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notes - Max Weber, le Savant et le Politique, notes de lecture Empty Max Weber, le Savant et le Politique, notes de lecture

par Robin Mar 10 Juin 2014 - 17:23
Max Weber, Le savant et le politique, traduit de l'allemand par Julien Freund, révisé par E. Fleischmann et Eric de Dampierre, Préface de Raymond Aron.


"Celui qui est convaincu qu'il ne s'effondrera pas si le monde, jugé de son point de vue, est trop stupide ou trop mesquin pour mériter ce qu'il prétend lui offrir, et qui reste néanmoins capable de dire "quand même !", celui-là seul a la "vocation" de la politique." (Max Weber, Le métier et la vocation de l'homme politique, p. 221-222)

"Les choix auxquels est effectivement condamné l'homme politique, parce que la science est limitée, l'avenir imprévisible et que les valeurs sont, à courte échéance, contradictoires, ne sont pas démontrables. Mais la nécessité de choix historiques n'implique pas que la pensée soit suspendue à des décisions essentiellement irrationnelles et que l'existence s'accomplisse dans une liberté qui refuserait de se soumettre à la vérité." (Raymond Aron, Préface)



Le savant et le politique est la traduction en français de deux textes issus de conférences prononcées en 1917 et 1919 à l'université de Munich, Wissenschaft als Beruf et Politik als Beruf. Leur publication par Julien Freund en 1959, précédées d'une longue préface de Raymond Aron a beaucoup fait pour la réception française de l'auteur.

Les deux textes originels en allemand sont :

- La vocation de savant (Wissenschaft als Beruf), dans lequel Weber traite de l'épistémologie de la science, du jugement et du rapport aux valeurs.

- La vocation de politique (Politik als Beruf), dans lequel Weber traîte de l'action politique, de son fonctionnement, de sa légitimation, et donne sa célèbre définition de l'État.


Max Weber, né le 21 avril 1864 et mort le 14 juin 1920, est un économiste et sociologue allemand, originellement juriste. Il est l'un des fondateurs de la sociologie moderne. Outre son travail de recherche, Weber s'est engagé dans l'action politique. Il contribua notamment à la rédaction de la Constitution de la  République de Weimar en 1919.


Aux élèves :

En relation avec les notions d'Etat et de Droit, lire le début de "Le métier et la vocation de l'homme politique" ("Wissenschaft als Beruft") où figure la célèbre définition de l'Etat comme "seul détenteur de la violence légitime" et la non moins célèbre distinction des trois formes d'autorité : traditionnelle, charismatique et rationnelle (juridique).

A la fin de texte, Max Weber s'interroge sur les liens entre l'éthique et la politique et pose la fameuse distinction entre "éthique de conviction" et éthique de responsabilité" : l'homme politique ne saurait s'en tenir aux valeurs et aux idéaux à l'état pur, il doit aussi tenir compte de la réalité, des conditions réelles au sein desquelles s'exerce son action et de ses conséquences.

Notes de lecture :

"Nous entendrons uniquement par politique la direction du groupement politique que nous appelons aujourd'hui "Etat", ou l'influence que l'on exerce sous cette direction."

Weber cite une déclaration de Léon Trotski : "Tout Etat est fondé sur la force."

"Il faut concevoir l'Etat contemporain comme une communauté humaine qui, dans les limites d'un territoire déterminé revendique avec succès pour son propre compte le monopole de la violence physique légitime."

Max Weber définit la politique comme :

"L'ensemble des efforts que l'on fait en vue de participer au pouvoir ou d'influencer la répartition du pouvoir, soit entre les Etats, soit entre les divers groupes à l'intérieur d'un même Etat."

"L'Etat consiste en un rapport de domination de l'homme sur l'homme fondé sur le moyen de la violence légitime (considérée comme telle). L'Etat ne peut donc exister qu'à la condition que les hommes dominés se soumettent à l'autorité revendiquée chaque fois par les dominateurs. Les questions suivantes se posent alors : dans quelles conditions se soumettent-elles et pourquoi ? Sur quelles justifications internes et sur quels moyens externes, cette domination s'appuie-t-elle ?"

Les trois raisons internes (les raisons "externes" étant la peur, l'espoir et l'intérêt) qui justifient la domination, les trois fondements de la légitimité selon Max Weber sont :

1) La tradition : l'autorité est fondée sur le passé, sur ce qui s'est fait "depuis toujours".

2) Le charisme : l'autorité est fondée sur la grâce personnelle et extraordinaire d'un individu.

3) La légalité rationnelle : l'autorité est fondée sur l'obéissance qui s'acquitte des obligations qui s'imposent en vertu de la "légalité", en vertu de la croyance en la validité d'un statut légal et d'une "compétence" positive fondée sur des règles établies rationnellement.

Max Weber précise que ces trois types d'autorité n'existent pas à l'état pur.

Il analyse ensuite l'évolution de l'Etat sous l'angle de "l'Etat-major administratif" et des "moyens matériels de gestion", jusqu'à l'Etat bureaucratique moderne qu'il définit comme "un groupement de domination de caractère institutionnel qui a cherché (avec succès) à monopoliser dans les limites d'un territoire, la violence physique légitime comme moyen de domination, et qui, dans ce but, a réuni dans les mains des dirigeants les moyens matériels de gestion."

Il se propose ensuite de comprendre l'apparition de "l'homme politique professionnel", distinguant ceux dont la politique est l'activité principale de ceux dont elle est l'activité secondaire, ceux qui vivent de la politique et ceux qui vivent pour la politique, en précisant que cette opposition n'a rien d'exclusif.

"Dans la mesure où l'homme politique doit, dans des conditions normales, être économiquement indépendant des revenus que l'activité politique pourrait lui procurer, certaines professions ou états sont plus favorables  ou moins favorables à l'exercice de responsabilités politiques."

Cet état de fait favorise le rentier et l'avocat, mais défavorise l'ouvrier, l'entrepreneur industriel ou agricole et le médecin.

"Le fait qu'un Etat ou un Parti vivent exclusivement pour la politique et non de la politique signifie nécessairement que les couches dirigeantes se recrutent de façon ploutocratiques." (de kratos = pouvoir et ploutos = richesse).

ploutocratie : gouvernement où le pouvoir appartient aux classes riches.

"(...) Les hommes politiques professionnels ne sont pas toujours directement contraints de réclamer un dédommagement pour leurs services politiques, alors que l'individu dépourvu de fortune est obligé de prendre cet aspect en considération."

"On sait par expérience que le souci de sa "sécurité" économique est précisément - de façon consciente ou non - le point cardinal dans l'orientation de la vie d'un homme qui possède déjà une fortune. L'idéalisme politique que n'arrête aucune considération ni aucun principe se rencontre, sinon exclusivement, chez les individus qui, à cause de leur pauvreté, restent en marge des couches sociales qui ont intérêt à conserver l'ordre économique d'une société donnée."

Le poids des nécessités de la vie matérielle entraînent le fait que "les luttes partisanes ne sont pas des buts objectifs, mais elles sont aussi et surtout des rivalités pour contrôler la distribution des emplois."

"A cette tendance s'oppose cependant le développement de la fonction publique moderne qui exige de nos jours un corps de travailleurs intellectuels spécialisés, hautement qualifiés, préparés à leur tâche professionnelle par une formation de plusieurs années et animés par un honneur corporatif très développé."

Sans ce sentiment de l'honneur corporatif, la société serait dominée par la corruption.

D'impérieuses exigences techniques ont conduit à cette évolution. On la voit déjà à l'œuvre dans la délégation par le Prince de la gestion financière à un spécialiste de la question, de la technique militaire à un officier de carrière et de la procédure judiciaire à un juriste. "Dans ces trois domaines de la finance, de l'armée et de la justice, les fonctionnaire de carrière triomphèrent définitivement."

Max Weber évoque ensuite divers figures d'hommes politiques professionnels à travers le temps : les clercs, les lettrés, la noblesse de cour, le patriciat (institution spécifiquement anglaise), les juristes.

Il souligne l'importance du Droit romain dans l'Histoire politique occidentale, ce qui explique le rôle important joué par les avocats au moment de la Révolution française et dans vie politique en général.

Max Weber met en évidence l'incompatibilité entre le statut de fonctionnaire et la politique : "Le fonctionnaire ne doit pas faire de politique : il doit administrer de façon non partisane (...) Les fonctionnaires qui ont moralement un sens très élevé de leur métier sont nécessairement de mauvais hommes politiques."

Il consacre ensuite plusieurs pages à ces figures incontournables de la vie politique que sont le démagogue - le mot n'a pas un sens péjoratif sous la plume de Max Weber qui se réfère à la figure du "dictateur" dans la République romaine et du "Législateur" athénien (Périclès) - , le fonctionnaire de Parti politique et le journaliste.

Aucune mesure n'a réussi jusqu'à présent à limiter la domination des politiciens professionnels. L'existence de chefs et de partisans actifs et l'existence d'un corps électoral passif constituent des conditions indispensables à la vie de tout Parti politique.

Max Weber expose ensuite le fonctionnement des différents systèmes politiques en Angleterre, en Allemagne et aux Etats-Unis.

Dans la dernière partie du texte, Max Weber s'interroge sur le lien entre la politique et l'éthique et pose la fameuse distinction entre "éthique de conviction" et "éthique de responsabilité" : l'homme politique ne peut pas s'en tenir aux "valeurs" pures, il doit aussi tenir compte de la réalité au sein de laquelle s'exerce l'action politique et des conséquences de cette action :

"Il est indispensable que nous nous rendions clairement compte du fait suivant : toute activité orientée selon l'éthique peut être subordonnée à deux maximes totalement différentes et irréductiblement opposées. Elle peut s'orienter selon l'éthique de la responsabilité (Verantwortungsethisch) ou selon l'éthique de la conviction (Gesinnungsethisch).

Cela ne veut pas dire que l'éthique de conviction est identique à l'absence de responsabilité et l'éthique de responsabilité à l'absence de conviction. Il n'en est évidemment pas question. Toutefois, il y a une opposition abyssale entre l'attitude de celui qui agit selon les maximes de l'éthique de conviction - dans un langage religieux nous dirions : "Le chrétien fait son devoir et en ce qui concerne le résultat de l'action il s'en remet à Dieu.", - et l'attitude de celui qui agit selon l'éthique de responsabilité qui dit : "Nous devons répondre des conséquences prévisibles de nos actes."
Paratge
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par Paratge Mar 10 Juin 2014 - 17:34
Merci Frère Tuck !Very Happy 
Cela me rappelle un petit débat que nous eûmes sur institution et communauté. Very Happy 
Robin
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par Robin Mar 10 Juin 2014 - 17:44
Paratge a écrit:Merci Frère Tuck !Very Happy 
Cela me rappelle un petit débat que nous eûmes sur institution et communauté. Very Happy 

La différence entre une institution et une communauté, n'est-ce pas ce qui sépare la triste cour du prince Jean du groupe des joyeux compagnons de Robin dans la forêt de Nottingham ?  notes - Max Weber, le Savant et le Politique, notes de lecture 2252222100 
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