Je fais de la lecture à mes élèves... Suis-je coupable ?

Bonjour,

J'ai deux classes (6èmes) en dernière heure et pour les deux classes, ils ont eu deux heures de sport avant... L'atmosphère devient intenable en ce moment (Zone A, les élèves n'en peuvent plus, s'agitent ou sont déjà ailleurs). Aujourd'hui, après 25 minutes de travail en autonomie, 5 minutes de tentative de mise au point commune (ils ne s'écoutaient pas les uns les autres, bavardaient ), j'ai écrit la correction à prendre en note en expliquant : "Maintenant plus un bruit. Le contrôle a lieu demain. Je ne le décalerai pas". Après que le silence fut fait, qu'ils aient pris en note la correction, qu'on ait fait un point sur ce qu'il y a à retenir, il restait quatre minutes.
J'ai sorti un livre de mon cartable, Les Métamorphoses, je l'ouvre au hasard, "Phaéthon", je les regarde, je leur fait le signe "chut" (ne jamais prononcer "chut") et je commence à lire en mettant le ton (je le fais toujours en lecture analytique). Dès que j'entends ou vois un élève qui commence à ramasser ses affaires ou qui tripote son classeur, ses crayons, sa trousse, je m'arrête net. Et là, j'entends un murmure "Mais arrête, on n'aura pas la suite à cause de toi". Je reprends : ça sonne au milieu d'une phrase. Tous restent immobiles, sauf un, spécialiste du rot non excusé (gros porc qui a par ailleurs craché sur une de ses camarades dans la cour, fait craquer son PP, cassé le casier d'un de ses camarades ...), je le regarde et lui dit "On n'interrompt jamais au milieu d'une phrase. c'est incorrect". Après, je reprends ma phrase et je la termine. Petites mains levées : "Vous nous lirez la suite ?". "Oui, après le contrôle, si tout se passe bien. Vous pouvez sortir. A demain". Et sortie dans le calme.
Je ne sais pas comment tout cela passerait auprès d'un IPR, de ma tutrice ou de mon CDE... Même moi, je me pose des questions.
Et vous ?

Si tu ne passes pas ton temps à le faire (ie si tu fais cours normalement: lecture, écriture, grammaire), je pense que c'est autorisé. Je trouve ça mm plutôt bien. Y'a qu'à voir la réaction des élèves.
C'est une bonne solution dans certaines situations.

Oh, non, tu n'es pas coupable! Au contraire! Lire des histoires à des élèves, c'est aussi favoriser leur lecture. Continue tant qu'ils en tirent du plaisir! (il m'est arrivé carrément de leur demander de ranger leurs affaires, de les laisser s'installer confortablement pour écouter la pause lecture, ou mêm de leur faire écouter des textes lus par d'autres (cette année encore, La parure de Maupassant lue par G. Galienne en 4e)

:lol!:
La lecture fait partie du programme de français.

Moi, je trouve ça bien, et même important. Je pense que cela peut faire découvrir aux élèves le plaisir de la lecture, et c'est notre rôle! Il m'est ainsi arrivé de lire un chapitre d' Oscar et la dame rose en 4e à chaque cours, jusqu'à ce que nous ayons terminé le livre...

J'avais une formatrice IUFM qui recommandait ce qu'elle appelait la lecture cadeau

Fais-toi plaisir!

J'imagine mal qq'un de censé te reprocher de faire la lecture à tes élèves, surtout si ces derniers apprécient! C'est quand même fou qu'en cours de français on en vienne à se poser ces questions (je ne dis pas du tout ça pour toi, mais pour l'ambiance générale autour de l'enseignement du français).
J'ai même vu dans des docs officiels sur la lecture cursive la possibilité de reproduire ce que fait Pennac dans Comme un roman...Alors fonce!

Pareil, je pense que c'est loin d'être problématique si tu ne fais pas que ça.
tu peux même ritualiser ces moments de plaisir avec ta classe, si tu sais que telle heure est tjs difficile, ça peut permettre de détendre tt le monde en début d'heure ou en fin d'heure.
Perso j'approuve... (mais je ne suis pas tutrice, il est vrai)

C'est vrai qu'on a des choses bien pour la pause lecture. Je ne sais pas si vous connaissez litteratureaudio.net. J'avais proposé cette lecture à une classe agitée : http://www.litteratureaudio.com/index.php?s=Demain%2C+d%C3%A8s+l%27aube&sbutt=Ok

Bonne idée pour obtenir le calme. En plus ça peut les tenir en haleine d'une fois sur l'autre. Faut juste couper au milieu d'une action, façon série TV. Je retiens.

Une collègue d'un précédent établissement (qui fut tutrice avant de rédiger la pétition pour l'être sous la nouvelle mouture!) lisait des œuvres intégrales à ses 6e à raison de plusieurs épisodes par semaines, et des nouvelles et des extraits aux plus grands. Et le considérait comme des lectures cursives, en plus de celles faites par les élèves en autonomie!

Et moi, non-tutrice, je ne le fais pas très souvent, mais ça arrive. Et les métamorphoses s'y prêtent particulièrement bien pour leur en faire découvrir en intégralité!

Ça m'arrive assez souvent, surtout avec les sixièmes. Ils adorent. Quand j'étais stagiaire, il m'est même arrivé, alors que je n'avais que la moitié de la classe de manière imprévue, de leur faire prendre leurs chaises, de les faire asseoir en cercle au fond de la salle (j'avais une très grande salle ) et de leur faire la lecture, assise avec eux dans le cercle.
Parfois, je leur raconte des histoires de la mythologie quand ça s'y prête. Et ça ça marche aussi avec les plus grands, auxquels je réserve des histoires un peu plus gore (la vérité sur la conception du minotaure par exemple, j'adore voir leurs têtes quand ils ont compris ! ). Pour les plus petits, je reste un peu plus soft, faut pas les traumatiser non plus.

liliepingouin a écrit:J'avais une formatrice IUFM qui recommandait ce qu'elle appelait la lecture cadeau

Pareil !

Et la plupart du temps, c'est moi qui fais la 1ère lecture du texte, pour leur permettre d'entrer dedans. Ensuite on explique le vocabulaire, le sens du texte, et s'il reste du temps en fin d'heure, à eux de jouer, en tenant compte de ce qui vient de se dire.
Avec des élèves de 6ème qui ânonnent encore beaucoup, je ne vois pas comment mon IPR pourrait m'en faire le reproche...

Bien au contraire, l'IPR de notre académie le recommande ! (à condition que ce soit bien une lecture de "classique")

Je l'ai toujours fait, à raison de 5 à 10 minutes par semaine, on ne me l'a jamais reproché !

Je le fais à mes latinistes 5èmes, et ils adorent ! Toujours un mythe (les dieux s'amusent). En général c'est 5 minutes en fin d'heure, mais c'est souvent qu'on n'a pas terminé à temps, donc il y a parfois des séances sans lecture. Mais vraiment, ils adorent. C'est souvent la première chose qu'ils me demandent en arrivant, si je n'ai pas oublié mon livre ! Oui parce que parfois je l'oublie, et quand je l'oublie, ils réclament une double ration la séance d'après !

C'est très bien.

Mais je déteste appeler cela "lecture offerte", comme on le fait en primaire. Comme si d'habitude, il fallait payer !

Cela me fait penser à Daniel Pennac...

Mais... je ne vois pas du tout en quoi tu serais "coupable" !? Coupable de quoi ?
C'est quand même étrange : on est profs de français, donc de lettres, et on ne pourrait pas passer 5 min (voire plus) à leur faire la lecture ? Je trouve ça très important, voire essentiel, de le faire.
Ma tutrice, à l'époque, m'avait même recommandé de le faire avec une classe de... seconde. Donc, en module, hop ! je leur ai lu "Le nom sur le bout de la langue" de Quignard. Il faut aussi qu'ils apprennent à écouter. L'attention, ça s'apprend. Et ça s'apprend aussi comme ça.

Je l'ai pratiqué régulièrement l'an dernier avec une classe de 4e que j'avais deux fois deux heures dans la semaine. Ils étaient plutôt sympathiques mais bavards et il y avait deux cas lourds qui entraînaient peu à peu la classe... J'ai eu besoin à la fin du 1e trimestre après un incident de trouver une solution pour garder les bons "de mon côté". Je leur ai donc proposé de leur lire entre les deux heures une lettre de Oscar et la dame rose de Schmitt. Ils attendaient ça à chaque fois avec impatience. J'ai donc poursuivi toute l'année avec des nouvelles fantastiques... Ça prend finalement peu de temps et ça apaise la classe. Bref je me dis que je devrais d'ailleurs recommencer!

Lorsque j'étais interne, une fois la lumière du dortoir éteinte (eh oui, un dortoir!), la surveillante nous lisait un roman. Pas de chahut, endormissement garanti.
Mère de famille, j'ai utilisé le truc pour calmer les colères de mon fils. On commence à raconter une histoire, et par miracle, tout s'apaise.
L'astuce consiste aussi à dire "je m'arrête là, vous lirez la suite tout seuls"

doctor who a écrit:C'est très bien.

Mais je déteste appeler cela "lecture offerte", comme on le fait en primaire. Comme si d'habitude, il fallait payer !

Moi aussi, mais si tu dis à des collègues de primaire que tu fais de la "lecture magistrale", ils t'imaginent tout de suite en blouse grise, la baguette à la main, en train d'éructer je ne sais quelle horreur devant des gosses terrorisés !

Que suggères-tu comme terme ?

doublecasquette a écrit:

doctor who a écrit:C'est très bien.

Mais je déteste appeler cela "lecture offerte", comme on le fait en primaire. Comme si d'habitude, il fallait payer !

Moi aussi, mais si tu dis à des collègues de primaire que tu fais de la "lecture magistrale", ils t'imaginent tout de suite en blouse grise, la baguette à la main, en train d'éructer je ne sais quelle horreur devant des gosses terrorisés !

Que suggères-tu comme terme ?

Tant que ce n'est pas de la lecture frontale...

Je ne l'ai pas fait cette année même si j'y ai beaucoup songé, car mes élèves ne lisent pas du tout chez eux. Vous croyez que je peux instaurer un rituel de ce genre à la rentrée, que c'est pas trop tard ? Vous allez me dire, trop tard pour lire et faire découvrir un livre aux élèves, ce serait étrange !