- KamolNiveau 9
Diriez-vous que l'Education sentimentale est un roman historique? Je pense que non, mais je peine à argumenter... Même chose pour La princesse de Clèves: étant donné la place que prend l'intrigue amoureuse dans ces romans, peut-on parler de romans historiques au même titre que Les Chouans, Quatre-vingt treize ou même Notre Dame de Paris?
- AvaExpert spécialisé
Non je ne pense pas que ça soit un roman historique. Cela dit l'Histoire tient en effet une place importante... Mais, selon moi, pas au même titre que Quatre-vingt-treize.
- SoizicNiveau 3
Un roman où le héros passe à côté de l'histoire ...
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- User5899Demi-dieu
Même si le roman met en scène l'histoire à plusieurs reprises, notamment dans la prise des Tuileries de 1848, il me semble qu'il repose plutôt sur une intrigue qui met à distance le personnage romantique (ce en quoi il rejoint, par un autre biais, Madame Bovary), les illusions de la jeunesse. A une autre époque, il évoque pour moi la Confession d'un enfant du siècle, sans dire la même chose, évidemment, mais en autorisant un parallèle social (sociétal ?).
Cela vous convient-il ?
Cela vous convient-il ?
- Reine MargotDemi-dieu
Comme Soizic, je dirais que les épisodes historiques ( notamment la révolution de 1848) montrent surtout le désengagement du héros et à quel point il passe à côté de la vie, donc de l'histoire.
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- doctor whoDoyen
Le référent du roman historique au XIXème siècle, c'est Walter Scott. Flaubert imite-t-il Scott ? Non. L'Education sentimentale n'est donc pas un roman historique.
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- KamolNiveau 9
Merci pour toutes ces réponses qui confortent mon sentiment en lui donnant des arguments. La référence à Walter Scott est effectivement décisive: trouvez le point commun entre Ivanhoé et Frédéric Moreau?
D'accord aussi pour dire que c'est autant un anti roman de formation (ou d'apprentissage) qu'un anti roman historique: Frédéric passe à côté d'une histoire qui de toute façon se révélera bien illusoire trois ans plus tard... N'est-ce pas aussi pour Flaubert une façon de montrer que tout engagement politique serait de toute façon réduit à de nouvelles illusions?
Cripure, la comparaison avec Madame Bovary est effectivement intéressante, et je pense d'ailleurs demander à mes petits chéris de lire ce grand roman.
D'accord aussi pour dire que c'est autant un anti roman de formation (ou d'apprentissage) qu'un anti roman historique: Frédéric passe à côté d'une histoire qui de toute façon se révélera bien illusoire trois ans plus tard... N'est-ce pas aussi pour Flaubert une façon de montrer que tout engagement politique serait de toute façon réduit à de nouvelles illusions?
Cripure, la comparaison avec Madame Bovary est effectivement intéressante, et je pense d'ailleurs demander à mes petits chéris de lire ce grand roman.
- jehanneNiveau 8
Moi, je le considérerai comme un roman historique, parce qu'il montre les ressorts des événements de 1848: comment on passe de février aux massacres des journées de juin, quelles forces sont à l'oeuvre (les Dambreuse, le père de la jeune fille de Nogent sur Seine dont j'ai oublié le nom...). mais un roman historique d'un nouveau genre, car le héros ne participe en rien à l'Histoire qui se fait...
Flaubert a voulu faire l'histoire d'une génération, il me semble (autour de Frédéric, il y a le socialiste, l'ouvrier utopiste... -J'oublie les noms, c'est lamentable! Si un "roman historique" se caractérise par cette ambition de fresque, L'Éduc centim en est un.
Avec tout de même le fait qu'il s'agit d'histoire quasi contemporaine. C'est peut-être ce qui fait le plus problème pour le définir comme "roman historique"...
Il y a un certain temps, l'oeuvre a été au programme des classes prépa scientifiques, pour traiter la question "L'Histoire".
Flaubert a voulu faire l'histoire d'une génération, il me semble (autour de Frédéric, il y a le socialiste, l'ouvrier utopiste... -J'oublie les noms, c'est lamentable! Si un "roman historique" se caractérise par cette ambition de fresque, L'Éduc centim en est un.
Avec tout de même le fait qu'il s'agit d'histoire quasi contemporaine. C'est peut-être ce qui fait le plus problème pour le définir comme "roman historique"...
Il y a un certain temps, l'oeuvre a été au programme des classes prépa scientifiques, pour traiter la question "L'Histoire".
- User5899Demi-dieu
Gisèle SEGINSER, Flaubert, une poétique de l'Histoire.jehanne a écrit:Moi, je le considérerai comme un roman historique, parce qu'il montre les ressorts des événements de 1848: comment on passe de février aux massacres des journées de juin, quelles forces sont à l'oeuvre (les Dambreuse, le père de la jeune fille de Nogent sur Seine dont j'ai oublié le nom...). mais un roman historique d'un nouveau genre, car le héros ne participe en rien à l'Histoire qui se fait...
Flaubert a voulu faire l'histoire d'une génération, il me semble (autour de Frédéric, il y a le socialiste, l'ouvrier utopiste... -J'oublie les noms, c'est lamentable! Si un "roman historique" se caractérise par cette ambition de fresque, L'Éduc centim en est un.
Avec tout de même le fait qu'il s'agit d'histoire quasi contemporaine. C'est peut-être ce qui fait le plus problème pour le définir comme "roman historique"...
Il y a un certain temps, l'oeuvre a été au programme des classes prépa scientifiques, pour traiter la question "L'Histoire".
- CelebornEsprit sacré
Finalement, la question n'est pas tant de savoir ce qu'est L'Éducation sentimentale, que de savoir ce qu'est un roman historique. Encore un problème d'étiquette !
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- doctor whoDoyen
Sans doute y a-t-il plus de Blazac dans L'Education que de Walter Scott. La chronique réaliste de l'histoire récente et immédiate, c'est Balzac qui la théorise.
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- NLM76Grand Maître
@ doctor who,
pas d'accord avec une réponse définitive. Dans "roman historique", je vois l'adjectif "historique"... Donc cela m'intéresse de me demander quel rapport avec l'histoire il y a dans ce roman, même si cela ne correspond pas à l'étiquette que tel ou tel a définie.
Bien à vous,
pas d'accord avec une réponse définitive. Dans "roman historique", je vois l'adjectif "historique"... Donc cela m'intéresse de me demander quel rapport avec l'histoire il y a dans ce roman, même si cela ne correspond pas à l'étiquette que tel ou tel a définie.
Bien à vous,
- AbraxasDoyen
Un roman historique, c'est un roman dont l'Histoire est la trame, et l'intrigue le motif. Les Trois mousquetaires ou les Pardaillan. Et il s'agit toujours d'une histoire assez largement passée (le Comte de Monte-Cristo n'est pas un roman historique). L'Education est quasi d'actualité. Comme pour le Rouge et le Noir, sur lequel ("Chronique de 1830", dit Stendhal) on pourrait poser la même question — et y répondre de la même façon.
L'Education est effectivement un anti-roman historique, parce que c'est un anti-roman tout court (anti-roman de formation, anti-roman d'amour, etc.). D'où la revendication de Flaubert par Sarraute and co. De surcroît, Flaubert (et il le montre assez dans les chapitres sur 1848) ne croit pas à l'Histoire — sinon comme suite insensée d'actes grotesques. Comme la vie ordinaire.
L'Education est effectivement un anti-roman historique, parce que c'est un anti-roman tout court (anti-roman de formation, anti-roman d'amour, etc.). D'où la revendication de Flaubert par Sarraute and co. De surcroît, Flaubert (et il le montre assez dans les chapitres sur 1848) ne croit pas à l'Histoire — sinon comme suite insensée d'actes grotesques. Comme la vie ordinaire.
- doctor whoDoyen
C'est un sujet de dissert possible en Khâgne ou à la fac, mais pas au lycée.
Et j'adooore les catégories, mettre les oeuvres dans des petites boîtes !!!
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- User5899Demi-dieu
En tout cas, et même si ça ne répond pas à la question, en ces temps de pré campagne électorale, il est urgent de relire les pages de la 3e partie sur "le club de l'intelligence".
- CarabasVénérable
Non : trop contemporain de l'auteur.
De plus, le héros passe à côté de l'Histoire, laquelle devient anecdotique.
De plus, le héros passe à côté de l'Histoire, laquelle devient anecdotique.
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Les chances uniques sur un million se réalisent neuf fois sur dix.
Terry Pratchett
- V.MarchaisEmpereur
Ce qui me paraît intéressant, c'est qu'il existe une filiation entre le roman historique et le roman réaliste, qui rend parfois les frontières incertaines.
On peut contester cette définition, mais quand on parle de roman historique, on parle en général de ce courant né dans le sillage du romantisme, qui aime l'exotisme des époques lointaines, reconstituées avec un souci du pittoresque caractéristique du genre. Les soubresauts de l'Histoire sont les ressorts même de l'intrigue qui ressortit avant tout à l'aventure. Walter Scott est effectivement le modèle du genre - et Dumas en France. Si l'on s'en tient à cette définition, L'Education sentimentale n'a pas grand chose d'un roman historique. On n'y trouve ni cette distance historique, ni ce goût de l'intrigue, ni cette recherche du pittoresque, dépassé dans un souci constant de réalisme.
Mais le roman réaliste, ce n'est jamais que le glissement de l'intérêt pour cette reconstitution d'une époque et de ses ressorts au contemporain - jusqu'à des projets prenant l'ampleur de la fresque : "faire concurrence à l'état civil", dresser un "tableau de la société de 1830", etc. Il y a des convergences dans l'ambition de reconstitution. Moins dans l'esthétique. Il y a davantage de souffle épique dans le roman historique où des héros évoluent dans une époque terrible et sublime, tandis que l'ironie n'est jamais loin chez les réalistes qui passent la société au scalpel, loin de l'émerveillement de l'exotisme.
Cela dit, certains oeuvres restent problématiques. Personnellement, c'est moins L'Education que j'aurais du mal à "étiqueter" que Les Misérables, qui mêle fresque sociale et historique, souffle épique, goût du pittoresque et un duel d'homme à homme qui n'a rien à envier au meilleur Walter Scott. Sacré Victor !
On peut contester cette définition, mais quand on parle de roman historique, on parle en général de ce courant né dans le sillage du romantisme, qui aime l'exotisme des époques lointaines, reconstituées avec un souci du pittoresque caractéristique du genre. Les soubresauts de l'Histoire sont les ressorts même de l'intrigue qui ressortit avant tout à l'aventure. Walter Scott est effectivement le modèle du genre - et Dumas en France. Si l'on s'en tient à cette définition, L'Education sentimentale n'a pas grand chose d'un roman historique. On n'y trouve ni cette distance historique, ni ce goût de l'intrigue, ni cette recherche du pittoresque, dépassé dans un souci constant de réalisme.
Mais le roman réaliste, ce n'est jamais que le glissement de l'intérêt pour cette reconstitution d'une époque et de ses ressorts au contemporain - jusqu'à des projets prenant l'ampleur de la fresque : "faire concurrence à l'état civil", dresser un "tableau de la société de 1830", etc. Il y a des convergences dans l'ambition de reconstitution. Moins dans l'esthétique. Il y a davantage de souffle épique dans le roman historique où des héros évoluent dans une époque terrible et sublime, tandis que l'ironie n'est jamais loin chez les réalistes qui passent la société au scalpel, loin de l'émerveillement de l'exotisme.
Cela dit, certains oeuvres restent problématiques. Personnellement, c'est moins L'Education que j'aurais du mal à "étiqueter" que Les Misérables, qui mêle fresque sociale et historique, souffle épique, goût du pittoresque et un duel d'homme à homme qui n'a rien à envier au meilleur Walter Scott. Sacré Victor !
- CarabasVénérable
Ah, ça, complètement d'accord. Je n'arrive pas à classer les Misérables... et tant pis!V.Marchais a écrit:
Cela dit, certains oeuvres restent problématiques. Personnellement, c'est moins L'Education que j'aurais du mal à "étiqueter" que Les Misérables, qui mêle fresque sociale et historique, souffle épique, goût du pittoresque et un duel d'homme à homme qui n'a rien à envier au meilleur Walter Scott. Sacré Victor !
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