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par Parménide Sam 24 Oct 2015, 10:20
Bonjour Smile

Dans le livre III de De la Nature, Lucrèce dit que âme et esprit sont étroitement unis et que la première serait dispersée dans tout le corps tandis que le deuxième aurait son siège dans la poitrine.

Ne savait-on pas à l'époque que c'est tout de même le cerveau qui pense et qui se fait des représentations? Parlons de Lucrèce 3795679266

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"Les paroles essentielles sont des actions qui se produisent en ces instants décisifs où l'éclair d'une illumination splendide traverse la totalité d'un monde", Martin Heidegger, "Schelling", (semestre d'été 1936)

"Et d'une brûlure d'ail naitra peut-être un soir l'étincelle du génie", Saint-John Perse, "Sécheresse" (1974)

"Il avait dit cela d'un air fatigué et royal", Franz-Olivier Giesbert, "Le vieil homme et la mort" (1996)

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par Carnyx Sam 24 Oct 2015, 10:35
Pour Aristote le cerveau sert à refroidir le sang, c'est le coeur qui est le siège de la pensée contrairement à la vision du médecin Galien. Donc dans l'Antiquité, la représentation n'était pas aussi claire pour tout le monde.

Sur la redécouverte de Lucrèce à la Renaissance, un excellent livre :
http://www.amazon.fr/Quattrocento-Stephen-Greenblatt/dp/2081312816/ref=sr_1_1?ie=UTF8&qid=1445675833&sr=8-1&keywords=greenblatt


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Of all tyrannies, a tyranny sincerely exercised for the good of its victims may be the most oppressive. It would be better to live under robber barons than under omnipotent moral busybodies. The robber baron’s cruelty may sometimes sleep, his cupidity may at some point be satiated; but those who torment us for our own good will torment us without end for they do so with the approval of their own conscience.
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par Parménide Sam 24 Oct 2015, 10:38
Mais comment peut-on ne pas avoir intuitivement le sentiment que c'est nécessairement le cerveau, ou du moins la partie la plus supérieure du corps humain, qui pense? C'est ça que je trouve incroyable...

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par Carnyx Sam 24 Oct 2015, 10:40
Parménide a écrit:Mais comment peut-on ne pas avoir intuitivement le sentiment que c'est nécessairement le cerveau, ou du moins la partie la plus supérieure du corps humain, qui pense? C'est ça que je trouve incroyable...
Incroyable pour nous, Occidentaux du XXIe siècle. Very Happy
Penser à "apprendre par coeur".

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par User5899 Sam 24 Oct 2015, 10:40
Parménide a écrit:Mais comment peut-on ne pas avoir intuitivement le sentiment que c'est nécessairement le cerveau, ou du moins la partie la plus supérieure du corps humain, qui pense? C'est ça que je trouve incroyable...
Paris n'est pas à Calais...
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par Thalia de G Sam 24 Oct 2015, 10:43
Dans certaines civilisations le foie n'est-il pas le siège des émotions ?

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par henriette Sam 24 Oct 2015, 10:46
La distinction n'est pas si claire.
Prends le terme "animus" et regarde ses entrées dans le Gaffiot : il désigne tout à la fois, selon le contexte, le siège de le pensée et de l'intelligence (opposée aux sens), le siège du désir et de la volonté, et le siège du sentiment et des passions.
http://www.lexilogos.com/latin/gaffiot.php?q=animus
Voir aussi la différence animus / mens.
Il serait intéressant de voir quels termes Lucrèce utilise.

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par User5899 Sam 24 Oct 2015, 10:50
henriette a écrit:La distinction n'est pas si claire.
Prends le terme "animus" et regarde ses entrées dans le Gaffiot : il désigne tout à la fois, selon le contexte, le siège de le pensée et de l'intelligence (opposée aux sens), le siège du désir et de la volonté, et le siège du sentiment et des passions.
http://www.lexilogos.com/latin/gaffiot.php?q=animus
Voir aussi la différence animus / mens.
Il serait intéressant de voir quels termes Lucrèce utilise.
Voir aussi chez Claudel la dispute entre animus et anima Razz
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par Iphigénie Sam 24 Oct 2015, 10:54
Il fut un temps où il y avait des programmes de Langues Anciennes passionnants: par exemple lorsqu'il s'agissait d'étudier l'expression des sentiments chez Homère.
phrên, par exemple, a pour premier sens "diaphragme" avant de désigner l'intelligence.
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par User5899 Sam 24 Oct 2015, 10:58
Iphigénie a écrit:Il  fut un temps où il y avait des programmes de Langues Anciennes passionnants: par exemple lorsqu'il s'agissait d'étudier l'expression des sentiments chez Homère.
phrên, par exemple, a pour premier sens "diaphragme" avant de désigner l'intelligence.
On voit par là que quand on n'en métaparle pas, l'interdisciplinarité est interdisciplinaire sans susciter rire ou moquerie professeur
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par Thalia de G Sam 24 Oct 2015, 11:05
Iphigénie a écrit:Il  fut un temps où il y avait des programmes de Langues Anciennes passionnants: par exemple lorsqu'il s'agissait d'étudier l'expression des sentiments chez Homère.
phrên, par exemple, a pour premier sens "diaphragme" avant de désigner l'intelligence.
J'ai produit, en Terminale un exposé, forcément passionnant sur le phrên, le nous et le thymos chez Platon.

Je ne sais pas si cette remarque peut aider Parménide. Embarassed

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par User17706 Sam 24 Oct 2015, 11:15
Thalia de G a écrit:Dans certaines civilisations le foie n'est-il pas le siège des émotions ?
Horace, Ode XXV du livre I:
Cum tibi flagrans amor et libido
Quæ solet matres furiare equorum
Sæviet circa iecur ulcerosum ...
____________

Sinon, ce que ça montre c'est qu'on n'a pas du tout de «sentiment intuitif» du siège de la pensée: et notamment, pas de sentiment qui suggérerait qu'il est plutôt la tête, la poitrine, les entrailles, ou rien de tout cela.


Dernière édition par PauvreYorick le Sam 24 Oct 2015, 11:18, édité 1 fois
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par Thalia de G Sam 24 Oct 2015, 11:16
PY, je pensais aux Mésopotamiens, mais je n'ai pas les références.

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par Iphigénie Sam 24 Oct 2015, 11:23
Thalia de G a écrit:Dans certaines civilisations le foie n'est-il pas le siège des émotions ?
Chez les Etrusques il est même l'image du cosmos comme on le voit avec  le foie de Plaisance
Bref, le foie, la foi, et les crises, tout ça c'est lié... Rolling Eyes

Pour être plus sérieuse: pour "penser" un siège précis de la pensée, ne faut-il pas passer par une conception duelle de l'homme, qui sépare l'esprit (voire l'âme) et le corps, ce qui est loin d'être le cas chez les Grecs?
Enfin, chais pas, question aux pro.
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par User17706 Sam 24 Oct 2015, 11:41
henriette a écrit:La distinction n'est pas si claire.
Prends le terme "animus" et regarde ses entrées dans le Gaffiot : il désigne tout à la fois, selon le contexte, le siège de le pensée et de l'intelligence (opposée aux sens), le siège du désir et de la volonté, et le siège du sentiment et des passions.
http://www.lexilogos.com/latin/gaffiot.php?q=animus
Voir aussi la différence animus / mens.
Il serait intéressant de voir quels termes Lucrèce utilise.
Lucrèce, dans le livre III, se livre à la clarification terminologique demandée (on trouve souvent l'hendiadyn animus+mens) et la différence animus/animam est en gros la différence principe de la pensée/principe de vie.
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par User17706 Sam 24 Oct 2015, 11:48
Iphigénie a écrit:Pour être plus sérieuse: pour "penser" un siège précis de la pensée, ne faut-il pas passer par une conception duelle de l'homme, qui sépare l'esprit (voire l'âme) et le corps, ce qui est loin d'être le cas chez les Grecs?
Pas forcément, voire au contraire: c'est dans la mesure où Lucrèce (et l'épicurisme en général) fait de la vie puis de la pensée des fonctions (certes raffinées) du corps qu'il peut s'interroger sur leur localisation organique. Dans d'authentiques dualismes il n'y a plus de localisation au sens propre de l'esprit (typiquement, Descartes).
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par pamplemousses4 Sam 24 Oct 2015, 11:53
De mes archives, voilà ce que je peux exhumer pour t'aider (pas le temps de relire, mais je crois me souvenir que ça pose bien les choses), par M. Boyancé, Pierre:
http://www.persee.fr/doc/bude_1247-6862_1958_num_17_4_4173
Iphigénie
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par Iphigénie Sam 24 Oct 2015, 11:55
Ah bon! d'accord et merci de ta réponse, PY!
Bon je raisonnais à l'envers, mais c'est bien une question liée, donc Very Happy
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par Invité El Sam 24 Oct 2015, 12:14
PauvreYorick a écrit:
Iphigénie a écrit:Pour être plus sérieuse: pour "penser" un siège précis de la pensée, ne faut-il pas passer par une conception duelle de l'homme, qui sépare l'esprit (voire l'âme) et le corps, ce qui est loin d'être le cas chez les Grecs?
Pas forcément, voire au contraire: c'est dans la mesure où Lucrèce (et l'épicurisme en général) fait de la vie puis de la pensée des fonctions (certes raffinées) du corps qu'il peut s'interroger sur leur localisation organique. Dans d'authentiques dualismes il n'y a plus de localisation au sens propre de l'esprit (typiquement, Descartes).

Et le fait qu'il y ait en effet une "conception" de l'homme chez les Grecs explique qu'ils n'ont pas cherché un siège de la pensée "intuitivement"!
Levincent
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par Levincent Dim 25 Oct 2015, 00:42
C'est un débat intéressant. Je me suis pour ma part souvent demandé si nous avions une perception intuitive d'un "lieu" de la pensée, en essayant de faire abstraction du fait que nous "savons" que c'est le cerveau qui pense. Je vois deux cas où nous semblons percevoir instinctivement que c'est à l'intérieur de la tête que l'opération se passe : pour les opérations abstraites (du type calcul mental), ou pour la recherche dans les souvenirs. C'est en effet dans ces cas que nous nous prenons le front dans la main, que nous pouvons sentir une certain "fatigue" du cerveau (mal de tête) si l'exercice se prolonge. Je pense donc que les anciens n'étaient pas totalement ignares sur le fait que le cerveau intervient dans la production de la pensée. Le problème est que les cas que je décris ne sont pas toute la pensée, car il n'y a a priori aucune raison de séparer intuitivement les opérations mentales que je décris des autres aspects de la vie de l'esprit, et qui ont un rapport avec les émotions. C'est à mon avis à partir de Descartes que nous avons commencé à concevoir le pur sujet pensant, c'est-à-dire le sujet capable d'employer sa raison discursive en faisant totalement abstraction des émotions. Or, des neurologues tels que Damasio prétendent qu'une telle isolation d'un sujet purement rationnel est pratiquement impossible, car l'usage de la raison est en réalité intimement lié aux émotions, qui participent aux délibérations pratiques. Ces considérations redécouvrent donc ce que les Anciens avaient sans doute perçu d'emblée, et qui les empêchaient de localiser la pensée dans le seul cerveau. Les émotions sont en effet liées au corps, comme cela est attesté par les expressions du langage courant ("avoir le cœur qui se serre", "avoir des papillons dans le ventre", etc.) qui se trouvent validées par l'expérience de chacun. Par conséquent, le siège de cette chose qu'on appelle la pensée, ou encore de l'esprit, ne saurait être le cerveau seul, et cela est encore validé par le même Damasio, qui montre comment notre cerveau est relié à nos autres organes.

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par philopoussin Mar 27 Oct 2015, 20:29
Sur une telle question, c'est pas pour pousser au vice, mais relire Bergson, tout de même... Le cerveau... bon. :dehors2:
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par Parménide Sam 07 Nov 2015, 18:51
Me revoici enfin :

Ce que je trouve extraordinaire c'est le fait, qu'il y a 2500 ans on n'ait jamais pu avoir réellement l'intuition que c'est au niveau de la tête que l'exercice de l'intelligence se fait. On peut toujours dire que l'état d'esprit de l'époque n'a rien à voir avec le notre, mais tout de même... Comment a-t-il été possible de considérer que c'est au niveau de la poitrine que cela se passe?

 
PauvreYorick a écrit:
Dans d'authentiques dualismes il n'y a plus de localisation au sens propre de l'esprit (typiquement, Descartes).

Mais Descartes n'avait-il pas dans l'idée que c'est le cerveau qui pense ou du moins que cela se situe dans la tête?

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par User17706 Sam 07 Nov 2015, 21:16
Parménide a écrit:
PauvreYorick a écrit:
Dans d'authentiques dualismes il n'y a plus de localisation au sens propre de l'esprit (typiquement, Descartes).
Mais Descartes n'avait-il pas dans l'idée que c'est le cerveau qui pense ou du moins que cela se situe dans la tête?
Non, absolument pas. Ce qui est vrai ─ mais c'est très différent ─ c'est qu'il estimait que les différentes parties du corps n'ont pas la même relation à l'âme, et qu'une partie du cerveau, la tristement fameuse glande pinéale, était plus particulièrement impliquée dans la relation, au demeurant mystérieuse, entre le corps et le siège (non corporel) de la pensée.
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Invité El
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par Invité El Dim 08 Nov 2015, 12:16
Parménide a écrit:Me revoici enfin :

Ce que je trouve extraordinaire c'est le fait, qu'il y a 2500 ans on n'ait jamais pu avoir réellement l'intuition que c'est au niveau de la tête que l'exercice de l'intelligence se fait. On peut toujours dire que l'état d'esprit de l'époque n'a rien à voir avec le notre, mais tout de même... Comment a-t-il été possible de considérer que c'est au niveau de la poitrine que cela se passe?

 
PauvreYorick a écrit:
Dans d'authentiques dualismes il n'y a plus de localisation au sens propre de l'esprit (typiquement, Descartes).

Mais Descartes n'avait-il pas dans l'idée que c'est le cerveau qui pense ou du moins que cela se situe dans la tête?

La théorie liant la pensée au coeur est plus orientale que grecque, on la trouve en Egypte.

La conception du siège de la pensée n'est pas uniforme dans l'Antiquité grecque. Ce sont les études sur l'anatomie qui ont lié le cerveau et l'exercice de la pensée, et Hippocrate dit, dans son traité sur La Maladie sacrée (§14): " Les hommes doivent savoir que la source de nos plaisirs, de nos joies, de nos rires et de nos plaisanteries n’est autre que cet endroit-là (ie le cerveau), qui est également la source de nos chagrins, de nos contrariétés, de nos tristesses et de nos peurs. Et c’est par lui surtout que nous pensons et nous concevons, regardons, entendons, distinguons le laid et le beau, le mal et le bien, l’agréable et le désagréable, tantôt discernant d’après l’usage, tantôt ressentant selon l’intérêt, parfois aussi distinguant plaisirs et déplaisirs d’après l’opportunité ; et ainsi, ce ne sont pas toujours les mêmes choses qui nous agréent. "

Il me semble ensuite que c'est la théorie des humeurs (avec l'influence déterminante de Gallien) qui a continué à voir un rôle déterminant du coeur dans le contrôle des émotions (ce qui n'est pas la même chose que la pensée d'ailleurs).
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