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Daria
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Texte sur un lever de soleil Empty Texte sur un lever de soleil

par Daria Jeu 30 Sep 2021 - 21:18
Bonsoir,

Auriez-vous des idées de textes décrivant un lever de soleil, plutôt XIXè?

Ascagne
Ascagne
Grand sage

Texte sur un lever de soleil Empty Re: Texte sur un lever de soleil

par Ascagne Jeu 30 Sep 2021 - 21:33
Bonsoir @Daria.
On doit en pouvoir trouver plusieurs qui sont particulièrement intéressants, mais où le lever du soleil lui-même n'est pas forcément au cœur. Je pense aux scènes d'aube chez Zola, mais lorsque l'accent va être placé en réalité sur les produits des Halles (Le Ventre de Paris), sur l'arrivée des travailleurs (L'Assommoir par exemple ; la fin de Germinal)...
Dans La Faute de l'abbé Mouret (deuxième partie, chapitre 5) Serge découvre ou redécouvre la Nature à l'aube (il y a donc le soleil, mais aussi pas mal d'autres choses) :

https://fr.wikisource.org/wiki/La_Faute_de_l%E2%80%99abb%C3%A9_Mouret/Livre_deuxi%C3%A8me

Émile Zola a écrit:Ce fut une aurore soudaine, un rideau d’ombre tiré brusquement, laissant voir le jour dans sa gaieté matinale. Le parc s’ouvrait, s’étendait, d’une limpidité verte, frais et profond comme une source. Serge, charmé, restait sur le seuil, avec le désir hésitant de tâter du pied ce lac de lumière. [...]
Serge, les mains pendantes, tournait lentement la tête, en face du parc. C’était une enfance. Les verdures pâles se noyaient d’un lait de jeunesse, baignaient dans une clarté blonde. Les arbres restaient puérils, les fleurs avaient des chairs de bambin, les eaux étaient bleues d’un bleu naïf de beaux yeux grands ouverts. Il y avait, jusque sous chaque feuille, un réveil adorable.

Serge s’était arrêté à une trouée jaune qu’une large allée faisait devant lui, au milieu d’une masse épaisse de feuillage ; tout au bout, au levant, des prairies trempées d’or semblaient le champ de lumière où descendait le soleil ; et il attendait que le matin prît cette allée pour couler jusqu’à lui. Il le sentait venir dans un souffle tiède, très-faible d’abord, à peine effleurant sa peau, puis s’enflant peu à peu, si vif, qu’il en tressaillait tout entier. Il le goûtait venir, d’une saveur de plus en plus nette, lui apportant l’amertume saine du grand air, mettant à ses lèvres le régal des aromates sucrés, des fruits acides, des bois laiteux. Il le respirait venir avec les parfums qu’il cueillait dans sa course, l’odeur de la terre, l’odeur des bois ombreux, l’odeur des plantes chaudes, l’odeur des bêtes vivantes, tout un bouquet d’odeurs, dont la violence allait jusqu’au vertige. Il l’entendait venir, du vol léger d’un oiseau, rasant l’herbe, tirant du silence le jardin entier, donnant des voix à ce qu’il touchait, lui faisant sonner aux oreilles la musique des choses et des êtres. Il le voyait venir, du fond de l’allée, des prairies trempées d’or, l’air rose, si gai, qu’il éclairait son chemin d’un sourire, au loin gros comme une tache de jour, devenu en quelques bonds la splendeur même du soleil. Et le matin vint battre le mûrier contre lequel Serge s’adossait. Serge naquit dans l’enfance du matin.

— Serge ! Serge, cria la voix d’Albine, perdue derrière les hauts buissons du parterre. N’aie pas peur, je suis là.

Mais Serge n’avait plus peur. Il naissait dans le soleil, dans ce bain pur de lumière qui l’inondait. Il naissait à vingt-cinq ans, les sens brusquement ouverts, ravi du grand ciel, de la terre heureuse, du prodige de l’horizon étalé autour de lui. Ce jardin, qu’il ignorait la veille, était une jouissance extraordinaire. Tout l’emplissait d’extase, jusqu’aux brins d’herbe, jusqu’aux pierres des allées, jusqu’aux haleines qu’il ne voyait pas et qui lui passaient sur les joues. Son corps entier entrait dans la possession de ce bout de nature, l’embrassait de ses membres ; ses lèvres le buvaient, ses narines le respiraient ; il l’emportait dans ses oreilles, il le cachait au fond de ses yeux. C’était à lui. Les roses du parterre, les branches hautes de la futaie, les rochers sonores de la chute des sources, les prés où le soleil plantait ses épis de lumière, étaient à lui. Puis, il ferma les yeux, il se donna la volupté de les rouvrir lentement, pour avoir l’éblouissement d’un second réveil.
Daria
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Niveau 6

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par Daria Jeu 30 Sep 2021 - 21:48
Merci, Ascagne!
C'est tout à fait ce type de texte que je cherchais. C'est bien pratique, Néo.
Clecle78
Clecle78
Bon génie

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par Clecle78 Jeu 30 Sep 2021 - 21:51
La belle matineuse : Ronsard,  Du Bellay mais c'est pas 19 ème


Dernière édition par Clecle78 le Jeu 30 Sep 2021 - 22:43, édité 1 fois
Ponocrates
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Expert spécialisé

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par Ponocrates Jeu 30 Sep 2021 - 22:33
Dans la troisième partie des Chouans de Balzac

Elle passa les bras autour d’un arbre, et attendit l’aurore en de vives anxiétés, car elle entendait un bruit d’armes, de chevaux et de voix humaines. Elle rendit grâces à la nuit qui la préservait du danger de tomber entre les mains des Chouans, si, comme le lui avait dit l’avare, ils entouraient Fougères.

Semblables à des feux nuitamment allumés pour un signal de liberté, quelques lueurs légèrement pourprées passèrent par-dessus les montagnes dont les bases conservèrent des teintes bleuâtres qui contrastèrent avec les nuages de rosée flottant sur les vallons. Bientôt un disque de rubis s’éleva lentement à l’horizon, les cieux le reconnurent ; les accidents du paysage, le clocher de Saint-Léonard, les rochers, les prés ensevelis dans l’ombre reparurent insensiblement, et les arbres situés sur les cimes se dessinèrent dans ses feux naissants. Le soleil se dégagea par un gracieux élan du milieu de ses rubans de feu, d’ocre et de saphir. Sa vive lumière s’harmonie par lignes égales, de colline en colline, déborda de vallons en vallons. Les ténèbres se dissipèrent, le jour accabla la nature. Une brise piquante frissonna dans l’air, les oiseaux chantèrent, la vie se réveilla partout. Mais à peine la jeune fille avait-elle eu le temps d’abaisser ses regards sur les masses de ce paysage si curieux, que, par un phénomène assez fréquent dans ces fraîches contrées, des vapeurs s’étendirent en nappes, comblèrent les vallées, montèrent jusqu’aux plus hautes collines, ensevelirent ce riche bassin sous un manteau de neige. Bientôt mademoiselle de Verneuil crut revoir une de ces mers de glace qui meublent les Alpes. Puis cette nuageuse atmosphère roula des vagues comme l’Océan, souleva des lames impénétrables qui se balancèrent avec mollesse, ondoyèrent, tourbillonnèrent violemment, contractèrent aux rayons du soleil des teintes d’un rose vif, en offrant çà et là les transparences d’un lac d’argent fluide. Tout à coup le vent du nord souffla sur cette fantasmagorie et dissipa les brouillards qui déposèrent une rosée pleine d’oxyde sur les gazons. Mademoiselle de Verneuil put alors apercevoir une immense masse brune placée sur les rochers de Fougères. Sept à huit cents Chouans arméss’agitaient dans le faubourg Saint-Sulpice comme des fourmis dans une fourmilière. Les environs du château occupés par trois mille hommes arrivés comme par magie furent attaqués avec fureur. Cette ville endormie, malgré ses remparts verdoyants et ses vieilles tours grises, aurait succombé, si Hulot n’eût pas veillé.

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