Re: montrer Nuit et Brouillard?

christophevan a écrit:bonjour,

Avec mes 3èmes, j'en suis à la seconde GM.
Demain matin, de 8 à 9, je vais parler de l'Europe allemande, et donc des camps.
Je souhaitais leur montrer Nuit et Brouillard. Mais j'ai revu le film ce matin, et il y a des extraits vraiment terribles (les morts évidemment, mais pas seulement ; la suggestion, sur la description de l'hôpital, fut pour moi aussi très éprouvant). Ce film peut aussi faire l'objet de critiques sur le fond (aucune évocation de la responsabilité de Vichy, une seule évocation de Juifs...), mais il est pour moi essentiel, étant donné qu'il est le premier à avoir présenté les camps et leur organisation.

donc question aux collègues d'HG : montrez vous tous le film ou faites vous une sélection des scènes? si oui, lesquelles? Quels problèmes avez vous rencontrés?

+ censure du gendarme de Pithiviers.

Cripure a écrit:Rikki, si à 18 ans, vous m'aviez traité d'ado, je vous aurais giflée. Faut quand même pas exagérer avec le développement des jeunes filles, elles sont bien plus mûres que les garçons bien plus tôt. En revanche, elles ont bien compris que l'époque est au maternage effréné et elles ont appris, c'est bien logique, à chouiner puisque leur entourage leur passe tout quand elles chouinent. Ca vous agace que d'aucuns le disent ? Tant pis.
Pour Nuit & Brouillard, il faut bien voir que ce film ne s'adresse qu'à l'émotion, d'un bout à l'autre. Bien sûr qu'il frappe. Moi, il me met la larme à l'oeil (mais je chouine quand je lis qu'on trouve Gervaise verte sous son escalier, alors vous pensez, là...). Des générations entières ont vu ce film à 15-16 ans. Je constate qu'elles n'en sont pas mortes.

On parle ici d'élèves de Troisième. Donc, de 14 ans, pas de 18.

J'ai vu Nuit et Brouillard au Collège. Je ne suis pas morte. J'ai juste fait des cauchemars pendant quelques semaines, cauchemars qui sont revenus de manière épisodique pendant les années qui ont suivi.

Je crois que je ne suis pas la seule à avoir vécu des moments très durs pendant ce type de projection, si j'en juge par les films qui en parlent, comme celui de Claude Berry (j'ai oublié le titre, un de ses nombreux films autobiographiques) et plus récemment "Le Nom des gens".

Les jeunes filles sont plus mûres que les garçons, certes. Ca leur permet peut-être justement de percevoir plus tôt la gravité de certaines choses.

Je ne regrette qu'une seule chose, c'est de ne pouvoir passer en complément Au revoir les enfants, de Louis Malle. Une autre vision du massacre.
Je pleure toujours à la fin. Peut-être parce que je sais ce qui s'est passé pour le jeune garçon et le père Jean, arrêtés par la Gestapo.

Pourquoi diable ne pouvez-vous pas le faire ? Le DVD est disponible pour moins de 15 euros…

Abraxas a écrit:Pourquoi diable ne pouvez-vous pas le faire ? Le DVD est disponible pour moins de 15 euros…

Jusqu'à plus ample informé, je n'ai pas le droit de passer un film dans son intégralité.

ysabel a écrit:J'ai bcp d'élèves de 1ère qui ne font pas la différence entre nazi/résistant et ne savent pas ce qu'est un camp de concentration (des collègues qui font passer tous les ans les oraux d'histoire en ST nous racontent justement des horreurs), s'ils avaient vu ce film, ils s'en souviendraient car ils auraient eu les tripes remuées.

Je l'ai vu en 3ème (j'avais une année d'avance) et si j'ai été horrifiée par ce que des hommes pouvaient faire à d'autres hommes je n'ai ni pleuré, ni fait des cauchemars...
Bon je n'ai jamais non plus pleuré devant un livre, un film, une chanson...
et c'est vrai que, du coup, les chouineuses ou chouineurs me gonflent (mais ça c'est une autre histoire)

pourtant, je sais qu'en 3°, ils passent une grande partie de l'année dessus avec des extraits de ce film ou d'autres, et moi j'en (comme pas mal d'autres profs de lettres) j'en remets une couche avec Un Secret (et je leur montre le film où justement Nuit et Brouillard est montré à ees élèves), d'autres profs travaillent surLe journal d'Anne Franck..donc, bon, c'est de la mauvaise foi/volonté..

Thalia de G a écrit:

Abraxas a écrit:Pourquoi diable ne pouvez-vous pas le faire ? Le DVD est disponible pour moins de 15 euros…

Jusqu'à plus ample informé, je n'ai pas le droit de passer un film dans son intégralité.

ben, moi je le fais, je passe Ridicule, Un secret chaque année.Et que j'aille en prison pour celà..

Ma collègue montre tous les ans "Au revoir les enfants" à ces 3e. Cela les touche beaucoup car ils s'identifient forcément aux adolescents de ce film et, de plus, cela s'est passé non loin du collège.

Je n'ai jamais passé "Nuit et brouillard" à mes élèves. L'an dernier, on a travaillé sur un document passé sur Arte où des déportés racontaient leur déportation. Juste des voix sur des images d’Auschwitz.

Thalia de G a écrit:

Abraxas a écrit:Pourquoi diable ne pouvez-vous pas le faire ? Le DVD est disponible pour moins de 15 euros…

Jusqu'à plus ample informé, je n'ai pas le droit de passer un film dans son intégralité.

Première nuvelle.
Je piétine la loi depuis des années. Et je compte bien continuer.

Bonne lecture
http://www.cinehig.clionautes.org/spip.php?article98#5
http://www.education.gouv.fr/cid50451/menj0901120x.html

Instructeurpublic a écrit:Je reste persuadé que lorsqu'on arrive soi-même complètement ébouriffé rien qu'à l'idée de projeter nuit et brouillard on devient de facto un facteur de déstabilisation émotionnelle pour l'ensemble de la classe. Je pense qu'il faut appréhender les choses avec un regard historique sous-tendant une réflexion de fond sur la nature humaine et se garder de verser dans la sensiblerie ou le sensationnalisme.

L'histoire c'est aussi les émotions.

Je suis d'accord avec les propos d'Abraxas et Stered.

Je n'ai pas eu encore de 3e mais lorsque j'en aurai je leur passerai ce film en leur ayant présenté avant.

Durruti a écrit:

Instructeurpublic a écrit:Je reste persuadé que lorsqu'on arrive soi-même complètement ébouriffé rien qu'à l'idée de projeter nuit et brouillard on devient de facto un facteur de déstabilisation émotionnelle pour l'ensemble de la classe. Je pense qu'il faut appréhender les choses avec un regard historique sous-tendant une réflexion de fond sur la nature humaine et se garder de verser dans la sensiblerie ou le sensationnalisme.

L'histoire c'est aussi les émotions.

C'est d'abord les émotions, et après il faut dépassionner pour comprendre. L'idéal c'est parvenir à tenir les deux bouts de la chaine. Mais quoi qu'il en soit, les émotions n'appellent pas forcément sensiblerie et sensationnalisme.