- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Bonjour,
Je galère, crois-je, avec les 3e. Il me tient à cœur de leur apprendre à rédiger un paragraphe d'explication de texte. Mais je crois que je manque de repères, que je n'y vois pas toujours très clair, - j'ai peut-être même des lacunes, aussi je me fais violence en venant vous en parler.
Déjà, ma méthode me paraît un rien bourine. En gros, elle consiste à les faire écrire souvent : à la fin de la plupart de mes explications de texte. J'explique à l'oral, longuement, en dépensant une énergie folle pour les engager dans l'explication, m'assurer qu'ils suivent, comprennent, tenter de les marquer ou de les interroger. Je note pas mal d'idées au tableau, de façon très schématique : un mot une idée, des flèches ; comme ils recopient tout ça frénétiquement, cela donne à leurs cours des airs de notes de lycéen qui ne siéent peut-être pas à leur jeune âge... Après ça, je répète ou révèle la question ou l'idée qui a guidé notre parcours, et je leur demande de mettre le tout sous la forme d'un paragraphe ou deux.
Je ramasse régulièrement. Dans le lot, chaque fois, il y a des travaux totalement catastrophiques : des résumés du texte, sans la moindre trace d'analyse, et qui en tant que tels pourraient être bons s'ils n'étaient pas souvent mâtinés d'imagination. Pour ceux-là, je suis bien gêné de ne pas savoir que dire pour les aider. Mais d'autres me semblent être « en bonne voie ». Me semblent, à condition de fermer les yeux sur bien des choses. Par exemple, dans cet extrait d'un travail sur la représentation du conflit intérieur d'Oreste, acte I scène 1 :
« Pour Oreste, aimer n'est pas une bonne chose. Cela a des effets négatifs sur lui. Il se sent prisonnier : « Traîner de mers en mers ma chaîne et mes ennuis », il y a dans le texte la rime Oreste / Funeste, ce qui révèle son état d'esprit ».
Je suis tenté de passer sur à peu près toute la formulation, la psychologisation, tout ça, pour me focaliser sur le fait que cette élève, au moins, a bien vu que la passion amoureuse était représentée d'une certaine manière dans ce texte, que c'est une passion mortifère et non un doux désir, et qu'elle a tenté de l'illustrer de plusieurs façons, en suivant vaguement un plan thèse / argumentation. Elle dit ensuite des choses totalement fausses, achève son paragraphe et en commence un nouveau pour expliquer qu'Oreste cherche à lutter contre cette passion en la remplaçant par d'autres passions et en personnifiant ses sentiments pour se déresponsabiliser. L'enchaînement est simple et efficace, ça aussi je trouve ça pas mal.
Or, à vrai dire, je ne parviens pas à me faire une idée de ce qu'on peut attendre d'un élève de 3e – plus précisément : si, en travaillant différemment, je ne pourrais pas en attendre davantage.
Je me demande si je ne vais pas revenir aux listes de questions, abandonnées vers octobre, pour bien des raisons qui me semblent encore valables. Mais il faudra bien apprendre un jour aux élèves à faire sans, non ?
Surtout, je me demande si je conçois bien mes trucs. A force de vouloir me mettre au niveau collège, j'ai l'impression de perdre toutes mes capacités. J'en viens parfois à me dire que je suis littérairement médiocre : je n'ai plus que mon classement au Capes et le souvenir de mes mentions pour me persuader du contraire. Or, de fait, je mets parfois des plombes, chez moi, à trouver un « axe de lecture », une question qui puisse chapeauter l'ensemble de mon explication, tout en ne sachant même plus trop ce qu'on veut dire ou faire par là.
Par exemple, dans cette tirade, ce qui m'intéresse, c'est la représentation extrêmement sombre de la passion amoureuse, et la manière dont Oreste a entendu la contrer ; le fait que le récit soit au passé, que ce soit la récit d'une lutte dont Oreste a annoncé dès le début de sa tirade qu'il l'avait perdue, qu'elle était illusoire ; tout le piment semble pour lui de montrer à Pylade comme le sort l'a bien eu ; cette lutte, ce n'est pas celle des arguments, de la raison contre la passion (et j'ai voulu aussi parler des stances de Rodrigue, puisque mes élèves ont étudié le Cid en 4e), Oreste combat à coup de simulacres, il entend changer l'amour en haine ou lui substituer la gloire. Alors, voulant faire simple et autoriser un maximum de remarques, je suis parti de cette question : « Comment le conflit intérieur d'Oreste est-il représenté » ; question qui ne contient pas le moindre paradoxe, et qui a l'inconvénient d'oublier le début de la tirade, et notamment ce très beau vers cité par mon élève – recasée in extremis par la nécessité de comprendre pourquoi Oreste a voulu lutter contre cette passion (elle le menait à la mort). J'ai l'impression de bricoler vaguement, de ne plus savoir comment m'y prendre, ou de n'avoir jamais su, tant me semblent excessivement éloignées les grosses problématiques en bouquet que j'inventais durant mes études et l'année du concours.
Là, je commence la scène 4 du même acte. Même problème, toujours le même : j'ai envie de montrer des tas de choses, trop sans doute, et des choses trop compliquées. Montrer l'évolution d'un rapport de force, de la relation maître-esclave (qui est l'esclave?) le pervertissement du schéma courtois, faire goûter le comique des premiers vers de Pyrrhus, la façon d'y répondre sans y répondre d'Andromaque, l'ironie qui lui permet encore de garder ses distances quand Pyrrhus tente de la tenir en lui annonçant de nouvelles larmes, montrer la force de telle périphrase, de telle antithèse... Et la question, la petite formule qui va unir tout ça à nouveau me fait défaut (j'y ai aussi moins réfléchi).
J'ouvre donc ce fil : pour réunir des conseils, des idées, que je récoltais jusque-là à droite à gauche ; et aussi pour tenter d'y voir plus clair sur ce que je fais, si je suis à l'ouest ou pas. Ça me tentait depuis un moment, c'est pas évident de prendre le risque de se voir dire qu'on fait n'importe ou quoi ; m'enfin, puisque je suis prof à présent et que je ne peux pas changer de métier et que je ne compte pas ne pas faire de mon mieux, tant pis pour l'ego, je me lance.
Je galère, crois-je, avec les 3e. Il me tient à cœur de leur apprendre à rédiger un paragraphe d'explication de texte. Mais je crois que je manque de repères, que je n'y vois pas toujours très clair, - j'ai peut-être même des lacunes, aussi je me fais violence en venant vous en parler.
Déjà, ma méthode me paraît un rien bourine. En gros, elle consiste à les faire écrire souvent : à la fin de la plupart de mes explications de texte. J'explique à l'oral, longuement, en dépensant une énergie folle pour les engager dans l'explication, m'assurer qu'ils suivent, comprennent, tenter de les marquer ou de les interroger. Je note pas mal d'idées au tableau, de façon très schématique : un mot une idée, des flèches ; comme ils recopient tout ça frénétiquement, cela donne à leurs cours des airs de notes de lycéen qui ne siéent peut-être pas à leur jeune âge... Après ça, je répète ou révèle la question ou l'idée qui a guidé notre parcours, et je leur demande de mettre le tout sous la forme d'un paragraphe ou deux.
Je ramasse régulièrement. Dans le lot, chaque fois, il y a des travaux totalement catastrophiques : des résumés du texte, sans la moindre trace d'analyse, et qui en tant que tels pourraient être bons s'ils n'étaient pas souvent mâtinés d'imagination. Pour ceux-là, je suis bien gêné de ne pas savoir que dire pour les aider. Mais d'autres me semblent être « en bonne voie ». Me semblent, à condition de fermer les yeux sur bien des choses. Par exemple, dans cet extrait d'un travail sur la représentation du conflit intérieur d'Oreste, acte I scène 1 :
« Pour Oreste, aimer n'est pas une bonne chose. Cela a des effets négatifs sur lui. Il se sent prisonnier : « Traîner de mers en mers ma chaîne et mes ennuis », il y a dans le texte la rime Oreste / Funeste, ce qui révèle son état d'esprit ».
Je suis tenté de passer sur à peu près toute la formulation, la psychologisation, tout ça, pour me focaliser sur le fait que cette élève, au moins, a bien vu que la passion amoureuse était représentée d'une certaine manière dans ce texte, que c'est une passion mortifère et non un doux désir, et qu'elle a tenté de l'illustrer de plusieurs façons, en suivant vaguement un plan thèse / argumentation. Elle dit ensuite des choses totalement fausses, achève son paragraphe et en commence un nouveau pour expliquer qu'Oreste cherche à lutter contre cette passion en la remplaçant par d'autres passions et en personnifiant ses sentiments pour se déresponsabiliser. L'enchaînement est simple et efficace, ça aussi je trouve ça pas mal.
Or, à vrai dire, je ne parviens pas à me faire une idée de ce qu'on peut attendre d'un élève de 3e – plus précisément : si, en travaillant différemment, je ne pourrais pas en attendre davantage.
Je me demande si je ne vais pas revenir aux listes de questions, abandonnées vers octobre, pour bien des raisons qui me semblent encore valables. Mais il faudra bien apprendre un jour aux élèves à faire sans, non ?
Surtout, je me demande si je conçois bien mes trucs. A force de vouloir me mettre au niveau collège, j'ai l'impression de perdre toutes mes capacités. J'en viens parfois à me dire que je suis littérairement médiocre : je n'ai plus que mon classement au Capes et le souvenir de mes mentions pour me persuader du contraire. Or, de fait, je mets parfois des plombes, chez moi, à trouver un « axe de lecture », une question qui puisse chapeauter l'ensemble de mon explication, tout en ne sachant même plus trop ce qu'on veut dire ou faire par là.
Par exemple, dans cette tirade, ce qui m'intéresse, c'est la représentation extrêmement sombre de la passion amoureuse, et la manière dont Oreste a entendu la contrer ; le fait que le récit soit au passé, que ce soit la récit d'une lutte dont Oreste a annoncé dès le début de sa tirade qu'il l'avait perdue, qu'elle était illusoire ; tout le piment semble pour lui de montrer à Pylade comme le sort l'a bien eu ; cette lutte, ce n'est pas celle des arguments, de la raison contre la passion (et j'ai voulu aussi parler des stances de Rodrigue, puisque mes élèves ont étudié le Cid en 4e), Oreste combat à coup de simulacres, il entend changer l'amour en haine ou lui substituer la gloire. Alors, voulant faire simple et autoriser un maximum de remarques, je suis parti de cette question : « Comment le conflit intérieur d'Oreste est-il représenté » ; question qui ne contient pas le moindre paradoxe, et qui a l'inconvénient d'oublier le début de la tirade, et notamment ce très beau vers cité par mon élève – recasée in extremis par la nécessité de comprendre pourquoi Oreste a voulu lutter contre cette passion (elle le menait à la mort). J'ai l'impression de bricoler vaguement, de ne plus savoir comment m'y prendre, ou de n'avoir jamais su, tant me semblent excessivement éloignées les grosses problématiques en bouquet que j'inventais durant mes études et l'année du concours.
Là, je commence la scène 4 du même acte. Même problème, toujours le même : j'ai envie de montrer des tas de choses, trop sans doute, et des choses trop compliquées. Montrer l'évolution d'un rapport de force, de la relation maître-esclave (qui est l'esclave?) le pervertissement du schéma courtois, faire goûter le comique des premiers vers de Pyrrhus, la façon d'y répondre sans y répondre d'Andromaque, l'ironie qui lui permet encore de garder ses distances quand Pyrrhus tente de la tenir en lui annonçant de nouvelles larmes, montrer la force de telle périphrase, de telle antithèse... Et la question, la petite formule qui va unir tout ça à nouveau me fait défaut (j'y ai aussi moins réfléchi).
J'ouvre donc ce fil : pour réunir des conseils, des idées, que je récoltais jusque-là à droite à gauche ; et aussi pour tenter d'y voir plus clair sur ce que je fais, si je suis à l'ouest ou pas. Ça me tentait depuis un moment, c'est pas évident de prendre le risque de se voir dire qu'on fait n'importe ou quoi ; m'enfin, puisque je suis prof à présent et que je ne peux pas changer de métier et que je ne compte pas ne pas faire de mon mieux, tant pis pour l'ego, je me lance.
- AmaliahEmpereur
Pourquoi ne pas les faire rédiger au fur et à mesure?
Exemple sur La Ferme des animaux, texte "Stupeur et tremblements" du TDL.
Je veux étudier comment le récit montre la mise en place d'un Etat totalitaire. C'est la question qui dirige mon étude.
Je leur demande les caractéristiques d'un Etat totalitaire et je note au tableau les trois quatre idées qui viennent. Puis je prends idée par idée, je demande un commentaire, une citation, un procédé, selon ce qui vient. Si je note une citation au tableau, on essaie de voir le procédé et l'effet produit. Si un élève explique quelque chose, je demande une citation pour appuyer son propos etc.
Une fois qu'on a quelques éléments, je rajoute au tableau les mots de liaison que je veux qu'ils emploient et je fais rédiger un paragraphe.
Il me semble que tu es trop ambitieux (mais peut-être as-tu des classes qui te le permettent?) et que donner la question de synthèse à rédiger est trop difficile pour des 3e.
Sur mon exemple, j'aurais par exemple au tableau:
Idée 1 : la propagande qui manipule les masses.
- "rumeur" + Brille-Babil (choix du nom / rôle du personnage).
- " C'est lui qui volait le blé, renversait les seaux à lait, cassait les oeufs, piétinait les semis" (l. 4-5) : énumération pour insister sur le nombre de méfaits commis par B de N + présentatif
cf. aussi hyperbole "cent méfaits" / "cent dangers".
- Forfaits absurdes, invraisemblables : clef de la resserre volée par B de N puis retrouvée.
"chose bizarre" : GN commentaire du narrateur qui montre la naïveté, la crédulité des animaux.
- Manipulation de l'histoire : B de N traître et même agent secret.
Questions rhétoriques pour persuader les animaux de la culpabilité de B de N.
Répétition de l'adverbe "catégoriquement" (l.48-49).
Et je fais rédiger un paragraphe à partir de ces éléments avant de passer à la 2e idée.
Et parfois on ne rédige qu'un paragraphe parce que ça prend énormément de temps. Parfois ils rédigent un paragraphe à la maison, bref je varie les plaisirs mais je ne donne pas à rédiger toute la question.
Ça m'évite de corriger des horreurs!
Edit: Je note aussi en début d'année les verbes utiles comme "insister sur", "mettre en valeur", "souligner" etc. qui permettent d'améliorer l'expression. c'est ce qui pèche dans l'exemple que tu as donné plus haut.
Bref je guide complètement!
Exemple sur La Ferme des animaux, texte "Stupeur et tremblements" du TDL.
Je veux étudier comment le récit montre la mise en place d'un Etat totalitaire. C'est la question qui dirige mon étude.
Je leur demande les caractéristiques d'un Etat totalitaire et je note au tableau les trois quatre idées qui viennent. Puis je prends idée par idée, je demande un commentaire, une citation, un procédé, selon ce qui vient. Si je note une citation au tableau, on essaie de voir le procédé et l'effet produit. Si un élève explique quelque chose, je demande une citation pour appuyer son propos etc.
Une fois qu'on a quelques éléments, je rajoute au tableau les mots de liaison que je veux qu'ils emploient et je fais rédiger un paragraphe.
Il me semble que tu es trop ambitieux (mais peut-être as-tu des classes qui te le permettent?) et que donner la question de synthèse à rédiger est trop difficile pour des 3e.
Sur mon exemple, j'aurais par exemple au tableau:
Idée 1 : la propagande qui manipule les masses.
- "rumeur" + Brille-Babil (choix du nom / rôle du personnage).
- " C'est lui qui volait le blé, renversait les seaux à lait, cassait les oeufs, piétinait les semis" (l. 4-5) : énumération pour insister sur le nombre de méfaits commis par B de N + présentatif
cf. aussi hyperbole "cent méfaits" / "cent dangers".
- Forfaits absurdes, invraisemblables : clef de la resserre volée par B de N puis retrouvée.
"chose bizarre" : GN commentaire du narrateur qui montre la naïveté, la crédulité des animaux.
- Manipulation de l'histoire : B de N traître et même agent secret.
Questions rhétoriques pour persuader les animaux de la culpabilité de B de N.
Répétition de l'adverbe "catégoriquement" (l.48-49).
Et je fais rédiger un paragraphe à partir de ces éléments avant de passer à la 2e idée.
Et parfois on ne rédige qu'un paragraphe parce que ça prend énormément de temps. Parfois ils rédigent un paragraphe à la maison, bref je varie les plaisirs mais je ne donne pas à rédiger toute la question.
Ça m'évite de corriger des horreurs!
Edit: Je note aussi en début d'année les verbes utiles comme "insister sur", "mettre en valeur", "souligner" etc. qui permettent d'améliorer l'expression. c'est ce qui pèche dans l'exemple que tu as donné plus haut.
Bref je guide complètement!
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
A première lecture, je n'ai pas bien saisi la différence entre ce que je fais et ce que tu décris : je note aussi beaucoup de choses au tableau, certes de façon un peu plus bordélique, et je ne demande guère plus à mes élèves qu'un paragraphe, celui-ci ne faisant que mettre en forme l'explication de texte.
Mais tu sembles faire de la question quelque chose de plus déterminant que moi dans la lecture. Je crois avoir un goût trop prononcé pour l'explication purement linéaire (avec certes moult renvois), le commentaire comme on se promène ; j'ai envie de parler de tout ce qui m'intéresse, je cherche donc une question qui va me laisser le plus libre possible, et surtout, j'oublie rapidement cette question. Quand vient l'heure pour mes élèves de faire un paragraphe qui y réponde, ils ont certes toutes les éléments sous la main, mais 1. ils doivent alors davantage faire l'effort que les tiens de retrouver le lien entre la question et le tableau, l'explication n'ayant pas vraiment été faite dans le but de répondre à la question, même si elle y répond ; 2. la question est sans doute généralement plus difficile, car plus large, vague et sans doute moins intéressante pour eux.
Peut-être qu'en partant de l'idée que ma question va guider vraiment la lecture, que la lecture va prendre la forme d'une enquête, en quelque sorte, de meilleures questions me viendraient à l'esprit. Mais j'ai parfois l'impression qu'il me manque une case. Pour les deux scènes de Racine dont j'ai parlé, aucune question aussi stimulantes que la tienne ne me vient à l'esprit. J'en ai plein, hein, mais rien d'aussi beau dans son évidence nue. EDIT : de "Pyrrhus, victime ou bourreau ?", je viens de passer à "Pyrrhus, bourreau malgré lui ?", bon bon.
Mais tu sembles faire de la question quelque chose de plus déterminant que moi dans la lecture. Je crois avoir un goût trop prononcé pour l'explication purement linéaire (avec certes moult renvois), le commentaire comme on se promène ; j'ai envie de parler de tout ce qui m'intéresse, je cherche donc une question qui va me laisser le plus libre possible, et surtout, j'oublie rapidement cette question. Quand vient l'heure pour mes élèves de faire un paragraphe qui y réponde, ils ont certes toutes les éléments sous la main, mais 1. ils doivent alors davantage faire l'effort que les tiens de retrouver le lien entre la question et le tableau, l'explication n'ayant pas vraiment été faite dans le but de répondre à la question, même si elle y répond ; 2. la question est sans doute généralement plus difficile, car plus large, vague et sans doute moins intéressante pour eux.
Peut-être qu'en partant de l'idée que ma question va guider vraiment la lecture, que la lecture va prendre la forme d'une enquête, en quelque sorte, de meilleures questions me viendraient à l'esprit. Mais j'ai parfois l'impression qu'il me manque une case. Pour les deux scènes de Racine dont j'ai parlé, aucune question aussi stimulantes que la tienne ne me vient à l'esprit. J'en ai plein, hein, mais rien d'aussi beau dans son évidence nue. EDIT : de "Pyrrhus, victime ou bourreau ?", je viens de passer à "Pyrrhus, bourreau malgré lui ?", bon bon.
- AmaliahEmpereur
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:A première lecture, je n'ai pas bien saisi la différence entre ce que je fais et ce que tu décris : je note aussi beaucoup de choses au tableau, certes de façon un peu plus bordélique, et je ne demande guère plus à mes élèves qu'un paragraphe, celui-ci ne faisant que mettre en forme l'explication de texte.
Mais tu sembles faire de la question quelque chose de plus déterminant que moi dans la lecture. Je crois avoir un goût trop prononcé pour l'explication purement linéaire (avec certes moult renvois), le commentaire comme on se promène ; j'ai envie de parler de tout ce qui m'intéresse, je cherche donc une question qui va me laisser le plus libre possible, et surtout, j'oublie rapidement cette question. Quand vient l'heure pour mes élèves de faire un paragraphe qui y réponde, ils ont certes toutes les éléments sous la main, mais 1. ils doivent alors davantage faire l'effort que les tiens de retrouver le lien entre la question et le tableau, l'explication n'ayant pas vraiment été faite dans le but de répondre à la question, même si elle y répond ; 2. la question est sans doute généralement plus difficile, car plus large, vague et sans doute moins intéressante pour eux.
Peut-être qu'en partant de l'idée que ma question va guider vraiment la lecture, que la lecture va prendre la forme d'une enquête, en quelque sorte, de meilleures questions me viendraient à l'esprit. Mais j'ai parfois l'impression qu'il me manque une case. Pour les deux scènes de Racine dont j'ai parlé, aucune question aussi stimulantes que la tienne ne me vient à l'esprit. J'en ai plein, hein, mais rien d'aussi beau dans son évidence nue. EDIT : de "Pyrrhus, victime ou bourreau ?", je viens de passer à "Pyrrhus, bourreau malgré lui ?", bon bon.
Il me semble mais j'ai peut-être lu trop vite que tu donnes à rédiger à tes élèves une synthèse qui répondrait à la question posée en début d'heure. Or tu dis toi-même ne pas suivre cette question et butiner librement de ligne en ligne.
Pour moi, ce n'est pas assez cadré : on essaie de répondre à une question, si on cite le texte, on donne un procédé et un effet produit, si on part de l'effet produit, on rettrouve une citation pour appuyer ce que l'on dit etc. Quel que soit le bout par lequel on prend la chose, je retombe toujours sur citation / procédé / effet produit.
Et puis, je fais rédiger petit à petit, paragraphe à paragraphe. Dans l'exemple donné, je ne veux pas qu'ils me montrent la mise en place de l'Etat totalitaire mais qu'ils rédigent d'abord un paragraphe pour me montrer l'importance de la propagande dans cet Etat totalitaire. Je ne sais pas si je suis bien claire.
Comment prendre les textes? Je crois que parfois l'expérience, la spontanéité des élèves nous font trouver de nouveaux angles d'attaque.
Mais en 3e, il faut accepter de laisser de côté certains aspects du texte. On est bien loin d'une étude exhaustive! Pour moi, le plus important est d'avoir un questionnement qui permette de rendre compte de l'essentiel du texte.
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Je me suis mal exprimé : je ne fais pas de remarques hors-sujet, mais je ne prends pas assez la peine, je crois, de rappeler régulièrement que tout ce qu'on récolte est pour la question. Je pense que je peux mieux faire de ce côté-là.
Et il est vrai que je ne les accompagne pas comme tu fais. Je sais qu'il faut le faire (toute ma pratique actuelle est née des discussions passionnantes qui ont eu lieu sur ce forum), mais j'ai toujours l'impression que mes leçons durent trop longtemps (sans doute parce que je suis trop exhaustif) et pour rattraper ça je finis par leur demander de faire le travail à la maison, rapidement commencé en classe au mieux. A travailler aussi.
Je te remercie pour ces riches réponses.
Et il est vrai que je ne les accompagne pas comme tu fais. Je sais qu'il faut le faire (toute ma pratique actuelle est née des discussions passionnantes qui ont eu lieu sur ce forum), mais j'ai toujours l'impression que mes leçons durent trop longtemps (sans doute parce que je suis trop exhaustif) et pour rattraper ça je finis par leur demander de faire le travail à la maison, rapidement commencé en classe au mieux. A travailler aussi.
Je te remercie pour ces riches réponses.
- AmaliahEmpereur
Mais pourquoi ne pas diviser ta question en sous-questions en fait? A la manière d'un axe de commentaire qu'on organise en sous-parties?
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Oui, c'est que je fais après l'explication, pour aider mes élèves à organiser l'ensemble des remarques et des idées, et ce qu'il me semble plus judicieux de faire avant à présent. Edit : Non, pardon, je parle de sous-parties, de plan. Les sous-questions, non, jamais fait. Là, comme ça, ça ne me vient pas. Je vais y réfléchir.
J'y réfléchis. Pour "Pyrrhus, bourreau malgré lui ?", il y aurait bien : Comment Pyrrhus s'y prend-il pour effacer son image de bourreau (ou de maître) ? On mettrait en valeur l'évolution du séducteur galant, chevalier, au mari nouvelle incarnation d'Hector. Puis, comment tente-t-il de faire passer Andromaque pour un bourreau (c'est mal formulé je trouve) : sa façon de minorer ses actes passés, de faire d'Andromaque la responsable de sa passion, et le fameux "il faut vous obéir" pour introduire l'horrible chantage.
C'est parce que je doute fort, aujourd'hui, que je me permets d'exposer cette maigre esquisse, comme ça. Bien envie de redevenir élève aujourd'hui.
J'y réfléchis. Pour "Pyrrhus, bourreau malgré lui ?", il y aurait bien : Comment Pyrrhus s'y prend-il pour effacer son image de bourreau (ou de maître) ? On mettrait en valeur l'évolution du séducteur galant, chevalier, au mari nouvelle incarnation d'Hector. Puis, comment tente-t-il de faire passer Andromaque pour un bourreau (c'est mal formulé je trouve) : sa façon de minorer ses actes passés, de faire d'Andromaque la responsable de sa passion, et le fameux "il faut vous obéir" pour introduire l'horrible chantage.
C'est parce que je doute fort, aujourd'hui, que je me permets d'exposer cette maigre esquisse, comme ça. Bien envie de redevenir élève aujourd'hui.
- AmaliahEmpereur
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Oui, c'est que je fais après l'explication, pour aider mes élèves à organiser l'ensemble des remarques et des idées, et ce qu'il me semble plus judicieux de faire avant à présent. Edit : Non, pardon, je parle de sous-parties, de plan. Les sous-questions, non, jamais fait. Là, comme ça, ça ne me vient pas. Je vais y réfléchir.
J'y réfléchis. Pour "Pyrrhus, bourreau malgré lui ?", il y aurait bien : Comment Pyrrhus s'y prend-il pour effacer son image de bourreau (ou de maître) ? On mettrait en valeur l'évolution du séducteur galant, chevalier, au mari nouvelle incarnation d'Hector. Puis, comment tente-t-il de faire passer Andromaque pour un bourreau (c'est mal formulé je trouve) : sa façon de minorer ses actes passés, de faire d'Andromaque la responsable de sa passion, et le fameux "il faut vous obéir" pour introduire l'horrible chantage.
C'est parce que je doute fort, aujourd'hui, que je me permets d'exposer cette maigre esquisse, comme ça. Bien envie de redevenir élève aujourd'hui.
Je ne sais pas si on se comprend bien en fait.
En 3e, je ne fais jamais noter toutes les remarques pour ensuite leur faire trouver le plan (ou alors en toute fin d'année).
Si je veux leur montrer que le conflit entre Napoléon et Boule de Neige constitue un tournant dans le récit (je suis toujours dans La Ferme des animaux), je vais poser une question sur le conflit (qui? quoi? comment?, remarques au tableau (toujours pareil citations / procédés / efffet produit) et rédaction du paragraphe.
Puis on expliquera en quoi c'est un tournant et rebelote paragraphe.
Mon but pour l'instant est qu'ils arrivent à rédiger un paragraphe à partir de notes. S'ils doivent en plus organiser leurs notes et refaire un plan, ça me semble trop compliqué et relever du lycée.
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
En gras, je parle du fait d'organiser la réflexion en sous-question. J'ai d'abord cru que je faisais comme toi, puis j'ai vu la différence.
J'ai tenté de faire ainsi aujourd'hui : une question à laquelle on va répondre en plusieurs paragraphes et, pour ce jour, une sous-question pour guider la rédaction du premier paragraphe. Notes au tableau, puis début de rédaction en classe. J'ai eu la sensation d'être plus à l'aise pour aider les élèves et leur permettre de comprendre ce qu'on fait. Je verrai les résultats lundi.
J'ai tenté de faire ainsi aujourd'hui : une question à laquelle on va répondre en plusieurs paragraphes et, pour ce jour, une sous-question pour guider la rédaction du premier paragraphe. Notes au tableau, puis début de rédaction en classe. J'ai eu la sensation d'être plus à l'aise pour aider les élèves et leur permettre de comprendre ce qu'on fait. Je verrai les résultats lundi.
- RabelaisVénérable
Euh, je suis sans doute HS mais : ils ont un commentaire au brevet maintenant?
Parce que dans mon établissement, la méthodologie du commentaire c'est doucement doucement en seconde parce qu'ils ne sont pas encore tout à fait prêts pour saisir toutes les subtilités .
Alors en troisième ?
Ce que tu fais est formidable, si ta classe en est arrivée à ce stade de compréhension,c'est chouette!
Mais ne te focalise pas sur ces paragraphes à rédiger "type commentaire", il y a 1000 façons de rendre compte de sa compréhension du texte en troisième .
Quant à leur prise de note, en seconde ,elle est la trace d'un processus de réflexion sur le texte, ses enjeux, les procédés trouvés , un chemin pour comprendre seul plus tard.
Et à la fin du cours, une petite synthèse écrite permet de mettre en mots " littéraires", en phrases construites le sens du texte.
L'activité d'écriture fait l'objet d'un travail plus en profondeur, avec insertion de citations, comment, pourquoi etc.
Mais comme on dit dans notre bahut: chacun fait bien comme il veut et le fait même d'y réfléchir est l'assurance de ne pas les conduire dans le mur.:succes:
Parce que dans mon établissement, la méthodologie du commentaire c'est doucement doucement en seconde parce qu'ils ne sont pas encore tout à fait prêts pour saisir toutes les subtilités .
Alors en troisième ?
Ce que tu fais est formidable, si ta classe en est arrivée à ce stade de compréhension,c'est chouette!
Mais ne te focalise pas sur ces paragraphes à rédiger "type commentaire", il y a 1000 façons de rendre compte de sa compréhension du texte en troisième .
Quant à leur prise de note, en seconde ,elle est la trace d'un processus de réflexion sur le texte, ses enjeux, les procédés trouvés , un chemin pour comprendre seul plus tard.
Et à la fin du cours, une petite synthèse écrite permet de mettre en mots " littéraires", en phrases construites le sens du texte.
L'activité d'écriture fait l'objet d'un travail plus en profondeur, avec insertion de citations, comment, pourquoi etc.
Mais comme on dit dans notre bahut: chacun fait bien comme il veut et le fait même d'y réfléchir est l'assurance de ne pas les conduire dans le mur.:succes:
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Oh mais, le brevet, si je devais m'en tenir à lui, je ne ferais même plus de grammaire ! :lol:
Mais je vais peut-être trop loin, là. Chais pas. D'un côté, si je les pousse dans cette direction, mes élèves ont tout à perdre et rien à gagner, non ? Et puis, en 2016, tout fout le camp, il est donc grand temps de s'amuser un peu.
Je leur fais faire aussi des exercices d'imitation, et des synthèses. Ces dernières, il m'arrive encore à ce niveau de les faire moi-même. Mais je ne suis vraiment pas à l'aise avec ça, les synthèses. J'avoue ne pas bien comprendre en quoi consiste une synthèse. Je ne suis pas habile pour dire quelque chose d'un texte en très peu de mots, j'ai du mal à trouver de l'intérêt à une synthèse de moins d'une demi-page (chez mes élèves), et moi même, quand je me lance, ça prend systématiquement la forme d'un joli petit pavé - ça revient à faire un paragraphe de commentaire, quoi. Y'a un truc qui doit m'échapper. Ou je dois avoir une petit voix qui me dit que si ça ne ressemble pas à une explication nourrie, argumentée et illustrée, c'est sans intérêt ; à tort sans doute.
Mais je vais peut-être trop loin, là. Chais pas. D'un côté, si je les pousse dans cette direction, mes élèves ont tout à perdre et rien à gagner, non ? Et puis, en 2016, tout fout le camp, il est donc grand temps de s'amuser un peu.
Je leur fais faire aussi des exercices d'imitation, et des synthèses. Ces dernières, il m'arrive encore à ce niveau de les faire moi-même. Mais je ne suis vraiment pas à l'aise avec ça, les synthèses. J'avoue ne pas bien comprendre en quoi consiste une synthèse. Je ne suis pas habile pour dire quelque chose d'un texte en très peu de mots, j'ai du mal à trouver de l'intérêt à une synthèse de moins d'une demi-page (chez mes élèves), et moi même, quand je me lance, ça prend systématiquement la forme d'un joli petit pavé - ça revient à faire un paragraphe de commentaire, quoi. Y'a un truc qui doit m'échapper. Ou je dois avoir une petit voix qui me dit que si ça ne ressemble pas à une explication nourrie, argumentée et illustrée, c'est sans intérêt ; à tort sans doute.
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