- IphigénieProphète
http://www.franceculture.fr/player/reecouter?play=5143525
Quelqu'un a signalé l'émission hier, mais pardon, je n'ai pas retrouvé le lien.
Émission forcément très intéressante.
Quelques remarques sur le vif:
Quand j'ai lu la présentation sur le site de France Culture, je me suis posé quelques questions:
On peut donc se demander pourquoi une telle présentation: contresens ou trahison?
Au long de l'émission, j'ai souvent eu, d'ailleurs, l'impression que le journaliste ne se souciait aucunement de la pensée de son interlocuteur mais restait sur son fil à lui, nécessairement "moderne". Ainsi, alors que P. Judet de la Combe règle l'histoire des déclinaisons en un tour de main -nécessaires et pas si compliquées, il suffit de s'y mettre- l'autre revient avec insistance, pour ne pas dire lourdeur, sur le côté rébarbatif et décourageant de cet "enseignement à l'ancienne qui veut passer par les déclinaisons qui en gros emm...tout le monde et que même c'est ce qui a tué l'enseignement des langues anciennes parce qu'il n'y a évidemment aucune autre raison et que les élèves en avaient marre de se faire endormir dans des cours insupportables"...(j'ajoute à peine les sous-entendus )
Bref je me suis dit que les médias sont actuellement un filtre extrêmement nocif pour la diffusion de la pensée.
Sinon, sur le fond du propos, que pensez-vous de cet éloge de la traduction? Je l'avais entendu en compagnie de Heinz Wismann il y a déjà pas mal d'années, qui défendait ce point de vue qui pour ma part me laisse sceptique (je crois que c'est ce qui a donné l'introduction au bac du "commentaire de traductions". Si j'adhère à ce qu'il dit sur l'intérêt de l'exercice de la traduction littéraire qui oblige à transposer d'une culture à l'autre et donc de prendre conscience de ces écarts, je doute de sa possibilité en classe secondaire actuellement. Pour arriver à travailler les traductions, il faut être parvenu à la maîtrise du texte source, pour causer correct. Or pour nos élèves, maîtriser le texte source est déjà un tel effort que personnellement, j'ai très peu le temps matériel de passer à l'étape du travail sur la traduction elle-même. Je trouve l'exercice de comparaisons des traductions totalement artificiel et pour tout dire impraticable sauf de manière hypocrite (on donne aux élèves des listes de remarques possibles à faire sur la longueur des phrases, l'ordre des mots, le respect des temps, l'ordre des compléments circonstanciels et autres éléments d'un pur bachotage sans intérêt à mes yeux et sans rigueur scientifique ni littéraire.)
Je suis sceptique aussi sur le "latin thérapeutique" cher à Mireille Ko dont il fait l'éloge, en tout cas ce n'est pas une thérapeutique adaptée pour tout type de malades, si j'ose filer la métaphore: à vouloir la généraliser, on a tué selon moi la possibilité d'avancer vers des apprentissages conséquents et on est entré dans "le latin de divertissement" et le chantage à l'option dès lors qu'on veut monter d'un cran le niveau des difficultés- c'est en tout cas mon point de vue- certes élitiste, en entendant par élitisme une exigence de capacités, évidemment.
Enfin voilà. Je suis curieuse de vos commentaires.
Quelqu'un a signalé l'émission hier, mais pardon, je n'ai pas retrouvé le lien.
Émission forcément très intéressante.
Quelques remarques sur le vif:
Quand j'ai lu la présentation sur le site de France Culture, je me suis posé quelques questions:
Quand on écoute le propos, on s'aperçoit que ce titre n'a, pour le moins rien à voir avec le propos, voire dit exactement le contraire, puisque que ce que déplore, très clairement, le grand helléniste c'est bien la primauté du civilisationnel à deux balles sur l'étude précise de la langue.(il le dit beaucoup mieux: réduire la culture antique à de simples faits au lieu d'en étudier la pensée, en passant par la maîtrise de la langue.)Aux antipodes d’un discours conservateur ou réactionnaire, le grand helléniste, Pierre Judet de la Combe s’inquiète de la manière dont s’enseignent trop souvent le grec et le latin.
On peut donc se demander pourquoi une telle présentation: contresens ou trahison?
Au long de l'émission, j'ai souvent eu, d'ailleurs, l'impression que le journaliste ne se souciait aucunement de la pensée de son interlocuteur mais restait sur son fil à lui, nécessairement "moderne". Ainsi, alors que P. Judet de la Combe règle l'histoire des déclinaisons en un tour de main -nécessaires et pas si compliquées, il suffit de s'y mettre- l'autre revient avec insistance, pour ne pas dire lourdeur, sur le côté rébarbatif et décourageant de cet "enseignement à l'ancienne qui veut passer par les déclinaisons qui en gros emm...tout le monde et que même c'est ce qui a tué l'enseignement des langues anciennes parce qu'il n'y a évidemment aucune autre raison et que les élèves en avaient marre de se faire endormir dans des cours insupportables"...(j'ajoute à peine les sous-entendus )
Bref je me suis dit que les médias sont actuellement un filtre extrêmement nocif pour la diffusion de la pensée.
Sinon, sur le fond du propos, que pensez-vous de cet éloge de la traduction? Je l'avais entendu en compagnie de Heinz Wismann il y a déjà pas mal d'années, qui défendait ce point de vue qui pour ma part me laisse sceptique (je crois que c'est ce qui a donné l'introduction au bac du "commentaire de traductions". Si j'adhère à ce qu'il dit sur l'intérêt de l'exercice de la traduction littéraire qui oblige à transposer d'une culture à l'autre et donc de prendre conscience de ces écarts, je doute de sa possibilité en classe secondaire actuellement. Pour arriver à travailler les traductions, il faut être parvenu à la maîtrise du texte source, pour causer correct. Or pour nos élèves, maîtriser le texte source est déjà un tel effort que personnellement, j'ai très peu le temps matériel de passer à l'étape du travail sur la traduction elle-même. Je trouve l'exercice de comparaisons des traductions totalement artificiel et pour tout dire impraticable sauf de manière hypocrite (on donne aux élèves des listes de remarques possibles à faire sur la longueur des phrases, l'ordre des mots, le respect des temps, l'ordre des compléments circonstanciels et autres éléments d'un pur bachotage sans intérêt à mes yeux et sans rigueur scientifique ni littéraire.)
Je suis sceptique aussi sur le "latin thérapeutique" cher à Mireille Ko dont il fait l'éloge, en tout cas ce n'est pas une thérapeutique adaptée pour tout type de malades, si j'ose filer la métaphore: à vouloir la généraliser, on a tué selon moi la possibilité d'avancer vers des apprentissages conséquents et on est entré dans "le latin de divertissement" et le chantage à l'option dès lors qu'on veut monter d'un cran le niveau des difficultés- c'est en tout cas mon point de vue- certes élitiste, en entendant par élitisme une exigence de capacités, évidemment.
Enfin voilà. Je suis curieuse de vos commentaires.
- hugo64Niveau 6
J'ai acheté aujourd'hui le livre de P. Judet de la Combe, mais n'a pas eu le temps d'écouter l'émission.
Je pense comme toi Iphigénie: je passe énormément de temps avec mes élèves sur la maîtrise du "texte source", et j'en manque pour leur faire travailler une "version" plus littéraire. Ponctuellement, je leur demande de reprendre x lignes/vers de notre juxtalinéaire en "français" élégant, mais c'est souvent médiocre, et je ne peux guère me permettre de tout refaire à chaque fois.
Pour ton commentaire sur Mireille Ko et le "latin thérapeutique", j'ai honte: je n'en ai jamais entendu parler...
Je pense comme toi Iphigénie: je passe énormément de temps avec mes élèves sur la maîtrise du "texte source", et j'en manque pour leur faire travailler une "version" plus littéraire. Ponctuellement, je leur demande de reprendre x lignes/vers de notre juxtalinéaire en "français" élégant, mais c'est souvent médiocre, et je ne peux guère me permettre de tout refaire à chaque fois.
Pour ton commentaire sur Mireille Ko et le "latin thérapeutique", j'ai honte: je n'en ai jamais entendu parler...
- yranohHabitué du forum
Merci pour le lien. C'est intéressant.
En ce qui concerne la traduction, je suis a priori d'accord avec toi ( mais aussi sur le fait que c'est un sujet particulièrement intéressant). Le travail de traduction littéraire, en effet, pourrait être l'accomplissement de l'étude d'un texte...si les élèves avaient cinq heures de latin depuis la cinquième. La seule solution qui me semble envisageable (et pas avant la première), c'est que le professeur prenne en charge, devant les élèves, ce travail de traduction. Les élèves pourraient faire quelques remarques, tout au plus, sur les choix de leur professeur. C'est juste une idée, mais je ne suis pas bien convaincu.
Quand j'ai eu des terminales, j'ai traité comme tu le fais la question du commentaire de traduction (pour l'oral), et cela m'a pris dans l'année... 10 minutes en fin d'année, pas une de plus. Les élèves ont traité un exemple ou deux à l'oral. Je leur ai dit : "très bien, c'est exactement ça". Ils ont compris tout de suite qu'il s'agissait de bluffer, ils étaient contents avec ça. Je pense que ce pourrait être intéressant (mais un peu redondant avec le commentaire) s'ils devaient commenter une phrase de traduction (ou un mot ? une tournure?) pendant au mois 3 min, et non pas 30 secondes, mais surtout si cette phrase était tirée des textes sérieusement et longuement travaillés avec eux pendant l'année. L'exercice tel qu'il est me semble nul, mauvais même. Pour l'écrit, c'est évidemment la même chose : sur n'importe quel extrait de l'oeuvre étudiée, c'est au moins stupide.
Je ne suis pas sûr d'avoir compris ce qu'était le latin thérapeutique. J'ai cru comprendre que c'était l'intérêt du latin pour aider à l'intégration sociale. Si c'est bien ça, je n'ai pas compris le rapport que tu établis avec la baisse des exigences. Ce qui est amusant, c'est que ceux qui parlent de cela ont tendance à insister sur le caractère méditerranéen de l'empire romain (cf le colloque Le latin pour quoi faire ?, auquel Judet de la Combe a participé), alors que PJDLC le défend par l'idée d'un terrain linguistique et culturel neutre (extrait de toute histoire personnelle, tout le contraire, donc).
En ce qui concerne la traduction, je suis a priori d'accord avec toi ( mais aussi sur le fait que c'est un sujet particulièrement intéressant). Le travail de traduction littéraire, en effet, pourrait être l'accomplissement de l'étude d'un texte...si les élèves avaient cinq heures de latin depuis la cinquième. La seule solution qui me semble envisageable (et pas avant la première), c'est que le professeur prenne en charge, devant les élèves, ce travail de traduction. Les élèves pourraient faire quelques remarques, tout au plus, sur les choix de leur professeur. C'est juste une idée, mais je ne suis pas bien convaincu.
Quand j'ai eu des terminales, j'ai traité comme tu le fais la question du commentaire de traduction (pour l'oral), et cela m'a pris dans l'année... 10 minutes en fin d'année, pas une de plus. Les élèves ont traité un exemple ou deux à l'oral. Je leur ai dit : "très bien, c'est exactement ça". Ils ont compris tout de suite qu'il s'agissait de bluffer, ils étaient contents avec ça. Je pense que ce pourrait être intéressant (mais un peu redondant avec le commentaire) s'ils devaient commenter une phrase de traduction (ou un mot ? une tournure?) pendant au mois 3 min, et non pas 30 secondes, mais surtout si cette phrase était tirée des textes sérieusement et longuement travaillés avec eux pendant l'année. L'exercice tel qu'il est me semble nul, mauvais même. Pour l'écrit, c'est évidemment la même chose : sur n'importe quel extrait de l'oeuvre étudiée, c'est au moins stupide.
Je ne suis pas sûr d'avoir compris ce qu'était le latin thérapeutique. J'ai cru comprendre que c'était l'intérêt du latin pour aider à l'intégration sociale. Si c'est bien ça, je n'ai pas compris le rapport que tu établis avec la baisse des exigences. Ce qui est amusant, c'est que ceux qui parlent de cela ont tendance à insister sur le caractère méditerranéen de l'empire romain (cf le colloque Le latin pour quoi faire ?, auquel Judet de la Combe a participé), alors que PJDLC le défend par l'idée d'un terrain linguistique et culturel neutre (extrait de toute histoire personnelle, tout le contraire, donc).
- IphigénieProphète
Non, on ne parle pas là d'intégration sociale mais de niveau scolaire: pour M. Ko c'est l'idée que le latin peut être utile aux élèves en grande difficulté pour les aider à mieux comprendre le français: il corrige les erreurs de parcours dans l'assimilation du français: grammaire, vocabulaire, etc. Je serais d'accord avec cette idée si on avait les moyens de faire des groupes de niveau. Mais quand on en est comme aujourd'hui à un seul groupe et même parfois qui regroupe plusieurs niveaux de classes et d'innombrables variations de niveaux par élève, c'est, à mon sens juste impossible.Je ne suis pas sûr d'avoir compris ce qu'était le latin thérapeutique. J'ai cru comprendre que c'était l'intérêt du latin pour aider à l'intégration sociale.
- User17706Bon génie
Très probablement contresens. Il est très difficile de croire, on a beau l'entendre de toutes ses cochlées, que le monsieur dit que le ciel est bleu quand on est persuadé qu'il est vert et qu'il faut donc dire qu'il est vert.Iphigénie a écrit: Quand j'ai lu la présentation sur le site de France Culture, je me suis posé quelques questions:
Quand on écoute le propos, on s'aperçoit que ce titre n'a, pour le moins rien à voir avec le propos, voire dit exactement le contraire, puisque que ce que déplore, très clairement, le grand helléniste c'est bien la primauté du civilisationnel à deux balles sur l'étude précise de la langue.(il le dit beaucoup mieux: réduire la culture antique à de simples faits au lieu d'en étudier la pensée, en passant par la maîtrise de la langue.)Aux antipodes d’un discours conservateur ou réactionnaire, le grand helléniste, Pierre Judet de la Combe s’inquiète de la manière dont s’enseignent trop souvent le grec et le latin.
On peut donc se demander pourquoi une telle présentation: contresens ou trahison?
Bah. Quand on s'est habitué à ne rien fiche, le moindre effort paraît insurmontable. Le journaliste est arrivé à se persuader que la taupinière est un Anapurna.Iphigénie a écrit: Au long de l'émission, j'ai souvent eu, d'ailleurs, l'impression que le journaliste ne se souciait aucunement de la pensée de son interlocuteur mais restait sur son fil à lui, nécessairement "moderne". Ainsi, alors que P. Judet de la Combe règle l'histoire des déclinaisons en un tour de main -nécessaires et pas si compliquées, il suffit de s'y mettre- l'autre revient avec insistance, pour ne pas dire lourdeur, sur le côté rébarbatif et décourageant de cet "enseignement à l'ancienne qui veut passer par les déclinaisons qui en gros emm...tout le monde et que même c'est ce qui a tué l'enseignement des langues anciennes parce qu'il n'y a évidemment aucune autre raison et que les élèves en avaient marre de se faire endormir dans des cours insupportables"...(j'ajoute à peine les sous-entendus )
Bref je me suis dit que les médias sont actuellement un filtre extrêmement nocif pour la diffusion de la pensée.
- Invité ElExpert spécialisé
En ce qui concerne l'exercice de comparaison de traductions, je partage sans problème vos avis sur ce qui est demandé à l'examen, notamment à l'oral. Pour l'écrit, j'avais en effet donné des "trucs" un peu tout faits à mes élèves.
Cependant, je ne dirais pas que l'exercice est stupide ni indigent. Qu'on ne puisse pas le faire à chaque texte traduit, soit. D'ailleurs, je ne suis pas certain que cela soit également intéressant selon les textes. Sur du Cicéron, avec nos élèves, on ne peut (selon moi) qu'essayer de leur faire améliorer la traduction. Je trouve alors qu'on perd un temps précieux qui pourrait être utilisé autrement. Mais pour des vers, je trouve l'exercice parfois très intéressant. Un exemple seulement: je suis (comme d'autres sans doute) dans la Phèdre de Sénèque, et j'ai construit une séance dont le but est d'approfondir le commentaire: je leur donne la traduction pour la scène de F. Dupont, et les questions que je pose doivent leur faire développer les interprétations implicites. J'ai trouvé ça plutôt stimulant.
Encore une fois, ce n'est absolument pas systématique, et ce qui est "exigé" à l'examen est déprimant.
Cependant, je ne dirais pas que l'exercice est stupide ni indigent. Qu'on ne puisse pas le faire à chaque texte traduit, soit. D'ailleurs, je ne suis pas certain que cela soit également intéressant selon les textes. Sur du Cicéron, avec nos élèves, on ne peut (selon moi) qu'essayer de leur faire améliorer la traduction. Je trouve alors qu'on perd un temps précieux qui pourrait être utilisé autrement. Mais pour des vers, je trouve l'exercice parfois très intéressant. Un exemple seulement: je suis (comme d'autres sans doute) dans la Phèdre de Sénèque, et j'ai construit une séance dont le but est d'approfondir le commentaire: je leur donne la traduction pour la scène de F. Dupont, et les questions que je pose doivent leur faire développer les interprétations implicites. J'ai trouvé ça plutôt stimulant.
Encore une fois, ce n'est absolument pas systématique, et ce qui est "exigé" à l'examen est déprimant.
- yranohHabitué du forum
Iphigénie a écrit:Non, on ne parle pas là d'intégration sociale mais de niveau scolaire: pour M. Ko c'est l'idée que le latin peut être utile aux élèves en grande difficulté pour les aider à mieux comprendre le français: il corrige les erreurs de parcours dans l'assimilation du français: grammaire, vocabulaire, etc. Je serais d'accord avec cette idée si on avait les moyens de faire des groupes de niveau. Mais quand on en est comme aujourd'hui à un seul groupe et même parfois qui regroupe plusieurs niveaux de classes et d'innombrables variations de niveaux par élève, c'est, à mon sens juste impossible.Je ne suis pas sûr d'avoir compris ce qu'était le latin thérapeutique. J'ai cru comprendre que c'était l'intérêt du latin pour aider à l'intégration sociale.
C'est vrai que l'adjectif aurait été particulièrement mal choisi.
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum