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Clp
Niveau 3

Aux frontières du réel : le collège Stanislas - Page 29 Empty Re: Aux frontières du réel : le collège Stanislas

par Clp Ven 18 Oct - 21:41
Merci Baldred pour ta réponse précise et nuancée !

Prezbo a écrit:Qu'on puisse mener une scolarité épanouie à Stanislas et que le modèle soit sous certaines conditions efficaces je n'en doute pas, mais le terme "salvateur" me semble ici étrange car il sous-entendrait qu'il y aurait dans cet établissement des élèves à "sauver".

Détrompe-toi, il y en a qui reconnaissent avoir été sur la mauvaise pente et sauvés par la discipline, ont réussi au meilleur niveau alors que dans un établissement lambda ils auraient décroché peu à peu.


Prezbo a écrit:D'ailleurs, il est probable que beaucoup des excellents professeurs qui sont en poste dans ces établissements sont des gens tout à fait compétent disciplinairement, mais qui n'ont jamais vraiment eu besoin d'être pédagogues, et ne serait pas plus en réussite que d'autres dans un autre établissement.

Malaga a écrit:Je reste persuadée qu'un lycée public qui accueillerait les mêmes élèves aurait d'aussi bons résultats. Et que si Stan devait accueillir le public massivement défavorisé de certains lycées parisiens, les résultats seraient loin d'être aussi bons.

Évidemment, on ne fait pas de miracles. Un lycée public ? Louis-le-Grand, Henri IV ou une poignée d'autres, sans doute. Si tu veux dire n'importe quel lycée, sûrement pas. Je ne comprends pas le mythe qui consiste à penser que les bons élèves seraient des génies lyophilisés qui réussiraient aussi bien dans n'importe quelles conditions. Ce sont des humains comme les autres, qui ont autant besoin d'attention, et autant besoin d'enseignement, simplement d'un enseignement qui soit au niveau de leurs capacités. Moi je trouve condescendant de penser qu'on n'a pas pas vraiment besoin d'être pédagogue quand on enseigne dans ces conditions, la pédagogie ce n'est pas l'apanage de ceux qui enseignent dans des établissement difficiles.
beaverforever
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par beaverforever Ven 18 Oct - 22:14
Clp a écrit:Moi je trouve condescendant de penser qu'on n'a pas pas vraiment besoin d'être pédagogue quand on enseigne dans ces conditions, la pédagogie ce n'est pas l'apanage de ceux qui enseignent dans des établissement difficiles.
D'un point de vue théorique, c'est vrai. Dans la pratique, un cadre qui combine autorité hiérarchique et sélection préalable des élèves incite peu à l'optimisation pédagogique.

Je donne une exemple. Je suis dans une salle de cours d'un lycée sélectif privé très bourgeois et deux étudiants en prépa tiennent une conversation étrange devant leurs ordinateurs. J'essaye de comprendre ce qu'ils font mais leur échange est très mystérieux, l'un commence une phrase puis l'autre l'interrompt en disant "Ah non là c'est plutôt ce mot" ou "Ici, tu oublies tel élément"... Intrigué je leur demande ce qu'ils font et ils m'expliquent qu'ils sont en train de fusionner leurs prises de notes de leur cours d'histoire, car l'enseignant parle tellement vite, qu'ils se sont organisés pour prendre une phrase sur deux et réunir leurs notes ensuite. Ils faisaient ainsi car les détails du cours étaient un critère clef de l'évaluation.
Je suis intimement convaincu que les étudiants auraient appris plus et mieux s'ils avaient pu lire le texte du cours avant et en discuter avec l'enseignant.

Ici, c'est juste une anecdote, mais ce qui est intéressant, c'est que c'était normalisé et que l'enseignant ne semblait pas être interrogé dans sa pratique.

(Bon, j'ai vu aussi des collègues très très opti dans leur système pédagogique dans ce genre de lycée, hein, ce n'est pas une généralité.)
Baldred
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Sage

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par Baldred Ven 18 Oct - 22:25
Clp a écrit:Merci Baldred pour ta réponse précise et nuancée !

Je t'en prie, je ne suis pas sûr que ma réponse soit si nuancée, elle est même assez tranchée : Delenda Stan

Je ne pense pas que l'émulation qui règne à Stan et dans les autres établissements "d'excellence" soit toujours saine. Je ne pense pas que la discipline militaro-religieuse de Stan puisse aider quelqu'un à réussir même si le syndrome de Stockholm peut expliquer que certains le pense. Je ne pense pas que le manque de diversité sociale de Stan puisse faire le moindre bien à la société.
Je pense qu'à Stan l'éducation est d'abord un dressage, d'autant plus efficace qu'une fois dressé on peut ne pas voir qu'on l'a été et que tout cela n'est pas seulement normal, mais aussi la norme.
Je pense que cela n'arrive pas qu'à Stan mais que Stan l'assume et le revendique.
Je pense que la tentation de Stan est assez forte chez bien des enseignants.
Prezbo
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Grand Maître

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par Prezbo Ven 18 Oct - 22:30
beaverforever a écrit:
Clp a écrit:Moi je trouve condescendant de penser qu'on n'a pas pas vraiment besoin d'être pédagogue quand on enseigne dans ces conditions, la pédagogie ce n'est pas l'apanage de ceux qui enseignent dans des établissement difficiles.
D'un point de vue théorique, c'est vrai. Dans la pratique, un cadre qui combine autorité hiérarchique et sélection préalable des élèves incite peu à l'optimisation pédagogique.

Je donne une exemple. Je suis dans une salle de cours d'un lycée sélectif privé très bourgeois et deux étudiants en prépa tiennent une conversation étrange devant leurs ordinateurs. J'essaye de comprendre ce qu'ils font mais leur échange est très mystérieux, l'un commence une phrase puis l'autre l'interrompt en disant "Ah non là c'est plutôt ce mot" ou "Ici, tu oublies tel élément"... Intrigué je leur demande ce qu'ils font et ils m'expliquent qu'ils sont en train de fusionner leurs prises de notes de leur cours d'histoire, car l'enseignant parle tellement vite, qu'ils se sont organisés pour prendre une phrase sur deux et réunir leurs notes ensuite. Ils faisaient ainsi car les détails du cours étaient un critère clef de l'évaluation.
Je suis intimement convaincu que les étudiants auraient appris plus et mieux s'ils avaient pu lire le texte du cours avant et en discuter avec l'enseignant.

Ici, c'est juste une anecdote, mais ce qui est intéressant, c'est que c'était normalisé et que l'enseignant ne semblait pas être interrogé dans sa pratique.

(Bon, j'ai vu aussi des collègues très très opti dans leur système pédagogique dans ce genre de lycée, hein, ce n'est pas une généralité.)


Je crois que le message à relire est celui de Marcelle.

Qu'il y ait des gens dans les grands lycée qui pensent à leur pédagogie, c'est probable, mais tout le système incite à ce que le prof fasse son cours, advienne que pourra, et que les élèves s'accrochent pour suivre, en étant renvoyé à leur manque de travail supposé s'ils n'y arrivent pas. Et comme système, je le dis sans ironie, cela peut avoir une incontestable efficacité, mais à la condition préalable d'avoir au préalable les élèves qui suivent, dans tous les sens du terme.
Aperçu par hasard
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par Aperçu par hasard Ven 18 Oct - 22:45
Si je résume ce qui s'est dit dans les dernières pages, Stanislas, c'est comme un bizutage, mais qui durerait 4 ou 7 ans, voire davantage pour ceux qui poursuivent en prépa. Quel établissement merveilleux...

Marcelle Duchamp a écrit:
J'étais lycéenne entre 2000 et 2003 dans un grand lycée public qui se targuait d'être le meilleur lycée de la région avec 98% de réussite au bac.

[...]

Et donc, rentrée de seconde, le CPE passe dans toutes les classes... Je m'en rappellerai toute ma vie. Il arrive, se met devant le bureau de l'enseignant, présente le lycée puis il marche dans les allées, nous fixe tous et il fait volte face dans une sorte de pirouette sur lui même. Il s'arrête et d'un ton impérieux nous dit: "Alors, si on sent que vous allez faire chuter nos statistiques de réussite au bac, on vous vire à la fin du 1er trimestre!"

Mais un lycée public ne peut pas faire cela. Donc c'était de l'esbroufe. Un discours perturbant voire traumatisant, je ne remets pas cela en question, mais de l'esbroufe. Ou alors, il faut m'expliquer par quel subterfuge un lycée public - fût-il grand et avec une réputation d'excellence à entretenir - parviendrait à se soustraire à la règle commune. Qui plus est en 2000-2003, c'est-à-dire hier.
Marcelle Duchamp
Marcelle Duchamp
Expert spécialisé

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par Marcelle Duchamp Ven 18 Oct - 23:02
Aperçu par hasard a écrit:Si je résume ce qui s'est dit dans les dernières pages, Stanislas, c'est comme un bizutage, mais qui durerait 4 ou 7 ans, voire davantage pour ceux qui poursuivent en prépa. Quel établissement merveilleux...

Marcelle Duchamp a écrit:
J'étais lycéenne entre 2000 et 2003 dans un grand lycée public qui se targuait d'être le meilleur lycée de la région avec 98% de réussite au bac.

[...]

Et donc, rentrée de seconde, le CPE passe dans toutes les classes... Je m'en rappellerai toute ma vie. Il arrive, se met devant le bureau de l'enseignant, présente le lycée puis il marche dans les allées, nous fixe tous et il fait volte face dans une sorte de pirouette sur lui même. Il s'arrête et d'un ton impérieux nous dit: "Alors, si on sent que vous allez faire chuter nos statistiques de réussite au bac, on vous vire à la fin du 1er trimestre!"

Mais un lycée public ne peut pas faire cela. Donc c'était de l'esbroufe. Un discours perturbant voire traumatisant, je ne remets pas cela en question, mais de l'esbroufe. Ou alors, il faut m'expliquer par quel subterfuge un lycée public - fût-il grand et avec une réputation d'excellence à entretenir - parviendrait à se soustraire à la règle commune. Qui plus est en 2000-2003, c'est-à-dire hier.

Bien sûr que c’était du flan!
Mais quand tu as 15 ans, que ça fait 45 min que tu es en Seconde et qu’on te sert ce discours, tu as peur!
Puis après, tu as le fameux « l’école est obligatoire jusqu’à 16 ans donc si vous avez dépassé les 16 ans et que vous faites chuter nos stats, on vous dégage! »
J’ai serré les fesses jusqu’au bac avec la peur au ventre (c’est d’ailleurs ce qui a causé ma dépression).
Mon meilleur ami a redoublé sa seconde. A l’issue de sa 2eme seconde, on estimait qu’il n’avait toujours pas le niveau attendu pour passer en 1ere. Lui, il rêvait de faire une 1ere L pour devenir professeur d’Histoire-Geo. Ils n’ont pas voulu le garder et l’ont orienté en bac pro. Il s’est retrouvé à passer un bac pro comptabilité qu’il détestait. Après le bac, terriblement déçu, il s’est engagé dans l’Armée… C’est un gros regret pour lui de n’avoir pas pu faire ce métier… Depuis qu’il était petit, il était féru d’Histoire. Sa chambre était remplie de livres sur ce sujet.


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Je m’excuse par avance des fautes d’accord, de grammaire, de syntaxe et de conjugaison que je peux laisser passer dans mes écrits. Je suis aphasique suite à un AVC et je réapprends à écrire depuis presque 5 ans. J'ai un grand problème avec le subjonctif et le genre des mots! Very Happy
Rinaldo
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Aux frontières du réel : le collège Stanislas - Page 29 Empty Re: Aux frontières du réel : le collège Stanislas

par Rinaldo Sam 19 Oct - 7:07
Marcelle Duchamp a écrit:
Aperçu par hasard a écrit:Si je résume ce qui s'est dit dans les dernières pages, Stanislas, c'est comme un bizutage, mais qui durerait 4 ou 7 ans, voire davantage pour ceux qui poursuivent en prépa. Quel établissement merveilleux...

Marcelle Duchamp a écrit:
J'étais lycéenne entre 2000 et 2003 dans un grand lycée public qui se targuait d'être le meilleur lycée de la région avec 98% de réussite au bac.

[...]

Et donc, rentrée de seconde, le CPE passe dans toutes les classes... Je m'en rappellerai toute ma vie. Il arrive, se met devant le bureau de l'enseignant, présente le lycée puis il marche dans les allées, nous fixe tous et il fait volte face dans une sorte de pirouette sur lui même. Il s'arrête et d'un ton impérieux nous dit: "Alors, si on sent que vous allez faire chuter nos statistiques de réussite au bac, on vous vire à la fin du 1er trimestre!"

Mais un lycée public ne peut pas faire cela. Donc c'était de l'esbroufe. Un discours perturbant voire traumatisant, je ne remets pas cela en question, mais de l'esbroufe. Ou alors, il faut m'expliquer par quel subterfuge un lycée public - fût-il grand et avec une réputation d'excellence à entretenir - parviendrait à se soustraire à la règle commune. Qui plus est en 2000-2003, c'est-à-dire hier.

Bien sûr que c’était du flan!
Mais quand tu as 15 ans, que ça fait 45 min que tu es en Seconde et qu’on te sert ce discours, tu as peur!
Puis après, tu as le fameux « l’école est obligatoire jusqu’à 16 ans donc si vous avez dépassé les 16 ans et que vous faites chuter nos stats, on vous dégage! »
J’ai serré les fesses jusqu’au bac avec la peur au ventre (c’est d’ailleurs ce qui a causé ma dépression).
Mon meilleur ami a redoublé sa seconde. A l’issue de sa 2eme seconde, on estimait qu’il n’avait toujours pas le niveau attendu pour passer en 1ere. Lui, il rêvait de faire une 1ere L pour devenir professeur d’Histoire-Geo. Ils n’ont pas voulu le garder et l’ont orienté en bac pro. Il s’est retrouvé à passer un bac pro comptabilité qu’il détestait. Après le bac, terriblement déçu, il s’est engagé dans l’Armée… C’est un gros regret pour lui de n’avoir pas pu faire ce métier… Depuis qu’il était petit, il était féru d’Histoire. Sa chambre était remplie de livres sur ce sujet.


Oui, dans le même genre, j'ai eu dans ma classe, en seconde, une camarade à qui la CPE avait fait croire qu'elle avait deux semaines pour relever sa moyenne parce que sinon, elle serait exclue définitivement.
On est impressionable à 15-16 ans et c'est immonde d'en profiter.
lene75
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par lene75 Sam 19 Oct - 7:20
beaverforever a écrit:
Clp a écrit:Moi je trouve condescendant de penser qu'on n'a pas pas vraiment besoin d'être pédagogue quand on enseigne dans ces conditions, la pédagogie ce n'est pas l'apanage de ceux qui enseignent dans des établissement difficiles.
D'un point de vue théorique, c'est vrai. Dans la pratique, un cadre qui combine autorité hiérarchique et sélection préalable des élèves incite peu à l'optimisation pédagogique.

À Stan je ne sais pas, peut-être qu'ils ont plus de moyens de faire régner l'ordre à tout prix que dans le public, mais les profs qui n'y arrivent pas dans les grands lycées publics parce qu'ils n'ont pas la pédagogie qui convient, et qui de ce fait se font bordéliser, il y en a un certain nombre.

J'ai connu dans mon entourage un prof qui a enseigné des années, suffisamment pour faire partie des murs, dans l'une des à l'époque on disait "ZEP" les plus dures du secteur. Il y était reconnu, apprécié et respecté. Considéré comme bon pédagogue et prof qui savait se faire respecter même d'élèves très durs et faire progresser ses élèves. Il a voulu finir sa carrière dans un grand lycée. Il s'en est mordu les doigts. Il a bossé comme un taré pour refaire ses cours, pour changer sa manière d'enseigner. Il n'a jamais réussi à s'adapter. Les élèves et les parents peuvent y être impitoyables quand ils ont le sentiment que le cours ne leur permet pas d'acquérir tout ce qu'ils en attendent. Pétitions de parents contre lui, chahut dans ses classes, aucun soutien de la direction, qui le jugeait incompétent et lui a retiré les classes à examen parce que ses élèves n’obtenaient pas les notes attendues et que d'autres profs arrivaient à leur faire obtenir. Il a regretté amèrement d'avoir voulu finir sa carrière dans un lycée où il pensait que tout roulerait tout seul avec des élèves triés sur le volet. Peut-être qu'en début de carrière il aurait réussi, il est difficile de le savoir, mais en fin de carrière, il n'a pas été en mesure d’adapter sa pédagogie à un public différent de celui dont il avait l'habitude.

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par dandelion Sam 19 Oct - 8:57
Je pense qu’au vu des résultats de Stan ils ont sans doute des professeurs de très bon niveau, notamment en prépa. Et sinon ils ont les mêmes profs que tout le monde en théorie, suivant les mutations (ma fille va dans un lycée privé de très bonne réputation, et ils ont les mêmes difficultés de recrutement que le public puisqu’ils sont sous contrat). Cela dit, on parlait dans le reportage d’humiliations, de confessions, d’homophobie et d’agressions sexuelles: c’est difficilement une approche pédagogique défendable, et encore moins avec de l’argent public.
En termes de justice, pour enseigner dans un lycée parisien, j’ai été écoeurée de voir les moyens qu’a Stan. Nous, nous en sommes à faire le ménage et amener notre matériel informatique. Je ne sais pas d’où vient l’argent de Stan mais d’autres lycées privés sous contrat, y compris bien plus onéreux que Stan pour les parents, n’ont pas leurs moyens. Et oui à Paris les établissements scolaires privés eux aussi doivent avoir recours aux infrastructures municipales.
J’ai été scolarisée dans un lycée public très sélectif et le censeur pouvait choisir les élèves (c’est comme cela que je suis rentrée en terminale, en me présentant avec mes bulletins) et les faire partir (si on répète a un élève qu’il ferait mieux de partir et qu’on l’humilie, il y a de grandes chances qu’il parte, parfois on n’est pas loin de la méthode France Télécom). De plus, à la fin du collège, les établissements parisiens pratiquent une sélection organisée, de sorte que les enfants doivent obtenir des bonnes notes pour pouvoir aller dans certains lycées.
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par Jenny Sam 19 Oct - 8:59
Je confirme ce que dit Dandelion : le ménage est très succinct chez nous, nous n’avons pas de videoprojecteur dans toutes les salles, pas de connexion internet, pas de service de restauration faute d’hygiène suffisante (revenir au point numéro 1)… Il y a de quoi être dégouté ! Pendant que la région donne de l’argent à Stanislas à profusion, elle n’assure pas le minimum dans d’autres lycées parisiens.
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par dandelion Sam 19 Oct - 9:15
Nos agents tombent malades du fait des conditions de travail dégradées, car ils ne sont apparemment pas remplacés en nombre suffisant. Certaines toilettes ont été fermées. Quand il y a un balai dans la salle, nous sommes plusieurs enseignants à le passer car nous avons honte d’enseigner dans des lieux aussi dégradés (gros moutons noirs, et tout ce qui se trouve dans une salle remplie d’enfants de 8h à 18h, on ne parle pas d’un petit coup de balai pour enlever les miettes au sol chez soi). Parfois je nettoie les tables avec le gel hydroalcoolique que j’ai dans mon sac et un mouchoir. Je renonce de plus en plus à faire des activités faute de matériel informatique fonctionnel. Internet ne fonctionnant plus sur nos ordinateurs personnels, impossible de trouver un plan B (déjà qu’il faut avoir toutes sortes d’adaptateurs car les connexions sont vintage).
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par Baldred Sam 19 Oct - 10:01
En ce qui concerne les profs, du primaire à  la 3e, j'ai eu la proportion habituelle je pense de tocards et de bons profs et même de très bons, ce qui était d'autant plus admirable que l'idée générale était que l'enfant était un truc pas fini, humainement incomplet, qu'il fallait usiner.
Je suis ensuite un produit de la fac, je ne sais pas si les prestigieuses prépas de Stan sont plus ou moins dures, si cela tient au vivier d'élèves "maison" ( on a vu comment ils contournent parcoursup avec le fils d'AOC), à  la qualité des profs, ou au "marche ou crève " des prépas en général.
Ma filleule a fait sa scolarité et sa prépa à H4. Pour le concours d'entrée à l"ENS elle n'avait qu un espoir, qu'un objectif : ne pas être la dernière, sinon : Terreur.
Ma question (sincère) est la suivante : vous qui sortez de Prépa. Quelle est la part de la pédagogie des profs dans votre réussite ?


Dernière édition par Baldred le Sam 19 Oct - 10:18, édité 1 fois
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par epekeina.tes.ousias Sam 19 Oct - 10:07
Baldred a écrit:Quelle est la part de la pédagogie des profs dans votre dans votre réussite ?

Remarque, même s'il m'a fallu du temps pour le formuler clairement, je répondrais plutôt ni la pédagogie ni son absence : ce sont des qualités humaines que j'ai trouvées chez quelques profs, pas tous mais un nombre finalement assez élevé, et c'est à ces qualités humaines que je dois beaucoup.
Et en te lisant, j'ai un sentiment de catastrophe, car je vois clairement, ce que l'on ne pouvait ignorer avant que tu le dise mais là on le voit concrètement, à savoir que ces qualités humaines — la générosité, la magnanimité, la libéralité, la patience, etc. — sont infiniment rares à Stan, voire qu'elles se sont absentées. Et de là une situation parfaitement tragique et désespérante, ou encore ce que l'on peut appeler le sentiment de vivre un enfer, la désolation.

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par Baldred Sam 19 Oct - 10:31
epekeina.tes.ousias a écrit:
Baldred a écrit:Quelle est la part de la pédagogie des profs dans votre dans votre réussite ?

Remarque, même s'il m'a fallu du temps pour le formuler clairement, je répondrais plutôt ni la pédagogie ni son absence : ce sont des qualités humaines que j'ai trouvées chez quelques profs, pas tous mais un nombre finalement assez élevé, et c'est à ces qualités humaines que je dois beaucoup.
Et en te lisant, j'ai un sentiment de catastrophe, car je vois clairement, ce que l'on ne pouvait ignorer avant que tu le dise mais là on le voit concrètement, à savoir que ces qualités humaines — la générosité, la magnanimité, la libéralité, la patience, etc. — sont infiniment rares à Stan, voire qu'elles se sont absentées. Et de là une situation parfaitement tragique et désespérante, ou encore ce que l'on peut appeler le sentiment de vivre un enfer, la désolation.

Sur les qualités humaines, tu as raison, elles sont sans doutes primordiales pour un prof.
Pour "l'enfer" c'est plus ambigu vu que l'enfer des uns et le paradis des autres. Des amis sortis de Stan "par le haut" y ont mis leurs enfants par adhésion aux valeurs de Stan et ses avantages associés : cadre, public choisi, réseau, sélection, bonus social, accès plus probable aux meilleures filières pour finalement pas si cher, Valeurs chrétiennes...
Comme Sisyphe, il faut imaginer un élève de Stan heureux...

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par epekeina.tes.ousias Sam 19 Oct - 10:48
Certes. Mais je suis un vieux schnock : dans les “valeurs de Stan” que tu énumères, et auxquelles je ne doute pas que nombre de parents et d'élèves adhèrent, je ne vois aucune qualité d'humanité. Je n'y vois que le désir malin de parvenir, de réussir dans une lutte où les faibles seront écrasés sans pitié, et le tout enrobé de guimauve prétendument chrétienne pour faire passer des bassesses pour de la vertu. On imagine ce qu'un Balzac, un Flaubert, un Vallès auraient su en tirer…

Rien de bien exceptionnel en soi, car on sait que cela est répandu (et depuis bien longtemps), mais institué en système dans l'espace restreint d'un établissement, même de grande taille, cela reste frappant.

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par Baldred Sam 19 Oct - 10:52
epekeina.tes.ousias a écrit:Certes. Mais je suis un vieux schnock : dans les “valeurs de Stan” que tu énumères, et auxquelles je ne doute pas que nombre de parents et d'élèves adhèrent, je ne vois aucune qualité d'humanité. Je n'y vois que le désir malin de parvenir, de réussir dans une lutte où les faibles seront écrasés sans pitié, et le tout enrobé de guimauve prétendument chrétienne pour faire passer des bassesses pour de la vertu. On imagine ce qu'un Balzac, un Flaubert, un Vallès auraient su en tirer…

Rien de bien exceptionnel en soi, car on sait que cela est répandu (et depuis bien longtemps), mais institué en système dans l'espace restreint d'un établissement, même de grande taille, cela reste frappant.

Oui, à tout.
dandelion
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Aux frontières du réel : le collège Stanislas - Page 29 Empty Re: Aux frontières du réel : le collège Stanislas

par dandelion Sam 19 Oct - 11:04
J’ai relu les Illusions perdues et Le père Goriot en arrivant à Paris et trouvé que, finalement, la technologie avait changé, sans que le reste ne change.
Ce qui était intéressant dans le reportage c’était qu’ils parlaient de la docilité comme d’une qualité. Or, apprendre c’est s’affranchir. Si nos élites sont à l’image des élèves de Stan, cela explique une partie de nos problèmes: pas de ‘thinking out of the box’ pour nous, mais la répétition shadokienne de choses qui ne marchent pas, mais qui sont traditionnelles. Puisque c’est comme ça, c’est que c’est bien, et en cas de doute, retournons donc vers le passé pour y trouver des solutions encore pires.
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par epekeina.tes.ousias Sam 19 Oct - 11:08
Je dirais plutôt qu'ils remplacent l'obéissance réfléchie ou responsable par la soumission — en échange de prébendes : donnant / donnant. Et cela, la capacité à se soumettre en échange de bénéfices sonnants et trébuchants, c'est ce que l'on appelle assez souvent, de nos jours, la “créativité”, l'absence de “tabous”, de “totems” et autres…

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par lene75 Sam 19 Oct - 11:08
Baldred a écrit:
Ma question (sincère) est la suivante : vous qui sortez de Prépa. Quelle est la part de la pédagogie des profs dans votre dans votre réussite ?

De prépa uniquement ou sur toute la scolarité ? N'étant pas du milieu tout à fait idoine, mes profs ont joué un rôle décisif dans ma scolarité. J'en ai clairement en tête quelques-uns, plus que d'autres, tout au long de ma scolarité, dont l‘apport est évident. Parmi eux deux profs de prépa, pas forcément des modèles d'humanité, l'un étant carrément odieux, il n'y a pas d'autre mot, mais redoutablement efficace. Mais ils n'auraient rien pu faire sans ceux qui les ont précédé, et en particulier celles à qui je pense devoir le plus : mes institutrices (on les appelait alors encore comme ça) de CP et de CE1, qui cependant, à elles seules, n'auraient pas suffi si d'autres n'avaient pas pris le relais plus tard pour construire sur les bases solides qu'elles avaient initiées.

Si on ne veut parler que de ceux de prépa, disons qu'ils ont été absolument décisifs pour ma réussite aux concours, mais que tous les autres ont rendu ça possible, et surtout, je ne limite pas la réussite à la réussite professionnelle, qui est d'ailleurs toute relative quand on exerce la profession peu valorisée socialement qui est la nôtre. Les profs les plus exigeants m'ont ouvert progressivement les portes d’un monde, et je me souviens clairement d'en avoir atteint l’apothéose à l'entrée en prépa. Je me revois chez moi, au milieu des champs de mon enfance, me dire qu'on m'avait offert un diamant et que peu importe ce qui arriverait alors, quand bien même j’échouerais lamentablement, maintenant que je l'avais aperçu, on ne pourrait plus jamais me le retirer.

J'imagine que l'effet psychologique est bien moins important pour ceux à qui ce monde n'est pas inconnu sans l'école et qui ne mesurent donc pas forcément tout ce qu'elle leur apporte. En tout cas, pour ma part, pour cette raison, certains messages d'anciens élèves me touchent plus que d'autres, et me donnent l'impression d'avoir fait le job, ceux notamment qui me disent que mes cours leur ont appris "à voir le monde autrement", ou encore leur ont donné "l'espoir et la volonté", ou ont été "une très grande expérience humaine", ceux qui, pour le dire autrement, témoignent de ce que ça leur a apporté personnellement et pas seulement scolairement ou en termes de "réussite" quantifiable. Et ce pourtant uniquement avec du scolaire tout ce qu'il y a de plus traditionnel, sans aucune ingérence dans leur intimité. C'est pour ça aussi que je me méfie comme de la peste de tous les indicateurs pseudo-objectifs censés mesurer l'efficacité d'un cours ou d'un système scolaire en cochant des compétences objectivables alors que l'essentiel est dans le non quantifiable.

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par Baldred Sam 19 Oct - 11:31
lene75 a écrit:
Baldred a écrit:
Ma question (sincère) est la suivante : vous qui sortez de Prépa. Quelle est la part de la pédagogie des profs dans votre dans votre réussite ?

De prépa uniquement ou sur toute la scolarité ? N'étant pas du milieu tout à fait idoine, mes profs ont joué un rôle décisif dans ma scolarité. J'en ai clairement en tête quelques-uns, plus que d'autres, tout au long de ma scolarité, dont l‘apport est évident. Parmi eux deux profs de prépa, pas forcément des modèles d'humanité, l'un étant carrément odieux, il n'y a pas d'autre mot, mais redoutablement efficace. Mais ils n'auraient rien pu faire sans ceux qui les ont précédé, et en particulier celles à qui je pense devoir le plus : mes institutrices (on les appelait alors encore comme ça) de CP et de CE1, qui cependant, à elles seules, n'auraient pas suffi si d'autres n'avaient pas pris le relais plus tard pour construire sur les bases solides qu'elles avaient initiées.

Si on ne veut parler que de ceux de prépa, disons qu'ils ont été absolument décisifs pour ma réussite aux concours, mais que tous les autres ont rendu ça possible, et surtout, je ne limite pas la réussite à la réussite professionnelle, qui est d'ailleurs toute relative quand on exerce la profession peu valorisée socialement qui est la nôtre. Les profs les plus exigeants m'ont ouvert progressivement les portes d’un monde, et je me souviens clairement d'en avoir atteint l’apothéose à l'entrée en prépa. Je me revois chez moi, au milieu des champs de mon enfance, me dire qu'on m'avait offert un diamant et que peu importe ce qui arriverait alors, quand bien même j’échouerais lamentablement, maintenant que je l'avais aperçu, on ne pourrait plus jamais me le retirer.

J'imagine que l'effet psychologique est bien moins important pour ceux à qui ce monde n'est pas inconnu sans l'école et qui ne mesurent donc pas forcément tout ce qu'elle leur apporte. En tout cas, pour ma part, pour cette raison, certains messages d'anciens élèves me touchent plus que d'autres, et me donnent l'impression d'avoir fait le job, ceux notamment qui me disent que mes cours leur ont appris "à voir le monde autrement", ou encore leur ont donné "l'espoir et la volonté", ou ont été "une très grande expérience humaine", ceux qui, pour le dire autrement, témoignent de ce que ça leur a apporté personnellement et pas seulement scolairement ou en termes de "réussite" quantifiable. Et ce pourtant uniquement avec du scolaire tout ce qu'il y a de plus traditionnel, sans aucune ingérence dans leur intimité. C'est pour ça aussi que je me méfie comme de la peste de tous les indicateurs pseudo-objectifs censés mesurer l'efficacité d'un cours ou d'un système scolaire en cochant des compétences objectivables alors que l'essentiel est dans le non quantifiable.

Merci, ma question portait plutôt sur la prépa, même si je comprends qu'il est difficile de saucissonner.
Par exemple quel a été l'apport de ces profs odieux mais efficaces dont tu parles ?
J'en ai eu un à Jussieu en préparation de l'agrégation. Redoutable lecteur de textes et homme dangereux qui avait sa cour. Je me demande encore si cette rencontre a été bénéfique.
lene75
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par lene75 Sam 19 Oct - 11:53
Baldred a écrit:
Par exemple quel a été l'apport de ces profs odieux mais efficaces dont tu parles ?

Le 1er était odieux et humainement détestable, pour ce qu'il voulait bien nous montrer de sa personnalité, en tout cas. Le 2e seulement froid et distant, économe de ses paroles en dehors du strict cadre du cours, mais percutant, et gentil dans le fond, je pense.

Ils m'ont apporté, pour le 1er, la technicité. C'est avec lui que j'ai eu le déclic de l'explication de texte, qui compte pour environ la moitié des points aux concours et qu'aucun autre prof, d'aucune matière, n'avait réussi à m'apprendre efficacement auparavant. Il nous a donné une explication linéaire à faire pour le lendemain, nous lui avons dit que nous ne savions pas faire (au lycée à l'époque on faisait des commentaires composés en français-philo, des commentaires de corpus documentaires dans les autres matières), il nous a répondu : "Eh bien demain vous saurez". Incroyable mais vrai. Un cours a suffi pour que je voie la lumière. Les cours suivants ont juste servi à améliorer la technique, mais en un cours l'essentiel a été posé, là où des années de scolarité auparavant avaient échoué. Le 2e, l'année suivante, m'a plus permis d'acquérir la subtilité, la précision et la finesse des analyses. On était moins dans la technique et plus dans ce truc imperceptible qui fait toute la différence et qui est un travail de plus longue haleine. Ils se sont articulés tous les deux dans le bon sens : le 1er était mon prof de français en 1re année, le 2e mon prof de spé philo en 2e année. Il fallait d'abord la froide technique pour pouvoir y adjoindre ensuite la sensibilité d'analyse. L'explication de texte, qui était mon point faible, est devenu mon point fort, et c'est un atout énorme pour pouvoir se cultiver seul une fois lâché dans la nature.

Humainement, tous les deux, et d'autres encore, m'ont apporté cet immense plaisir esthétique pris à la connaissance qu'aucune approche ludique ne m'a jamais apporté. Sur ce point, j'avais commencé à voir la lumière avec mon prof de maths de seconde, à la réputation assez controversée (réputé faire pleurer les filles, ce qui ne s'est pas produit une seule fois dans l'année, comme quoi, les réputations...), mais c'est vraiment en prépa que l'essai a été transformé. Mon prof d'histoire, aussi, a été une révélation pour moi : bien qu'y ayant d'excellentes notes parce qu'ils suffisait d'apprendre par coeur, j'ai détesté l'histoire dans le secondaire, en prépa, je n'ai jamais réussi à avoir de bonnes notes en histoire (donc techniquement il n'a pas été très efficace pour moi, malgré son côté très scolaire et apparemment plus accessible que les deux autres), mais j'ai découvert que ça n'avait strictement rien à voir avec ce qu'on faisait au lycée et que c'était absolument passionnant. C'est ça qui m'a le plus apporté sur le plan personnel, et c'est ça que je crois transmettre le mieux à mes élèves : le plaisir d'apprendre et la confiance en ses capacités intellectuelles. Moi qui avais peu confiance en moi, ça m'a permis de découvrir des trésors en moi. C'est quelque chose que mes élèves me disent et qui m'étonne toujours. Hier encore, un peu comme un cheveu sur la soupe, un élève m'a sorti : "Vous croyez plus en nous que nous ne croyons nous-mêmes en nous." C'est un truc que me disent souvent mes anciens, y compris et peut-être même surtout des élèves à qui je n'ai pas mis de bonnes notes : qu'ils me remercient d'avoir été celle qui, dans leur scolarité, a le plus cru en eux. J'en suis toujours étonnée, parce que je n'ai pas l'impression de donner cette image, mais de fait, c'est aussi le ressenti que j'ai eu face à ces profs.

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par epekeina.tes.ousias Sam 19 Oct - 12:01
Pour ma part, les quelques profs que j'ai vu être agressifs, insultants ou humiliants — surtout en prépa, un peu en fac — m'ont surtout appris à leur rentrer dedans et à rendre coups pour coups quand ils ont essayé leur petit jeu avec ma pomme. Le plus amusant (pour moi, s'entend), c'est que j'en ai ensuite eu un ou deux comme collègues…

Mais les deux profs de philo carrément odieux que j'ai pu croiser en prépa — paix à leurs cendres — ne m'ont rien appris. Mon prof de terminale (pour ce qui est de la philo, et mes profs de terminale en général) et trois ou quatre profs de fac m'ont appris énormément, y compris humainement

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par Baldred Sam 19 Oct - 12:21
Merci @Lene75, croire en ses élèves plus qu'ils ne croient eux-mêmes en eux est une belle définition du prof.
Ma question est peut-être sans intérêt après tout, comme semble le dire @ETO je me suis autant construit par opposition que par adhésion, l'essentiel est de ne pas s'y perdre.
epekeina.tes.ousias
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par epekeina.tes.ousias Sam 19 Oct - 12:35
Baldred a écrit:Merci @Lene75, croire en ses élèves plus qu'ils ne croient eux-mêmes en eux est une belle définition du prof.
Ma question est peut-être sans intérêt après tout, comme semble le dire @ETO je me suis autant construit par opposition que par adhésion, l'essentiel est de ne pas s'y perdre.

Ah, non, je ne dis rien sur toi, je ne me permettrais pas et je te demande pardon si je t'ai donné cette impression. Seulement que j'en ai croisé quelques-uns, mais que, comme à cette époque j'étais assez agressif, que je faisais du rugby et de la boxe, ça ne m'a pas spécialement impressionné. Mais j'ai bien vu tout de même que certains de mes amis de l'époque ne réagissaient pas du tout (mais alors pas du tout) de la même manière — cela motivait d'ailleurs certaines de mes “répliques”.

À part cela, on est tous plus ou moins différents, c'est possible, mais ça ne justifie pas ce type de comportement, au contraire. Et je trouve ta question au contraire très pertinente : l'idée qu'il faut “en baver” pour apprendre quelque chose, mais qu'ensuite on serait “reconnaissance” est, à mon avis, une forme de crétinerie indigne. C'est l'équivalent du machin bien réac : “les jeunes, il leur faudrait une bonne guerre”. Et encore, je reste poli.

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par uneodyssée Sam 19 Oct - 12:52
Bien d’accord là-dessus !

Pour répondre à la question de la pédagogie en prépa : mon prof de grec m’a beaucoup appris par sa pédagogie… et sa bonne humeur ! Ma prof d’histoire m’a beaucoup appris parce que j’ai lu tous les polycopiés illisibles (police minuscule, copies de mauvaise qualité) qu’elle m’a distribués, mais de l’avis général elle était plus savante que pédagogue. Pour les autres, je me souviens surtout de leur personnalité… Et que j’ai surtout appris parce qu’avec des DS tous les jeudis et des versions tous les mercredis, eh bien à force, ça rentre.

Comme le dit Lene, ce n’aurait sans doute été rien sans l’école primaire où régnait, de l’avis de ma mère qui y enseignait, un bel «accord pédagogique», où j’ai bénéficié de pratiques que bien plus tard, à l’IUFM, on m’a présentées comme innovantes, et qui, de manière certaine, ont développé mon autonomie et mon goût d’apprendre.
lene75
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par lene75 Sam 19 Oct - 13:40
epekeina.tes.ousias a écrit:l'idée qu'il faut “en baver” pour apprendre quelque chose, mais qu'ensuite on serait “reconnaissance” est, à mon avis, une forme de crétinerie indigne.

Le problème, c'est qu'arrivé à un certain niveau, les choses sont forcément difficiles. On en bave forcément pour comprendre un texte de Kant, et on en bave d'autant plus qu'on n'est pas socialement armé pour en avoir une compréhension plus aisée. On peut réécrire le texte pour le simplifier. Je le fais parfois (rarement). Mais on en perd alors l'essentiel. Il n'y a donc que deux options : simplifier et accepter que ceux qui n'ont pas reçu chez eux les moyens d'aller plus loin n'y aient jamais accès, ou ne pas simplifier, faire suer les élèves dans tous les sens du terme, et faire le pari fou qu'ils vont finir par y arriver, ou qu'en tout cas ils s'en seront rapprochés autant que possible.

Ce qui est amusant, c'est que c'est très largement admis dans le domaine du sport. Toute la société est d'accord pour dire qu'en sport on n'arrive à rien sans effort, de façon même très largement exagérée, comme si tout le monde avait vocation à devenir champion olympique dans le moindre club de quartier, mais pour ce qui est des disciplines intellectuelles, le moindre effort est décrié. Apprendre sans effort, ça fonctionne bien pour des gens qui ont des dispositions particulières, ou qui "sont tombés dans la marmite quand ils étaient petits", comme me l'avait dit un autre prof de prépa, mais pour ceux qui sont plus en difficulté ou socialement moins dotés, apprendre sans effort me paraît illusoire. Et le niveau à partir duquel il faut fournir un gros effort, et donc en baver, est très variable suivant les personnes. Certains ne découvrent ça qu'en prépa parce que leurs facilités leur ont permis d'arriver jusque-là sans effort, et pour eux ça peut faire un sacré choc, mais il y a des enfants pour qui apprendre à marcher et à parler est déjà un parcours du combattant, et qui ont donc l'habitude de devoir se battre pour tout.

Après on n'est pas obligé d'ajouter de la difficulté à la difficulté en se montrant odieux et humiliant, mais ceux qui le sont restent des personnages assez rares. En prépa à Henri IV je n'en ai eu qu'un seul en deux ans. Suffisamment marquant pour qu'on ne parle que de lui et pas des autres quand on évoque ses souvenirs de prépa, mais ça cache que tous les autres, qui se contentent d'être exigeants, ne sont pas comme ça, combien sont-ils en 2 ans de prépa ? Une quinzaine, une vingtaine ? Même les plus déjantés d'entre eux, comme ce prof avec qui nous avions des conversations surréalistes et qui, un jour que je n'avais pas envie de retourner en cours après une pause et lui pas envie d'aller à son conseil de classe, m'a offert un chocolat pour que nous nous soutenions mutuellement. Complètement décalé mais tellement humain.

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