Nouveau documentaire de Judith Grumbach : "Devenir grand"

Ce que relève Sylvain Connac au début de son article est ce qui m’a le plus gêné, et que j’ai même noté. Le professeur de physique-chimie dit deux choses. La première est que moins on connaît un sujet et mieux on accompagne les élèves sans les diriger vers ce que le professeur souhaite, lui. La seconde est que donner la voix aux jeunes est clairement insuffisante. Si effectivement on « accompagne » les élèves sur des sujets qu’on connaît moins c’est aussi parce qu’on est obligé de se questionner dessus. Or maîtriser notre sujet est quand même la base de notre métier. Sur le second point, si je comprends l’argument à partir d’un certain niveau, il est peu efficace avec de faibles niveaux. Pour se poser des questions il paraît nécessaire de maîtriser les codes du langage (dans son acceptation large) et les bases minimales des autres matières, ce qui est loin d’être le cas quand, effectivement, on voit les séquences où des élèves lisent. Et je ne vais pas dire le contraire étant donné le département dans lequel je suis.

Ce que ne semble pas dire le documentaire c’est que pour les passages sur le niveau 6ème (je connais moins le lycée et point le primaire), ce sont des séances principalement de vie de classe et d’AP, si j’ai bien compris. Or pour cela il faut des heures et pour avoir des heures, il faut de l’argent. Oui, voir les progrès des élèves avec l’élève, le faire réfléchir à son comportement me semblent des choses bénéfiques. Mais on le fait sur quel temps ? quelles disciplines, quels temps de révision sont supprimés par ces moments ?

C’est là le problème du documentaire, selon moi. On ne voit un bel échantillon de scènes centrées sur les élèves apprenants là où, il me semble, ces scènes auraient bien plus d’intérêt en les intégrant dans les scènes plus quotidiennes. Pour la gosse de 6ème (Youssra ?) qui, dans une scène de tutorat avec son professeur d’EPS, en vient à dire qu’elle peut faire des efforts d’accord ; mais qu’est-ce qui a précédé ce moment ? On apprend plus tard par la CPE qu’elle était à deux doigts de l’exclusion, qu’elle a été en exin.

Bref. Trop idyllique dans sa forme parce que bien trop biaisé. Je trouve qu’il y a des choses intéressantes dans le documentaire mais c’est trop. On a déjà peu d’heures à consacrer à ce qu’on est censé faire alors bon... Dans l’ensemble, j’ai eu l’impression d’être revenu sur les bancs de l’INSPE avec la sacro-sainte analyse réflexive. Et puis cette obsession du métier m’a mis mal à l’aise quand même. Je ne savais pas qu’en primaire cette question était si développée. Ce que disent les lycéens par rapport au forum des métiers où il n’y a quasiment que des écoles privées... ce serait peut-être un filon à creuser pour comprendre pourquoi il y a des soucis d’orientation aussi, non ?