Octobre 2013 : Assises de l'éducation prioritaire.

Le ministère lance officiellement les Assises de l'Education prioritaire :
http://eduscol.education.fr/cid73627/assises-de-l-education-prioritaire.html

L'éducation prioritaire, ce devrait être celle que donnent les parents, non?
Celle qui permet d'instruire efficacement ensuite.

Arthur RIMBAUD   (1854-1891)

Les assis

Noirs de loupes, grêlés, les yeux cerclés de bagues
Vertes, leurs doigts boulus crispés à leurs fémurs,
Le sinciput plaqué de hargnosités vagues
Comme les floraisons lépreuses des vieux murs ;

Ils ont greffé dans des amours épileptiques
Leur fantasque ossature aux grands squelettes noirs
De leurs chaises ; leurs pieds aux barreaux rachitiques
S'entrelacent pour les matins et pour les soirs !

Ces vieillards ont toujours fait tresse avec leurs sièges,
Sentant les soleils vifs percaliser leur peau,
Ou, les yeux à la vitre où se fanent les neiges,
Tremblant du tremblement douloureux du crapaud.

Et les Sièges leur ont des bontés : culottée
De brun, la paille cède aux angles de leurs reins ;
L'âme des vieux soleils s'allume, emmaillotée
Dans ces tresses d'épis où fermentaient les grains.

Et les Assis, genoux aux dents, verts pianistes,
Les dix doigts sous leur siège aux rumeurs de tambour,
S'écoutent clapoter des barcarolles tristes,
Et leurs caboches vont dans des roulis d'amour.

- Oh ! ne les faites pas lever ! C'est le naufrage...
Ils surgissent, grondant comme des chats giflés,
Ouvrant lentement leurs omoplates, ô rage !
Tout leur pantalon bouffe à leurs reins boursouflés.

Et vous les écoutez, cognant leurs têtes chauves,
Aux murs sombres, plaquant et plaquant leurs pieds tors,
Et leurs boutons d'habit sont des prunelles fauves
Qui vous accrochent l'oeil du fond des corridors !

Puis ils ont une main invisible qui tue :
Au retour, leur regard filtre ce venin noir
Qui charge l'oeil souffrant de la chienne battue,
Et vous suez, pris dans un atroce entonnoir.

Rassis, les poings noyés dans des manchettes sales,
Ils songent à ceux-là qui les ont fait lever
Et, de l'aurore au soir, des grappes d'amygdales
Sous leurs mentons chétifs s'agitent à crever.

Quand l'austère sommeil a baissé leurs visières,
Ils rêvent sur leur bras de sièges fécondés,
De vrais petits amours de chaises en lisière
Par lesquelles de fiers bureaux seront bordés ;

Des fleurs d'encre crachant des pollens en virgule
Les bercent, le long des calices accroupis
Tels qu'au fil des glaïeuls le vol des libellules
- Et leur membre s'agace à des barbes d'épis.

Ah ben, on va y avoir droit.
J'ai pas tout compris mais si j'ai bien suivi, ce sera une grande réunion avec nous tous, des enseignants d'élémentaire et...
Plus d'infos demain, a priori.

Nous avons préparé ces assises - réunion demain chez nous - en heure de vie syndicale.

Nous refusons les questions qui nous sont soumises et qui sont libellées de manière à orienter nos réponses : on essaie de nous faire plébisciter l'interdisciplinarité et le travail en équipe dont les vertus sont posées comme acquises.

Je rappelle que la langue française qui doit être étudiée dans toutes les disciplines, c'est l'argument qui a déjà servi pour réduire les horaires de Français au moment de la création des IDD, celui qui a encore servi pour abaisser les horaires de Français à 3h par semaine dans les "écoles du socle" (oui, 3 heure par semaine, chers collègues, on peut tomber encore plus bas. Remontez sur votre chaise, SVP, j'ai pas fini...), et celui que défend l'UNSA, et qui semble avoir les faveurs du gouvernement. C'est peut-être le moment où jamais de ce bouger les fesses pour éviter une catastrophe.

Bref, nous boycottons le questionnaire tel qu'il nous est soumis et nous avons rédigé collectivement une motion que je vous colle ci-dessous.

Pas de copyright : diffusez autant que vous voulez, proposez à vos établissements de faire de même, reprenez le texte, aménagez-le, n'hésitez pas, bien au contraire.

On nous dit que les moyens investis dans les ZEP ne se traduisent pas par de meilleurs résultats, au contraire. On a alors envie de demander : Quels moyens ? Certes, il y a (un peu) moins d’élèves dans les classes de ZEP qu’ailleurs. Mais à part ça, que se passe-t-il depuis 15 ans ? On a diminué les horaires de Français, de Mathématiques et d’Histoire-Géographie. On a supprimé presque tous les demi-groupes qui permettaient d’individualiser un peu le travail et de conduire certaines tâches dans de bonnes conditions. Et pendant ce temps-là, effectivement, les résultats ont baissé régulièrement. Comme s’il y avait une corrélation entre le temps consacré à l’étude de certaines disciplines et la maîtrise de ces compétences. Une possibilité à ne pas écarter trop vite.
On a aussi fermé les RASED, les SEGPA, les Classes d’accueil et toutes les structures alternatives au collège unique, qui permettaient une prise en charge adaptée pour les élèves les plus en difficulté. Et on a déversé ces élèves en grande difficulté dans le système général, le plus souvent sans accompagnement d’aucune sorte. Évidemment, tout ça grève un peu plus les difficultés des ZEP et plombe les chiffres. Mais ces élèves, nous sommes les seuls à les accueillir. Combien de non-francophones et de SEGPA à Henri IV ? C’est chez nous qu’ils sont, et nous mettons tout en œuvre pour travailler au mieux avec eux. Mais il ne faut peut-être pas s’étonner si nous n’en faisons pas l’élite de la nation. Les ZEP ont de moins bons résultats aux évaluations que les autres établissements ? Sans blague ! Ça démontre quoi, à part le fait que nous n’avons pas du tout le même public ?

Qui dit public différent dit besoins différents.

On nous dit qu’il n’y aurait pas de corrélation entre le nombre d’élèves par classe, ou entre l’existence de groupes allégés et les résultats des élèves. Certes, pour les élèves les plus en difficulté, les causes de l’échec sont souvent multifactorielles, sociales, familiales au moins autant que scolaire. Sur ces causes, l’école n’a pas de prise. Elle ne résout donc pas ces difficultés. Mais ce n’est pas la moindre de ses réussites que de parvenir à conduire avec ces élèves au moins un travail éducatif par le suivi qu’elle met en place. Sans effectifs allégés, ce suivi deviendrait impossible et ces élèves abandonnés à leurs difficultés, noyés dans le nombre, n’auraient d’autre issue que la violence.

À ce propos, il nous paraît superfétatoire, voire méprisant de nous enjoindre à chercher à mettre en place « une école bienveillante », comme si nous avions besoin qu’on nous y exhorte pour le faire. Nous tenons à dire que la bienveillance est une qualité indispensable pour faire face au public souvent explosif des ZEP et que le professeur qui en serait dépourvu ne ferait pas long feu en classe. Inutile d’enfoncer des portes ouvertes. Mais utile de reconnaître ce qui se fait déjà.

On nous demande de réfléchir au rapport entre éducation et enseignement. Le postulat – étrange – semble opposer approches éducatives et pédagogiques. Nous voulons rappeler qu’un enfant qui se voit progresser est heureux d’apprendre et le fait assez volontiers – en classe au moins. À l’inverse, un élève complètement perdu a tôt fait de se dissiper. Si nous voulons agir sur l’éducatif, il faut commencer par s’atteler au pédagogique, nous attacher à mieux transmettre les connaissances.

On nous demande encore « comment construire une école qui permet aux élèves et aux personnels de travailler dans un climat serein et apaisé ». Nous rappellerons un précepte de base de la psychologie : pour réussir une tâche, quelle qu’elle soit, une personne a besoin de se sentir compétente. Or, selon un rapport du Haut Conseil de l’Éducation publié en 2007, près de la moitié des enfants sortent de l’école primaire sans maîtriser suffisamment la lecture ni leur langue maternelle pour suivre une scolarité efficace au collège.[url=#_ftn1][1][/url] Ce sont des chiffres nationaux. Nous vous laissons imaginer la proportion des élèves ne maîtrisant ni les bases de la lecture ni celles du calcul dans des ZEP comme la nôtre. Comment un élève qui ne sait pas lire en 6^e, qui ne peut donc réussir dans aucune discipline, qui se sent déjà en échec depuis des années, comment cet élève peut-il se sentir compétent, avoir un sentiment de maîtrise de sa scolarité et confiance en l’école et ce qu’elle lui réserve ? Comment peut-il être « serein » ? Comment l’adulte en face de lui, qui n’a plus ni le temps ni la possibilité, eu égard aux programmes, de lui apprendre à lire, peut-il ne pas se sentir impuissant ? Parlons vrai : au collège, il n’est plus possible d’aider des enfants qui peinent encore à lire et à écrire. Si l’on veut mettre fin aux sorties du système sans qualification, il faut commencer par redonner à l’école primaire les moyens de faire son travail correctement : arrêter de multiplier les disciplines (anglais, informatique, développement durable…) au détriment du temps passé à développer le logos, qui détermine toute la capacité à raisonner. Rappelons qu’en 1976, un élève qui sortait du collège avait reçu 2800 heures d'enseignement du français depuis son entrée au cours préparatoire. En 2004, il en a reçu 800 de moins. Il a donc perdu l'équivalent de deux années et demie.[url=#_ftn2][2][/url]

On ressasse comme un mantra la nécessité de mettre l’accent sur « la maîtrise de la langue » et en particulier de la langue écrite. Mais en même temps, on diminue constamment le temps dévolu à l’étude de cette langue. Comment s’étonner, dès lors, que les résultats de la France dans les enquêtes internationales soient en chute libre, en particulier dans des zones où la langue est mal maîtrisée par les familles ? Car c’est aussi ça, la réalité des ZEP, de la nôtre en particulier. Informez-vous sur le nombre d’enfants qui ne parlent pas français à la maison – ou un français très pauvre et souvent fautif. C’est en Primaire qu’il faut mettre le paquet sur la lecture et la maîtrise de la langue si l’on veut changer quoi que ce soit à la scolarité des élèves de ZEP. Je cite J.-P. Terrail qui déclarait en 2012 : « les études montrent que tous les enfants, à partir du moment où ils ont acquis le langage, disposent des moyens intellectuels nécessaires pour entrer dans la culture écrite, et s’engager dans un processus qui débouche sur un bac général. »[url=#_ftn3][3][/url]


On connaît le principal levier de la réussite des élèves : la maîtrise de la langue, en particulier de la lecture. La suite est aussi, ne vous ne déplaise, question de moyens : on n’apprend pas à lire ni à écrire à 30 par classe – pas en ZEP en tout cas.  On ne guide pas efficacement les élèves dans l’apprentissage de la rédaction quand ils sont 30 par classe et qu’on a une heure pour travailler un brouillon (2 minute par élève), ni même 25 (2 minutes 30 s.). La solution passe non exclusivement mais nécessairement par un renforcement des horaires de Français en Primaire et des demi-groupes au collège.

Un nombre limité d’élèves par classe est aussi indispensable pour que les classes restent gérables. Créer des classes à 29 élèves ou davantage avec la population que nous avons, où les difficultés scolaires se traduisent souvent par des dérives du comportement, ce serait créer des classes explosives, décourager les enseignants et susciter un turn-over semblable à celui qui existe en Seine-Saint-Denis, qui prive les ZEP d’équipes stables et expérimentées.

Enfin, nous remarquons que les questions soumises aux groupes de travail sont biaisées, orientant délibérément la teneur des propositions. L’interdisciplinarité y est présentée comme une évidence, voire une panacée, et on nous demande de réfléchir aux moyens de « rendre [le travail en équipe] indispensable ». Nous tenons à réaffirmer la liberté pédagogique et le fait que non, le travail en équipe n’a rien d’indispensable. L’injonction coercitive au travail en équipe ne peut produire que de l’uniformité – serait-ce là le but ? – quand l’enseignement se nourrit de particularités, d’inventivité, d’audaces permanentes, qui sont souvent le fait d’individus. Quant au travail interdisciplinaire, il peut être un réel enrichissement s’il est conduit en plus des horaires disciplinaires. Mais s’il prétend s’y substituer, l’expérience des IDD a montré qu’il met les élèves davantage en échec en les privant d’un travail méthodique, progressif et structuré dans les apprentissages fondamentaux. Rappelons qu’un tel travail ne peut être conduit que par des spécialistes ayant du recul sur leur discipline. Une excellente maîtrise disciplinaire est, contrairement à ce que l’on imagine souvent, d’autant plus nécessaire en ZEP que les élèves en difficulté nous obligent à multiplier les stratégies explicatives, à innover en tenant compte des enjeux de chaque notion. Enfin, le travail interdisciplinaire nécessite beaucoup de concertation et ne peut être envisagé que si ce temps de concertation est inclus dans le service des enseignants qui ont déjà vu leurs tâches et leur temps de travail démultiplié ces dernières années. Bref, quelles que soient les solutions envisagées, il faudra mettre des moyens en face.

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[url=#_ftnref2][2][/url] Source : http://www.sauv.net/horaires.php
[url=#_ftnref3][3][/url] Interview donnée dans Télérama n°3270, du 15 au 21 septembre 2012

Bon texte! vous allez me dire, à force de dire tout ça, on a eu le temps de soigner la formulation...

De toute façon, toutes ces «assises» et ces «consultations» souffrent d'emblée d'un déficit de crédibilité: qui peut croire à la synthèse de 800 000 expertises? Ou, d'ailleurs, de 80? Et ce, sans même jeter un regard sur la manière dont ces consultations sont en général formulées et encadrées ─ regard qui ne peut guère avoir d'autre effet que de rendre plus dubitatif encore.

V.Marchais,  

V.Marchais a écrit:
On connaît le principal levier de la réussite des élèves : la maîtrise de la langue, en particulier de la lecture. La suite est aussi, en vous ne déplaise, question de moyens : on n’apprend pas à lire ni à écrire à 30 par classe – pas en ZEP en tout cas.  On ne guide pas efficacement les élèves dans l’apprentissage de la rédaction quand ils sont 30 par classe et qu’on a une heure pour travailler un brouillon (2 minute par élève), ni même 25 (2 minutes 30 s.). La solution passe non exclusivement mais nécessairement par un renforcement des horaires de Français en Primaire et des demi-groupes au collège.

Juste une petite question: ce n'est pas plutôt "ne vous en déplaise"?

Oui, merci.

J'ai repéré quelques coquilles que j'essaie de corriger. N'hésitez pas à me signaler celles qui m'échapperaient.

Très beau texte.
Dans le groupe dans lequel j'étais, nous avons également refusé de suivre l'ordre du jour qui nous était demandé mais nous n'avons rien rédigé. Je vais diffuser votre texte, ça fera peut-être réagir.

Je suis profondément déprimée.

Les instits du secteur ont massivement joué le jeu du questionnaire, formulant les réponses attendues, plébiscitant "le travail du Français dans toutes les disciplines", "il faut qu'on soit davantage bienveillant, les élèves ont une estime d'eux-mêmes tellement misérables, il faut qu'on se remette en cause et qu'on travaille sur le statut de l'erreur", etc.

C'est formidable.

On se prépare une réforme effrayante, et en plus, ce sera avec la caution des profs.

Désolée, mais là, y a plus de politiquement correct, je me dis que mes collègues sont vraiment trop cons.
Cons de ne pas comprendre les finalités de ces "assises".
Cons de ne pas être capables de lire les présupposés derrière les questions.
Cons de penser qu'un élève qui ne sait pas lire aura une meilleure estime de lui-même parce qu'on va lui dire que son erreur est intéressante et qu'on l'aime bien quand même.

J'ai envie de vomir devant un tel déballage de bêtise.

Y a plus qu'à attendre la nouvelle vague pédagole, maintenant. Je n'ai plus de raison de douter qu'elle sera accueillie avec enthousiasme.

Dans mon groupe, mercredi il y a une semaine, nous avons travaillé sur le français: comment le travailler à l'oral et à l'écrit, etc.

Pour le coup, nous avons été très critiques, unanimement. Nous avons tous réaffirmé le besoin de renforcer les horaires de français au primaire et au collège, de ne pas valoriser que l'effort et les "idées", mais de rester intraitables sur les exigences de syntaxe et d'orthographe. Nous avons insisté sur le fait que l'élève devait être mené progressivement à cesser de partir de son expérience personnelle pour entrer dans le vécu collectif de l'humanité à travers la lecture, et que c'était essentiel de lui apprendre à regarder autre chose que son nombril en rédaction et dans la littérature.
Les collègues de primaire et nous, profs de lettres du collège, étions désespérés…et le fait que les élèves non francophones sont de plus en plus nombreux n'y était pas pour rien.

Merci, Audrey, pour ce témoignage. J'espère qu'il y aura eu des groupes plus critiques que le nôtre, sinon, les ZEP et le Français sont morts.

Oh ! purée ! j'avais dit que je t'appelais...

V.Marchais a écrit:Merci, Audrey, pour ce témoignage. J'espère qu'il y aura eu des groupes plus critiques que le nôtre, sinon, les ZEP et le Français sont morts.

Oh ! purée ! j'avais dit que je t'appelais...

Je n'en suis pas sûre quand je vois les âneries dites dans ma ville vendredi dernier.

Ceci dit, quoi qu'on nous ait demandé, chaque groupe a fait remonter la nécessité de diminuer drastiquement les effectifs des classes. Mais c'est bien la seule chose positive qui ait été dite.

Une collègue a même dit qu'il ne fallait surtout pas augmenter l'indemnité ZEP parce que sinon il y aurait des gens qui demanderaient les postes pour le fric.   Ben voyons.

Bref, aux assises, je me suis assise.

Nous, on a été sages ou presque, parce qu'on a répondu à ce questionnaire stupide, tout en sachant qu'absolument personne ne lirait notre prose (et pourtant, on est considéré comme un réseau en réussite, c'est dire).
Les cinq ateliers ont pris en charge des questions différentes... et ont fourni les mêmes réponses :
- "plus de moyens", mon oeil !
- "moins d'élèves dans les classe", mon oeil !
- "travail en équipe", mon c..!
- "enseigner explicitement des compétences" (sic), allez vous faire f...
- on veut : une assistante sociale, une cop, une infirmière, un orthophoniste, du matériel, des êtres humains, plus de sous et moins de paperasse !
Le rectorat va encore nous dire qu'on les emm...  

V.Marchais a écrit:Merci, Audrey, pour ce témoignage. J'espère qu'il y aura eu des groupes plus critiques que le nôtre, sinon, les ZEP et le Français sont morts.

La plénière aura lieu mardi prochain, mais je doute fort d'y voir apparaître des critiques : nous avons été "invités" à réfléchir en groupes au préalable, des groupes constitués en amont par l'administration, chaque groupe devant travailler sur une partie des questions seulement. Chaque groupe avec un rapporteur déjà désigné, rapporteur qui a fait tout son possible pour orienter les réponses - à des questions qui l'étaient déjà elles-mêmes - pour que ressortent "aussi" les points positifs. Deux râleurs au maximum par groupe, je suis prête à parier qu'il n'en restera rien dans la synthèse.

J'ai eu "mes" assises aujourd'hui, et chez moi aussi ça a été assez déprimant... Ou comment les profs se tirent une balle de pied en donnant leur assentiment à la dénaturation du métier qui se profile, dans un contexte où ce qui est en jeu c'est l'éradication pure et simple des zep et la dérégulation républicaine.
Je me suis franchement engueulée avec un "collègue" d'EPS (mais peut-on encore parler de collègues quand on des conceptions de l'enseignement aussi opposées) qui a dit que le problème venait du caractère disciplinaire des capes, que de toute façon on était des "éducateurs", ce à quoi j'ai violemment réagi en disant que moi j'étais "enseignante" et n'étais éducatrice que par finalité seconde, que ce n'est certainement pas ma conception du métier (il m'a d'ailleurs répondu que j'allais au-devant de désillusions et que depuis la loi Jospin de 1989 j'étais dans l'illégalité de penser que notre mission n'était pas d'éduquer et de faire de la citoyenneté       ). Ce même collègue tenait aussi à ce qu'on fasse plus de temps de concertation (ce que j'ai appelé la réunionite) et était opposé au fait qu'il y a aujourd'hui plus d'illettrisme et que ce peut être mis en lien avec le fait que les horaires disciplinaires ont baissé dans les matières fondamentales, et notamment en français. En clair, il soutient le fait qu'il y ait peu d'heures de cours (danlintérédezenfants, "parce que ça sert à rien de donner des épinards à des enfants qui aiment pas ça" sic, que les activités périscolaires à l'école c'est très bien, que quand j'ai dit que le problème vient sans doute plutôt des programmes/méthodes et des horaires disciplinaires dans le primaire, il a cherché à caricaturer ma pensée en disant que j'attaquais mes collègues instits qui étaient présents ce matin...). Dans le même groupe, j'étais assise à côté d'un directeur d'école qui défendu les "postes de la gauche"    et qui trouvait la réforme des rythmes scolaires "très bien pour les élèves", qu'on ne leur supprimait rien et qu'ils n'étaient pas moins fatigués...
Bref, je me demande si ce matin j'étais dans un sous-marin du sgen/snuip ou si c'est ce que pense la plupart des collègues... Et si l'éduknat' évolue comme le souhaitent ces "chers" collègues, moi qui suis encore jeune et profondément attachée au savoir, à l'idée que l'école doit être un lieu d'instruction (et pas un lieu de vie et de prêchi-prêcha citoyennisant) et à l'égalité républicaine qui s'adosse à des exigences identiques pour tous, ben je me dis que vraiment d'ici quelques années je me tire...  

Bref, j'aurais pu poster dans le fil "mes collègues sont des c..."

J'attends lundi après midi avec impatience.  

En fait, je pense de plus en plus que nos collègues sont majoritairement cons et que c'est pour ça qu'on en est là.

Quand j'ai émis l'idée qu'il faudrait peut-être interroger le présupposé de questions telles que "Quels partenariats établir avec les entreprises ?" (est-ce bien notre rôle ?) ou "Comment rendre incontournable le travail en équipe" (et d'abord, pourquoi faudrait-il le rendre incontournable ?), je me suis fais renvoyer dans les cordes sur le mode ironique : "Ben si il faut poser des questions sur les questions avant de répondre aux questions, on a pas fini..."

Et là, j'ai juste eu envie de dire : "Ça s'appelle penser, cocotte, mais si ça te fatigue, tu peux t'abstenir. On peut vivre con et content."

Pétard, le jour où on leur demande qui il faut zigouiller en premier, les juifs ou les tziganes, il répondent sans broncher ?

Tiens, j'ai eu droit à une réponse du même tonneau par un autre collègue d'EPS (on va croire que je leur en veux... bon, un peu peut-être... en tout cas, disons qu'on sent bien la déformation iufiemme qu'ils ont subie durant leur cursus et capeps). Bref, au moment où j'ai moi aussi attaqué le présupposé des questions, le fait que l'ensemble même de cette grand'messe est une mascarade et qu'on fait semblant de nous concerter pour mieux nous imposer des réponses déjà écrites, et qu'il faudrait faire une action très forte si on nous retirait le peu de moyens zep qu'on nous laisse encore, le sigle zep même (parce que c'est ce qui est en jeu chez nous, alors que l'on a 95 % d'élèves de csp -- et d'origine étrangère, de nouveaux arrivants etc....), ce collègue donc me sort : "oui mais avant de parler de faire grève etc, on pourrait peut-être essayer de jouer le jeu non?"...
Comme je l'ai écrit plus haut, je suis ressortie (encore plus) dégoûtée de mon métier après ces "assises". Finalement, ce sont pas les gamins qui me dégoûtent, je les prends comme ils sont, j'essaie de garder les mêmes exigences avec eux que j'aurais avec mes propres filles, avec leurs boulets et leur paresse (largement hérités de l'institution, même si évidemment ce matin c'est parti dans le tout-socialisant...), que l'institution et son mélange de cynisme et de démagogie, les ptis chefaillons carriéristes et les collègues bénis-oui-oui donc...

Dinosaura, c'est effrayant...Je m'attendais justement à avoir ce genre de choses et à me barrer en claquant la porte et finalement, j'ai été bien soulagée d'être avec des gens qui remettaient en cause le côté "éducateur" qu'on nous demandait d'avoir, qui remettaient en cause la FCPE et l'ingérence des parents, et qui prônaient un retour des horaires de français et de mathématiques en supprimant les à-côtés à la c** (anglais etc.) qui dispersent.

(Et comme de toute façon, on a surtout fait un réquisitoire local...)

A propos de la FCPE, mon super-collègue d'EPS (le premier susnommé) a justement loué les attendus éducatifs de cette fédération quand j'ai osé critiquer les supposés bienfaits de la réforme des rythmes scolaires.

Ça me rassure qu'ailleurs d'autres sons de cloches, plus proches de mes idées, existent...