[Philo] Nouveaux programmes - progression

Comment pensez-vous aborder les nouveaux programmes ? selon quelle progression ? Nous sommes invités à croiser les notions et non à les étudier séparément, ce qui n'est pas forcément le plus facile pour la compréhension des élèves. Qu'en pensez-vous ?

Je suis en train d'élaborer une progression pour les séries Techno dans un premier temps, je débute cette année, alors je ne sais pas du tout si je m'y prends bien! D'après ce que j'ai lu dans les textes officiels l'idée est de construire son cours en le problématisant et effectivement en croisant les notions. Je pensais donc commencer par la liberté et réfléchir sur la question classique "Etre libre est-ce faire ce que l'on veut?". J'aborderai ensuite la notion de Justice en réfléchissant sur "Peut-il être juste de désobéir à la loi?". Ce qui me permet de croiser les deux notions, cela a l'avantage pour les élèves de réinvestir les connaissances acquises sur la liberté lors du premier cours. Après je pense traiter la Nature avec "doit-on prendre la nature pour modèle?". Là aussi j'articulerai la réflexion sur la Nature à celle sur la Justice par la distinction lois naturelles/lois légales.
Et ainsi de suite pour les autres notions en veillant à ce que le sujet que je propose pour structurer le cours n'anticipe pas sur une notion que je traiterai ultérieurement.

Voici la progression que j'ai établie. Les textes viennent du Livre Scolaire.

Partie 1 : prendre conscience, prendre connaissance

1. Ma pensée est-elle toujours consciente ? Leibniz (p.50), Freud (p.54-55), de Beauvoir (p.34). Notions : conscience, inconscient, temps, devoir. Méthode : dissertation. Rédaction : plan détaillé + une partie. Distribution d’une partie rédigée par le professeur + de celle d’un élève.

2. La conscience du temps nous rend-elle malheureux ? Nietzsche (p.72), Sénèque, Arendt, Eliade (p.80-81) Notions : conscience, temps, bonheur, liberté. Rédaction dissertation : plan détaillé + intro. Distribution d’une introduction et d’une partie rédigées par le professeur + de l’introduction d’un élève.

3. Les scientifiques ont-ils le monopole de la connaissance ? Bachelard, Heidegger, Einstein, Platon, Nietzsche (p.142 à 145), Foucault (p.244). Notions : science, vérité, religion, raison, nature. Rédaction dissertation : plan détaillé + une partie + conclusion. Distribution du plan détaillé du professeur.

DST du 15/10

Partie 2 : fabriquer et célébrer le monde

4. Le travail : nécessité ou libération ? Weil, Alain (p.220-221) Notions : travail, technique, liberté, bonheur, temps. Méthode : explication de texte. Rédaction : plan détaillé + intro (Alain p.221).

5. L’oeuvre d’art dit-elle la beauté du monde ? Platon (p.188), Hegel (p.190), Bergson (p.193), Camus (p.194), Kant (p.196) Notions : art, nature, travail, technique, inconscient, langage. Rédaction explication de texte : plan détaillé + une partie et une transition (Kant p.196).

Bac blanc

DST du 07/01

Partie 3 : édifier un monde moral

6. Comment déterminer quel est mon devoir ? Kant, Bentham, Levinas, Singer (p.306 à 309) Notions : devoir, conscience, raison, technique. Explication de texte complète (Durkheim p.310).

7. Avons-nous des devoirs envers la nature ? Jonas, Serres (p.240-241) Notions : nature, devoir, conscience, temps, justice. Dissertation complète.

DST du 11/02

Partie 4 : vivre ensemble

8. La diversité des langues nous prive-t-elle de la vérité ? Arendt, Cournot, Foucault (p. 262 à 265) Notions : langage, vérité, raison. Dissertation complète.

DST du 01/04

9. Être citoyen, est-ce renoncer à une part de liberté ? Rousseau, Constant, Spinoza, Tocqueville (p.372 à 375) Notions : État, justice, liberté, devoir. Explication de texte complète (Hegel p.284).

10. OI : Criton de Platon. Notions : État, justice, liberté, devoir, vérité, raison. Plans détaillés et rédaction d’une partie.

Une séquence dure environ 3 semaines. J'utilise le Livre Scolaire comme manuel. Les 4 parties sont des directions que j'indique aux élèves pour montrer l'unité des sujets que nous allons aborder, elles contiennent toutes les perspectives. Je ne m'attarde pas sur les perspectives à vrai dire, je vais en parler naturellement dans chacun des sujets traités.

Une remarque concernant ce que tu appelles œuvre intégrale : Le programme écrit noir sur blanc qu'il n'y a aucune nécessité à étudier une œuvre intégralement. Ce qui est obligatoire c'est une "étude suivie". Mais, de nouveau, attention aux confusions : ça ne veut pas dire qu'une partie du cours annuel est réservée à cette étude. "L'étude suivie n'est pas séparée du cours dont elle accompagne le développement". Ça veut donc dire : 1º pas de chapitre "étude suivie" (et encore moins OI), mais 2º choix d'un texte sur lequel on revient (elle sert de référence) et où l'on rentre dans le détail d'argumentations relativement longues et surtout continues.

Au plan de cours proposé plus haut... je disais "tu", mais c'est un réflexe, parce que je tutoie tous les collègues, par principe.

Il n'est pas nécessaire d'étudier une oeuvre en intégralité mais ce n'est pas non plus exclu (OI : oeuvre intégrale, ça dit bien ce que je fais). Comme le Criton est court, je le fais donc étudier en intégralité et je ne vois pas comment je pourrais ne faire étudier que des extraits. Par ailleurs, je demande aux élèves de lire l'oeuvre dès le début et j'y fais référence tout au long de l'année, dès que le sujet s'y prête ou qu'une occasion se présente. Mais le chapitre "étude suivie" ou "OI" de fin d'année sert à approfondir ce qu'on a évoqué (notamment, comme je l'indique, réfléchir à des sujets de dissertation non seulement avec l'oeuvre mais aussi grâce à d'autres références) et permet de fixer les éléments essentiels en vue, le cas échéant, de l'oral de second groupe.

La structure de l'oeuvre étudiée doit cependant bien être analysée :

A toutes fins utiles : eduscol.education.fr/ - Ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse - Mai 2020
l’étude suivie des œuvres (une au moins dans la voie générale) ou de quelques extraits d’œuvres (dans les séries technologiques) est associée à
l’élaboration des notions et des problèmes philosophiques dont la construction et l’élucidation structurent le cours. Les repères, qui apportent des précisions destinées à soutenir l’effort de conceptualisation des élèves, sont intégrés à la progression du cours et ne font pas l’objet d’un traitement isolé.
Comme le stipulent les programmes, l’étude des œuvres ou de certains extraits accompagne le déploiement d’ensemble du cours. Elle peut, selon le choix du professeur, être articulée ou intégrée à l’un ou à l’autre des chapitres du cours, parfois à plusieurs. Dans la voie générale, il importe en toutes circonstances que la dimension de l’œuvre, considérée dans sa totalité et associée à des lectures extensives, soit effectivement prise en compte. Il n’est pas nécessaire que cette étude prenne la forme d’une explication ou d’un commentaire linéaire et systématique, il faut et il suffit qu’elle fasse apparaître une unité et une logique précise de
pensée, et que certains passages soient plus explicitement approfondis. On évite de recourir à de très brefs opuscules. En tout état de cause, l’étude suivie des œuvres n’est pas réservée à la seule préparation de l’oral du baccalauréat et ne doit par conséquent pas être repoussée à la
fin d’année scolaire.

Oui, j'avais lu ça, et il me semble que je respecte plutôt ces recommandations. L'oeuvre intégrale ne sert pas uniquement à l'oral de rattrapage, certes, mais le fait est qu'en ayant en tête cette donnée, l'approfondissement en fin d'année me semble tout indiqué.

Chacun fait comme il veut, bien sûr, et nombreux, dans les faits, sont ceux qui traitent l'étude suivie en dernier. Mais justement c'est un peu comme choisir la Lettre à Ménécée : le caractère fréquent de la chose la rend d'autant plus odieuses aux différentes inspections (régionales et générale). Quand on a l'occasion d'en discuter avec le doyen, il est clair sur ce sur ce point : le nouveau programme est surtout fait pour explicitement exclure ce que le programme précédent ne favorisait pas mais laissait finalement un peu faire. Programme donc absolument pas nouveau dans l'esprit mais nouveau dans la lettre, par souci de précision.