- SolovieïNiveau 10
Salut.
Avertissement : ce sujet peut paraitre provocateur, volontairement polémique, un quasi-troll pour certains. Ce n’est pas mon intention. À ce jour, je n’ai pas trouvé d’espace où discuter de cela, à l’exception d’un obscur fil Reddit en anglais.
Avertissement : ce sujet peut paraitre provocateur, volontairement polémique, un quasi-troll pour certains. Ce n’est pas mon intention. À ce jour, je n’ai pas trouvé d’espace où discuter de cela, à l’exception d’un obscur fil Reddit en anglais.
J’entends bien que mes propos peuvent choquer de la part d’un professeur de lettres : j’ai beaucoup de mal à aimer le théâtre. Voilà, c’est dit !
Pour être plus précis, je parle bien de la mise en scène, de la représentation, non du texte. Les textes de théâtre, quand je les apprécie, me procurent autant de plaisir que tout autre genre littéraire. Mon problème ne réside pas dans le texte.
J’ai assisté à des dizaines de représentations, du répertoire classique au contemporain, en passant par les pièces dites pour la jeunesse. Mon avis reste (presque) le même, et je cherche à comprendre les fondements de cette expérience négative.
Je trouve le théâtre trop artificiel, peu convaincant et surtout surjoué. J’aurais voulu écrire : « faux », conscient du paradoxe. J’ai bien souvent une envie de fou rire, alors que le propos de la pièce est plus que sérieux. De fait, je ne suis jamais touché par ce qui se dit et se produit sur la scène et je reste hermétique aux émotions que j’aurais pu ressentir, parfois à la même réplique, lors de la lecture du texte. Si je vais plus loin dans l’exploration de ce ressenti, je dirais même que je ressens parfois comme une trahison, de voir déclamées sur scène des lignes qui m’ont paru si belles, si nobles, sur le papier. Je trouve au théâtre un aspect guignolesque, pour ne pas dire un peu ridicule, dont j’ai du mal à me défaire.
Cela fait des années que je m’interroge. Voici quelques pistes de réflexion :
- Je n’ai pas assisté à de « bonnes » représentations. C’est évidemment la réponse que j’obtiens quand je m’en ouvre à des collègues, des spécialistes ou des pratiquants. Tout de même, je n’en suis pas à mon premier rideau, et j’ai assisté à des représentations prestigieuses, du moins plébiscitées par le milieu. L'hypothèse n'en reste pas moins recevable.
- Je suis trop imprégné de réalisme, ce qui conforme mes attentes et mes jugements. Mes interlocuteurs sont surpris de me savoir cinéphile. Justement, c’est une possibilité pour expliquer ma difficulté. Je suis très sensible au jeu d’acteur au cinéma. Le jeu des comédiens au théâtre me parait faux ou surjoué. Autrement dit, face au comédien, je n’y crois pas un seul instant. Cette dramatisation du jeu théâtral me parait passer à côté du sens, introduisant comme un décalage (parfois comique contre son gré) entre la posture et le propos. Au demeurant, j’ai du mal avec le jeu (ou la direction) d’acteurs dans une bonne part du cinéma français, peut-être parce que les acteurs français s’inspirent beaucoup du jeu théâtral comme modèle (quand ils ne sont pas eux-mêmes issus du théâtre, ce qui est somme toute logique).
- Le film est une œuvre totale, au sens où l’immersion est totale. Tout l’artifice s’efface, rien n’est visible. Ainsi, tous les moyens de ma cognition sont plongés dans la bulle, dans l’univers énonciatif et esthétique du film, d’autant que je souscris volontairement à l’illusion en concédant à cette « suspension de l’incrédulité » qui permet l’immersion. Au théâtre, je ne parviens pas à le faire, d’abord, car la dimension esthétique et immersive est matériellement moindre, ensuite car les comédiens sont toujours des gens qui jouent le rôle du personnage. Le comédien me semble largement dépasser les contours du minuscule masque qu’il s’efforce de porter. J’ai l’impression de voir une imitation grotesque et caricaturale de ce que le personnage est censé être. Voilà, c’est ça : une caricature, les comédiens sur scène me font trop souvent penser à une caricature, ce qui m’amène au point suivant.
- Mon malaise est peut-être dû à une certaine école dramatique, un type de jeu ou de formation. Ainsi, un phénomène m’a toujours intrigué : lors d’une activité théâtrale (formation, cours,…), il y a comme une sorte de basculement entre le moment (l’état) où la personne (le formateur, le professeur de théâtre, le comédien professionnel,…) est « elle-même » et le moment où elle joue son personnage. Je perçois un changement d’état : la personne passe de l’état normal (posture et expressivité naturelle d’un être humain) à l’état « joué », état que je trouve souvent caricatural, faux, ce que j’entends par « surjoué ». Pour le dire autrement, je pense à un extra-terrestre qui parviendrait à emprunter un corps humain et qui s’efforcerait d’avoir l’air naturel, sans y parvenir, puisque ignorant totalement en quoi cela consiste. Il n’y a que dans certaines rares activités d’improvisation que j’ai pu voir des comédiens capables de « glisser » sans ce décalage entre eux-mêmes et le personnage.
- Je suis très sensible au regard. Mes moments de cinéma préférés, ceux que je vis intensément, mettent souvent en jeu le regard. C’est évidemment un lieu commun que d’écrire que les yeux sont les fenêtres de l’âme, mais cela n’en est pas moins vrai. Au théâtre, je constate souvent que le regard ne concorde pas avec la posture, la personnalité ou le sentiment que le comédien est supposé incarner. Il en va de même pour les mauvais acteurs, d’ailleurs.
Voilà où j’en suis… Je ne parviens pas à prendre au sérieux ce qui m’est montré sur scène, en particulier les personnages, leurs propos et leurs interactions. Comme si les comédiens faisaient semblant et voulaient à tout prix montrer qu’ils font semblant. J’en ressens une grande distance. Les gesticulations, les mimiques et les fausses postures me font souvent, et involontairement, rire. Je ressors la plupart du temps avec l’impression dérangeante d’avoir assisté à une vaste bouffonnerie, là où j’attendais quelque chose de noble, de grand, d’épique ou de profond. Il va sans dire que la richesse du propos s’efface souvent derrière cette dimension représentative que je ne parviens pas à dépasser. Sauf à revenir au texte seul…
En dernier point, je veux circonscrire mon témoignage, et là se trouve peut-être l’explication qui m’échappe encore. En effet, quand j’écris tout cela, je pense exclusivement au théâtre occidental (disons, de source européenne, qu’il se soit exporté ou non). Étrangement, et très étrangement même, le théâtre traditionnel japonais, notamment le nô (et même le théâtre de marionnettes bunraku), ne me fait pas cet effet. Serait-ce parce qu’il s’agit d’un théâtre de masque (masque par ailleurs parfois volontairement plus petit que le visage du comédien, ce qui revêt un sens particulier et souhaité) ? Est-ce à cause de ce parti-pris fantasmagorique assumé ? À cause de cette codification extrême ? L’origine magique du théâtre, son atavique nature de rituel, me touchent-elles plus facilement dans ma nature profonde et ma relation singulière au monde ? Paradoxalement, ce théâtre traditionnel est, au moins pour la forme, aux antipodes du réalisme.
Pour être plus précis, je parle bien de la mise en scène, de la représentation, non du texte. Les textes de théâtre, quand je les apprécie, me procurent autant de plaisir que tout autre genre littéraire. Mon problème ne réside pas dans le texte.
J’ai assisté à des dizaines de représentations, du répertoire classique au contemporain, en passant par les pièces dites pour la jeunesse. Mon avis reste (presque) le même, et je cherche à comprendre les fondements de cette expérience négative.
Je trouve le théâtre trop artificiel, peu convaincant et surtout surjoué. J’aurais voulu écrire : « faux », conscient du paradoxe. J’ai bien souvent une envie de fou rire, alors que le propos de la pièce est plus que sérieux. De fait, je ne suis jamais touché par ce qui se dit et se produit sur la scène et je reste hermétique aux émotions que j’aurais pu ressentir, parfois à la même réplique, lors de la lecture du texte. Si je vais plus loin dans l’exploration de ce ressenti, je dirais même que je ressens parfois comme une trahison, de voir déclamées sur scène des lignes qui m’ont paru si belles, si nobles, sur le papier. Je trouve au théâtre un aspect guignolesque, pour ne pas dire un peu ridicule, dont j’ai du mal à me défaire.
Cela fait des années que je m’interroge. Voici quelques pistes de réflexion :
- Je n’ai pas assisté à de « bonnes » représentations. C’est évidemment la réponse que j’obtiens quand je m’en ouvre à des collègues, des spécialistes ou des pratiquants. Tout de même, je n’en suis pas à mon premier rideau, et j’ai assisté à des représentations prestigieuses, du moins plébiscitées par le milieu. L'hypothèse n'en reste pas moins recevable.
- Je suis trop imprégné de réalisme, ce qui conforme mes attentes et mes jugements. Mes interlocuteurs sont surpris de me savoir cinéphile. Justement, c’est une possibilité pour expliquer ma difficulté. Je suis très sensible au jeu d’acteur au cinéma. Le jeu des comédiens au théâtre me parait faux ou surjoué. Autrement dit, face au comédien, je n’y crois pas un seul instant. Cette dramatisation du jeu théâtral me parait passer à côté du sens, introduisant comme un décalage (parfois comique contre son gré) entre la posture et le propos. Au demeurant, j’ai du mal avec le jeu (ou la direction) d’acteurs dans une bonne part du cinéma français, peut-être parce que les acteurs français s’inspirent beaucoup du jeu théâtral comme modèle (quand ils ne sont pas eux-mêmes issus du théâtre, ce qui est somme toute logique).
- Le film est une œuvre totale, au sens où l’immersion est totale. Tout l’artifice s’efface, rien n’est visible. Ainsi, tous les moyens de ma cognition sont plongés dans la bulle, dans l’univers énonciatif et esthétique du film, d’autant que je souscris volontairement à l’illusion en concédant à cette « suspension de l’incrédulité » qui permet l’immersion. Au théâtre, je ne parviens pas à le faire, d’abord, car la dimension esthétique et immersive est matériellement moindre, ensuite car les comédiens sont toujours des gens qui jouent le rôle du personnage. Le comédien me semble largement dépasser les contours du minuscule masque qu’il s’efforce de porter. J’ai l’impression de voir une imitation grotesque et caricaturale de ce que le personnage est censé être. Voilà, c’est ça : une caricature, les comédiens sur scène me font trop souvent penser à une caricature, ce qui m’amène au point suivant.
- Mon malaise est peut-être dû à une certaine école dramatique, un type de jeu ou de formation. Ainsi, un phénomène m’a toujours intrigué : lors d’une activité théâtrale (formation, cours,…), il y a comme une sorte de basculement entre le moment (l’état) où la personne (le formateur, le professeur de théâtre, le comédien professionnel,…) est « elle-même » et le moment où elle joue son personnage. Je perçois un changement d’état : la personne passe de l’état normal (posture et expressivité naturelle d’un être humain) à l’état « joué », état que je trouve souvent caricatural, faux, ce que j’entends par « surjoué ». Pour le dire autrement, je pense à un extra-terrestre qui parviendrait à emprunter un corps humain et qui s’efforcerait d’avoir l’air naturel, sans y parvenir, puisque ignorant totalement en quoi cela consiste. Il n’y a que dans certaines rares activités d’improvisation que j’ai pu voir des comédiens capables de « glisser » sans ce décalage entre eux-mêmes et le personnage.
- Je suis très sensible au regard. Mes moments de cinéma préférés, ceux que je vis intensément, mettent souvent en jeu le regard. C’est évidemment un lieu commun que d’écrire que les yeux sont les fenêtres de l’âme, mais cela n’en est pas moins vrai. Au théâtre, je constate souvent que le regard ne concorde pas avec la posture, la personnalité ou le sentiment que le comédien est supposé incarner. Il en va de même pour les mauvais acteurs, d’ailleurs.
Voilà où j’en suis… Je ne parviens pas à prendre au sérieux ce qui m’est montré sur scène, en particulier les personnages, leurs propos et leurs interactions. Comme si les comédiens faisaient semblant et voulaient à tout prix montrer qu’ils font semblant. J’en ressens une grande distance. Les gesticulations, les mimiques et les fausses postures me font souvent, et involontairement, rire. Je ressors la plupart du temps avec l’impression dérangeante d’avoir assisté à une vaste bouffonnerie, là où j’attendais quelque chose de noble, de grand, d’épique ou de profond. Il va sans dire que la richesse du propos s’efface souvent derrière cette dimension représentative que je ne parviens pas à dépasser. Sauf à revenir au texte seul…
En dernier point, je veux circonscrire mon témoignage, et là se trouve peut-être l’explication qui m’échappe encore. En effet, quand j’écris tout cela, je pense exclusivement au théâtre occidental (disons, de source européenne, qu’il se soit exporté ou non). Étrangement, et très étrangement même, le théâtre traditionnel japonais, notamment le nô (et même le théâtre de marionnettes bunraku), ne me fait pas cet effet. Serait-ce parce qu’il s’agit d’un théâtre de masque (masque par ailleurs parfois volontairement plus petit que le visage du comédien, ce qui revêt un sens particulier et souhaité) ? Est-ce à cause de ce parti-pris fantasmagorique assumé ? À cause de cette codification extrême ? L’origine magique du théâtre, son atavique nature de rituel, me touchent-elles plus facilement dans ma nature profonde et ma relation singulière au monde ? Paradoxalement, ce théâtre traditionnel est, au moins pour la forme, aux antipodes du réalisme.
- SolovieïNiveau 10
Ce que je ressens est encore plus prégnant pour la tragédie classique, je te comprends donc parfaitement.
- PoupoutchModérateur
En réalité, il me semble que, l'un comme l'autre, vous avez un souci avec l'illusion théâtrale (ou avec la convention).
Souci qui vient sans doute en partie d'une attente qui ne correspond plus depuis longtemps à ce que propose le théâtre... (Si tant est d'ailleurs que ça ait réellement existé au delà d'une vision purement théorique héritée du XVIIIe siècle)
En fait, vous aimeriez un théâtre naturaliste, qui vous fasse croire que ce que vous voyez se produit ici et maintenant, et vous fasse oublier tous les artifices du théâtre. Et comme évidemment ça n'est pas le cas, vous ressentez un décalage qui vous gêne et vous empêche d'adhérer au spectacle.
Bref, je ne le dis pas du tout méchamment ou pour provoquer, mais vous avez je crois des attentes très datées de ce qu'est le théâtre, et il n'est pas étonnant qu'elles ne trouvent pas d'écho sur les scènes actuelles parce que précisément, toute une partie du vocabulaire que vous utilisez (incarner, y croire, etc.) est un vocabulaire qu'on manie avec des pincettes depuis quelques décennies...
De plus, j'ai l'impression que vous essayez de vous "forcer" à aimer le théâtre en allant avant tout voir ce qui plaît à la majorité ou des classiques. Je pense que c'est dommage, parce que mon constat, en tant que personne qui forme des spectateurs depuis maintenant quelques (dizaines d') années, c'est qu'on arrive souvent à un meilleur résultat en se confrontant à des formes où les attentes sont moindres (ce que tend à prouver l'exemple du Nô).
Enfin, je dirais qu'on peut aussi ne pas aimer le théâtre, et qu'en soi ça n'a rien de dramatique, même pour un enseignant de lettres. Par contre ce qui serait dommage dans l'enseignement du théâtre (et ce que je vois bien trop souvent) c'est d'omettre que le texte théâtral a cette particularité d'être adossé à une représentation. Une représentation qui peut être purement virtuelle et ne prendre place que dans l'esprit d'un lecteur. Mais un texte de théâtre c'est en effet un objet qui n'est complet qu'avec un passage sur une scène, fût-elle imaginaire.
Édit : c'est d'ailleurs amusant parce que vous semblez rechercher du naturalisme et de l'incarnation dans la tragédie classique qui est par excellence, historiquement, un genre qui ne se souciait pas de réalisme (ce que la vraisemblance n'est pas)...
Souci qui vient sans doute en partie d'une attente qui ne correspond plus depuis longtemps à ce que propose le théâtre... (Si tant est d'ailleurs que ça ait réellement existé au delà d'une vision purement théorique héritée du XVIIIe siècle)
En fait, vous aimeriez un théâtre naturaliste, qui vous fasse croire que ce que vous voyez se produit ici et maintenant, et vous fasse oublier tous les artifices du théâtre. Et comme évidemment ça n'est pas le cas, vous ressentez un décalage qui vous gêne et vous empêche d'adhérer au spectacle.
Bref, je ne le dis pas du tout méchamment ou pour provoquer, mais vous avez je crois des attentes très datées de ce qu'est le théâtre, et il n'est pas étonnant qu'elles ne trouvent pas d'écho sur les scènes actuelles parce que précisément, toute une partie du vocabulaire que vous utilisez (incarner, y croire, etc.) est un vocabulaire qu'on manie avec des pincettes depuis quelques décennies...
De plus, j'ai l'impression que vous essayez de vous "forcer" à aimer le théâtre en allant avant tout voir ce qui plaît à la majorité ou des classiques. Je pense que c'est dommage, parce que mon constat, en tant que personne qui forme des spectateurs depuis maintenant quelques (dizaines d') années, c'est qu'on arrive souvent à un meilleur résultat en se confrontant à des formes où les attentes sont moindres (ce que tend à prouver l'exemple du Nô).
Enfin, je dirais qu'on peut aussi ne pas aimer le théâtre, et qu'en soi ça n'a rien de dramatique, même pour un enseignant de lettres. Par contre ce qui serait dommage dans l'enseignement du théâtre (et ce que je vois bien trop souvent) c'est d'omettre que le texte théâtral a cette particularité d'être adossé à une représentation. Une représentation qui peut être purement virtuelle et ne prendre place que dans l'esprit d'un lecteur. Mais un texte de théâtre c'est en effet un objet qui n'est complet qu'avec un passage sur une scène, fût-elle imaginaire.
Édit : c'est d'ailleurs amusant parce que vous semblez rechercher du naturalisme et de l'incarnation dans la tragédie classique qui est par excellence, historiquement, un genre qui ne se souciait pas de réalisme (ce que la vraisemblance n'est pas)...
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Lapin Émérite, celle qui Nage en Lisant ou Inversement, Dompteuse du fauve affamé et matutinal.
"L'intelligence est une maladie qui peut se transmettre très facilement mais dont on peut guérir très rapidement et sans aucune séquelle"
- NLM76Grand Maître
Très intéressant.
Il me semblait pouvoir te répondre plutôt aisément à la lecture de tout le début de ton billet. Mais la fin, sur le Nô, infléchit forcément ma réponse.
Ce que j'aime dans le théâtre, c'est justement qu'il ne prétend pas au naturel, c'est qu'il propose bien autre chose que le réel et le naturel. Le jeu naturaliste au théâtre m'indispose profondément. Cela dit, même au cinéma, il me gêne : non que je le trouve inconvenant ; c'est sans doute tout à fait idoine pour cet art. Mais j'ai le sentiment que la justesse du jeu des acteurs au cinéma fait d'un film quelque chose d'évanescent, quelque chose d'innécessaire, et donc d'assez indifférent. En fait, si je demande à ma mémoire de faire surgir des films qui comptent pour moi, viennent d'abord des films qui n'ont absolument rien de naturaliste : Nosferatu, Les Blues Brothers, La ruée vers l'or... J'ai pu prendre plaisir à en voir beaucoup d'autres ; mais ils ont sombré dans les limbes de l'oubli.
[Je vais attendre un peu, avant de parler un peu du théâtre lui-même.]
Il me semblait pouvoir te répondre plutôt aisément à la lecture de tout le début de ton billet. Mais la fin, sur le Nô, infléchit forcément ma réponse.
Ce que j'aime dans le théâtre, c'est justement qu'il ne prétend pas au naturel, c'est qu'il propose bien autre chose que le réel et le naturel. Le jeu naturaliste au théâtre m'indispose profondément. Cela dit, même au cinéma, il me gêne : non que je le trouve inconvenant ; c'est sans doute tout à fait idoine pour cet art. Mais j'ai le sentiment que la justesse du jeu des acteurs au cinéma fait d'un film quelque chose d'évanescent, quelque chose d'innécessaire, et donc d'assez indifférent. En fait, si je demande à ma mémoire de faire surgir des films qui comptent pour moi, viennent d'abord des films qui n'ont absolument rien de naturaliste : Nosferatu, Les Blues Brothers, La ruée vers l'or... J'ai pu prendre plaisir à en voir beaucoup d'autres ; mais ils ont sombré dans les limbes de l'oubli.
[Je vais attendre un peu, avant de parler un peu du théâtre lui-même.]
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Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- cléliaFidèle du forum
C'est intéressant et de manière amusante, ces propos font écho à ce que me disait ma fille, lycéenne et fan de mythologie, tout à l'heure : impossible pour elle d'imaginer une actrice jouant Hélène de Troie, toute incarnation de la plus belle femme du monde étant forcément vouée à l'échec. Et cela nous a amenées à discuter de nos attentes vis-à-vis du théâtre ou du cinéma.
Quand je vais au théâtre (mais aussi à l'opéra ou voir une adaptation cinématographique), j'y vais pour voir la lecture du metteur en scène. Si je réfléchis, je pense que je ne vais pas voir Beckett, ou Racine, pas plus qu'au cinéma, je ne vais voir Dumas, ou Flaubert, ou Tolkien.
En ce qui concerne le jeu des acteurs, il faut que j'y réfléchisse davantage.
Une chose est sûre, j'aime profondément, je dirais même viscéralement, le spectacle vivant, que j'ai découvert très tôt (et de manière intime, personnelle) par le cirque et je crois que cette expérience, cette histoire, influence ma manière d'appréhender le théâtre. Même une représentation objectivement mauvaise peut m'émouvoir.
Quand je vais au théâtre (mais aussi à l'opéra ou voir une adaptation cinématographique), j'y vais pour voir la lecture du metteur en scène. Si je réfléchis, je pense que je ne vais pas voir Beckett, ou Racine, pas plus qu'au cinéma, je ne vais voir Dumas, ou Flaubert, ou Tolkien.
En ce qui concerne le jeu des acteurs, il faut que j'y réfléchisse davantage.
Une chose est sûre, j'aime profondément, je dirais même viscéralement, le spectacle vivant, que j'ai découvert très tôt (et de manière intime, personnelle) par le cirque et je crois que cette expérience, cette histoire, influence ma manière d'appréhender le théâtre. Même une représentation objectivement mauvaise peut m'émouvoir.
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Il voyagea.
Il connut la mélancolie des paquebots, les froids réveils sous la tente, l’étourdissement des paysages et des ruines, l’amertume des sympathies interrompues.
Il revint.
Il fréquenta le monde, et il eut d’autres amours, encore.
- SolovieïNiveau 10
Poupoutch a écrit:En réalité, il me semble que, l'un comme l'autre, vous avez un souci avec l'illusion théâtrale (ou avec la convention).
Souci qui vient sans doute en partie d'une attente qui ne correspond plus depuis longtemps à ce que propose le théâtre... (Si tant est d'ailleurs que ça ait réellement existé au delà d'une vision purement théorique héritée du XVIIIe siècle)
En fait, vous aimeriez un théâtre naturaliste, qui vous fasse croire que ce que vous voyez se produit ici et maintenant, et vous fasse oublier tous les artifices du théâtre. Et comme évidemment ça n'est pas le cas, vous ressentez un décalage qui vous gêne et vous empêche d'adhérer au spectacle.
Bref, je ne le dis pas du tout méchamment ou pour provoquer, mais vous avez je crois des attentes très datées de ce qu'est le théâtre, et il n'est pas étonnant qu'elles ne trouvent pas d'écho sur les scènes actuelles parce que précisément, toute une partie du vocabulaire que vous utilisez (incarner, y croire, etc.) est un vocabulaire qu'on manie avec des pincettes depuis quelques décennies...
De plus, j'ai l'impression que vous essayez de vous "forcer" à aimer le théâtre en allant avant tout voir ce qui plaît à la majorité ou des classiques. Je pense que c'est dommage, parce que mon constat, en tant que personne qui forme des spectateurs depuis maintenant quelques (dizaines d') années, c'est qu'on arrive souvent à un meilleur résultat en se confrontant à des formes où les attentes sont moindres (ce que tend à prouver l'exemple du Nô).
Enfin, je dirais qu'on peut aussi ne pas aimer le théâtre, et qu'en soi ça n'a rien de dramatique, même pour un enseignant de lettres. Par contre ce qui serait dommage dans l'enseignement du théâtre (et ce que je vois bien trop souvent) c'est d'omettre que le texte théâtral a cette particularité d'être adossé à une représentation. Une représentation qui peut être purement virtuelle et ne prendre place que dans l'esprit d'un lecteur. Mais un texte de théâtre c'est en effet un objet qui n'est complet qu'avec un passage sur une scène, fût-elle imaginaire.
Édit : c'est d'ailleurs amusant parce que vous semblez rechercher du naturalisme et de l'incarnation dans la tragédie classique qui est par excellence, historiquement, un genre qui ne se souciait pas de réalisme (ce que la vraisemblance n'est pas)...
Merci pour ta réponse. Je reconnais cette attente "naturaliste" de ma part, mais c'est automatique, non le fruit d'une réflexion ou d'une décision. Je suppose donc que je fus, à un moment donné, "formaté" en ce sens.
Oui encore sur le fait que je me force, non à "aimer" le théâtre, mais à assister à des représentations. Je n'aime pas condamner en bloc ni me contenter de jugements hâtifs. Je me dis qu'en assistant à des représentations, en y réfléchissant, parfois à l'aide d'un appareil critique, je parviendrais à progresser.
Concernant l'enseignement du théâtre, je sais faire la part des choses. J'invite les élèves et les guide dans la comparaison de plusieurs mises en scène d'une même pièce ou d'un même extrait, en les sensibilisant aux différents aspects du travail du metteur en scène. Mon objectif est qu'ils comprennent combien peut changer une représentation d'une même œuvre, et en fonction de quels paramètres, ce qui est peu ou prou ce qui est attendu dans les programmes du secondaire.
J'ai durant des années répété que le texte théâtral ne se concevait pas sans la représentation, que le théâtre était un genre conçu pour être représenté. Depuis quelque temps, je suis plus sceptique et en doute.
Je ne suis pas certain de chercher du naturalisme dans la tragédie classique. Je n'attends rien de spécial et je m'efforce de garder l'esprit ouvert. Je sais les origines de la tragédie et le fait qu'elle se soucie peu de réalisme, par essence, dirons-nous. Néanmoins, dans les représentations auxquelles j'ai assisté, je n'ai pas perçu ce souffle épique, cette énergie, que j'associe spontanément au genre. Durant mes études, une de mes professeurs (de CM) était une spécialiste de la tragédie classique, qu'elle pratiquait également, passant pour une référence du domaine, notamment en ce qui concerne la diction et la déclamation du vers. Assistant à une représentation (Iphigénie), j'ai trouvé qu'elle ressemblait à une grosse poule, roulant les R et ponctuant son propos de montées de voix aigües plutôt désagréables. Amère expérience, parmi d'autres. Je suis vraiment passé à côté de la chose. Récemment encore, j'ai vu une Antigone (celle d'Anouilh, pourtant) sous Xanax, apathique, pâlichonne, au ton monocorde (façon récitation scolaire ou spectacle de fin d'année de CM2). Dans tous les cas, j'en ressens un malaise et je suis frustré de ne pas avoir les clés pour saisir le sens de tout cela.
- SolovieïNiveau 10
NLM76 a écrit:Très intéressant.
Il me semblait pouvoir te répondre plutôt aisément à la lecture de tout le début de ton billet. Mais la fin, sur le Nô, infléchit forcément ma réponse.
Ce que j'aime dans le théâtre, c'est justement qu'il ne prétend pas au naturel, c'est qu'il propose bien autre chose que le réel et le naturel. Le jeu naturaliste au théâtre m'indispose profondément. Cela dit, même au cinéma, il me gêne : non que je le trouve inconvenant ; c'est sans doute tout à fait idoine pour cet art. Mais j'ai le sentiment que la justesse du jeu des acteurs au cinéma fait d'un film quelque chose d'évanescent, quelque chose d'innécessaire, et donc d'assez indifférent. En fait, si je demande à ma mémoire de faire surgir des films qui comptent pour moi, viennent d'abord des films qui n'ont absolument rien de naturaliste : Nosferatu, Les Blues Brothers, La ruée vers l'or... J'ai pu prendre plaisir à en voir beaucoup d'autres ; mais ils ont sombré dans les limbes de l'oubli.
[Je vais attendre un peu, avant de parler un peu du théâtre lui-même.]
Oui, c'est pourquoi j'ai multiplié les prudences et modalisateurs dans mon dernier paragraphe : "là se trouve peut-être l’explication qui m’échappe encore", "Étrangement, et très étrangement même" et "Paradoxalement, ce théâtre traditionnel est, au moins pour la forme, aux antipodes du réalisme."
C'est-à-dire que j'ai bien conscience d'une contradiction (forcément apparente, tant que je n'ai pas élucidé le phénomène).
En cinéma, je ne défends pas non plus le naturalisme. D'ailleurs, les réalisateurs se voulant naturalistes m'ennuient souvent.
- SolovieïNiveau 10
clélia a écrit:C'est intéressant et de manière amusante, ces propos font écho à ce que me disait ma fille, lycéenne et fan de mythologie, tout à l'heure : impossible pour elle d'imaginer une actrice jouant Hélène de Troie, toute incarnation de la plus belle femme du monde étant forcément vouée à l'échec. Et cela nous a amenées à discuter de nos attentes vis-à-vis du théâtre ou du cinéma.
Quand je vais au théâtre (mais aussi à l'opéra ou voir une adaptation cinématographique), j'y vais pour voir la lecture du metteur en scène. Si je réfléchis, je pense que je ne vais pas voir Beckett, ou Racine, pas plus qu'au cinéma, je ne vais voir Dumas, ou Flaubert, ou Tolkien.
En ce qui concerne le jeu des acteurs, il faut que j'y réfléchisse davantage.
Une chose est sûre, j'aime profondément, je dirais même viscéralement, le spectacle vivant, que j'ai découvert très tôt (et de manière intime, personnelle) par le cirque et je crois que cette expérience, cette histoire, influence ma manière d'appréhender le théâtre. Même une représentation objectivement mauvaise peut m'émouvoir.
Je te comprends tout à fait. De même, pour les adaptations cinématographiques, c'est bien la vision du réalisateur qui m'intéresse (et les comparaisons qui peuvent se faire, si les adaptations sont multiples).
La discussion avec ta fille me fait songer à une autre piste de réflexion. Je suis d'un naturel introverti, et les arts vivants me mettent mal à l'aise (même en tant que simple spectateur, dans une certaine mesure). Une gêne sourde s'installe en moi (les neurones miroirs sans doute !). C'est pour cela qu'il m'est difficile de participer à ces activités, voire impossible pour certaines (danse, chant,...) alors que j'évolue dans un milieu plutôt actif culturellement.
Ainsi, j'ai peut-être une vision très réduite du jeu, supposant qu'il faut forcément devenir le personnage, sans compromis, dans une sorte de fiction totale, puisque je ne vois pas intimement comment faire autrement.
- BaldredSage
J'ai eu quelques expériences théâtrales marquantes comme spectateur. Des moments que, cinéphile, je n'ai jamais vécu au cinéma.
Je ne pense pas que ta difficulté avec la représentation soit liée mais je suis moi fatigué du théâtre qui se regarde faire du théâtre, qui a fait de la mise en abyme du théâtre, de la création, de l'artiste, du comédien le sujet exclusif du théâtre. Sur 4 pièces vues il y a 3 ans à Avignon, 3 parlaient du théâtre. Ce théâtre narcissique est parfois intéressant, mais également très limité quand la proposition est purement formelle et ne nous permet pas d'avoir un accès vivant au texte, à la parole, à la voix qui parfois nous balancent le grand frisson.
Je ne pense pas que ta difficulté avec la représentation soit liée mais je suis moi fatigué du théâtre qui se regarde faire du théâtre, qui a fait de la mise en abyme du théâtre, de la création, de l'artiste, du comédien le sujet exclusif du théâtre. Sur 4 pièces vues il y a 3 ans à Avignon, 3 parlaient du théâtre. Ce théâtre narcissique est parfois intéressant, mais également très limité quand la proposition est purement formelle et ne nous permet pas d'avoir un accès vivant au texte, à la parole, à la voix qui parfois nous balancent le grand frisson.
- TardisNiveau 9
Es-tu jamais monté sur scène en tant que comédien dans un spectacle amateur? Depuis que je fais du théâtre avec les élèves j'apprécie plus le theâtre en tant que spectateur.
- SolovieïNiveau 10
Tardis a écrit:Es-tu jamais monté sur scène en tant que comédien dans un spectacle amateur? Depuis que je fais du théâtre avec les élèves j'apprécie plus le theâtre en tant que spectateur.
J'ai participé à des ateliers d'initiation et des stages. Je rends visite régulièrement aux 2 collègues en charge de l'option Théâtre dans mon lycée. Je ne peux pas faire plus, par blocage et timidité. Ces expériences, bien dérisoires j'en conviens, ont plutôt tendance à renforcer mon idée. La perspective même de monter sur scène m'est pénible (alors que, dans l'absolu, je le fais tous les jours, en montant sur scène devant mes élèves...).
- cléliaFidèle du forum
Solovieï a écrit: Je suis d'un naturel introverti, et les arts vivants me mettent mal à l'aise (même en tant que simple spectateur, dans une certaine mesure). Une gêne sourde s'installe en moi (les neurones miroirs sans doute !).
Je comprends très bien cela. C'est pourquoi je ne supporte pas les émissions de jeux, que ce soit à la télévision ou à la radio. La prestation des joueurs me met très mal à l'aise, crée une gêne, voire une honte. J'ai dû mal à l'expliquer, je me sens voyeuse ou je m'imagine à la place de ces joueurs. Je change systématiquement de fréquence en voiture quand il y a un jeu avec un auditeur. Les seules émissions que je peux supporter sont celles où on ne demande pratiquement rien de personnel aux candidats, les jeux où la prestation est la plus neutre possible, comme Questions pour un champion.
Bizarrement, pour les spectacles vivants, je n'ai pas du tout cette gêne parce que, pour moi, ce sont des professionnels (j'ai plus de mal avec les troupes amateurs). Ils font un travail, ils ne s'exhibent pas de manière impudique.
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Il voyagea.
Il connut la mélancolie des paquebots, les froids réveils sous la tente, l’étourdissement des paysages et des ruines, l’amertume des sympathies interrompues.
Il revint.
Il fréquenta le monde, et il eut d’autres amours, encore.
- cléliaFidèle du forum
Solovieï a écrit: Durant mes études, une de mes professeurs (de CM) était une spécialiste de la tragédie classique, qu'elle pratiquait également, passant pour une référence du domaine, notamment en ce qui concerne la diction et la déclamation du vers. Assistant à une représentation (Iphigénie), j'ai trouvé qu'elle ressemblait à une grosse poule, roulant les R et ponctuant son propos de montées de voix aigües plutôt désagréables. Amère expérience, parmi d'autres. Je suis vraiment passé à côté de la chose. Récemment encore, j'ai vu une Antigone (celle d'Anouilh, pourtant) sous Xanax, apathique, pâlichonne, au ton monocorde (façon récitation scolaire ou spectacle de fin d'année de CM2). Dans tous les cas, j'en ressens un malaise et je suis frustré de ne pas avoir les clés pour saisir le sens de tout cela.
Je dirais que c'est comme l'art contemporain : parfois, on a beau comprendre, on n'est pas touché. Ma fille (toujours la même ) est en spé arts plastiques. Quand on est en vacances en famille, on met souvent au programme un musée d'art contemporain. C'est souvent curieux, intéressant, intrigant, mais seules quelques rares oeuvres me touchent vraiment, déclenchent une émotion chez moi. C'est comme ça. Je continue par curiosité et parce que j'aime partager ces moments avec ma fille mais je sais que si je veux vivre une émotion artistique, il vaut mieux que j'aille au Louvre ou à Orsay. Pour moi, c'est pareil pour la diction. J'ai beaucoup de mal avec Luchini par exemple. Je ne supporte pas sa façon de dire les vers. J'admire le travail, en particulier de mémorisation, mais ses récitations me laissent assez froide, voire agacée. (D'ailleurs, quand il s'est fait connaître il y a 10 ans, 15 ans (?), c'était une référence qui revenait souvent : "Tu as vu, cet acteur, qui récite des fables, c'est génial, non, tu dois adorer ?" Ben, non... J'aime la Fontaine mais pas Luchini.) A l'inverse, il m'est arrivé une fois de pleurer à chaudes larmes à un petit spectacle de cirque dans un village de province.
Il y a une part d'intime et d'inexplicable dans ce qui nous touche ou non. On peut tout comprendre intellectuellement, mais peut-être doit-on renoncer à tout saisir.
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Il voyagea.
Il connut la mélancolie des paquebots, les froids réveils sous la tente, l’étourdissement des paysages et des ruines, l’amertume des sympathies interrompues.
Il revint.
Il fréquenta le monde, et il eut d’autres amours, encore.
- Clecle78Bon génie
Pas très sympa, la grosse poule même si l'image est assez parlante.
Ceci dit j'ai le souvenir du film Molière de Mnouchkine où le jeune Molière se ridiculise en jouant la tragédie comme tu le décris.
J'ai vu aussi lorsque j'étais étudiante une représentation à l'ancienne à la Comédie française et j'avoue que j'ai fait un gros dodo, bercée par l'alexandrin et l'immobilisme des acteurs.
Ça ne fonctionne plus du tout aujourd'hui ou alors à titre expérimental alors que jouer du baroque sur les instruments d'époque c'est magnifique.
D'ailleurs c'est compliqué aussi d'entendre les voix ou les doublages de vieux films. Mais pas si simple de redoubler non plus.
Ceci dit j'ai le souvenir du film Molière de Mnouchkine où le jeune Molière se ridiculise en jouant la tragédie comme tu le décris.
J'ai vu aussi lorsque j'étais étudiante une représentation à l'ancienne à la Comédie française et j'avoue que j'ai fait un gros dodo, bercée par l'alexandrin et l'immobilisme des acteurs.
Ça ne fonctionne plus du tout aujourd'hui ou alors à titre expérimental alors que jouer du baroque sur les instruments d'époque c'est magnifique.
D'ailleurs c'est compliqué aussi d'entendre les voix ou les doublages de vieux films. Mais pas si simple de redoubler non plus.
- A TuinVénérable
Je me souviens d'une fabuleuse représentation de Bajazet de Racine.
J'aime bien lire le théâtre mais pas le voir représenté non plus, car bien souvent la représentation théâtrale me semble surfaite, triviale, terre à terre. Bref une chose inscrite dans le réel et qui ne vend pas du rêve. On peut avoir besoin de ressentir l'exception, de rêver au contact de la fiction, mais encore faut il l'apparence de la fiction.
La représentation de Bajazet était superbe, dans le phrasé des comédiens, dans les vêtements, dans l'ambiance et la musique. Un parfum d'encens avait été diffusé dans la salle, tout y était.
Le côté trivial, trop encré dans le réel peut être pénible et fort déplaisant. Cela court circuite l'immersion et l'imaginaire, et peut déplaire.
J'aime bien lire le théâtre mais pas le voir représenté non plus, car bien souvent la représentation théâtrale me semble surfaite, triviale, terre à terre. Bref une chose inscrite dans le réel et qui ne vend pas du rêve. On peut avoir besoin de ressentir l'exception, de rêver au contact de la fiction, mais encore faut il l'apparence de la fiction.
La représentation de Bajazet était superbe, dans le phrasé des comédiens, dans les vêtements, dans l'ambiance et la musique. Un parfum d'encens avait été diffusé dans la salle, tout y était.
Le côté trivial, trop encré dans le réel peut être pénible et fort déplaisant. Cela court circuite l'immersion et l'imaginaire, et peut déplaire.
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