- JohnMédiateur
http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/leleve/Pages/2012/129_4.aspx
Violence scolaire : L'enquête de Seine-Saint-Denis inverse les perspectives
Par François Jarraud
Et si la droite nous avait vendu des salades durant des années à propos de la violence scolaire ? Et si la gauche était mieux armée pour faire face au problème ? Quelques jours après la visite de François Hollande à Pierrefitte (93) sur le thème de la violence scolaire, le Conseil général de Seine Saint-Denis publie le 16 janvier une enquête de victimation dirigée par Eric Debarbieux qui apporte des éclairages nouveaux sur cette question.
C'est une enquête unique. On ne peut comparer les chiffres de Seine Saint-Denis à aucun autre travail identique, même si on peut penser que dans le département le plus jeune et le plus pauvre de France la violence scolaire est plus importante qu'ailleurs. Plus de 2000 personnels de l'éducation nationale, enseignants et non-enseignants, ont répondu à une enquête en ligne en novembre et décembre. Pour donner une illustration de l'importance de cette enquête, Eric Debarbieux a comparé les résultats d'une enquête de victimation sur les élèves avec ceux des déclarations SIGNA. Quand Signa signale 0,2% d'élèves insultés, les élèves déclarent eux être victimes à 72% !
Le premier enseignement c'est que la situation en Seine Saint-Denis n'est pas aussi violente que ce que les médias peuvent montrer. Trois personnels sur quatre jugent le climat scolaire de leur établissement globalement bon. Mais cette situation moyenne cache de fortes inégalités. Le poids de l'enseignement prioritaire (EP) pèse lourd. Un tiers des personnels des établissements d'EP jugent le climat mauvais. Un sur cinq travaille dans l'insécurité, un taux double du taux moyen. Pour Eric Debarbieux, "alors que l'enquête de victimation DEPP avait montré que le critère social ne jouait pas sur la violence entre élèves, cette étude montre qu'il joue dans les relations entre élèves et adultes. On retrouve là la violence antiscolaire qui est un phénomène nouveau et grave lié à l'exclusion". La violence est surtout verbale (insultes, menaces), très rarement physique. Mais 17% des personnels sont victimes de violences répétées.
Le second enseignement c'est que la violence est un phénomène interne aux établissements. Les intrus sont auteurs de 3% des violences seulement. Les élèves de l'établissement sont les principaux auteurs, loin devant les parents et très loin devant les intrusions. Le tapage médiatique sur la sécurisation des établissements, la vidéosurveillance, les sas, etc., est disproportionné par rapport aux risques réels. Ce n'est pas en accentuant cette sécurisation là qu'on règlera un problème qui est ailleurs.
Peut-être la plus importante révélation de cette étude, c'est d'avoir fait émerger l'importance du harcèlement entre personnels de l'éducation nationale. 18% d'entre eux ont déclaré en souffrir, être victimes d'ostracisme par exemple. Il ne touche pas particulièrement des personnels de direction ou des inspecteurs avec qui on aurait des comptes à régler. C'est une violence horizontale mais dont souffrent un peu plus que les autres les CPE, les personnels sociaux ou de santé. Pour Eric Debarbieux, cela montre qu'il y a des tensions dans les équipes. Et un ressentiment envers les personnels dont on attend médiation, soutien et action quand on est soi-même victime de violence.
L'enquête a demandé aux personnels leurs préconisations contre la violence. Ce qui ressort en premier c'est moins d'élèves par classe. La seconde demande porte sur le travail en équipe. La troisième sur le travail avec les parents. Enfin vient une demande de personnels spécialisés et de structures spécialisées. Très loin derrière viennent les remèdes dont on a tant entendu parler ces dernières années : des policiers dans les établissements, la sécurisation des établissements (10% des demandes). Les personnels de l'éducation nationale veulent des réponses éducatives.
En présentant ces résultats, Claude Bartolone, président du Conseil général, rappelait "qu'il n'y a pas de fatalité. Rien n'est écrit en Seine Saint-Denis". Le département est un vrai laboratoire de lutte contre la violence scolaire avec une politique de soutien aux élèves exclus par les conseils de disciplines : 800 par an environ. Un programme départemental permet de les accueillir, de maintenir le lien avec le collège et de leur faire accepter la sanction. Au bilan, 8 jeunes sur 10 accueillis dans ces structures ne font plus jamais parler d'eux (77%). "On peut régler les problèmes" affirme C Bartolone. La politique menée dans le 93 devrait être généralisée si F Hollande arrive au pouvoir. Le représentant de l'Etat, Daniel Auverlot, inspecteur d'académie, a promis qu'en 2012 il appliquerait le même taux d'ouverture de classe qu'en 2011. Il a souligné l'importance du primaire : 17% des élèves entrent en 6ème avec du retard.
Pour Eric Debarbieux, la bonne approche pour lutter contre la violence scolaire c'est de travailler sur le vivre ensemble, les méthodes pédagogiques mais aussi tout ce qui peut favoriser les relations et l'encadrement des jeunes. De ce côté là aussi le Conseil général fait beaucoup en finançant par exemple des voyages pour les collégiens (10 000 depuis 2009).
La présentation de l'étude a attiré une centaine de personnes au conseil général. Pour les parents, Michel Hervieu, de la Fcpe, a souligné la facilité avec laquelle on pratique des exclusions. Pour lui la violence des quartiers pèse sur le climat scolaire. Il a aussi soulevé la question des enseignants non remplacés. Pour l'Unsa, représentée dans la classe, le grand enseignement c'est la victimation par les pairs. Pour elle seul le travail en équipe peut permettre de dépasser ces tensions.
Quelques heures seulement après le passage de François Hollande, sa politique semble plébiscitée par le département où la violence scolaire est la plus forte. Mieux : les remèdes semblent fonctionner.
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- arobaseNiveau 4
Eric Debardieux : un "expert".
- SchéhérazadeNiveau 10
"Pour les parents, Michel Hervieu, de la Fcpe, a souligné la facilité avec laquelle on pratique des exclusions. Pour lui la violence des quartiers pèse sur le climat scolaire"
Alors ça faut oser le dire...Chers collègues de Seine Saint Denis, vous pouvez témoigner de ce qu'est la particularité méconnue de votre académie: l'exclusion "facilement" pratiquée, les conseils de discipline pour un oui ou pour un non, qui excluent des malheureux pour les motifs tout à fait futiles.
Combien a coûté au contribuable cette enquête? Combien coûte au contribuable le salaire de Debarbieux?
Et si la gauche s'apprêtait à nous revendre ses propres salades sur la violence scolaire? Et si on les trouvait tout aussi indigestes et frelatées que les salades de la droite?
Alors ça faut oser le dire...Chers collègues de Seine Saint Denis, vous pouvez témoigner de ce qu'est la particularité méconnue de votre académie: l'exclusion "facilement" pratiquée, les conseils de discipline pour un oui ou pour un non, qui excluent des malheureux pour les motifs tout à fait futiles.
Combien a coûté au contribuable cette enquête? Combien coûte au contribuable le salaire de Debarbieux?
Et si la gauche s'apprêtait à nous revendre ses propres salades sur la violence scolaire? Et si on les trouvait tout aussi indigestes et frelatées que les salades de la droite?
- arobaseNiveau 4
Debardieux, "expert" indépendant... qui le paye ?
La "gauche", comme la droite, a organisé le désordre dans l'EN en empêchant les enseignants d'enseigner, en s'attaquant sans relâche au statut de la Fonction Publique, et aux principes même du service public.
La "gauche", comme la droite, a organisé le désordre dans l'EN en empêchant les enseignants d'enseigner, en s'attaquant sans relâche au statut de la Fonction Publique, et aux principes même du service public.
- eeNiveau 9
Personnellement, je ne trouve pas très étonnants les résultats de l'enquête.
Pour enseigner en Seine Saint Denis depuis "toujours" (de l'IUFM à aujourd'hui, soit 3 établissements, dont le dernier où je suis pour la 7eme ou 8eme année), dans un collège "difficile" mais pas trop par comparaison à d'autres, je n'ai jamais ressenti de peur face aux élèves ou à leurs copains de l'extérieur, et mes seuls vrais conflits (rares) ont été avec une collègue d'une part, avec mon chef d'établissement d'autre part.
Bien-sûr, des gamins en grande difficulté scolaire, instables, malpolis, pas ou peu intéressés, facilement dans la provocation... c'est pénible. D'autant plus pénible quand on n'a pas beaucoup d'autorité naturelle (c'est mon cas), qu'on est un peu désordonné en prime (genre à oublier des punitions mises, à me tromper sur là où on en est dans une progression etc) et qu'en même temps, on est plutôt exigeant intellectuellement (encore mon cas).
Mais, en même temps, il me semble qu'un enfant est un enfant (ou un ado est un ado), qu'il n'est donc pas surprenant que son penchant naturel soit de chercher comment ne pas travailler (particulièrement si son entourage personnel n'est pas en mesure de valoriser l'école à ses yeux), et que la réponse à cette évidente difficulté n'est pas dans des mesures "policières" (vidéosurveillance, exclusions aboutissant à une descolarisation, judiciarisation par dépôt de plainte etc).
Pour donner un exemple précis, depuis le début de l'année, on s'offre au moins deux fois par semaine une heure de cours interrompue parce qu'un petit "malin" en promenade dans les couloirs a déclanché l'alarme incendie. Evacuation (c'est obligatoire), momes surexcités dans la cour, remontée en classe au compte-gouttes..
C'est insupportable. Quand on attrape l'un des petits malins, je trouve fort bien qu'on lui hurle dessus, qu'on le sanctionne sévèrement dans un cadre scolaire (retenues et TIG). Mais, en même temps, on a aussi affaire à quelque chose qui tient de la blague de collégien, et ça m'ennuierait fort qu'on prétende écraser une mouche avec un marteau, et qu'on prétende prévenir ce genre de bêtises avec des caméras de vidéosurveillance ou les punir avec des dépôts de plainte ou des conseils de discipline aboutissant à l'exclusion.
Je crois qu'on a tous besoin d'être revalorisés par nos pairs et notre hiérarchie comme professionnels (statut assurant notre liberté pédagogique et soutien de nos "chefs") et comme adultes (capables à la fois de moucher un morveux et de ne pas prendre au tragique ce qui a justifié qu'on le mouche). Et que cette revalorisation nous permettrait peut-être de relativiser (ce qui ne signifie pas accepter, nuance importante) les bêtises de nos élèves.
Cordialement,
EE
Pour enseigner en Seine Saint Denis depuis "toujours" (de l'IUFM à aujourd'hui, soit 3 établissements, dont le dernier où je suis pour la 7eme ou 8eme année), dans un collège "difficile" mais pas trop par comparaison à d'autres, je n'ai jamais ressenti de peur face aux élèves ou à leurs copains de l'extérieur, et mes seuls vrais conflits (rares) ont été avec une collègue d'une part, avec mon chef d'établissement d'autre part.
Bien-sûr, des gamins en grande difficulté scolaire, instables, malpolis, pas ou peu intéressés, facilement dans la provocation... c'est pénible. D'autant plus pénible quand on n'a pas beaucoup d'autorité naturelle (c'est mon cas), qu'on est un peu désordonné en prime (genre à oublier des punitions mises, à me tromper sur là où on en est dans une progression etc) et qu'en même temps, on est plutôt exigeant intellectuellement (encore mon cas).
Mais, en même temps, il me semble qu'un enfant est un enfant (ou un ado est un ado), qu'il n'est donc pas surprenant que son penchant naturel soit de chercher comment ne pas travailler (particulièrement si son entourage personnel n'est pas en mesure de valoriser l'école à ses yeux), et que la réponse à cette évidente difficulté n'est pas dans des mesures "policières" (vidéosurveillance, exclusions aboutissant à une descolarisation, judiciarisation par dépôt de plainte etc).
Pour donner un exemple précis, depuis le début de l'année, on s'offre au moins deux fois par semaine une heure de cours interrompue parce qu'un petit "malin" en promenade dans les couloirs a déclanché l'alarme incendie. Evacuation (c'est obligatoire), momes surexcités dans la cour, remontée en classe au compte-gouttes..
C'est insupportable. Quand on attrape l'un des petits malins, je trouve fort bien qu'on lui hurle dessus, qu'on le sanctionne sévèrement dans un cadre scolaire (retenues et TIG). Mais, en même temps, on a aussi affaire à quelque chose qui tient de la blague de collégien, et ça m'ennuierait fort qu'on prétende écraser une mouche avec un marteau, et qu'on prétende prévenir ce genre de bêtises avec des caméras de vidéosurveillance ou les punir avec des dépôts de plainte ou des conseils de discipline aboutissant à l'exclusion.
Je crois qu'on a tous besoin d'être revalorisés par nos pairs et notre hiérarchie comme professionnels (statut assurant notre liberté pédagogique et soutien de nos "chefs") et comme adultes (capables à la fois de moucher un morveux et de ne pas prendre au tragique ce qui a justifié qu'on le mouche). Et que cette revalorisation nous permettrait peut-être de relativiser (ce qui ne signifie pas accepter, nuance importante) les bêtises de nos élèves.
Cordialement,
EE
- DhaiphiGrand sage
Conclusion : vous n'avez pas fini d'évacuer ! :shock:ee a écrit:Pour donner un exemple précis, depuis le début de l'année, on s'offre au moins deux fois par semaine une heure de cours interrompue parce qu'un petit "malin" en promenade dans les couloirs a déclanché l'alarme incendie. Evacuation (c'est obligatoire), momes surexcités dans la cour, remontée en classe au compte-gouttes..
C'est insupportable. Quand on attrape l'un des petits malins, je trouve fort bien qu'on lui hurle dessus, qu'on le sanctionne sévèrement dans un cadre scolaire (retenues et TIG). Mais, en même temps, on a aussi affaire à quelque chose qui tient de la blague de collégien, et ça m'ennuierait fort qu'on prétende écraser une mouche avec un marteau, et qu'on prétende prévenir ce genre de bêtises avec des caméras de vidéosurveillance ou les punir avec des dépôts de plainte ou des conseils de discipline aboutissant à l'exclusion.
Enfin, jusqu'à ce qu'ils aient trouvé un motif de distraction plus amusant, quels blageurs ces collégiens !
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De toutes les écoles que j’ai fréquentées, c’est l’école buissonnière qui m’a paru la meilleure.
[Anatole France]
J'aime les regretteurs d'hier qui voudraient changer le sens des rivières et retrouver dans la lumière la beauté d'Ava Gardner.
[Alain Souchon]
- ThalieGrand sage
Je ne suis pas du tout d'accord avec toi. Déclencher l'alarme incendie est un geste grave qui peut conduire à des dangers (que se passera-t-il le jour où il y aura un vrai incendie avec vos élèves surexcités dans les couloirs ? Il s'agit là d'apprendre un vraie responsabilité civile et ce n'est pas un événement que je qualifierais de "mouche" ou de "blague". Depuis le temps, n'avez-vous pas réussi à faire comprendre à vos collégiens combien il était important de respecter leurs lieux et la sécurité de tous ? Si c'est le cas, il faudrait en effet passer à plus lourd pour le bien commun de la communauté.ee a écrit:Pour donner un exemple précis, depuis le début de l'année, on s'offre au moins deux fois par semaine une heure de cours interrompue parce qu'un petit "malin" en promenade dans les couloirs a déclenché l'alarme incendie. Evacuation (c'est obligatoire), momes surexcités dans la cour, remontée en classe au compte-gouttes..
C'est
insupportable. Quand on attrape l'un des petits malins, je trouve fort
bien qu'on lui hurle dessus, qu'on le sanctionne sévèrement dans un
cadre scolaire (retenues et TIG). Mais, en même temps, on a aussi
affaire à quelque chose qui tient de la blague de collégien, et ça m'ennuierait fort qu'on prétende écraser une mouche avec un marteau,
et qu'on prétende prévenir ce genre de bêtises avec des caméras de
vidéosurveillance ou les punir avec des dépôts de plainte ou des
conseils de discipline aboutissant à l'exclusion.
- eeNiveau 9
Chère Thalie,
Le faire comprendre au plus grand nombre, si, certainement - mais le faire comprendre à tous les élèves, hélas, non!
Après, je pense qu'il y a trois aspects, dans le "faire comprendre" :
- Une dimension de pur raisonnement (on peut se casser la jambe dans la cohue etc), et ça, quand même, ça marche avec une majorité d'élèves, heureusement!
- Une dimension de sanction "mise en scène" : c'est entre adultes que je dis que c'est une mauvaise blague de collégiens, à un enfant, je ne dirais pas ça mais au contraire, que c'est très grave, que ça pourrait relever du conseil de discipline, que la responsabilité de ses parents pourrait être engagée etc
- Une dimension de sanction "tout court" : je ne suis pas favorable aux sanctions lourdes (exclusions), et encore moins au passage de la sanction scolaire à la plainte pénale (dépôt de plainte pour mise en danger de la vie d'autrui, par exemple). L'expérience de ces dernières années, qui a vu un durcissement sans précédent depuis 1945 de la justice pénale des mineurs, et qui a vu dans le même temps un durcissement sensible des communautés éducatives (non incompatible avec un discours démago - on démagogise en coeur, et on exclut quand même au final), me semble avoir montré sa totale inefficacité. Des adultes bienveillants, qui ne lachent rien mais qui considèrent que la punition n'est pas l'élément central du système éducatif, ça me parait mieux.
Le faire comprendre au plus grand nombre, si, certainement - mais le faire comprendre à tous les élèves, hélas, non!
Après, je pense qu'il y a trois aspects, dans le "faire comprendre" :
- Une dimension de pur raisonnement (on peut se casser la jambe dans la cohue etc), et ça, quand même, ça marche avec une majorité d'élèves, heureusement!
- Une dimension de sanction "mise en scène" : c'est entre adultes que je dis que c'est une mauvaise blague de collégiens, à un enfant, je ne dirais pas ça mais au contraire, que c'est très grave, que ça pourrait relever du conseil de discipline, que la responsabilité de ses parents pourrait être engagée etc
- Une dimension de sanction "tout court" : je ne suis pas favorable aux sanctions lourdes (exclusions), et encore moins au passage de la sanction scolaire à la plainte pénale (dépôt de plainte pour mise en danger de la vie d'autrui, par exemple). L'expérience de ces dernières années, qui a vu un durcissement sans précédent depuis 1945 de la justice pénale des mineurs, et qui a vu dans le même temps un durcissement sensible des communautés éducatives (non incompatible avec un discours démago - on démagogise en coeur, et on exclut quand même au final), me semble avoir montré sa totale inefficacité. Des adultes bienveillants, qui ne lachent rien mais qui considèrent que la punition n'est pas l'élément central du système éducatif, ça me parait mieux.
- MelanieSLBDoyen
Ma perception des choses et mon vécu: l'EN a déjà décidé que la punition n'était pas l'élèment central. C'est même honteux et totalement inefficace (soi-disant) de punir un gamin pour avoir insulté un prof, pour avoir frappé quelqu'un, pour avoir déclenché des alarmes incendie à répétition, ...
EE, j'ai vraiment du mal à comprendre ta position. Pour moi, on y est déjà, à un stade bien plus avancé que ce que tu décris, et il est là le pb, pas dans une soi-disant montée des sanctions lourdes. Quant à la pénalisation des actes graves, tu as déjà essayé d'aller porter plainte? (et non de déposer une main courante?)
EE, j'ai vraiment du mal à comprendre ta position. Pour moi, on y est déjà, à un stade bien plus avancé que ce que tu décris, et il est là le pb, pas dans une soi-disant montée des sanctions lourdes. Quant à la pénalisation des actes graves, tu as déjà essayé d'aller porter plainte? (et non de déposer une main courante?)
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Et pour ceux qui voudraient en comprendre quelques fondements idéologiques:
De l’école, Jean-Claude Milner, visionnaire en 1984 (ça ne s'invente pas!) de ce qui nous arrive: "On ne dira pas que les enseignants sont l'appendice inutile d'une institution dangereuse et presque criminelle; on dira seulement qu'ils doivent devenir Autres: animateurs, éducateurs, grands frères, nourrices, etc. La liste est variable. Que, par là, les enseignants cessent d’être ce qu'ils doivent être, c'est encore une fois sortir de la question. On ne dira pas que les enseignants n'ont pas à exister, mais qu'ils ont à exister Autrement. Que cette Autre existence consiste à renoncer à soi-même pour disparaître dans la nuit éducative et s'y frotter, tous corps et tous esprits confondus, avec les partenaires de l'acte éducatif - manutentionnaires, parents, élèves, etc. -, seul un méchant pourrait en prendre ombrage." (page 24)
- JEMSGrand Maître
Pour avoir sur(vécu) je peux vous dire que tout est pesant... les élèves qui par quartiers occupent des pans de murs (vous êtes tout petit lorsque vous tentez de vous faufiler pour avoir accès à votre salle de cour), aux CPE démagos qui donnent du crédit aux dires des élèves et pointent du doigt votre rigidité, en passant par les proviseurs et proviseurs adjoints en quête de primes et qui se gargarisent de mettre en place des innovations pédagogiques de tout premier plan (dans les bahuts de catégorie 4 notamment)... Vous voulez sortir un peu, vous croisez vos gamins à la sortie de la gare, des insultes et intimidations pleuvent, cela se termine chez les flics, vous êtes témoin lors d'un conseil de discipline, c'est la bataille rangée à la sortie du Lycée, vous êtes victime de vol, on tente de vous prendre en photo ou de vous filmer... Je peux en raconter des tonnes d'histoires comme celles-ci car je n'ai travaillé que dans des zones sensibles et ces faits remontent à 10 ans pour les plus anciens. Je n'ai rencontré qu'un seul proviseur jusqu'à présent qui avait les c..... de déclencher les foudres du Rectorat devant des actes d'incivilités. Il arrive un moment où les difficultés de vos élèves passent en deuxième plan, votre seul objectif étant de ne pas péter un câble, de vous préserver et de préserver votre vie de famille. Beaucoup de collègues optent donc pour la technique de la paix sociale et le laisser faire (sans doute font-ils partie des 72 % sondés).
- eeNiveau 9
Chère Mélanie,
J'adore Milner et je pense que, dans la citation que tu donnes, il résume bien la question!
Je ne sais plus si c'est dans ce même livre qu'il parle, à propos des profs, et sans que la qualification soit le moins du monde péjorative, des "classes moyennes intellectuelles inférieures" - inférieures en termes financiers et de reconnaissance sociale, intellectuelles en tant que leur métier est un métier de savoir(s), leur laissant aussi une disponibilité que d'autres n'ont pas pour la recherche, la réflexion, l'engagement associatif etc.
Les profs avaient du temps libre et quelques outils pour l'utiliser autrement qu'en regardant la télé.
Or là où ça va mal, peut-être, c'est qu'à force de dévalorisation, d'augmentation insidieuse de notre charge de travail, de dévalorisation générale des "intellos", de prescriptions psychologisantes et moralisatrices, d'évaluations débiles... cette dimension intellectuelle, au sens large, est en voie de disparition. La culture devient quelque chose dont on a honte, au lieu d'en être fier. Elle ne nous est pas une aide, parce qu'on a envie de la partager, mais un poids, parce qu'on s'est laissé inconsciemment gagné par le bon vieux "à quoi ça sert?". A quoi ça sert, la culture? La question, est sa réponse implicite "à rien", elle est posée par Sarko bien plus fort que par nos cancres.
Il me semble que le malaise enseignant, s'il existe, est plus lié à ça qu'aux élèves.
Car franchement, quand on pense à la Guerre des boutons, à l'épisode de la casquette au début de Madame Bovary ou à à peu près n'importe quelle oeuvre mettant en scène des enfants (sauf peut-être Les petites filles modèles!), on voit que les grosses bêtises, parfois dangereuses, les phénomènes de bande, les chahuts hostiles, le "harcèlement" etc, ça pouvait être au moins aussi violent qu'aujourd'hui!
Je n'ai jamais déposé de main courante, porté plainte, ni même demandé de conseil de discipline. Je me souviens notamment d'une gamine en souffrance, il y a 4 ans, qui avait trouvé mon numéro de portable et m'envoyait des SMS injurieux et pleins de fautes d'orthographe. ANonymes, mais la petite était trop bête, sur le coup, pour ne pas être découverte dans les 2 jours. Mon principal : "C'est la fin de l'année, on ne peut pas faire grand chose, mais si vous voulez porter plainte, je vous soutiendrai". Mon CPE de l'époque : "Si je convoque son père, il ne se déplacera pas, mais passe au commissariat".
Les deux, pour moi, allaient ensemble : refus d'agir, incitation à pénaliser.
Je me suis "battue" pour convoquer la gamine et le père, menaçant justement d'un dépôt de plainte si ils ne se déplaçaient pas, je leur fait un sketch mémorable sur mon honneur et tout le tralala. Et en punition, j'ai demandé à l'élève, puisqu'elle avait mes coordonnées, de m'envoyer une longue et jolie carte de vacances.
Elle s'est assagie depuis, partie très loin, en LEP, et m'envoie régulièrement et gentiment des nouvelles par Facebook.
Je sais que ce que je raconte fait très "bisounours", pour certains, mais je continue à penser que, quand on en a l'énergie (on ne l'a pas toujours), une réaction très forte dans sa théâtralité mais très faible dans la sanction donnée, c'est le mieux.
Amicalement,
EE
J'adore Milner et je pense que, dans la citation que tu donnes, il résume bien la question!
Je ne sais plus si c'est dans ce même livre qu'il parle, à propos des profs, et sans que la qualification soit le moins du monde péjorative, des "classes moyennes intellectuelles inférieures" - inférieures en termes financiers et de reconnaissance sociale, intellectuelles en tant que leur métier est un métier de savoir(s), leur laissant aussi une disponibilité que d'autres n'ont pas pour la recherche, la réflexion, l'engagement associatif etc.
Les profs avaient du temps libre et quelques outils pour l'utiliser autrement qu'en regardant la télé.
Or là où ça va mal, peut-être, c'est qu'à force de dévalorisation, d'augmentation insidieuse de notre charge de travail, de dévalorisation générale des "intellos", de prescriptions psychologisantes et moralisatrices, d'évaluations débiles... cette dimension intellectuelle, au sens large, est en voie de disparition. La culture devient quelque chose dont on a honte, au lieu d'en être fier. Elle ne nous est pas une aide, parce qu'on a envie de la partager, mais un poids, parce qu'on s'est laissé inconsciemment gagné par le bon vieux "à quoi ça sert?". A quoi ça sert, la culture? La question, est sa réponse implicite "à rien", elle est posée par Sarko bien plus fort que par nos cancres.
Il me semble que le malaise enseignant, s'il existe, est plus lié à ça qu'aux élèves.
Car franchement, quand on pense à la Guerre des boutons, à l'épisode de la casquette au début de Madame Bovary ou à à peu près n'importe quelle oeuvre mettant en scène des enfants (sauf peut-être Les petites filles modèles!), on voit que les grosses bêtises, parfois dangereuses, les phénomènes de bande, les chahuts hostiles, le "harcèlement" etc, ça pouvait être au moins aussi violent qu'aujourd'hui!
Je n'ai jamais déposé de main courante, porté plainte, ni même demandé de conseil de discipline. Je me souviens notamment d'une gamine en souffrance, il y a 4 ans, qui avait trouvé mon numéro de portable et m'envoyait des SMS injurieux et pleins de fautes d'orthographe. ANonymes, mais la petite était trop bête, sur le coup, pour ne pas être découverte dans les 2 jours. Mon principal : "C'est la fin de l'année, on ne peut pas faire grand chose, mais si vous voulez porter plainte, je vous soutiendrai". Mon CPE de l'époque : "Si je convoque son père, il ne se déplacera pas, mais passe au commissariat".
Les deux, pour moi, allaient ensemble : refus d'agir, incitation à pénaliser.
Je me suis "battue" pour convoquer la gamine et le père, menaçant justement d'un dépôt de plainte si ils ne se déplaçaient pas, je leur fait un sketch mémorable sur mon honneur et tout le tralala. Et en punition, j'ai demandé à l'élève, puisqu'elle avait mes coordonnées, de m'envoyer une longue et jolie carte de vacances.
Elle s'est assagie depuis, partie très loin, en LEP, et m'envoie régulièrement et gentiment des nouvelles par Facebook.
Je sais que ce que je raconte fait très "bisounours", pour certains, mais je continue à penser que, quand on en a l'énergie (on ne l'a pas toujours), une réaction très forte dans sa théâtralité mais très faible dans la sanction donnée, c'est le mieux.
Amicalement,
EE
- eeNiveau 9
JC Milner parle en fait de "petite bourgeoisie intellectuelle" - ce que c'est que de ne pas vérifier avant de poster!
- moonGrand sage
Autant je suis d'accord avec ce que tu dis sur le manque de reconnaissance et de valorisation intellectuelle, autant il me semble que ce n'est juste pas possible....
Les textos d'insultes, les coup de fil anonymes, c'est une chose. Mais ee, est-ce que tu as eu déjà mal au ventre avant de prendre une classe, vraiment? Cette trouille qui te tord parce que tu as peur qu'il t'arrive quelque chose physiquement, parce que tu sais qu'en face de toi tu as un ou plusieurs mômes qui sont effectivement dans une telle détresse - et ça je ne le nie pas - qu'ils ont en eux une violence impossible à canaliser et qui peut sortir à tout moment, et que l'institution n'a rien à te proposer à par les prendre en cours et prier pour que ça ne pète pas? Tu sais, le même genre de bouillonnement qui fait que des bagarres explosent pour un oui, au point qu'un adulte se sente aussi réellement en danger? Le malaise enseignant c'est aussi ça, et je suis prête à parier qu'on est beaucoup dans ce cas là. Et çà n'a rien à voir avec la casquette de Bovary ou n'importe quel chahut organisé, que ce soit d'hier ou aujourd'hui.
ee a écrit:
Il me semble que le malaise enseignant, s'il existe, est plus lié à ça qu'aux élèves.
Les textos d'insultes, les coup de fil anonymes, c'est une chose. Mais ee, est-ce que tu as eu déjà mal au ventre avant de prendre une classe, vraiment? Cette trouille qui te tord parce que tu as peur qu'il t'arrive quelque chose physiquement, parce que tu sais qu'en face de toi tu as un ou plusieurs mômes qui sont effectivement dans une telle détresse - et ça je ne le nie pas - qu'ils ont en eux une violence impossible à canaliser et qui peut sortir à tout moment, et que l'institution n'a rien à te proposer à par les prendre en cours et prier pour que ça ne pète pas? Tu sais, le même genre de bouillonnement qui fait que des bagarres explosent pour un oui, au point qu'un adulte se sente aussi réellement en danger? Le malaise enseignant c'est aussi ça, et je suis prête à parier qu'on est beaucoup dans ce cas là. Et çà n'a rien à voir avec la casquette de Bovary ou n'importe quel chahut organisé, que ce soit d'hier ou aujourd'hui.
- MelanieSLBDoyen
Moon, . Je ne suis pas dans un collège classé, mais j'ai au moins deux élèves très violents (soucis avec la justice pour des atteintes physiques à des adultes en dehors du collège) par classe, et je peux te dire, EE, que mon malaise vient d'abord et avant tout de là, même si ce que tu dis n'est pas faux.
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La réforme du collège en clair : www.reformeducollege.fr .
Et pour ceux qui voudraient en comprendre quelques fondements idéologiques:
De l’école, Jean-Claude Milner, visionnaire en 1984 (ça ne s'invente pas!) de ce qui nous arrive: "On ne dira pas que les enseignants sont l'appendice inutile d'une institution dangereuse et presque criminelle; on dira seulement qu'ils doivent devenir Autres: animateurs, éducateurs, grands frères, nourrices, etc. La liste est variable. Que, par là, les enseignants cessent d’être ce qu'ils doivent être, c'est encore une fois sortir de la question. On ne dira pas que les enseignants n'ont pas à exister, mais qu'ils ont à exister Autrement. Que cette Autre existence consiste à renoncer à soi-même pour disparaître dans la nuit éducative et s'y frotter, tous corps et tous esprits confondus, avec les partenaires de l'acte éducatif - manutentionnaires, parents, élèves, etc. -, seul un méchant pourrait en prendre ombrage." (page 24)
- eeNiveau 9
Evidemment, j'ai la chance de n'avoir jamais été confrontée à quelque chose de vraiment grave - mais peut-être aussi ma tendance spontanée à relativiser par le sens du comique de situation me fait-il voir comme "pas grave" quelque chose qui paraitrait "très grave" à un autre collègue.
Là dessus, chacun vit et ressent les choses différemment, et le même événement peut être vécu comme terrible, comme très embêtant ou comme juste anecdotique en fonction de mille paramètres personnels. C'est vrai qu'un grand gaillard de 17 ans, pesant 40 kg de plus que moi, j'ai quand même toujours tendance à le voir comme un "petit", et que ça relativise beaucoup ce qu'il peut dire ou faire. Mais ce ressenti différent pour chacun peut donner lieu à témoignage, pas à débat.
Ensuite, je pense que comme nous sommes supposés accueillir quasiment 100% d'une classe d'age jusqu'à 16 ans, il y a forcément dans le lot - comme dans le métro, dans ma rue ou à la piscine - quelques individus capables de péter les plombs de façon dangereuse. Je ne propose pas de "sanctuariser" les établissements scolaires, et de considérer qu'un crime qu'y s'y commettrait (viol, violences en réunion avec arme...) ne relève pas de la justice!
Je pense simplement aux situations de tension, parfois de tension très vive, entre élèves et adultes (ou entre élèves entre eux). Tension très vive qui peut aller jusqu'à l'insulte, jusqu'à la grosse connerie proférée en quittant une salle en claquant la porte, jusqu'à la mauvaise blague type coup de fil ou SMS anonyme, chewing gum dans une serrure, jet de cartouche d'encre, grosse baston entre quelques gamins... toutes choses plus fréquentes que l'agression physique stricto sensu.
Et là, je pense que nous - adultes - serions plus détendus si nous étions moins écrasés par ailleurs par la dégradation de notre métier, et qu'être plus détendus nous rendrait plus indulgents. Pas "indulgents" au sens : on laisse faire. "Indulgents" au sens : on prend en charge, par l'explication et la sanction, sans chercher à être trop sévère car on n'a rien à prouver, rien à venger, et que le maximum d'efficacité ne passe pas - le plus souvent - par le maximum de sévérité.
EE
Là dessus, chacun vit et ressent les choses différemment, et le même événement peut être vécu comme terrible, comme très embêtant ou comme juste anecdotique en fonction de mille paramètres personnels. C'est vrai qu'un grand gaillard de 17 ans, pesant 40 kg de plus que moi, j'ai quand même toujours tendance à le voir comme un "petit", et que ça relativise beaucoup ce qu'il peut dire ou faire. Mais ce ressenti différent pour chacun peut donner lieu à témoignage, pas à débat.
Ensuite, je pense que comme nous sommes supposés accueillir quasiment 100% d'une classe d'age jusqu'à 16 ans, il y a forcément dans le lot - comme dans le métro, dans ma rue ou à la piscine - quelques individus capables de péter les plombs de façon dangereuse. Je ne propose pas de "sanctuariser" les établissements scolaires, et de considérer qu'un crime qu'y s'y commettrait (viol, violences en réunion avec arme...) ne relève pas de la justice!
Je pense simplement aux situations de tension, parfois de tension très vive, entre élèves et adultes (ou entre élèves entre eux). Tension très vive qui peut aller jusqu'à l'insulte, jusqu'à la grosse connerie proférée en quittant une salle en claquant la porte, jusqu'à la mauvaise blague type coup de fil ou SMS anonyme, chewing gum dans une serrure, jet de cartouche d'encre, grosse baston entre quelques gamins... toutes choses plus fréquentes que l'agression physique stricto sensu.
Et là, je pense que nous - adultes - serions plus détendus si nous étions moins écrasés par ailleurs par la dégradation de notre métier, et qu'être plus détendus nous rendrait plus indulgents. Pas "indulgents" au sens : on laisse faire. "Indulgents" au sens : on prend en charge, par l'explication et la sanction, sans chercher à être trop sévère car on n'a rien à prouver, rien à venger, et que le maximum d'efficacité ne passe pas - le plus souvent - par le maximum de sévérité.
EE
- eeNiveau 9
Moon, je relis ton message et je me dis qu'effectivement, une classe ressemblant à ce que tu décris, j'en ai eu une une fois. Des DP6, cumulant toutes les souffrances de la vie, et y réagissant comme de jeunes fauves sans limites. J'ai beaucoup souffert avec cette classe parce que, la plupart du temps, je n'arrivais pas à faire cours, je me sentais nulle, épuisée, j'étais fréquemment bordélisée, ou me heurtais à un mur d'indifférence hostile, rien ne marchait etc. Mais en même temps, non, je n'ai jamais eu peur ni d'eux en général, ni de l'un d'entre eux en particulier. Je ne peux pas l'expliquer, c'est comme si, quand j'arrive dans l'établissement comme prof, je savais intimement que ce ne sont "que" des ados, et que j'en déduisais - peut-être à tort - qu'ils ne peuvent pas me faire de mal.
AMicalement,
EE
AMicalement,
EE
- DhaiphiGrand sage
Que te faut-il de plus ?ee a écrit: J'ai beaucoup souffert avec cette classe parce que, la plupart du temps, je n'arrivais pas à faire cours, je me sentais nulle, épuisée, j'étais fréquemment bordélisée, ou me heurtais à un mur d'indifférence hostile,
Tu viens pour apprendre (pas pour être éduqué), tu bosses, tu respectes les règles sinon tu dégages.
Voilà qui devrait être la règle !
_________________
De toutes les écoles que j’ai fréquentées, c’est l’école buissonnière qui m’a paru la meilleure.
[Anatole France]
J'aime les regretteurs d'hier qui voudraient changer le sens des rivières et retrouver dans la lumière la beauté d'Ava Gardner.
[Alain Souchon]
- Docteur OXGrand sage
Dhaiphi a écrit:Que te faut-il de plus ?ee a écrit: J'ai beaucoup souffert avec cette classe parce que, la plupart du temps, je n'arrivais pas à faire cours, je me sentais nulle, épuisée, j'étais fréquemment bordélisée, ou me heurtais à un mur d'indifférence hostile,
Tu viens pour apprendre (pas pour être éduqué), tu bosses, tu respectes les règles sinon tu dégages.
Voilà qui devrait être la règle !
+1, le reste ce n'est que de la poudre de perlinpinpin.
- eeNiveau 9
Chers Dhaiphi et Ox,
Si vous faites l'effort de pratiquer l'attention que vous réclamez légitimement des élèves, vous constaterez que ce fil part d'une "enquête de victimisation" menée auprès des enseignants.
La question n'est pas : telle situation en classe est-elle intolérable? (ce que j'ai décrit de cette 3eme était intolérable)
Mais : vous êtes vous senti en danger, avez-vous été agressé etc? (ce qui n'est pas mon cas).
A propos, vraie question, si l'on excepte des enfants qui seraient à l'évidence mieux dans un enseignement adapté (hopital de jour, ULIS, SEGPA et j'en oublie), où les places sont hélas trop rares, n'en reste-t-il pas un certain nombre qu'il faut bien scolariser, et qui posent quelques problèmes, surtout quand ils sont plusieurs dans une même classe? Vous croyez que multiplier les conseils de dis serait LA réponse?
EE
Si vous faites l'effort de pratiquer l'attention que vous réclamez légitimement des élèves, vous constaterez que ce fil part d'une "enquête de victimisation" menée auprès des enseignants.
La question n'est pas : telle situation en classe est-elle intolérable? (ce que j'ai décrit de cette 3eme était intolérable)
Mais : vous êtes vous senti en danger, avez-vous été agressé etc? (ce qui n'est pas mon cas).
A propos, vraie question, si l'on excepte des enfants qui seraient à l'évidence mieux dans un enseignement adapté (hopital de jour, ULIS, SEGPA et j'en oublie), où les places sont hélas trop rares, n'en reste-t-il pas un certain nombre qu'il faut bien scolariser, et qui posent quelques problèmes, surtout quand ils sont plusieurs dans une même classe? Vous croyez que multiplier les conseils de dis serait LA réponse?
EE
- JEMSGrand Maître
Il est évident que le conseil de discipline est un échec, mais nous ne devons pas porter seuls le poids de cet échec. Ma (mes) missions se limitent à l'enseignement, je ne suis pas pédo-psychatre, médecin, éducateur spécialisé... Que l'Education Nationale assume sa politique d'abandon des élèves fragiles, désolé, mais si tu commences à mettre les pieds dans le vécu de certains enfants, tu te retrouves face à un gouffre immense dans lequel tu peux facilement te perdre.
- MoonchildSage
Agressé non, mais menacé oui ; et quel que soit le danger réel de mise en application des ces menaces, je trouve qu'elles se suffisent à elles-mêmes pour affirmer que c'est une situation inacceptable.ee a écrit:La question n'est pas : telle situation en classe est-elle intolérable? (ce que j'ai décrit de cette 3eme était intolérable)
Mais : vous êtes vous senti en danger, avez-vous été agressé etc? (ce qui n'est pas mon cas).
Les conseils de discipline ne sont pas LA réponse, mais l'impunité effective qui découle de sanctions "éducatives" consistant bien souvent à discuter longuement avec l'élève afin de lui faire dire pourquoi il est aussi méchant avant de lui donner une troisième dernière chance est encore moins LA réponse surtout quand l'insolence et la provocation tendent à devenir la norme comportementale d'une proportion non négligeable d'élèves et que l'insulte s'érige en mode de communication courant.
- PlumeNiveau 6
Merci pour cet article et pour la discussion qui en découle !
EE, je trouve ton point de vue très intéressant et je partage ton ressenti.
Il me semble que lorsqu'on arrive au conseil de discipline, c'est en quelque sorte un échec : on doit se protéger parce qu'on n'a pas su trouver de solution au problème posé. C'est un constat dérangeant mais qui ne signifie pas que tout est la faute de l'équipe éducative : nous manquons de moyens, de personnel spécialisé, de structures... Et puis parfois le problème dépasse largement le cadre de l'école.
Malgré tout, l'exclusion n'est pas une vraie solution : le problème n'est pas résolu, il va se manifester ailleurs pendant que l'établissement récupère un autre élève exclu, qui a l'avantage d'être au départ inconnu de tous. Et puis tout recommence.
Du coup, il doit y avoir sanction, mais la sanction doit être exemplaire, définir clairement la limite et en ce sens, la "sanction théâtralisée" me semble une bonne option, certainement utile à tous... lorsqu'elle fonctionne bien sûr.
Cela ne veut pas dire qu'il faut tolérer quoi que ce soit, en particulier lorsqu'on est volé, humilié, menacé, etc...
Évidemment, là on sort du cadre purement scolaire et il est inadmissible que ce genre de violence pénètre à l'école, ou même que l'on ait à subir cela aux abords de l'établissement.
Bref, tout ça pour dire qu'il me semble qu'il y a deux volets au problème :
- le volet éducatif, qui peut fonctionner pour une majorité d'élèves : petits groupes, tutorat, psychologue scolaire (je ne sais même pas si ça existe ), pédagogie adaptée... système de punitions et sanctions, aussi, évidemment
- le volet judiciaire : faire respecter la loi et surtout être en mesure de protéger élèves et adultes des violences
Ce qui rend les choses compliquées, c'est que dans bon nombre d'établissements difficiles, le rapport de force est inversé : la cité fait la loi dans l'établissement. Dans mon ancien établissement, beaucoup d'élèves (et quelques adultes) étaient violentés mais personne ne parlait de peur des représailles, non pas dans l'établissement mais dans la cité. Là on n'est plus en mesure de protéger qui que ce soit. J'ai un élève qui s'est fait fracassé la tête sur le trottoir à coups de pied, filmé par ses camarades... Et la loi du silence. Comment travailler dans ces conditions ? C'est qu'il y a un dysfonctionnement, mais à qui la faute ?
Malgré tout, je peux dire que dans cet établissement, les élèves étaient malgré tout de simples enfants pour la plupart ; moi non plus je n'ai jamais eu peur en classe (j'ai pourtant vécu l'intimidation physique assortie de paroles menaçantes) et je pense que les réponses à apporter à ces enfants doivent être éducatives. Mais cela ne peut pas fonctionner dans un tel climat d'impunité et d'insécurité. Les conseils de discipline peuvent limiter la casse mais ne peuvent pas modifier ce climat insupportable.
EE, je trouve ton point de vue très intéressant et je partage ton ressenti.
Il me semble que lorsqu'on arrive au conseil de discipline, c'est en quelque sorte un échec : on doit se protéger parce qu'on n'a pas su trouver de solution au problème posé. C'est un constat dérangeant mais qui ne signifie pas que tout est la faute de l'équipe éducative : nous manquons de moyens, de personnel spécialisé, de structures... Et puis parfois le problème dépasse largement le cadre de l'école.
Malgré tout, l'exclusion n'est pas une vraie solution : le problème n'est pas résolu, il va se manifester ailleurs pendant que l'établissement récupère un autre élève exclu, qui a l'avantage d'être au départ inconnu de tous. Et puis tout recommence.
Du coup, il doit y avoir sanction, mais la sanction doit être exemplaire, définir clairement la limite et en ce sens, la "sanction théâtralisée" me semble une bonne option, certainement utile à tous... lorsqu'elle fonctionne bien sûr.
Cela ne veut pas dire qu'il faut tolérer quoi que ce soit, en particulier lorsqu'on est volé, humilié, menacé, etc...
Évidemment, là on sort du cadre purement scolaire et il est inadmissible que ce genre de violence pénètre à l'école, ou même que l'on ait à subir cela aux abords de l'établissement.
Bref, tout ça pour dire qu'il me semble qu'il y a deux volets au problème :
- le volet éducatif, qui peut fonctionner pour une majorité d'élèves : petits groupes, tutorat, psychologue scolaire (je ne sais même pas si ça existe ), pédagogie adaptée... système de punitions et sanctions, aussi, évidemment
- le volet judiciaire : faire respecter la loi et surtout être en mesure de protéger élèves et adultes des violences
Ce qui rend les choses compliquées, c'est que dans bon nombre d'établissements difficiles, le rapport de force est inversé : la cité fait la loi dans l'établissement. Dans mon ancien établissement, beaucoup d'élèves (et quelques adultes) étaient violentés mais personne ne parlait de peur des représailles, non pas dans l'établissement mais dans la cité. Là on n'est plus en mesure de protéger qui que ce soit. J'ai un élève qui s'est fait fracassé la tête sur le trottoir à coups de pied, filmé par ses camarades... Et la loi du silence. Comment travailler dans ces conditions ? C'est qu'il y a un dysfonctionnement, mais à qui la faute ?
Malgré tout, je peux dire que dans cet établissement, les élèves étaient malgré tout de simples enfants pour la plupart ; moi non plus je n'ai jamais eu peur en classe (j'ai pourtant vécu l'intimidation physique assortie de paroles menaçantes) et je pense que les réponses à apporter à ces enfants doivent être éducatives. Mais cela ne peut pas fonctionner dans un tel climat d'impunité et d'insécurité. Les conseils de discipline peuvent limiter la casse mais ne peuvent pas modifier ce climat insupportable.
- Docteur OXGrand sage
ee a écrit:Chers Dhaiphi et Ox,
Si vous faites l'effort de pratiquer l'attention que vous réclamez légitimement des élèves, vous constaterez que ce fil part d'une "enquête de victimisation" menée auprès des enseignants.
La question n'est pas : telle situation en classe est-elle intolérable? (ce que j'ai décrit de cette 3eme était intolérable)
Mais : vous êtes vous senti en danger, avez-vous été agressé etc? (ce qui n'est pas mon cas).
A propos, vraie question, si l'on excepte des enfants qui seraient à l'évidence mieux dans un enseignement adapté (hopital de jour, ULIS, SEGPA et j'en oublie), où les places sont hélas trop rares, n'en reste-t-il pas un certain nombre qu'il faut bien scolariser, et qui posent quelques problèmes, surtout quand ils sont plusieurs dans une même classe? Vous croyez que multiplier les conseils de dis serait LA réponse?
EE
Pour avoir la paix dans une classe et pouvoir enfin laisser la majorité travailler tranquillement : OUI.
- A TuinVénérable
ee a écrit:
Or là où ça va mal, peut-être, c'est qu'à force de dévalorisation, d'augmentation insidieuse de notre charge de travail, de dévalorisation générale des "intellos", de prescriptions psychologisantes et moralisatrices, d'évaluations débiles... cette dimension intellectuelle, au sens large, est en voie de disparition. La culture devient quelque chose dont on a honte, au lieu d'en être fier. Elle ne nous est pas une aide, parce qu'on a envie de la partager, mais un poids, parce qu'on s'est laissé inconsciemment gagné par le bon vieux "à quoi ça sert?". A quoi ça sert, la culture? La question, est sa réponse implicite "à rien", elle est posée par Sarko bien plus fort que par nos cancres.
Il me semble que le malaise enseignant, s'il existe, est plus lié à ça qu'aux élèves.
Comme d'autres, je ne suis pas 'accord avec ce point de vue : à partir du moment où quelques élèves se comportent dans l'enceinte scolaire comme des délinquants, et que rien n'est fait pour enrayer les choses et les faire se tenir à carreau, cela peut vite provoquer une ambiance de malaise. D'autant plus si la direction de l'endroit ne suit pas et préfère "punir" les enseignants plutôt que les élèves, en faisant peser sur eux différentes sortes de pressions. Les élèves sentent vite si l'établissement est tenu, ou s'ils ont le droit de tout faire sans que mesure soit prise à l'encontre de leurs bêtises.
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