A Mantes-la-Jolie, des dizaines de jeunes agenouillés mains sur la tête

Plus de 700 lycéens ont été interpellés par les forces de l’ordre en France ce jeudi, lors de la quatrième journée de mobilisation lycéenne, selon le ministère de l’Intérieur. Les arrestations les plus spectaculaires ont été menées à Mantes-la-Jolie, dans les Yvelines, où 153 personnes ont été interpellées pour «participation à un attroupement armé».

Des images de ces interpellations ont choqué de nombreuses personnes, notamment une vidéo montrant des dizaines de jeunes agenouillés, les mains dans le dos ou sur la tête, encadrés par de nombreux policiers.

S'ils sont nombreux et violents, c'est un moyen simple de les garder à l'oeil ; ça ne me choque pas.

Ca va finir mal…

Oui, j'avais mis le lien dans le sujet sur les gilets jaunes mais cela mérite une exposition plus importante et il ne s'agit pas directement des gilets jaunes (https://www.neoprofs.org/t121230p200-le-mouvement-des-gilets-jaunes#4592830)
C'est extrêmement choquant. Tous ces jeunes ont été emmenés dans des commissariats en garde à vue. La vidéo fait en plus entendre des propos particulièrement humiliants.
Si on ajoute à cela les nombreuses violences policières de ces derniers jours contre les lycéens, cela tiendrait presque du miracle que les cités ne se mettent pas plus fortement en mouvement...

Rappelons une partie de la lettre aux policier du préfet Grimaud en mai 68, que certains seraient bien inspirés de méditer :

Dites-vous bien et répétez-le autour de vous : toutes les fois qu'une violence illégitime est commise contre un manifestant, ce sont des dizaines de ses camarades qui souhaitent le venger. Cette escalade n'a pas de limites.

Mais est-ce une "violence" ici, et illégitime ?

Oudemia a écrit:Mais est-ce une "violence" ici, et  illégitime ?

Oui. Ils sont mineurs, filmés, leur image dans une position humiliante mise en ligne contre le droit à l'image le plus élémentaire. Rien ne peut le justifier.

Peut-être devrais-tu essayer de t'imaginer lycéenne, les mains sur la tête, à genoux, les pieds croisés, avec des menottes, pour avoir manifesté,
afin de répondre à cette question ?

Quand un pays est partagé ainsi et que chaque camp se fiche sur la tronche, c'est bien une guerre civile, non ?


Je n'aime décidemment pas "le nouveau Monde".

Oudemia a écrit:Mais est-ce une "violence" ici, et  illégitime ?

1) L'humiliation pour être une violence symbolique n'en est pas moins une violence.
2) Une fois à l'abri des murs épais du commissariat que croyez vous que ces ... ont fait à ces gamins ?

Sans parler du fait que la garde à vue, c'est assez peu amusant.

Hélips a écrit:

Oudemia a écrit:Mais est-ce une "violence" ici, et  illégitime ?

Oui. Ils sont mineurs, filmés, leur image dans une position humiliante mise en ligne contre le droit à l'image le plus élémentaire. Rien ne peut le justifier.

En effet, la personne qui a fait cela est en faute.
Mais j'en reviens au début : comment garder ces dizaines de jeunes, le temps de les interroger ?

ben2510 a écrit:Peut-être devrais-tu essayer de t'imaginer lycéenne, les mains sur la tête, à genoux, les pieds croisés, avec des menottes, pour avoir manifesté,
afin de répondre à cette question ?

Lycéenne, non, étudiante en prépa, j'ai manifesté dans les rues de la ville de mon lycée, je me suis assise sur la place de la mairie : je sais que je me serais bien gardée de rester s'il y avait eu le moindre signe de débordement.

En vérité:

Est-ce mal d'avoir une conscience politique? Et on ne peut pas toujours partir dès que ça dégénère.

Non, pas du tout : je veux dire que je ne me rendais absolument pas compte de la situation, que je voyais là un monôme estudiantin...
Là, on parle d'attroupement armé, c'est autre chose que notre défilé dans des rues paisibles.

Edit : De plus, aujourd'hui il faudrait être singulièrement hors de l'actualité pour ne pas savoir ce qui se passe, et où on peut être entrainé.

Cette sinistre mise en scène policière s'inscrit dans une perte de sens des droits fondamentaux de la personne humaine en France.

Ces images me révoltent

Oui, c'est choquant.

Le gouvernement annonce un nombre très faible de lycées bloqués, mais il y en a sans doute davantage.

Oudemia a écrit:Non, pas du tout : je veux dire que je ne me rendais absolument pas compte de la situation, que je voyais là un monôme estudiantin...
Là, on parle d'attroupement armé, c'est autre chose que notre défilé dans des rues paisibles.

Edit : De plus, aujourd'hui il faudrait être singulièrement hors de l'actualité pour ne pas savoir ce qui se passe, et où on peut être entrainé.

J'aimerais bien savoir combien étaient armés et avec quoi.

Code de la procédure pénale, article 803 a écrit:Nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s'il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite.

Dans ces deux hypothèses, toutes mesures utiles doivent être prises, dans les conditions compatibles avec les exigences de sécurité, pour éviter qu'une personne menottée ou entravée soit photographiée ou fasse l'objet d'un enregistrement audiovisuel.

C'est le second point qui pose problème dans cette affaire, mais j'ai juste fait une recherche hyper rapide sur le Code concerné, donc évidemment, la critique porterait sur ce seul article.
Bref, aux agents en question et à leur hiérarchie de répondre.
La vidéo choque parce qu'on voit un grand nombre de personnes interpellées (il y en a eu beaucoup à Mantes-la-Jolie), parce que la vidéo a été diffusée, parce que le commentaire d'un policier (?) est déplacé, et parce que la situation évoque... d'autres choses. De là à en tirer des conclusions générales ou de demander la démission des deux ministres (pourquoi Blanquer, parce que ce sont des lycéens ? Hum.)... Fort heureusement, il existe un service d'inspection qui s'appelle l'IGPN. Quant à savoir si, de façon pratique, l'opération d'interpellation pouvait se dérouler autrement, il faudrait des éléments techniques pour le savoir.

Maintenant, c'est mieux quand on se renseigne sur les événements qui ont conduit à cela, tout de même :

Article de Libération - Que s'est-il passé pour que des jeunes s'agenouillent, entourés de policiers, à Mantes-la-Jolie ?
Par Cédric Mathiot et Fabien Leboucq 7 décembre 2018 à 00:45

«De violentes échauffourées opposant les forces de l’ordre à des individus dans le quartier de Val-Fouré, près du lycée Jules-Saint-Exupéry. A 12h20, 122 étaient interpellés et placés en garde à vue pour participation à un groupement en vue de la préparation à des violences volontaires ou des destructions ou dégradations», selon la place Beauvau, qui ajoute : «37 des présents, la plupart encagoulés, étaient trouvés porteurs de bâtons, battes de base-ball et conteneurs de gaz lacrymogène.» Le ministère, qui se félicite qu'«aucun blessé» n’ait été recensé termine par cette justification : «L’interpellation d’un nombre aussi important d’individus a nécessité de prendre des mesures de sécurité complémentaires.»

L’heure et le lieu concordent avec ceux que donne un témoin de la scène contacté par CheckNews. Toutefois, celui-ci explique que parmi les jeunes agenouillés «il y en avait qui passaient simplement par la, des personnes qui ne faisaient même pas partie de la manifestation ou juste des spectateurs.» D’après ce témoin, la plupart des personnes à genoux ont tenté, avant d’être arrêtées, de se réfugier dans un local des Restos du Cœur. Sur les photos du site Mantes Actu, on voit à côté des lycéens à genoux un camion aux couleurs de l’association.

Oudemia a écrit:S'ils sont nombreux et violents, c'est un moyen simple de les garder à l'oeil ; ça ne me choque pas.

Moi non plus.
Ce qui me choque, c'est de voir des mineurs, dont certains fort jeunes et pas du tout lycéens, se saisir d'un prétexte dont ils n'ont en réalité, pour la plupart, rien à carrer, pour aller "se marrer" en cassant et brûlant du matériel urbain et des voitures, en dégradant la propriété de gens qui, à Mantes la Jolie, ont peu de probabilités d'être des nantis bénéficiaires de la suppression de l'ISF. L'excuse de minorité, ça va bien un moment.

Qui a entendu Christophe Chalençon remettre à sa place un leader étudiant mercredi soir sur LCI? Je lui aurais bien fait deux gros poutous.

Je ne suis pas choquée non plus, mais je pense que ma perception de la violence a changé depuis que je vis aux Etats-Unis. Quelle était l'alternative? En l'espèce, ils ont assuré la sécurité des biens et des personnes, y compris des adolescents. Si c'était ma fille, franchement, je serais surtout contente qu'elle s'en sorte sans être blessée. En même temps, si elle faisait ça ici, ma fille serait renvoyée de l'école, certainement envoyée en prison, et nous devrions payer une énorme amende. Et nous aurions notre photo dans tous les journaux, parce qu'ici on reste très 'lettre écarlate' quand même.

Autant je peux comprendre que les forces de police doivent recourir à ce type de manœuvre face à de grands groupes en attendant les renforts et les fourgons, autant le fait de filmer et les propos tenus me semblent extrêmement problématiques et fautifs professionnellement parlant. On ne filme pas des mineurs, on ne tient pas ce genre de propos lourds d'implicites inacceptables dans l'exercice d'une fonction régalienne. Ces pratiques délégitiment leur fonction et affaiblissent leur institution face aux populations dont ils ont la mission de protéger.
La violence est inacceptable mais le véritable problème est la perte de légitimité de l'Etat et des forces de l'ordre aux yeux de nombreux Français. Or, le pacte républicain est fondé sur le fait que la population accepte la légitimité de l'Etat et de son usage à la force par le moyen de ses forces de l'ordre. Là, pour une partie de la population, ce n'est plus le cas et ça m'inquiète terriblement.
Personnellement, ce qui me terrifie dans les prochains jours est que le gouvernement décrète l'état d'urgence et passe des lois liberticides pendant ce laps de temps. Je vais paraître idiot mais je suis très inquiet du maintient du pacte républicain et démocratique dans notre pays avec ce gouvernement. On vit des mouvements insurrectionnels et c'est très inquiétant. Pourtant, j'en ai vu des mouvements de violence (j'étais dans les zones où ça se battait lors des émeutes urbaines de 2005 et 2007) mais il n'y avait pas de mouvement massif de délégitimation de l'Etat et des forces de l'ordre. Là, si. Hier, j'ai entendu ma mère et ma grand-mère tenir des propos où la confiance dans l'Etat et la police était morte… et ce ne sont pas femmes à s'insurger ou à aller manifester (elles n'ont jamais manifesté de leur vie). Moi, j'ai juste peur pour l'avenir de notre société démocratique. Je suis peut-être à l'ouest, me direz-vous.

Et si filmer (on ne voit pas le détail des visages) était précisément une façon de se protéger contre la diffamation?
C'est curieux qu'on présente toujours les policiers comme l'image de la violence et de la répression et les jeunes comme les pauvres victimes. Sur les images de samedi dernier, j'ai plutôt vu le contraire.

"On en filme pas des mineurs".
Et personne ne songe à dire "les mineurs n'ont rien à faire là"?

Comme Elyas, ce qui me dérange ce n'est pas tellement le fait que des policiers forcent des manifestants à s'agenouiller pour mieux les contrôler (on parle de 700 jeunes manifestants dont certains ont commis des actes de violence et de 70 policiers pour maintenir l'ordre) mais pourquoi est-ce filmé et surtout diffusé ? Je peux entendre que filmer est un moyen de prouver justement qu'il n'y a pas eu de "dérapage" de la part de la police mais que cette vidéo se retrouve sur les réseaux sociaux est justement un dérapage.

J'ai envie de dire "Bienvenue dans la vie réelle, finie la bienveillance familiale et éducative, mais la marche est beaucoup trop haute. Les deux camps ont une responsabilité coupable. J'espère que nos têtes pensantes vont enfin comprendre que ne pas éduquer ni instruire correctement notre jeunesse est extrêmement dangereux. Et pendant ce temps là une loi "anti-fessée" est passée.

+1000

Pour la diffusion, je reconnais que cela pose question. Mais comment est-elle arrivée là ?

En même temps, peut-on accepter la diffusion de vidéos tendancieuses dans l'autre sens sans finir par répliquer ?  Honnêtement, je comprends l'exaspération et l'épuisement des forces de l'ordre. On veut tout et son contraire : la police doit protéger tout le monde, empêcher toues les exactions, mais ne pas faire bobo aux pauvres petits casseurs malmenés par la société (et l'école). A un moment, il faut choisir.