- RobinFidèle du forum
Sigmund Freud, Le Délire et les Rêves dans la Gradiva de W. Jensen, Presses universitaires de France, oeuvres complètes.
Sigmund Freud, Délire et rêves dans la "Gradiva" de Jensen, Der Wahn und die Traüme in W. Jensens "Gradiva", traduit de l'allemand par Marie Bonaparte et précédé du texte de Jensen traduit par E. Zak et G. Sadoul, NRF Gallimard
Ce livre publié en 1903 sous le titre Der Wahn und die Traüme in W. Jensens Gradiva, comporte deux parties : la première reproduit une nouvelle de l'écrivain Wilhelm Jansen, la seconde est l'analyse qu'en fait Freud, appliquant, pour la première fois, les outils et les concepts de la psychanalyse à une œuvre d'art (en l'occurrence une œuvre littéraire), comme il le fera plus tard à une œuvre picturale : la vierge, l'enfant Jésus et sainte Anne de Léonard de Vinci (Un souvenir d'enfance de Léonard de Vinci) : le rêve comme voie royale conduisant à l'inconscient et comme réalisation d'un désir, la confusion entre le réel, le symbolique et l'imaginaire dans le délire, le fétichisme, le refoulement, et le retour du refoulé, l'oubli, l'importance et le rôle des souvenirs d'enfance.
Voici le résumé que fait Freud du point de départ de la nouvelle de Jensen : "Un jeune archéologue, Norbert Hanold, a découvert dans une collection d'antiques, à Rome, un bas-relief lui ayant tellement plu qu'il est heureux d'en obtenir un excellent moulage, moulage qu'il peut suspendre en son cabinet d'études, dans une petite ville universitaire allemande, et étudier à loisir. Cette image représente une jeune fille dans tout l'épanouissement de la jeunesse ; elle marche et relève un peu sa robe à plis nombreux, de telle sorte que se voient les pieds chaussés de sandales. L'un des pieds repose à plat sur le sol : l'autre, le quittant déjà, le frôle à peine du bout des orteils, tandis que la semelle et le talon s'élèvent presque perpendiculaires. Cette démarche inusitée et d'une grâce si particulière avait, sans doute, attiré l'attention de l'artiste et fascine à présent à des siècles de distance, les regards de notre archéologue. (Gallimard, coll. Idées, p. 130)
L'intérêt du héros de ce récit pour ce bas-relief constitue le fait psychologique fondamental du petit roman (...) Il donne un nom à cette jeune fille surprise dans sa marche : Gradiva, féminisation de Gradivus, surnom du dieu Mars, c'est-à-dire celle qui s'avance..."
La nuit suivante, il rêve qu'il voyage dans le temps et rencontre la jeune fille marchant à travers Pompéi tandis que le Vésuve est en éruption en 79 apr. J.-C.. Profondément perturbé par ce rêve, il décide de se rendre à Pompéi, où il fera une rencontre inattendue.
Freud montre que la nouvelle est le compte-rendu d'un délire, mais aussi celui d'une véritable cure psychanalytique, bien que l'auteur n'ait jamais vraiment appartenu au mouvement psychanalytique, ni souhaité collaborer avec Freud.
Cette réticence de Jensen rend sa nouvelle d'autant plus mystérieuse qu'on y découvre noir sur blanc de nombreux thèmes psychanalytiques et en particulier le travail linguistique de déplacement du signifié sous le signifiant que Freud met en évidence dans l'Interprétation des rêves (la Traumdeutung) : "Nous avions supposé que l'origine grecque de la fabuleuse Gradiva (celle qui resplendit en marchant) était un vague écho du nom grec de Zoé (Zoé = la Vie en grec est le prénom de la jeune fille), mais nous n'avions pas osé aborder le nom de Gradiva, nous l'avions laissé n'être qu'une libre création de l'imagination de Norbert Hanold. Et voyez, justement ce nom se trouve être un dérivé, la traduction même du nom de famille de l'amie d'enfance soi-disant oubliée, et dont il avait refoulé le vocable (Bertgang).
Bien que le lecteur hésite sans cesse (mais justement pas jusqu'au bout) entre les deux interprétations possibles chères à Todorov (rationnelle et surnaturelle), La nouvelle ne relève pas à proprement parler du fantastique, comme la Spirite de Théophile Gautier. La dimension fantastique est uniquement dans l'esprit du héros et non dans une surnaturalité qui viendrait croiser la réalité. Le roman se rapproche donc, bien qu'il n'y ait ni crime, ni criminel, à moins de considérer que Norbert a tué en lui le souvenir de Zoé Bertgang, de ces énigmes policières dont l'apparence fantastique recouvre une explication rationnelle.
On comprend donc, en lisant cette nouvelle ce qui a passionné Freud : l'idée, en complet décalage avec la psychiatrie de l'époque, que les manifestations psychiques les plus aberrantes, les plus incompréhensibles, les plus manifestement contraires à toute explication rationnelle : les rêves et le délire de Norbert, obéissent à une causalité latente et relèvent d'une "herméneutique".
Sigmund Freud, Délire et rêves dans la "Gradiva" de Jensen, Der Wahn und die Traüme in W. Jensens "Gradiva", traduit de l'allemand par Marie Bonaparte et précédé du texte de Jensen traduit par E. Zak et G. Sadoul, NRF Gallimard
Ce livre publié en 1903 sous le titre Der Wahn und die Traüme in W. Jensens Gradiva, comporte deux parties : la première reproduit une nouvelle de l'écrivain Wilhelm Jansen, la seconde est l'analyse qu'en fait Freud, appliquant, pour la première fois, les outils et les concepts de la psychanalyse à une œuvre d'art (en l'occurrence une œuvre littéraire), comme il le fera plus tard à une œuvre picturale : la vierge, l'enfant Jésus et sainte Anne de Léonard de Vinci (Un souvenir d'enfance de Léonard de Vinci) : le rêve comme voie royale conduisant à l'inconscient et comme réalisation d'un désir, la confusion entre le réel, le symbolique et l'imaginaire dans le délire, le fétichisme, le refoulement, et le retour du refoulé, l'oubli, l'importance et le rôle des souvenirs d'enfance.
Voici le résumé que fait Freud du point de départ de la nouvelle de Jensen : "Un jeune archéologue, Norbert Hanold, a découvert dans une collection d'antiques, à Rome, un bas-relief lui ayant tellement plu qu'il est heureux d'en obtenir un excellent moulage, moulage qu'il peut suspendre en son cabinet d'études, dans une petite ville universitaire allemande, et étudier à loisir. Cette image représente une jeune fille dans tout l'épanouissement de la jeunesse ; elle marche et relève un peu sa robe à plis nombreux, de telle sorte que se voient les pieds chaussés de sandales. L'un des pieds repose à plat sur le sol : l'autre, le quittant déjà, le frôle à peine du bout des orteils, tandis que la semelle et le talon s'élèvent presque perpendiculaires. Cette démarche inusitée et d'une grâce si particulière avait, sans doute, attiré l'attention de l'artiste et fascine à présent à des siècles de distance, les regards de notre archéologue. (Gallimard, coll. Idées, p. 130)
L'intérêt du héros de ce récit pour ce bas-relief constitue le fait psychologique fondamental du petit roman (...) Il donne un nom à cette jeune fille surprise dans sa marche : Gradiva, féminisation de Gradivus, surnom du dieu Mars, c'est-à-dire celle qui s'avance..."
La nuit suivante, il rêve qu'il voyage dans le temps et rencontre la jeune fille marchant à travers Pompéi tandis que le Vésuve est en éruption en 79 apr. J.-C.. Profondément perturbé par ce rêve, il décide de se rendre à Pompéi, où il fera une rencontre inattendue.
Freud montre que la nouvelle est le compte-rendu d'un délire, mais aussi celui d'une véritable cure psychanalytique, bien que l'auteur n'ait jamais vraiment appartenu au mouvement psychanalytique, ni souhaité collaborer avec Freud.
Cette réticence de Jensen rend sa nouvelle d'autant plus mystérieuse qu'on y découvre noir sur blanc de nombreux thèmes psychanalytiques et en particulier le travail linguistique de déplacement du signifié sous le signifiant que Freud met en évidence dans l'Interprétation des rêves (la Traumdeutung) : "Nous avions supposé que l'origine grecque de la fabuleuse Gradiva (celle qui resplendit en marchant) était un vague écho du nom grec de Zoé (Zoé = la Vie en grec est le prénom de la jeune fille), mais nous n'avions pas osé aborder le nom de Gradiva, nous l'avions laissé n'être qu'une libre création de l'imagination de Norbert Hanold. Et voyez, justement ce nom se trouve être un dérivé, la traduction même du nom de famille de l'amie d'enfance soi-disant oubliée, et dont il avait refoulé le vocable (Bertgang).
Bien que le lecteur hésite sans cesse (mais justement pas jusqu'au bout) entre les deux interprétations possibles chères à Todorov (rationnelle et surnaturelle), La nouvelle ne relève pas à proprement parler du fantastique, comme la Spirite de Théophile Gautier. La dimension fantastique est uniquement dans l'esprit du héros et non dans une surnaturalité qui viendrait croiser la réalité. Le roman se rapproche donc, bien qu'il n'y ait ni crime, ni criminel, à moins de considérer que Norbert a tué en lui le souvenir de Zoé Bertgang, de ces énigmes policières dont l'apparence fantastique recouvre une explication rationnelle.
On comprend donc, en lisant cette nouvelle ce qui a passionné Freud : l'idée, en complet décalage avec la psychiatrie de l'époque, que les manifestations psychiques les plus aberrantes, les plus incompréhensibles, les plus manifestement contraires à toute explication rationnelle : les rêves et le délire de Norbert, obéissent à une causalité latente et relèvent d'une "herméneutique".
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