Création du Prix Samuel Paty

C'est assez difficile à dire. En fait cela semble un travail réalisé par un club facultatif. Et ces dispositifs facultatifs sont généralement marqués par un fort entresoi socialement favorisé.

C'est assez perceptible je trouve dans le résultat final.

Une classe c'est hétérogène et le résultat est moins homogène mais aussi moins artificiel.

C'est une des raisons pour lesquelles j'ai arrêté le club théâtre que j'ai fait une année. Malgré mes intentions c'était assez peu représentatif du public du collège.

Désolé d'être si critique. Je ne remets pas en cause le travail de ces collégien•nes. C'est plutôt une limite de ce type de dispositif facultatif.

Ça se ressent à mon sens au résultat final.

Tangleding a écrit:

C'est une des raisons pour lesquelles j'ai arrêté le club théâtre que j'ai fait une année. Malgré mes intentions c'était assez peu représentatif du public du collège.

Mais pourquoi avoir pour autant arrêté ?
Si j'attends que mon club théâtre soit représentatif du collège, ben oui, je ne le ferai jamais car pour la majorité des élèves de mon bahut, le théâtre, c'est ce qu'on voit en français et les sorties imposées par les professeurs. Ca ne les intéresse pas.
Alors oui, dans ce club, ce sont seulement des élèves volontaires. Oui j'ai de bons élèves favorisés socialement, mais aussi des gamins défavorisés, des gamins ULIS, des gamins qui justement trouvent dans ce club une occasion de s'épanouir et de mettre en valeur d'autres compétences.

On travaille autrement avec un petit groupe volontaire qu'avec une classe, c'est évident. Est-ce pour autant artificiel ?

Je trouve précisément ta vision sociologiquement marquée, Tangleding. :lol:

D'expérience, partir du principe que seuls les gamins favorisés participent à ce genre de club, c'est appliquer la même logique que celle qui pousse à supprimer le latin, au prétexte que ce sont les enfants de familles CSP+ qui le choisissent.

Si on ne propose pas ce genre de clubs partout, pour qu'il puisse être suivi par tous ceux qui voudront/pourront d'où qu'ils viennent, alors oui, on en fait un truc sociologiquement marqué.

Je l'ai déjà dit, pour ce club avec 19 élèves essentiellement issus des CSP+, nous étions deux profs.

Une classe c'est 26 et je suis tout seul.

Je trouve injuste d'utiliser ces heures pour ceux qui ont déjà le plus et laisser les autres mariner dans un groupe de 25, sans le moindre dédoublements avec des programmes indigestes sur un plan volumique.

Le volontariat est socialement discriminant, c'est largement démontré.

Je préfère faire moins pour tous que plus pour quelques uns.

On devrait tout simplement avoir les moyens de faire du théâtre avec nos classes, avec tous les élèves qui les constituent.

@henriette : le latin est une option, sur trois années de suite, on peut fidéliser, élargir le vivier. Le théâtre en théorie fait partie des contenus d'enseignement obligatoires dans notre discipline.

Après on peut dire que ma vision est sociologiquement marquée mais pour ce qui est des clubs c'est malheureusement ce que j'ai constaté avec une relative constance.

Idem lorsque on nous refusait des moyens pour des oraux blancs pour tous, c'était les enfants de CSP+ qui en profitaient uniquement, ils en avaient aussi besoin. Mais les autres plus encore, et bien sûr ils n'étaient pas volontaires. On a fini par obtenir (avec un changement de direction) que les oraux blancs concernent tout le monde. Et c'est incomparable.

Si on voulait on pourrait rendre le latin obligatoire. A l'état d'option c'est malgré toute la bonne volonté des collègues encore grandement discriminant socialement.

Je crois qu'il y a pas mal d'études qui ont montré le caractère discriminant du volontariat.

Mais tu le connais, toi, l'établissement récompensé pour juger qu'il s'agit forcément de CSP+ ?

Et puis, si un tel club existe dans un collège lambda, c'est à mon avis une bonne chose : cela évitera peut-être que les CSP+ le fuient pour le privé, et que ce collège deviennent un lieu de non mixité sociale.

Mais franchement je trouve un peu triste de débattre de ça précisément sur ce fil, et précisément à cette occasion particulière.

Ouais c’est le même raisonnement que pour le latin, en effet. Plus personne n’en fera, comme ça une stricte égalité dans la nullité sera scrupuleusement respectée. Non à la discrimination.

DesolationRow a écrit:Ouais c’est le même raisonnement que pour le latin, en effet. Plus personne n’en fera, comme ça une stricte égalité dans la nullité sera scrupuleusement respectée. Non à la discrimination.

Tangleding a écrit:Je préfère faire moins pour tous que plus pour quelques uns

Sérieusement ?

Ça peut paraître déplacé sur ce fil, mais ça ne l'est pas forcément tant que cela. Car ces problèmes de ségrégation interne, dont les enseignants ne sont pas responsables, ont des traductions concrètes en terme de difficulté d'enseigner, de transmettre ce qui doit permettre l'émancipation des jeunes esprits qui nous sont confiés.

Je ne suis pas pour la supression du latin, plutôt pour son élargissement.

Je ne connais pas cet établissement, bien sûr. Par contre je connais ces clubs optionnels et je regrette leurs biais.

Ce n'était sans doute pas le moment pour exprimer le malaise que j'ai ressenti en écoutant ce podcast, désolé.

Oudemia : oui j'ai arrêté de faire mettre en scène toute une pièce de Molière par quelques privilégiés et j'essaie de faire au mieux pour faire jouer des extraits par toute une classe hétérogène. Ça correspond à la maxime qui semble te choquer.

Ben l'un n'empêche pas l'autre, que je sache.

Bourg-Lastic  est une commune vraiment sociologiquement marquée, mais pas comme tu le crois Tangleding. C'est la France périphérique périphérique et vraiment pas riche.

CSP:
Agriculteurs exploitants 40 personnes, soit 5.08 %
Artisans, commerçants, chefs d'entreprise 30 personnes, soit 3.81%
Cadres et professions intellectuelles supérieures 15 personnes, soit 1.9 %
Professions intermédiaires 69 personnes, soit 8.76%
Employés 144 personnes, soit 18.27%
Ouvriers 70 personnes, soit 8.88%
Retraités 347 personnes, soit 44.04%
Autres sans activité 75 personnes, soit 9.52 %

Et pour le revenu fiscal moyen: 1 745 €
Rang de la commune 28 213

Pour les diplômes :
Aucun diplôme ou certificat d'études primaires                                                         29,9%
BEPC, brevet des collèges, DNB                                                                              8,0%
CAP, BEP ou équivalent                                                                                           29,5%
Baccalauréat, brevet professionnel ou équivalent                                                     17,0%        
Diplôme de l'enseignement supérieur de niveau bac + 2                                          10,4%
Diplôme de l'enseignement supérieur de niveau bac + 3 ou bac + 4                          2,9%
Diplôme de l'enseignement supérieur de niveau bac + 5 ou plus                               2,3%


Présentation du Collège Willy Mabrut, établissement Public de Bourg Lastic (63).
Le collège accueille 90 élèves dont 31 élèves en classe de 6ème et 18 en classe de 5ème, 24 élèves de 4ème et 17 élèves en 3ème. (année 2021-2022).

Pas vraiment un coin favorisé!!

Source : INSEE
Et c'est du même genre dans les villages voisins.

Sinon pour être tranquilles avec notre conscience, interdisons l'accès des riches à l'école publique et réservons la aux pauvres... Ah, pardon on me dit dans l'oreillette que quelqu'un a déjà eu l'idée et que c'est presque acté. Au temps pour moi

Je parle de ségrégation interne. A l'intérieur de l'établissement. Chacun peut regarder dans son bahut. Quels élèves constituent le club développement durable, le club théâtre, le cinéclub... Contrairement à ce que cela peut faire penser, je n'ai pas de compte à régler avec ces élèves, mon enseignement favorise énormément les héritiers, ils sont extrêmement valorisés du fait de ma pratique. J'utilise sans doute le terme CSP+ de façon impropre, je pense plutôt aux catégories intermédiaires (ce qui intègre les enfants de profs, ce que j'ai été)

C'est vrai tout de même que le collège en question ici est un tout petit collège, comme souvent en zone rurale, les biais que j'observe dans mon collège "600" de moyenne ceinture sont peut-être moins opérants ici. Dans tous les cas mon propos ne visait pas à dénigrer les élèves lauréat-es, ni leur enseignant excellent pédagogue. C'est plutôt l'expression d'une forme d'inquiétude générale quant au caractère ségrégatif du système scolaire et au poids de l'héritage socio-culturel.

Et tant mieux au fond si la source présente de mon inquiétude l'est ici par erreur.

Bonsoir,
Je viens d'écouter le podcast que je trouve très bien. Et en ce moment sur France-Info un reportage sur le Prix Samuel Paty et le lycée primé.
Bonne soirée.

Merci, Michel, de nous ramener à ce qui compte vraiment dans ce fil : la belle réussite de ces élèves et de leur enseignant, qui poursuivent ce en quoi Samuel Paty croyait.

La remise du prix pour cette année tombait aujourd'hui...

Coïncidence de dates glaçante en effet. Comment cela s'est-il passé ?

Belle cérémonie d'après des collègues qui y étaient.

Un extrait du discours d’E. Borne :

Ce nouvel attentat a provoqué une onde de choc notamment dans la communauté enseignante, toujours marquée par la mort de Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie assassiné le 16 octobre 2020 à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines). La première ministre leur promet d’assurer leur sécurité. « Je veux le dire à tous les enseignants : nous serons au rendez-vous pour assurer votre sécurité », a-t-elle déclaré lors d’un discours prononcé à l’occasion de la cérémonie de remise du prix Samuel Paty à la Sorbonne à Paris. « L’école est un sanctuaire (…). Quand un enseignant est attaqué, ce n’est pas seulement la République qui est visée : c’est son avenir qui est menacé », a-t-elle poursuivi, assurant : « Nous ne céderons rien à la violence. Nous lui ferons face et nous la combattrons. »

https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/10/14/attentat-d-arras-les-cours-annules-lundi-jusqu-a-10-heures-dans-les-colleges-et-lycees-une-minute-de-silence-prevue-a-14-heures_6194426_3224.html

Tangleding a écrit:Oudemia : oui j'ai arrêté de faire mettre en scène toute une pièce de Molière par quelques privilégiés et j'essaie de faire au mieux pour faire jouer des extraits par toute une classe hétérogène. Ça correspond à la maxime qui semble te choquer.

C'est un aparté par rapport au fil de discussion, mais ça peut servir. Dans un collège où j'ai travaillé (privé hors contrat), tous les élèves faisaient du théâtre.
On jouait une pièce par classe. Les élèves se relayaient sur un même rôle. Tout le monde jouait, mais on avait quand même la satisfaction de proposer un spectacle complet. Ca demande un gros travail sur les costumes et la mise en scène afin de maintenir la cohérence de l'ensemble. Mais ça marche. Quant au niveau des élèves, on gère ça par un bon entrainement et une distribution des rôles soignée.