Lectures pour un élève intelligent en plein désarroi existentiel ?

C'est dans ces moments-là que je goûte vraiment le métier que j'exerce: à la fin d'une heure de cours, un de mes très bons élèves de 1S est venu se confier à moi sur son désarroi existentiel. Nous étudions quelques fragments des Pensées en ce moment, et cela le fait cogiter.
Il se pose mille questions sur le sens de la vie et de la mort, écrit des pages et des pages de prose poétique un peu enfiévrée mais belle et sensible, me les confie. Il m'a demandé de le lire et de lui indiquer des lectures qui pourraient, dit-il, le "cadrer" un peu. C'est un jeune homme anxieux, l'univers pour le moment  l'engloutit comme un point.

J'ai bien-sûr quelques suggestions à lui faire, mais je suis certaine que vous enrichirez mes idées. A celles et ceux qui parmi vous ont été ce jeune homme: quelles lectures ont en partie étanché votre soif?

Propos sur le bonheur d'Alain.

Pensées pour moi-même de Marc Aurèle.

Je recommanderais le très édifiant 1 kilo de blagues avec Jean-Marie Bigard.

Au même âge, également très impressionnée par l'intransigeance de Pascal, j'avais trouvé un bon compagnon d'adolescence chez Tolstoï.

Lettres à un jeu poète.

Ah non, pardon.

A son âge, j'ai lu Cioran et ça m'a fait beaucoup de bien. Le livre de l'intranquillité aussi.

Nietzsche était, à cette époque-là, mon compagnon de route... Humain trop humain.

Camus (le théâtre, La Peste, les essais) et Sartre ?

Yachar Kemal : Memet le Mince et Memet le Faucon.
Vladimir Bukowski : Et le vent reprend ses tours.
Le Seigneur des Anneaux.
Pascal.

Les Carnets du sous-sol de Dostoïevski.
Je plussoie vivement Tolstoï et Camus.

maldoror1 a écrit:Mémoires d'Hadrien

Je plussoie.
Platon a beaucoup été sur ma table de chevet à 16-18 ans.

maldoror1 a écrit:Mémoires d'Hadrien

C'est le premier titre qui m'est venu à l'esprit et que je n'ai pas posté par modestie mal venue. Une magnifique réflexion sur la vie, écrite dans une langue à la fois classique et superbe.

Nul académicien n'aura mérité de siéger dans la Coupole autant que Marguerite Yourcenar.

Thalia de G a écrit:

maldoror1 a écrit:Mémoires d'Hadrien

C'est le premier titre qui m'est venu à l'esprit et que je n'ai pas posté par modestie mal venue. Une magnifique réflexion sur la vie, écrite dans une langue à la fois classique et superbe.

Nul académicien n'aura mérité de siéger dans la Coupole autant que Marguerite Yourcenar.

Oui, c'est un livre inépuisable, qu'il faut lire, selon moi, à tous les âges de la vie, comme Proust.

Je l'ai lu et pas qu'une seule fois.

Et "inépuisable", c'est ce qui fait le chef-d'œuvre.

Thalia de G a écrit: Je l'ai lu et pas qu'une seule fois.

Et "inépuisable", c'est ce qui fait le chef-d'œuvre.

Nous sommes bien d'accord !

Cet élève a-t-il lu Rimbaud ?

Merci à tous. Beaucoup de titres cités comptent parmi ceux auxquels j'avais songé.

Il a bien lu Rimbaud, c'est le poète que je leur ai fait étudier cette année. Il a aimé, il a même lu Une Saison en Enfer en plus.

Il connaît Rilke et Pessoa (forcément!) aussi, goûts de la prof obligent.

Pourquoi ne pas lui faire lire aussi du vers régulier et même surtout classique ? Ca lui éviterait ce défaut dominant chez les poètes novices de se tourner vers la prose ou le vers libre non par choix véritable, mais par facilité ou par ignorance des règles formelles qui ont longtemps fait l'essence de la poésie. On sait très bien qu'en règle générale, dans le champ de la poésie, l'adolescent mystérieux en crise existentielle ne va pas se jeter sur Boileau, encore moins sur Rutebeuf ou Clément Marot. Rimbaud est l'idole number one, ce qui induit souvent chez le jeune poète deux défauts majeurs : le rejet peu justifié des règles de la versification et l'obscurité du sens.
Si le devoir du professeur est de contrebalancer les influences dominantes en dirigeant l'élève vers ce qu'il n'aurait pas cherché à connaître de lui-même et qui pourrait lui éviter certains écueils, il me semblerait pertinent de lui faire lire l'Art poétique de Boileau. Ce serait idéal pour le "cadrer" dans sa pratique poétique : c'est un peu la base de toute écriture poétique vraiment éclairée, bien qu'évidemment on puisse ensuite s'en éloigner, mais alors consciemment et volontairement.
Après, effectivement, ce ne serait pas le caresser dans le sens du poil, mais le faut-il ?

Aden arabie ?

Meersch a écrit:Pourquoi ne pas lui faire lire aussi du vers régulier et même surtout classique ? Ca lui éviterait ce défaut dominant chez les poètes novices de se tourner vers la prose ou le vers libre non par choix véritable, mais par facilité ou par ignorance des règles formelles qui ont longtemps fait l'essence de la poésie. On sait très bien qu'en règle générale, dans le champ de la poésie, l'adolescent mystérieux en crise existentielle ne va pas se jeter sur Boileau, encore moins sur Rutebeuf ou Clément Marot. Rimbaud est l'idole number one, ce qui induit souvent chez le jeune poète deux défauts majeurs : le rejet peu justifié des règles de la versification et l'obscurité du sens.
Si le devoir du professeur est de contrebalancer les influences dominantes en dirigeant l'élève vers ce qu'il n'aurait pas cherché à connaître de lui-même et qui pourrait lui éviter certains écueils, il me semblerait pertinent de lui faire lire l'Art poétique de Boileau. Ce serait idéal pour le "cadrer" dans sa pratique poétique : c'est un peu la base de toute écriture poétique vraiment éclairée, bien qu'évidemment on puisse ensuite s'en éloigner, mais alors consciemment et volontairement.
Après, effectivement, ce ne serait pas le caresser dans le sens du poil, mais le faut-il ?

Euh...Après ta plaisanterie sur Bigard, j'espère que ce message en est une aussi?

Huysmans, A rebours, même si les désillusions du personnage, des Esseintes, peuvent parfois égarer... Ce roman a été un choc culturel pour moi, une révélation sur la décadence.

Je me demande si la lecture d'une poésie engagée ne pourrait pas lui donner l'idée que la vie peut avoir un sens dans l'engagement pour une juste cause (je sais, je parle d'un peu loin dans le temps...)
Antonio Machado, Mahmoud Darwich, Eluard pour ne citer qu'eux.
Et je suppose que tu lui as conseillé Char.

La Nausée, L'Etranger, Les Choses

Poul Anderson, Jo Walton, Tolkien, Glen Cook, George R. R. Martin.