élève douée

Je n'ai pas lu tout le fil, donc pardon si ça arrive comme un cheveu sur la soupe. DC va dire que je radote, vu qu'elle connaît cette histoire et qu'elle y a contribué , mais...

...l'élève qui m'a le plus marquée, et qui continue à le faire car j'ai des échos par son instit actuelle : père ne sachant pas lire, redoublement du Ce1, arrivée en Ce2 sans rien déchiffrer, comportement difficile, RASED n'y croyant plus et ayant abandonné l'aide lexique.
Eh bien il m'a littéralement épatée sur la qualité et la précision de son vocabulaire, ses questions sur Dieu, son humour... Il me reconstituait (à l'oral) des poèmes à trous, avec les mots justes, ceux choisis par l'auteur. Sur le cul la Mufab.

Oui, il ne faut surtout pas cataloguer trop tôt les enfants, et surtout ne rien prédire à l'avance, - et sans être pour autant démago (car on peut très bien dire à un enfant : "là tu as des lacunes", "Tu ne sais pas lire mais on va réapprendre : tu verras après, tu pourras exprimer tout ça par écrit...", "Comment ça se fait que tu bloques en maths ?" etc.).

Et comme vous, je pense sincèrement que les enfants en difficulté sont encore plus sensibles que d'autres à l'introduction en classe d'une Culture commune -qui dépasse l'école-, qu'ils ne reçoivent pas forcément chez eux, mais qui est encore un lien fort (l'un des derniers ?) entre les hommes et les générations, de quelque milieu qu'ils soient.
En fait je suis en train de me dire que seule l'école a encore ce pouvoir de transmission.

Merci Mufab, Akwa et Véronique.

Je n'ai plus trop la tête au forum en ce moment, mais vous lire me fait du bien.

C'est triste qu'on soit obligés de cataloguer "surdoué" un gamin juste "bien doué", faisant de l'intelligence une anomalie. C'est triste qu'on soit obligé de cataloguer "handicapé" un gamin juste "mou du genou" ou "lent au démarrage" ou "méga flemmard", au lieu de lui botter le train tout en lui donnant des billes pour avancer.

Mais ça fait du bien de lire des gens de bon sens et de conviction qui se battent pour que tout le monde progresse au max de ses propres possibilités.

En même temps, il faut bien admettre, Rikki, que "botter le train" est devenu extrêmement compliqué. J'enrage quand je vois tous ces petits normalement fainéants et tout aussi normalement intelligents qu'on enferme peu à peu dans l'indigence à force de ne jamais rien exiger d'eux.
Pas de devoirs en primaire - poussé dans certaines ZEP (la mienne notamment) jusqu'à aucun exercice de mémoire, aucune leçon. Bref, aucune habitude de travail jusqu'en Sixième. Or, chacun sait que la préadolescence, c'est l'âge idéal pour découvrir l'effort...
Des élèves de collège qui considèrent qu'apprendre un sonnet en deux semaines, c'est exorbitant, n'apprennent aucune leçon, ne font pas les punitions.
Une administration qui renâcle de plus en plus à des sanctions un peu plus significatives - ou alors, nous sommes priés d'assurer la surveillance de nos heures de colle nous-mêmes.
Des textes qui nous mettent des bâtons dans les roues, insistant toujours sur les devoirs des enseignants, jamais sur ceux des élèves.
Des "pédagogues" prompts à nous culpabiliser et à faire des élèves les victimes toujours irresponsables d'un système abject (mais pourquoi diable le conserve-t-on, alors ?).
Une avocate à la con qui vient procéduriser tout ça.
Des parents de plus en plus contestataires, exigeant le retrait de ce zéro (aucune conjugaison sue le jour du contrôle pourtant annoncé de longue date), contestant telle punition et jurant leurs grands dieux que Chéri ne la fera pas.
Je suis lasse de régler ces questions dans le bureau du CDE. Maintenant, il m'arrive de répondre : "Si vous voulez faire de votre enfant un imbécile, après tout, c'est votre problème, pas le mien."

Le bottage de cul pourrait sauver sans doute aucun une bonne moitié de nos cancres qui n'a contre soi qu'une tendance bien naturelle à la paresse. En nous l'interdisant, on condamne ces enfants.

Dans ce métier, on balance constamment entre la passion et le pessimisme. Hier j'étais bien dans le creux. Ce matin je regarde deux-trois rédac de 3ème, et j'y recrois !

D'accord sur ton message, Véro (si tu le permets), notamment sur les parents qui contestent les punitions (c'est ce qu'il y a de pire, que de remettre en cause la sanction, même si elle peut paraître injuste, et à travers elle l'autorité : c'est perturbant pour des enfants, que de devoir choisir qui a raison, du prof ou de ses parents) sauf sur les devoirs en primaire : l'exception est au contraire de n'en pas donner.

V.Marchais a écrit:En même temps, il faut bien admettre, Rikki, que "botter le train" est devenu extrêmement compliqué. J'enrage quand je vois tous ces petits normalement fainéants et tout aussi normalement intelligents qu'on enferme peu à peu dans l'indigence à force de ne jamais rien exiger d'eux.(...)
Je suis lasse de régler ces questions dans le bureau du CDE. Maintenant, il m'arrive de répondre : "Si vous voulez faire de votre enfant un imbécile, après tout, c'est votre problème, pas le mien."

Le bottage de cul pourrait sauver sans doute aucun une bonne moitié de nos cancres qui n'a contre soi qu'une tendance bien naturelle à la paresse. En nous l'interdisant, on condamne ces enfants.

Véronique, est-ce que tu accepterais que je publie ton texte sur le blog que je tiens, soit en l'état, soit que tu le remanies, complète un peu (si tu en as le temps) ? Je comprendrais tout à fait que tu préfères le garder ici sur le forum, cela dit. J'aime bien avoir des échos d'expérience, pour multiplier les sources et enfoncer le clou...

Mufab a écrit:Je n'ai pas lu tout le fil, donc pardon si ça arrive comme un cheveu sur la soupe. DC va dire que je radote, vu qu'elle connaît cette histoire et qu'elle y a contribué , mais...

...l'élève qui m'a le plus marquée, et qui continue à le faire car j'ai des échos par son instit actuelle : père ne sachant pas lire, redoublement du Ce1, arrivée en Ce2 sans rien déchiffrer, comportement difficile, RASED n'y croyant plus et ayant abandonné l'aide lexique.
Eh bien il m'a littéralement épatée sur la qualité et la précision de son vocabulaire, ses questions sur Dieu, son humour... Il me reconstituait (à l'oral) des poèmes à trous, avec les mots justes, ceux choisis par l'auteur. Sur le cul la Mufab.

Oui, il ne faut surtout pas cataloguer trop tôt les enfants, et surtout ne rien prédire à l'avance, - et sans être pour autant démago (car on peut très bien dire à un enfant : "là tu as des lacunes", "Tu ne sais pas lire mais on va réapprendre : tu verras après, tu pourras exprimer tout ça par écrit...", "Comment ça se fait que tu bloques en maths ?" etc.).

Et comme vous, je pense sincèrement que les enfants en difficulté sont encore plus sensibles que d'autres à l'introduction en classe d'une Culture commune -qui dépasse l'école-, qu'ils ne reçoivent pas forcément chez eux, mais qui est encore un lien fort (l'un des derniers ?) entre les hommes et les générations, de quelque milieu qu'ils soient.
En fait je suis en train de me dire que seule l'école a encore ce pouvoir de transmission.

je suis tentée de te faire la même demande qu'à Véronique et qu'en plus tu es PE avec des expériences que je n'aurai jamais.

Ben fais plutôt un renvoi de ton blog vers le message de Véronique ici

https://www.neoprofs.org/t38955p120-eleve-douee#1069026

Idem : https://www.neoprofs.org/t38955p120-eleve-douee#1068914

Excusez-moi, (et l'on va encore m'accuser de polémiquer, m'en fous) mais n'allez pas répandre l'idée que les instits ne donnent pas de devoirs (oui, j'enfonce le clou moi aussi, mais on ne peut pas laisser dire ça.)

survivor a écrit:

condorcet a écrit:Faire de John Rawls, l'un des grands théoriciens de l'égalité des chances un sociologue marxiste, voilà qui laisse songeur. Il faudra vraiment m'expliquer comment libéralisme et marxisme sont d'aimables frères intellectuels.

Certes, et je ne te l'expliquerai pas . J'ai écrit une belle connerie, un peu hâtivement, emporté par mon indignation . Mea culpa
Rawls d'ailleurs, est assez lucide quand il conditionne l'égalité des chances aux capacités égales. En ce sens, l'égalité sociale des chances doit aussi tenir compte des inégalités naturelles et intellectuelles, qu'il ne nie pas. C'est là une injustice de fait dont il faut tenir compte. Il n'y a bien qu'au Ministère de l’Éducation Nationale qu'on nie ces inégalités-là... pour mieux supprimer, au nom des impératifs financiers, toute alternative digne de ce nom au parcours scolaire classique. Mais je m'égare à nouveau...

Merci à toi en tout cas pour le recadrage.

Je me suis un peu emporté cette nuit.
Même le marxisme prêté à Bourdieu reste à mes yeux candides sujet à caution.
Pour le reste, nous faisons/faisions/ferons classe pour tout le monde (ou tentons de le faire, même celles et ceux qui pensent le contraire).

Pas de problème, Marie Laetitia. J'ai peur de manquer de temps pour donner à ce coup de gueule une forme plus articulée mais si ça te convient ainsi, tu peux en disposer, commenter, compléter...
C'est quoi, ton blog ?

John a écrit:Ben fais plutôt un renvoi de ton blog vers le message de Véronique ici

https://www.neoprofs.org/t38955p120-eleve-douee#1069026

c'est gentil, merci, mais j'essaie de ne pas faire que des billets de renvoi (ne serait-ce qu'à cause du manque de pérennité des messages sur les forums) et puis j'aime bien quand les choses sont un peu développées.

Moi ce sera avec plaisir que je développerai l'histoire de cet élève - d'autant qu'il m'a permis de rencontrer, sur un forum d'enseignants du primaire, des instits géniales (si, si, faites pas les modestes, les filles), qui m'ont fait découvrir une autre façon d'appréhender l'apprentissage de la lecture, et sans lesquelles je ne serai pas là.

Je m'y mets ce soir ! Génial !

Mufab a écrit:Moi ce sera avec plaisir que je développerai l'histoire de cet élève - d'autant qu'il m'a permis de rencontrer, sur un forum d'enseignants du primaire, des instits géniales (oui, oui, faites pas les modestes, les filles), qui m'ont fait découvrir une autre façon d'appréhender l'apprentissage de la lecture, et sans lesquelles je ne serai pas là.

Je m'y mets ce soir ! Génial !

Sapotille, tu connais par coeur ! Je vais essayer de retrouver le fil initial sur E*P, pour l'historique.

V.Marchais a écrit:Pas de problème, Marie Laetitia. J'ai peur de manquer de temps pour donner à ce coup de gueule une forme plus articulée mais si ça te convient ainsi, tu peux en disposer, commenter, compléter...
C'est quoi, ton blog ?

une chose qui mélange histoire, recherche et enseignement :lol: là http://le-gout-des-archives.blogspot.com/
L'idée est d'en faire une vitrine sur la vie des chercheurs et des profs. Jusqu'ici il y a eu essentiellement ma propre expérience. Mais l'idée de l'ouvrir aux autres me semble utile.

Merci en tout cas (j'imaginais en effet que le temps était chose précieuse en ce moment )

Mufab merci !

Mufab a écrit:Excusez-moi, (et l'on va encore m'accuser de polémiquer, m'en fous) mais n'allez pas répandre l'idée que les instits ne donnent pas de devoirs (oui, j'enfonce le clou moi aussi, mais on ne peut pas laisser dire ça.)

Ça dépend vraiment des écoles.

Jamais rencontré d'instits ne donnant pas de devoirs.

Et je m'arrête là pour les polémiques.

Mufab a écrit:Jamais rencontré d'instits ne donnant pas de devoirs.

Ah si, excuse-moi : dans l'enseignement spécialisé. Moi-même, lors de mon année en hôpital de jour accueillant des enfants présentant des troubles psychiatriques avérés n'en donnais pas. Ou tout au plus une phrase à relire.

V.Marchais a écrit:J'enrage quand je vois tous ces petits normalement fainéants et tout aussi normalement intelligents qu'on enferme peu à peu dans l'indigence à force de ne jamais rien exiger d'eux.

C'est vrai qu'ils sont de plus en plus indolents... L'exigence : voilà le maître-mot. C'est le cercle vicieux. Comme ils sont de moins en moins capables - car de moins en moins sollicités - on exige de moins en moins, donc ils sont de moins en moins capables, jusqu'à disparition programmée de la moindre capacité. Cela dit, il n'y a pas que ça. Comment un gamin aujourd'hui pourrait-il être motivé par ce qui demande un effort et un investissement durable alors que les sirènes de la surconsommation, de l'immédiateté, de la technologie, des jeux vidéos, des réseaux sociaux, des paradis artificiels et du sexe (je vais passer pour un gros réac, moi ) cornaquent toujours plus précocement à ses oreilles ?

Mufab a écrit:Jamais rencontré d'instits ne donnant pas de devoirs. Tant mieux. Ce n'est pas mon cas.

Et je m'arrête là pour les polémiques.

Quelles polémiques? Les remarques sur ce que nous pouvons constater ne sont pas des attaques contre Mufab ou le corps des PE...

Oui, je sais.
Tout cela m'a été expliqué maintes fois : un peu parano, me trouvant nulle, je transposerais le mépris que j'aurais subi sur les membres du forum, me sentirais visée par toutes les remarques à l'encontre des instits, et alimenterais les polémiques de façon malsaine. Ce n'est pas vrai (j'ai une confiance en moi -et en mes collègues PE- énorme . Du coup vous pouvez laisser tomber ces sous-entendus, je ne les lirai plus.) : je voulais juste rétablir une vérité générale (car son contraire était énoncé comme telle), me trouvant un tout petit mieux placée pour en parler, c'est tout, et donc devançais les remarques.
D'où mes précautions oratoires. Encore insuffisantes, mais je progresse.

D'ailleurs, en élémentaire, les devoirs ont également une fonction que l'on oublie peut-être parfois : ils créent du lien entre l'école et les parents, car ces derniers ont souvent encore (au minimum) un regard sur eux. Reflet de ce que l'on y apprend, ils font entrer l'école à la maison.
En outre, ils mettent en valeur les apprentissages de l'enfant, ses progrès, son métier d'élève, dans la famille.

C'est pourquoi j'y suis plus que favorable (dans la mesure où ils restent raisonnables et ne s'apparentent pas à une corvée qui dure des heures), comme tous les instituteurs que je connais.

Mufab a écrit:Jamais rencontré d'instits ne donnant pas de devoirs.

Et je m'arrête là pour les polémiques.

Dans ma courte carrière d'enseignante, j'en ai connu plusieurs.
Et en tant que maman de 5 enfants, plusieurs aussi dans le parcours scolaire de mes enfants ...y compris au CM2 !
Mais je suis d'accord aussi pour dire que ce n'est pas la règle et qu'ils sont minoritaires.