- SomniumNiveau 5
Ha, ça me rappelle un oral où un professeur m'avait regardé de travers parce que je n'avais pas su nommer un polyptote alors que j'avais commenté l'effet produit. Encore aujourd'hui je suis persuadé que la liste des figures de style à connaître pour commenter un texte (même à l'université) est finalement assez réduite, en tout cas beaucoup plus que ce qu'on veut nous faire croire.
Sur les dérives pédagogiques, formalistes et, entre autres, stylistiques, le meilleur fortifiant est le site de René Pommier.
Sur les dérives pédagogiques, formalistes et, entre autres, stylistiques, le meilleur fortifiant est le site de René Pommier.
- Spoiler:
- René Pommier a écrit:Mais l'horrible lourdeur, l'effroyable laideur du style, pardon du « comportement langagier », de Georges Molinié, ne tiennent pas seulement au vocabulaire; elles tiennent aussi à la syntaxe, pardon à « l'organisation phrastique ». Malheureusement il est encore beaucoup plus difficile d'en donner brièvement une idée suffisante. Je ne puis citer, presque au hasard, que quelques bribes de charabia, quelques lambeaux d'un « tissu textuel » véritablement hideux, comme celui-ci : « Et c'est sans doute par ce cheminement de la valeur de suranné ressenti à l'égard de cet univers de culture et d'écriture que […] » (III, 154); ou celui-ci : « dans tous les cas, déception dans l'attente d'usage par abrupt dans le processus d'actualisation » (V, 183); ou cet autre : « Position facile, et certainement pratiquement tenable pour les travaux du premier cycle » (V, 189); ou encore celui-ci : « Le dernier vers de la scène 1 est surabondant de marques d'allocution au personnage concrètement interlocuteur » (III, 112); ou cette définition : « est illocutoire une production de paroles à visée d'instauration d'une situation mondaine, et perlocutoire celle qui réalise effectivement, par sa manifestation verbale même, une transformation dans le réel extra-linguistique » (II, 82); ou encore celle-ci : « le stylème est appréhendé comme un caractérisème de littérarité, c'est-à-dire comme une détermination langagière fondamentalement non informative (même fictionnellement) dans le fonctionnement textuel » (II, 105). Georges Molinié ose commenter le vers de Phèdre : Je le vois, je lui parle, et mon cœur… Je m'égare, en disant que « le caractérisème du style passionné est tout entier dans la construction-déconstruction de son acte de parole par la locutrice mise en scène » (V, 133). Comment ne se rend-il pas compte que, pour parler d'un vers à la fois si beau et si simple, un style aussi pesant, aussi inélégant et d'une cuistrerie aussi gratuite, est d'une incongruité qui atteint au grotesque ? Si Verlaine avait lu Georges Molinié, au lieu de conseiller à l'apprenti-poète de ne point choisir ses mots « sans quelque méprise », il l'aurait invité à s'efforcer de mettre en œuvre « des modifications lexicales porteuses de la quantité différentielle à valeur stylistique » (II, 17). Mais, au lieu d'être sacré prince des poètes, sans doute aurait-il été sacré roi des cuistres !
Jugeant sans doute aujourd'hui que la syntaxe est réactionnaire, voire fasciste, Georges Molinié tend de plus en plus à mettre les noms et les adjectifs simplement bout à bout, comme dans cette phrase : « On peut donc se livrer à un deuxième ratissage de la page, en quête de marques langagières se constituant peu à peu, par accumulation-augmentation-imbrication, à l'intérieur et au cours du tissu textuel concret en question » (V, 191-192); ou celle-ci : « Si on accepte de ce passage une analyse proprement pragmatique, on y verra l'arrivée enthousiaste vers un contre-monde, un anti-monde, selon une condensation-expansion spasmodique totalement érotique ». Je me suis assagi avec l'âge, et c'est heureux, car, il y a une dizaine d'années, je n'aurais certainement pas résisté à la tentation de dire qu'on trouve dans les écrits de Georges Molinié « une accumulation-addition-concentration-profusion de cuistrerie recuite et de connerie récurrente véritablement unique ». Mais la courtoisie veut qu'on ne dise pas toujours tout ce qu'on pense, et j'espère sans trop y croire, car je connais la nature humaine, que Georges Molinié m'en saura gré.
Ce que je puis dire, en revanche, c'est que la langue de Molinié ne ressemble guère à celle de Molière, ou plutôt qu'elle ressemble à celle que Molière aurait fait parler à des personnages comme Vadius et Trissotin, ou que Rabelais aurait fait parler à son écolier limousin, s'ils avaient vécu à notre époque. Mais, ce qui est peut-être encore plus surprenant de la part de l'ancien directeur de l'U.F.R. de Langue française de l'Université de Paris-Sorbonne, le français qu'il écrit n'est pas seulement le plus laid que je connaisse : bien souvent ce n'est plus du français.
Ne parlons pas des maladresses d'expression : il n'y a pratiquement pas une seule phrase qui n'en renferme une ou plusieurs. Parlons seulement des impropriétés et des incorrections caractérisées : il y en a à toutes les pages et souvent plusieurs. Je ne puis donc en donner ici qu'un très rapide aperçu. Passons sur le fait, pourtant bien étrange, qu'un professeur à la Sorbonne reprenne à son compte la plupart des impropriétés qu'on entend quotidiennement à la télévision, en employant par exemple le verbe générer (« C'est ce point qui a généré d'assez graves malentendus », V, 202) ou le verbe initier (« La phrase même initiée par cet adverbe […] », V, 43) d'une manière tout à fait abusive, ou en disant qu' « il se produit, chaque fois un plus » (II, 84), ou en parlant de la stylistique comme d'une « discipline porteuse » (II, 3).
Mais Georges Molinié commet encore beaucoup plus d'impropriétés et d'incorrections que les journalistes de la télévision. Ici encore on devra se contenter de quelques échantillons, tels que celui ci : « l'arrivée du vers 5 »; ou celui-ci (V, 139) : « la considération des études conversationnelles entraîne à chercher à savoir s'il existe des régularités dans la gestion des conversations » (V, 10), où l'on voit, mais ce n'est pas le seul cas, que Georges Molinié emploie « entraîner à » dans le sens de « inciter à »; ou cet autre : « le procédé qui consiste à remettre sur autrui la cause de telle ou telle situation » (III, 143), où il emploie « remettre sur » au sens de « imputer à »; ou encore celui-ci : « le monologue entier de Phèdre peut être considéré comme une déprécation, dans la mesure où il est contigu aux propos que Phèdre adressait dans la scène précédente à Œnone » (III, 112). Georges Molinié semble ignorer que, si des maisons, des terres, des jardins, des propriétés peuvent être contigus à d'autres, un monologue ne saurait être contigu à des propos. Citons enfin cette phrase, sur la quatrième de couverture de La Stylistique (Collection Premier Cycle), qui présente ce manuel comme « un guide pratique et méthodique pour entrer et progresser dans la discipline, par des parcours construisibles à volonté et en fonction des diverses manières de questions ». Georges Molinié ne sait pas, apparemment, qu'il y a des « sortes de questions » et des « manières de questionner », mais qu'il n'y a pas plus de « manières de questions » qu'il n'y a de « sortes de questionner ». Et là encore il s'agit d'une impropriété qui n'est nullement isolée.
On aura compris que Georges Molinié ignore ou veut ignorer les règles et les usages les mieux établis. Est-il besoin de dire qu'il ne craint d'employer à la forme pronominale des verbes qui ne l'admettent pas, écrivant ainsi que « le foisonnement actuel dans les sciences humaines […] va en s'abondant depuis quelques années » (IV, 1) ? Est-il besoin de dire qu'il ne craint pas de construire avec une proposition complétive des verbes transitifs qui ne sauraient avoir pour complément qu'un nom, en disant, par exemple : « on est conduit à interpréter que Nicomède s'arrête » (III, 61), ou bien : « seul, l'ensemble du propos fait interpréter correctement qu'il y a figure » (III, 276) ? Est-il besoin de dire qu'il ne craint pas de construire avec une proposition complétive des substantifs qui ne sauraient gouverner qu'un complément de nom, en écrivant, par exemple, cette monstruosité : « il convient d'associer à la considération, méthodologique, que la façon dont une discipline construit ses objets décide de l'interprétation qu'elle en tirera, la considération, épistémologique, qu'il y a distance, différence, entre l'objet et le concept, entre les formes empiriques et les constructions épistémiques » (IV, 2) ? Est-il besoin de dire que, de plus en plus fréquemment, il ne fait plus ou ne veut plus faire la distinction entre les verbes transitifs et les verbes intransitifs parlant notamment d' « une œuvre non jouie à réception ». Cet exemple montre d'ailleurs qu'à l'occasion il supprime aussi allégrement des articles indispensables, comme les journalistes de la météo qui ne sauraient dire que « côté températures ». Et, bien entendu, il fait souvent fi de l'ordre normal des mots, mettant parfois l'adjectif avant le substantif sans la moindre raison, comme dans cet exemple : « Soit le suivant extrait, si célèbre, de Rigodon» (V, 97), ou, beaucoup plus souvent, car c'est devenu chez lui un véritable tic, le verbe en tête de la phrase, comme dans cette phrase par ailleurs assez surréaliste : « S'opère ici la mise en acte d'une affinité aussi satinée que la voûte du ciel étoilé ». Il pense sans doute que c'est là un procédé particulièrement efficace « pour la montée du discours en régime de littérarité » (V, 202), pour employer un genre de métaphores dont il raffole et qui semble indiquer que sa vraie vocation était de vendre des automobiles. Ne pouvant malheureusement multiplier les exemples, je citerai seulement pour terminer la phrase suivante, qui me paraît bien propre à montrer jusqu'où peut descendre dans le charabia l'ancien directeur de l'U.F.R. de Langue française à l'Université de Paris-Sorbonne : « car, justement, c'est plus il avance que le texte devient plus nettement lyrique » (V, 177). On reste sans voix. Si Georges Molinié fait école, au lieu de dire : « plus je mange, plus je grossis », on dira dorénavant : « c'est plus je mange que plus je grossis », à moins que l'on ne préfère dire : « plus c'est que je mange, plus c'est que je grossis ».
Je le sais bien, tous les stylisticiens actuels n'écrivent pas un galimatias aussi calamiteux que Georges Molinié et je pense même, non seulement qu'il n'a point de rival, mais qu'en comparaison du sien, le style des plus détestables cacographes pourrait passer pour un modèle de clarté et d'élégance. Il n'empêche qu'on retrouve chez tous, à des degrés très divers, les défauts qu'on relève chez lui. Or la première chose que l'on devrait demander à des stylisticiens, c'est, me semble-t-il, sinon d'avoir vraiment du style, du moins de s'exprimer avec une certaine élégance. On est très loin du compte. Et c'est bien fâcheux, car comment des gens qui ne savent pas reconnaître les maladresses, les déficiences, voire la laideur de leur propre style, peuvent-ils prétendre juger et rendre compte de la force, de l'efficacité et de la beauté de celui des autres ? L'idée que le plus important dans une œuvre, c'est ce que l'auteur nous dit sans le savoir, fait certainement partie des stupidités les plus rebattues, des sottises les plus ressassées, des sornettes les plus "récurrentes" que la nouvelle critique a répandues. Il n'en est pas moins vrai que certains auteurs nous disent sans le savoir des choses qui sont, en effet, très importantes, du moins quant à l'usage que l'on peut faire de leurs œuvres : elles nous apprennent tout de suite qu'on peut se dispenser de les lire. Ainsi, ce que Georges Molinié nous dit continuellement, sans le savoir, dans tous ses ouvrages, à toutes les pages et dans chacune de ses phrases, c'est qu'il n'est vraiment pas fait pour s'occuper de littérature, qu'il ne sait pas, qu'il n'a jamais su et qu'il ne saura jamais, ce que peut être le style. Et je crains fort qu'il n'en soit de même, même si c'est moins flagrant, de beaucoup des stylisticiens actuels.
- IphigénieProphète
Merci pour ce sacre spoiler!
Les guerres intestines sont féroces….
Les guerres intestines sont féroces….
- NLM76Grand Maître
Je lis l'article; et il est dans son ensemble beaucoup plus intéressant que l'extrait malicieusement choisi par tes soins, @Somnium : les attaques contre Molinié quant à l'incorrection de sa langue peuvent y paraître un peu mesquines.
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Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- SomniumNiveau 5
Sans doute! Mais que serait la polémique sans une dose de mauvaise foi?
- NLM76Grand Maître
Soit. Mais sa manière d'éreinter Ubersfeld m'apparaît quand même beaucoup plus drôle. J'en ai encore mal aux abdos.
- Spoiler:
- René Pommier a écrit:Dans l'art de dire longuement et lourdement des évidences, d'expliquer pesamment et pédantesquement les choses les plus simples, la palme revient peut-être à Mme Anne Ubersfeld qui, dans son livre Lire le théâtre[15], ne cesse d'enfoncer sur le ton le plus doctoral des enfilades de portes grandes ouvertes. Non contente de dire très doctement des choses que tout le monde pourrait dire, elle va même jusqu'à dire des choses qui vont tellement de soi que jamais personne avant elle n'avait songé à les dire. Elle nous apprend ainsi qu'au théâtre les acteurs doivent impérativement dire le texte que l'auteur a écrit à leur intention : le personnage, nous explique-t-elle sur le ton sentencieux qui lui est habituel, « est le sujet d'un discours que l'on marque de son nom et que le comédien qui revêtira ce nom devra prononcer [16]». Et, craignant sans doute que l'on méconnaisse l'importance de cette remarque, elle nous redit un peu plus loin que le personnage « parle parce que l'auteur le fait parler, lui enjoint de parler, de dire tels mots [17]». On le voit, Anne Ubersfeld a manifestement peur de n'être pas vraiment comprise. Aussi croit-elle nécessaire de se montrer très explicite : quand elle dit que l'auteur « fait parler » le personnage, elle veut dire non pas qu'il lui donne l'autorisation ou la possibilité de parler, mais qu'il le lui « enjoint » expressément; et, qui plus est, il ne lui ordonne pas seulement de parler, mais décide entièrement de ce qu'il doit dire; loin de pouvoir dire tout ce qui lui passe par la tête, le personnage ne peut dire que « tels mots » que l'auteur a choisi de lui faire dire [18].
Et craignant encore, malgré ces explications redondantes, que certains lecteurs puissent avoir de la peine à la suivre, Mme Ubersfeld n'hésite pas à prendre des exemples, et elle le fait avec un sens pédagogique qu'on ne saurait trop admirer. La célèbre injonction d'Auguste à Cinna : « Prends un siège, Cinna » n'avait guère jusqu'ici sollicité la sagacité des commentateurs. Elle fournit à Mme Ubersfeld l'occasion d'illustrer les merveilleuses découvertes qu'elle a faites, et il lui faut une page entière [19] pour nous dévoiler à grand renfort de jargon toute la richesse de cet hémistiche. Elle nous explique que, lorsque Corneille fait dire à Auguste : « Prends un siège, Cinna », il veut que l'acteur qui joue Auguste dise effectivement : « Prends un siège, Cinna » (malheureusement Mme Ubersfeld oublie de préciser que Corneille ne veut en aucun cas que l'acteur qui joue Auguste parle à la cantonade ou s'adresse à quelqu'un d'autre qu'à l'acteur qui joue Cinna, et qu'il tient absolument à ce qu'il ne prononce ces mots qu'après s'être assuré que l'acteur qui joue Cinna était effectivement présent sur la scène et en mesure de l'entendre). Mme Ubersfeld nous explique aussi que, si Corneille fait dire à l'acteur qui joue Auguste : « Prends un siège, Cinna », c'est à l'intention du public qui doit pouvoir entendre les mots qu'il prononce et comprendre qu'Auguste dit à Cinna de prendre un siège. Mais ce n'est pas tout et Mme Ubersfeld nous explique encore que Corneille veut aussi, même s'il n'y a pas d'indication scénique qui le dise explicitement, que quelqu'un, le metteur en scène, le régisseur ou un accessoiriste, s'occupe de faire apporter sur la scène un siège pour que Cinna puisse s'asseoir. Une telle perspicacité laisse pantois; comme on se sent plus intelligent quand on a lu Mme Ubersfeld !
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- IphigénieProphète
Et avant de parler commence par te taire?
selon la lapalissade la plus éminemment pédagogique (versus pédagogiste) qui soit ...)
selon la lapalissade la plus éminemment pédagogique (versus pédagogiste) qui soit ...)
- e-WandererGrand sage
Une petite réaction à chaud…
- Spoiler:
- Il m'est difficile de répondre, vu que la stylistique est ma discipline de spécialité et que Georges Molinié, en plus d'avoir dirigé ma thèse, était devenu un ami proche. Je connaissais ses défauts, mais ils n'éclipsaient pas à mes yeux ses immenses qualités. Il ne faut pas prendre au pied de la lettre sa propension au jargon, dont il jouait avec un certain goût de la provocation. J'étais loin d'apprécier tous ses écrits, ni son style volontiers désinvolte, ni sa capacité à diriger absolument n'importe quoi (y compris des mémoires sur la scénographie de Johnny Halliday ou l'art des marionnettes !) mais j'ai rarement rencontré un esprit aussi rapide (c'était réellement très impressionnant) et une personne aussi tolérante. Il m'a toujours laissé libre d'écrire absolument ce que je voulais, y compris parfois l'inverse exact de ce que lui-même pensait. Il était peu dirigiste mais m'a toujours accordé le temps dont j'avais besoin, même quand il était président de Paris IV avec un emploi du temps démentiel. Je ne l'ai jamais vu non plus faire un coup tordu, ce qui est assez rare chez les grands mandarins parisiens.
Concernant sa lecture des textes, plutôt qu'au pamphlet de Pommier (lequel n'a pas laissé grand'chose à part des règlements de comptes venimeux et quelques paraphrases insipides), je renverrai volontiers à sa belle thèse sur le roman baroque qui reste 40 ans après un livre de référence, à Sémiostylistique, l'effet de l'art qui est à mon avis un très grand livre, d'une richesse de propositions inouïe, ou aux excellentes pages qu'il a écrites ici ou là sur la fin de Zénon dans L'Œuvre au Noir, sur le Télémaque de Fénelon (qu'il détestait pourtant), sur les Contes drôlatiques de Balzac etc. Il faut se souvenir aussi du grand vent d'air frais qu'il a fait souffler à l'UFR de langue française de Paris IV (quand régnaient les Rougeot, les Tritter et des olibrius de cet acabit), à la direction de la revue XVIIe siècle, ou des risques personnels qu'il a pris en défendant l'université contre la réforme Pécresse. On ne m'ôtera pas de l'idée que le cancer qu'il a développé un an après n'était pas une conséquence directe de la campagne de presse immonde diligentée par Le Monde ou Le Figaro (ouvrant complaisamment leurs colonnes à l'acrimonie du vieux Pommier et des réactionnaires comme Jean-Robert Pitte, son rival malheureux pour la présidence de la Sorbonne). Difficile de dire aujourd'hui qu'il avait tort, quand on voit la ruine de l'université française, avec des postes gelés à tour de bras et des dizaines de jeunes docteurs d'un niveau exceptionnel qui restent sur le carreau…
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« Profitons du temps qui nous reste avant la définitive invasion de la grande muflerie du Nouveau Monde » (Huysmans)
- IphigénieProphète
C’est une discussion bien intéressante et sans doute même essentielle. (n’hésitons pas sur le choix des adjectifs puisque je suis responsable de ce long hs!)
Les querelles entre universitaires sont on le comprend bien, féroces mais normales: que les chercheurs cherchent, s’opposent, questionnent, renouvellent, s’aventurent ( parfois s’égarent peut-être même) est rassurant. Et personne ne doute qu’il y ait parmi eux de grands esprits qui ouvrent des voies subtiles.
Le problème c’est quand (avec un formalisme artificiel et/ou absurde, qui n’est que l’écume de ces recherches et peut-être bien le résultat ou l’enjeu de luttes d’influences), on en vient à reprocher à un collégien ou un lycéen de ne pas savoir trancher, d’avoir eu le « mauvais » enseignement ( trop en avance ou trop en retard sur les versions ou variantes d’un programme dont les vérités changent tous les trois ans), de ne pas utiliser la bonne façon de trouver un cod- s’il le trouve- ou de ne pas avoir de « bases » quand les bases sont si mouvantes que les professeurs eux-mêmes en vacillent bien souvent ( quel est le nom de cette figure de style? Est ce une forme ou un type de phrase? Est-ce une négation totale ou partielle? Est-ce un Coi ou un complément de lieu? Peut-on le déplacer ou pas? (Car l’idée de supprimer de la catégorie des compléments de lieu tous les compléments des verbes qui, justement, expriment une localisation ou un déplacement est certainement un des traits de génie de la grammaire contemporaine française) Comment, ton professeur ( le candidat ) n’a pas su repérer ce bel épitrochasme?
Les querelles entre universitaires sont on le comprend bien, féroces mais normales: que les chercheurs cherchent, s’opposent, questionnent, renouvellent, s’aventurent ( parfois s’égarent peut-être même) est rassurant. Et personne ne doute qu’il y ait parmi eux de grands esprits qui ouvrent des voies subtiles.
Le problème c’est quand (avec un formalisme artificiel et/ou absurde, qui n’est que l’écume de ces recherches et peut-être bien le résultat ou l’enjeu de luttes d’influences), on en vient à reprocher à un collégien ou un lycéen de ne pas savoir trancher, d’avoir eu le « mauvais » enseignement ( trop en avance ou trop en retard sur les versions ou variantes d’un programme dont les vérités changent tous les trois ans), de ne pas utiliser la bonne façon de trouver un cod- s’il le trouve- ou de ne pas avoir de « bases » quand les bases sont si mouvantes que les professeurs eux-mêmes en vacillent bien souvent ( quel est le nom de cette figure de style? Est ce une forme ou un type de phrase? Est-ce une négation totale ou partielle? Est-ce un Coi ou un complément de lieu? Peut-on le déplacer ou pas? (Car l’idée de supprimer de la catégorie des compléments de lieu tous les compléments des verbes qui, justement, expriment une localisation ou un déplacement est certainement un des traits de génie de la grammaire contemporaine française) Comment, ton professeur ( le candidat ) n’a pas su repérer ce bel épitrochasme?
- Spoiler:
- - fallait que je le replace, pour pouvoir le retenir à l’avenir
- e-WandererGrand sage
La question doit surtout être posée aux spécialistes de sciences de l'éduk qui élaborent les programmes… Personnellement, je ne verrais aucune objection à ce qu'on revienne aux vieilles méthodes auxquelles j'ai été moi-même formé. Bizarrement, à l'époque, tous les élèves admis en CE1 savaient lire, et on savait reconnaître un sujet inversé en entrant au collège (pas comme 50% d'une promo de L1 aujourd'hui – soupir !). Et qu'on ne vienne pas me dire que j'étais dans une école élitiste, mes parents habitaient un patelin de 3000 habitants !
À chaque âge ses difficultés. Aucun problème à ce qu'on enseigne aux gamins que la phrase "Paul est à Marseille" comprend un complément circonstanciel de lieu (le sémantisme marche plutôt bien pour une première approche de la grammaire, c'est moins abstrait pour des enfants, même si c'est souvent approximatif). Il sera toujours temps à l'université de parler d'attribut locatif…
À chaque âge ses difficultés. Aucun problème à ce qu'on enseigne aux gamins que la phrase "Paul est à Marseille" comprend un complément circonstanciel de lieu (le sémantisme marche plutôt bien pour une première approche de la grammaire, c'est moins abstrait pour des enfants, même si c'est souvent approximatif). Il sera toujours temps à l'université de parler d'attribut locatif…
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« Profitons du temps qui nous reste avant la définitive invasion de la grande muflerie du Nouveau Monde » (Huysmans)
- IphigénieProphète
Oui tout à fait . Mais c’est aussi l’ensemble de l’institution qui est prescripteur de ce fléau, comme pour la grammaire élaborée pour les lycéens sous la houlette de l’inspection, qui ne jure que par la Riegel . Ensuite au niveau des études de textes les étudiants reproduisent plus ou moins bien ce pour quoi ils ont été formatés ( plus ou moins bien aussi) par la configuration des concours. Mais tu as raison le problème n’est pas au niveau de l’université mais de l’absence de réflexion raisonnable ( ou plutôt l’étouffement de) sur l’enseignement des lettres dans le primaire et le secondaire, qui sert finalement de terrain de sport pour luttes de pouvoir.e-Wanderer a écrit:La question doit surtout être posée aux chercheurs de sciences de l'éduk qui élaborent les programmes… Personnellement, je ne verrais aucune objection à ce qu'on revienne aux vieilles méthodes auxquelles j'ai été moi-même formé. Bizarrement, à l'époque, tous les élèves admis en CE1 savaient lire, et on savait reconnaître un sujet inversé en entrant au collège (pas comme 50% d'une promo de L1 aujourd'hui – soupir !). Et qu'on ne vienne pas me dire que j'étais dans une école élitiste, mes parents habitaient un patelin de 3000 habitants !
Vaste problème .
C'est un exemple intéressant en effet: je me souviens de la première fois que j'ai entendu cette possibilité d'analyse: en 1974, j'étais en prépa mais on devait suivre un cours de grammaire en fac. Sauf que cette analyse nous était alors présentée comme une interrogation stimulante et non une vérité révélée, car elle posait autant de problèmes qu'elle n'apportait d'éclaircissement. Et on continuait tranquillement en latin de parler de lieu où je suis, où je vais, etc, comme, si je ne m'abuse, on continue de le faire dans la grammaire italienne contemporaine d'ailleurs (du moins en usage dans le secondaire) - et en tout cas sans perdre les élèves en leur demandant de traduire "je vais au forum" selon qu'on leur a parlé de complément essentiel, de cc, d'attribut ou de coi (en général des 4 en quatre années de collège, avec un peu de bol). C'est vrai que le plus simple, comme le préconisait sous les huées le malheureux et très conscient Paul Veyne, était de supprimer le latin, ou comme le concluent dans une sagesse condamnable les élèves, de laisser tomber la grammaire (le français).e-Wanderer a écrit:À chaque âge ses difficultés. Aucun problème à ce qu'on enseigne aux gamins que la phrase "Paul est à Marseille" comprend un complément circonstanciel de lieu (le sémantisme marche plutôt bien pour une première approche de la grammaire, c'est moins abstrait pour des enfants, même si c'est souvent approximatif). Il sera toujours temps à l'université de parler d'attribut locatif…
- User9525Niveau 8
Iphigénie a écrit:Oui tout à fait . Mais c’est aussi l’ensemble de l’institution qui est prescripteur de ce fléau, comme pour la grammaire élaborée pour les lycéens sous la houlette de l’inspection, qui ne jure que par la Riegel . Ensuite au niveau des études de textes les étudiants reproduisent plus ou moins bien ce pour quoi ils ont été formatés ( plus ou moins bien aussi) par la configuration des concours. Mais tu as raison le problème n’est pas au niveau de l’université mais de l’absence de réflexion raisonnable ( ou plutôt l’étouffement de) sur l’enseignement des lettres dans le primaire et le secondaire, qui sert finalement de terrain de sport pour luttes de pouvoir.e-Wanderer a écrit:La question doit surtout être posée aux chercheurs de sciences de l'éduk qui élaborent les programmes… Personnellement, je ne verrais aucune objection à ce qu'on revienne aux vieilles méthodes auxquelles j'ai été moi-même formé. Bizarrement, à l'époque, tous les élèves admis en CE1 savaient lire, et on savait reconnaître un sujet inversé en entrant au collège (pas comme 50% d'une promo de L1 aujourd'hui – soupir !). Et qu'on ne vienne pas me dire que j'étais dans une école élitiste, mes parents habitaient un patelin de 3000 habitants !
Vaste problème .C'est un exemple intéressant en effet: je me souviens de la première fois que j'ai entendu cette possibilité d'analyse: en 1974, j'étais en prépa mais on devait suivre un cours de grammaire en fac. Sauf que cette analyse nous était alors présentée comme une interrogation stimulante et non une vérité révélée, car elle posait autant de problèmes qu'elle n'apportait d'éclaircissement. Et on continuait tranquillement en latin de parler de lieu où je suis, où je vais, etc, comme, si je ne m'abuse, on continue de le faire dans la grammaire italienne contemporaine d'ailleurs (du moins en usage dans le secondaire) - et en tout cas sans perdre les élèves en leur demandant de traduire "je vais au forum" selon qu'on leur a parlé de complément essentiel, de cc, d'attribut ou de coi (en général des 4 en quatre années de collège, avec un peu de bol). C'est vrai que le plus simple, comme le préconisait sous les huées le malheureux et très conscient Paul Veyne, était de supprimer le latin, ou comme le concluent dans une sagesse condamnable les élèves, de laisser tomber la grammaire (le français).e-Wanderer a écrit:À chaque âge ses difficultés. Aucun problème à ce qu'on enseigne aux gamins que la phrase "Paul est à Marseille" comprend un complément circonstanciel de lieu (le sémantisme marche plutôt bien pour une première approche de la grammaire, c'est moins abstrait pour des enfants, même si c'est souvent approximatif). Il sera toujours temps à l'université de parler d'attribut locatif…
Vous avez dit l'essentiel !
- NLM76Grand Maître
Nous sommes d'accord sur tout, comme souvent... sauf sur ce détail. Et il me paraît d'importance. D'une part, l'affirmation selon laquelle le sémantisme est souvent approximatif me paraît tout à fait sujette à caution. L'analyse sémantique en effet est quelque chose d'extrêmement rigoureux, et la grammaire qui prétend s'affranchir du sémantisme est tout sauf scientifique, puisqu'elle oublie que son objet est par nature et irrémédiablement sémantique. Je pense d'autre part que la notion d'attribut, fût-il qualifié de locatif, est scientifiquement un peu moins valable en l'espèce que celle de complément de lieu. Il faudrait ne pas dire à l'université "attribut locatif", c'est plus exact que "complément de lieu" pour un tel syntagme; il faudrait dire : cela peut être intéressant de regarder aussi sous cet angle cette affaire, parce que le sémantisme du verbe "être" est multiforme, et il peut impliquer une localisation, une manière d'être, etc. Il ne relie pas seulement deux termes qui entretiennent une relation d'identité, comme dans la relation attributive, qui tend à établir un accord morphologique entre ces deux termes. Mais dire qu'il s'agit d'un complément de lieu du verbe "être" est à peu près irréprochable. Il complète le verbe "être", et indique bien où l'être a lieu. Ce qui se repère très bien structuralement avec la pronominalisation.e-Wanderer a écrit:À chaque âge ses difficultés. Aucun problème à ce qu'on enseigne aux gamins que la phrase "Paul est à Marseille" comprend un complément circonstanciel de lieu (le sémantisme marche plutôt bien pour une première approche de la grammaire, c'est moins abstrait pour des enfants, même si c'est souvent approximatif). Il sera toujours temps à l'université de parler d'attribut locatif…
Excuse-moi de te chipoter là-dessus; mais il me semble essentiel de ne pas présenter l'analyse scolaire comme une piètre approximation, pifométrique, faute de plus "scientifique", qu'on livrerait plus tard.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- User9525Niveau 8
NLM76 a écrit:Nous sommes d'accord sur tout, comme souvent... sauf sur ce détail. Et il me paraît d'importance. D'une part, l'affirmation selon laquelle le sémantisme est souvent approximatif me paraît tout à fait sujette à caution. L'analyse sémantique en effet est quelque chose d'extrêmement rigoureux, et la grammaire qui prétend s'affranchir du sémantisme est tout sauf scientifique, puisqu'elle oublie que son objet est par nature et irrémédiablement sémantique. Je pense d'autre part que la notion d'attribut, fût-il qualifié de locatif, est scientifiquement un peu moins valable en l'espèce que celle de complément de lieu. Il faudrait ne pas dire à l'université "attribut locatif", c'est plus exact que "complément de lieu" pour un tel syntagme; il faudrait dire : cela peut être intéressant de regarder aussi sous cet angle cette affaire, parce que le sémantisme du verbe "être" est multiforme, et il peut impliquer une localisation, une manière d'être, etc. Il ne relie pas seulement deux termes qui entretiennent une relation d'identité, comme dans la relation attributive, qui tend à établir un accord morphologique entre ces deux termes. Mais dire qu'il s'agit d'un complément de lieu du verbe "être" est à peu près irréprochable. Il complète le verbe "être", et indique bien où l'être a lieu. Ce qui se repère très bien structuralement avec la pronominalisation.e-Wanderer a écrit:À chaque âge ses difficultés. Aucun problème à ce qu'on enseigne aux gamins que la phrase "Paul est à Marseille" comprend un complément circonstanciel de lieu (le sémantisme marche plutôt bien pour une première approche de la grammaire, c'est moins abstrait pour des enfants, même si c'est souvent approximatif). Il sera toujours temps à l'université de parler d'attribut locatif…
Excuse-moi de te chipoter là-dessus; mais il me semble essentiel de ne pas présenter l'analyse scolaire comme une piètre approximation, pifométrique, faute de plus "scientifique", qu'on livrerait plus tard.
- e-WandererGrand sage
Ce que je voulais dire, c'est qu'une grille sémantique scolaire, forcément simplifiée pour être mémorisable, aura du mal à rendre compte de valeurs sémantiques se situant en marge du balisage le plus fréquent : comment qualifier par exemple des subordonnées introduites par "outre que", "sans que" etc. Idem pour le maquis invraisemblable des concessives, qui recouvrent des valeurs fines extrêmement diverses (oppositives, contrastives, etc.). Ce n'est pas impossible, mais c'est quand même compliqué à assimiler pour un élève du secondaire.
La proposition de Le Goffic de parler de locatif (sur le modèle syntaxique de Sum Romæ récupéré de façon très extensive) pour évoquer tous les compléments prépositionnels essentiels du verbe être, a le mérite inverse : ça permet de rendre compte de configurations très diverses bien embêtantes à caractériser ("le vase est en or","la cantatrice est en voix ce soir", "je suis pour le Stade toulousain" etc…) autour d'un modèle syntaxique simple à décrire, mais effectivement ça écrase le sémantisme et c'est assez abstrait pour un jeune esprit.
Bref, il n'y a sans doute pas de modèle parfait, simplement parce que la langue est un système infiniment complexe : tout choix pédagogique aura ses avantages et ses inconvénients.
La proposition de Le Goffic de parler de locatif (sur le modèle syntaxique de Sum Romæ récupéré de façon très extensive) pour évoquer tous les compléments prépositionnels essentiels du verbe être, a le mérite inverse : ça permet de rendre compte de configurations très diverses bien embêtantes à caractériser ("le vase est en or","la cantatrice est en voix ce soir", "je suis pour le Stade toulousain" etc…) autour d'un modèle syntaxique simple à décrire, mais effectivement ça écrase le sémantisme et c'est assez abstrait pour un jeune esprit.
Bref, il n'y a sans doute pas de modèle parfait, simplement parce que la langue est un système infiniment complexe : tout choix pédagogique aura ses avantages et ses inconvénients.
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- User9525Niveau 8
e-Wanderer a écrit:Ce que je voulais dire, c'est qu'une grille sémantique scolaire, forcément simplifiée pour être mémorisable, aura du mal à rendre compte de valeurs sémantiques se situant en marge du balisage le plus fréquent : comment qualifier par exemple des subordonnées introduites par "outre que", "sans que" etc. Idem pour le maquis invraisemblable des concessives, qui recouvrent des valeurs fines extrêmement diverses (oppositives, contrastives, etc.). Ce n'est pas impossible, mais c'est quand même compliqué à assimiler pour un élève du secondaire.
La proposition de Le Goffic de parler de locatif (sur le modèle syntaxique de Sum Romæ récupéré de façon très extensive) pour évoquer tous les compléments prépositionnels essentiels du verbe être, a le mérite inverse : ça permet de rendre compte de configurations très diverses bien embêtantes à caractériser ("le vase est en or","la cantatrice est en voix ce soir", "je suis pour le Stade toulousain" etc…) autour d'un modèle syntaxique simple à décrire, mais effectivement ça écrase le sémantisme et c'est assez abstrait pour un jeune esprit.
Bref, il n'y a sans doute pas de modèle parfait, simplement parce que la langue est un système infiniment complexe : tout choix pédagogique aura ses avantages et ses inconvénients.
Si des élèves (y compris en 1ère) parviennent à isoler une subordonnée du reste de la phrase et identifient une complétive sans la confondre avec une relative, c'est déjà le Graal.
Je vois un avantage au "sémantisme", c'est que la réflexion grammaticale peut alors aider à une compréhension approfondie du texte littéraire, et qu'il me semble même que ça pourrait aider à mieux écrire. Mais ce n'est qu'une hypothèse.
- NLM76Grand Maître
Voilà. C'est exactement cela. Et il en est de même pour les choix "scientifiques". Parce qu'en fait, la pédagogie et la science, c'est la même chose. La transposition didactique, d'une certaine façon, ça n'existe pas. Il y a seulement une réflexion sur l'ordre d'exposition des connaissances, qui sont les connaissances en elles-mêmes, et non les connaissances transposées.e-Wanderer a écrit:Bref, il n'y a sans doute pas de modèle parfait, simplement parce que la langue est un système infiniment complexe : tout choix pédagogique aura ses avantages et ses inconvénients.
Alors maintenant, le problème que tu soulèves quant au sémantisme est réel mais à mon avis très simple à résoudre... dans la mesure où il n'est pas en réalité tellement propre au sémantisme. Oui, dans la langue, il y a des cas-limites, qu'on soit dans le domaine de la syntaxe ou dans celui de la sémantique. Et en pédagogie, il est raisonnable de mettre dans un premier temps de côté ces cas-limites. Et de les travailler le moment venu. Il arrive cependant fréquemment que ces cas limites soient très importants, et il faut les étudier en tant que tels, au moment opportun.
En plus, je trouve que la nomenclature des conjonctives "circonstancielles" en français se cartographie fort bien, et permet d'aboutir à une véritable analyse logique. A cet égard, la place des conjonctives en "outre que" dans cette cartographie est fort intéressante. Et il est très simple, au cas où l'on doive vraiment en analyser dans le secondaire, d'accepter diverses analyses qu'il y ait une difficulté dans l'analyse sémantique. Mais dès lors que l'élève aura dit quel verbe (ou quelle proposition, mais surtout pas quelle phrase) elle complète, qu'elle est conjonctive parce qu'elle est introduite une conjonction, et qu'elle est "circonstancielle" parce qu'elle n'est pas introduite par "que", tout ira bien : la partie sémantique de l'analyse est secondaire. Le problème, avec la doxa en vigueur à l'université, est qu'on croit qu'il est essentiel de savoir si le complément est essentiel ou non. Et en plus, elle croit que cette affaire n'est pas sémantique... Ce qui est une grave erreur scientifique.
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- NLM76Grand Maître
Évidemment, la réponse, a priori, est non. Une relative isolée ne constitue pas une phrase correcte, mais encore n'a pas de sens. Et nous autres professeurs de français, nous échinons à enseigner cela à nos élèves. Et pourtant... "Mais si, ça veut dire quelque chose, monsieur !"
Et pourtant dans "Il était une bergère", j'ai le couplet suivant : "Le chat qui la regarde/ (et ron et ron petit patapon) / Le chat qui la regarde / D'un petit air fripon / Ron ron, d'un petit air fripon."
Je fais l'hypothèse suivante : cette phrase a un sens, parce qu'en fait elle est en quelque sorte accompagnée d'un geste, une deixis am phantasma, une désignation gestuelle d'une image créée par le langage : le chanteur a montré à droite la bergère; il montre à gauche (par exemple) le chat.
En somme, si l'on veut rendre la phrase entièrement verbale, il faut ajouter "Voici, voyez..." avant la relative.
De sorte que peut-être on pourrait expliquer pourquoi dans un texte "textuel", on ne peut utiliser une relative isolée comme phrase : il faut suppléer le geste.
Et pourtant dans "Il était une bergère", j'ai le couplet suivant : "Le chat qui la regarde/ (et ron et ron petit patapon) / Le chat qui la regarde / D'un petit air fripon / Ron ron, d'un petit air fripon."
Je fais l'hypothèse suivante : cette phrase a un sens, parce qu'en fait elle est en quelque sorte accompagnée d'un geste, une deixis am phantasma, une désignation gestuelle d'une image créée par le langage : le chanteur a montré à droite la bergère; il montre à gauche (par exemple) le chat.
En somme, si l'on veut rendre la phrase entièrement verbale, il faut ajouter "Voici, voyez..." avant la relative.
De sorte que peut-être on pourrait expliquer pourquoi dans un texte "textuel", on ne peut utiliser une relative isolée comme phrase : il faut suppléer le geste.
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- TangledingGrand Maître
Édition : ah non en effet.
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- Lady_SaganNiveau 4
Cette relative ne dépendrait-elle pas de la phrase commençant le couplet 5? La principale est éloignée, non? Autrement, je trouve qu'il manque quelque chose.
Je ne vois pas quelle proposition relative pourrait avoir du sens sans une proposition principale dont elle dépendrait, à la rigueur avec un antécédent implicite. En tout cas je ne vois pas d'exemple.
3.
Le chat qui la regarde,
Et ron, ron, ron, petit patapon
Le chat qui la regarde,
D'un petit air fripon,
Ron, ron,
D'un petit air fripon.
4.
« Si tu y mets la patte,
Et ron, ron, ron, petit patapon;
Si tu y mets la patte,
Tu auras du bâton,
Ron, ron,
Tu auras du bâton. »
5.
Il n'y mit pas la patte,
Et ron, ron, ron, petit patapon;
Il n'y mit pas la patte,
Il y mit le menton,
Ron, ron,
Il y mit le menton.
Je ne vois pas quelle proposition relative pourrait avoir du sens sans une proposition principale dont elle dépendrait, à la rigueur avec un antécédent implicite. En tout cas je ne vois pas d'exemple.
- menerveOracle
La relative est "qui la regarde"... Et n'est donc pas une phrase.
La phrase est "le chat qui la regarde" qu'on pourrait considérer comme une phrase nominale dont il manquerait "voici".
La phrase est "le chat qui la regarde" qu'on pourrait considérer comme une phrase nominale dont il manquerait "voici".
- NLM76Grand Maître
Bah si.Lady_Sagan a écrit:Je ne vois pas quelle proposition relative pourrait avoir du sens sans une proposition principale dont elle dépendrait, à la rigueur avec un antécédent implicite. En tout cas je ne vois pas d'exemple.
La chanson en donne un.
Avez-vous entendu mon explication ?
Un geste, qui signifie, "voyez par là, imaginez".
Dites-moi pourquoi elle ne tient pas ; mais ne faites pas comme si je ne l'avais pas donnée ! Smile Ce qui vous manque, c'est le geste du chanteur, qui désigne à son auditoire le chat qu'il faut imaginer, et qu'il place dans l'espace, quelque part entre lui et son auditoire.
@menerve. En effet; c'est ce que je disais : si l'on s'en tient à une analyse purement verbale, textuelle, on peut considérer qu'il y a ici une ellipse de "voici". Et pourquoi peut-on avoir cette ellipse ? Parce qu'on est dans une situation où le texte n'est pas isolé de sa "performance", de la musique, et, éventuellement du geste.
P.S. : je comprends fort bien vos réticences. Cela fait quelques années que j'ai découvert cette bizarrerie, que je ne parvenais pas jusque-là à comprendre...sauf à la placer, trop facilement, dans la catégorie "faute de syntaxe". Même si c'en est une, il s'agit de comprendre comment elle fonctionne.
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- Lady_SaganNiveau 4
NLM76 a écrit:Bah si.Lady_Sagan a écrit:Je ne vois pas quelle proposition relative pourrait avoir du sens sans une proposition principale dont elle dépendrait, à la rigueur avec un antécédent implicite. En tout cas je ne vois pas d'exemple.
La chanson en donne un.
Avez-vous entendu mon explication ?
Un geste, qui signifie, "voyez par là, imaginez".
Dites-moi pourquoi elle ne tient pas ; mais ne faites pas comme si je ne l'avais pas donnée ! Smile Ce qui vous manque, c'est le geste du chanteur, qui désigne à son auditoire le chat qu'il faut imaginer, et qu'il place dans l'espace, quelque part entre lui et son auditoire.
@menerve. En effet; c'est ce que je disais : si l'on s'en tient à une analyse purement verbale, textuelle, on peut considérer qu'il y a ici une ellipse de "voici". Et pourquoi peut-on avoir cette ellipse ? Parce qu'on est dans une situation où le texte n'est pas isolé de sa "performance", de la musique, et, éventuellement du geste.
Désolée si je n'ai pas été claire. Je propose un avis, je n'ai pas dit que vous ne donniez pas un exemple mais je ne trouve pas que la proposition ait du sens et donc constitue vraiment une phrase.
Pour moi, "le chat qui la regarde" n'a pas de sens. On nous montre un chat d'accord mais (et je me trompe peut-être) la relative dépend peut-être, je le redis, de la phrase du couplet 5. Certes, il y a le problème de la ponctuation, ce qui limite beaucoup la valeur de ma proposition.
Après, c'est peut-être particulier au rythme et au geste accompagnant la chanson, effectivement. Toutefois, si c'est le cas, il y a un implicite ("voici, voyez" que vous proposez) et la relative ne fait pas phrase à elle seule, non?
- HypermnestreÉrudit
Si tu considères que "le chat qui la regarde" a un sens et qu'il faut sous-entendre "voici", le problème n'est pas la relative : ton raisonnement fonctionne aussi bien avec "le chat" ("voici le chat").
Pour moi, ce groupe de mots est à rattacher à "il était". Il était, d'une part, une bergère, d'autre part, un chat (qui la regarde).
Pour moi, ce groupe de mots est à rattacher à "il était". Il était, d'une part, une bergère, d'autre part, un chat (qui la regarde).
- NLM76Grand Maître
@Lady_Sagan : Il y a deux questions différentes, me semble-t-il. Est-ce que c'est une phrase ? Est-ce que cela a du sens ?
Ce n'est pas une "phrase" au sens scolaire du terme. Mais cela a du sens [Et vraiment, dans la chanson, rapporter le couplet 3 au couplet 5 ne tient pas debout ; de fait, le couplet fait sens en lui-même]. Donc c'est presque une phrase. En fait, il me semble que cela marche comme une phrase nominale exclamative. "L'imbécile !" "Et but !!!" "Kylian Mbappééééé !". "A ma droite, Cassius Clay ; à ma gauche, Marcel Cerdan !".
Autrement dit, je me demande si on ne peut pas expliquer aux élèves, quand ils ont envie de faire d'une relative une phrase, qu'à l'écrit, dans un texte "purement verbal", on doit le plus possible verbaliser les gestes qu'on ferait à l'oral. "Vous comprenez la relative isolée que vous écrite dans votre texte, parce que vous imaginez le geste que vous faites à ce moment-là ; mais mais on attend de vous que vous explicitiez ce geste."
Autrement dit, je me demande si on n'a pas intérêt à travailler ce qui se passe dans la transposition de la parole réelle, en voix, en présence à la parole dégestualisée. Et dans l'autre direction, pour faire comprendre un texte littéraire, à travailler la gestuelle qu'implique un texte, quand on le fait passer des mots à la voix et à la parole.
Ce ne sont que des hypothèses maladroites. Mais cela me tarabuste, surtout face à l'inflation de pseudo-phrases nominales du style "Ben de faire une description...", dans lesquelles on a l'impression que tout propos s'est évaporé.
@Hypermnestre : Oui. Mais cela revient à la question du geste. Ce n'est pas "[il était] UN chat qui la regardE". Tu fais un geste, qui pourrait correspondre au mot "voici", mais sans le dire, et tout s'éclaire. Et effectivement, tu as raison, ce n'est pas une relative seule ("qui la regarde") que les élèves prétendent transformer en phrase dans leur devoir. En fait le problème est celui des pseudo-phrases nominales [nom + relative], contrairement à ce que laisse entendre le titre que j'ai donné au fil.
Ce n'est pas une "phrase" au sens scolaire du terme. Mais cela a du sens [Et vraiment, dans la chanson, rapporter le couplet 3 au couplet 5 ne tient pas debout ; de fait, le couplet fait sens en lui-même]. Donc c'est presque une phrase. En fait, il me semble que cela marche comme une phrase nominale exclamative. "L'imbécile !" "Et but !!!" "Kylian Mbappééééé !". "A ma droite, Cassius Clay ; à ma gauche, Marcel Cerdan !".
Autrement dit, je me demande si on ne peut pas expliquer aux élèves, quand ils ont envie de faire d'une relative une phrase, qu'à l'écrit, dans un texte "purement verbal", on doit le plus possible verbaliser les gestes qu'on ferait à l'oral. "Vous comprenez la relative isolée que vous écrite dans votre texte, parce que vous imaginez le geste que vous faites à ce moment-là ; mais mais on attend de vous que vous explicitiez ce geste."
Autrement dit, je me demande si on n'a pas intérêt à travailler ce qui se passe dans la transposition de la parole réelle, en voix, en présence à la parole dégestualisée. Et dans l'autre direction, pour faire comprendre un texte littéraire, à travailler la gestuelle qu'implique un texte, quand on le fait passer des mots à la voix et à la parole.
Ce ne sont que des hypothèses maladroites. Mais cela me tarabuste, surtout face à l'inflation de pseudo-phrases nominales du style "Ben de faire une description...", dans lesquelles on a l'impression que tout propos s'est évaporé.
@Hypermnestre : Oui. Mais cela revient à la question du geste. Ce n'est pas "[il était] UN chat qui la regardE". Tu fais un geste, qui pourrait correspondre au mot "voici", mais sans le dire, et tout s'éclaire. Et effectivement, tu as raison, ce n'est pas une relative seule ("qui la regarde") que les élèves prétendent transformer en phrase dans leur devoir. En fait le problème est celui des pseudo-phrases nominales [nom + relative], contrairement à ce que laisse entendre le titre que j'ai donné au fil.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- e-WandererGrand sage
Ma première remarque est que NLM a des lectures bien friponnes…
OK avec sa proposition, il est difficile de s'en tirer sans restituer logiquement un présentatif, soit Voici/Voilà, soit Il y a (et donc la relative est analysable comme relative prédicative/attributive, si on veut détailler, plutôt que comme une relative épithète).
Il est aussi effectivement très intéressant d'analyser l'article du point de vue de la sémantique du prototype : non pas Il y a / Voici un chat qui la regarde, mais le chat, comme si sa présence était normale ou attendue : on force en quelque sorte la référence, un peu comme dans les romans de gare qui ont besoin d'immerger rapidement le lecteur dans leur univers (entame typique :"L'avion était déjà haut dans le ciel. Martine était plongée dans son magazine." etc.). Le genre de la comptine relève sans doute de la même recherche d'efficacité en créant très vite un univers cohérent (alors qu'on attend plutôt un chien qu'un chat auprès d'une bergère). De ce point de vue, l'ellipse du présentatif et la présence de la relative font hésiter entre deux logiques tant qu'on ne sait pas s'il y a un verbe principal derrière, et le fait de forcer la référence passe plus facilement.
OK avec sa proposition, il est difficile de s'en tirer sans restituer logiquement un présentatif, soit Voici/Voilà, soit Il y a (et donc la relative est analysable comme relative prédicative/attributive, si on veut détailler, plutôt que comme une relative épithète).
Il est aussi effectivement très intéressant d'analyser l'article du point de vue de la sémantique du prototype : non pas Il y a / Voici un chat qui la regarde, mais le chat, comme si sa présence était normale ou attendue : on force en quelque sorte la référence, un peu comme dans les romans de gare qui ont besoin d'immerger rapidement le lecteur dans leur univers (entame typique :"L'avion était déjà haut dans le ciel. Martine était plongée dans son magazine." etc.). Le genre de la comptine relève sans doute de la même recherche d'efficacité en créant très vite un univers cohérent (alors qu'on attend plutôt un chien qu'un chat auprès d'une bergère). De ce point de vue, l'ellipse du présentatif et la présence de la relative font hésiter entre deux logiques tant qu'on ne sait pas s'il y a un verbe principal derrière, et le fait de forcer la référence passe plus facilement.
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- ipomeeGuide spirituel
Et que dire de "l'homme qui murmurait à l'oreille des chevaux" ?
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