, voire des doublons : manēre donne en anc. fs manoir (avec l'accent resté sur le ē) et maindre, qui suppose un *mánĕre.
Mais sans irrégularités, l'étude des langues serait-elle aussi passionnante ?
Eh bien voilà, c'est ce que je cherchais!
Merci!
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